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Dommages subis par la mosquée d'Aubervilliers, une banlieue au nord de Paris, lors d'une perquisition effectuée le 17 novembre 2015 dans le cadre de l’état d'urgence. © 2015 Association des musulmans d'Aubervilliers

« L’état d’urgence, ça ne peut pas être un état permanent », a déclaré ce matin le Premier ministre français Manuel Valls dans une interview à la radio. Mais il a ajouté que le gouvernement allait demander sa prolongation pour deux mois, jusqu’à fin juillet, afin de couvrir l’Euro de football et le Tour de France. Si elle est adoptée par le parlement, cette prolongation serait la troisième depuis la déclaration de l’état d’urgence par le Président Hollande au lendemain des terribles attaques du 13 novembre 2015, qui ont coûté la vie à 130 personnes et en ont blessé des centaines d’autres.

L’état d’urgence octroie au gouvernement des pouvoirs considérables pour effectuer des perquisitions sans autorisation judiciaire et assigner à résidence des personnes considérées par les autorités comme une menace pour l’ordre et la sécurité publics sans qu’elles n’aient été inculpées –encore moins condamnées- d’aucune infraction.

© 2012 Human Rights Watch

En février 2016, Human Rights Watch a documenté des perquisitions et des assignations à résidence abusives et discriminatoires contre des musulmans, menées sous l’état d’urgence. Les personnes interrogées nous ont expliqué comment les agents de police ont fait irruption chez elles au beau milieu de la nuit, dégradé leurs affaires, traumatisé leurs enfants et détruit leur réputation. Nous avons également parlé à des personnes que les assignations à résidence empêchaient de sortir de leur commune et confinaient, jusqu’à onze heures par jour, à leur domicile. Ces assignations les obligeaient aussi à pointer au commissariat jusqu’à trois fois par jour, provoquant des difficultés économiques ainsi que des problèmes de santé.

Presque toutes les 3 397 perquisitions effectuées en vertu de ces pouvoirs ont eu lieu avant le 1er janvier. Alors qu’il cherche à les renouveler une fois encore, le gouvernement devrait expliquer pourquoi il ne peut garantir l’ordre et la sécurité publics en s’appuyant sur le large éventail de lois et de pouvoirs dont il dispose déjà.

La perspective d’un état d’urgence de huit mois, sans engagement quant à une date de fin, soulève la question de s’il ne risquerait pas, de fait, de devenir permanent. Une nouvelle prolongation de ces pouvoirs donnerait également un dangereux exemple à d’autres pays qui pourraient utiliser la France comme exemple pour justifier leurs propres restrictions sans fin aux libertés.

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