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Les rues de Bangui, la capitale de la République centrafricaine, sont de nouveau le théâtre d'horribles effusions de sang, quelques semaines seulement après que les Nations Unies ont assumé le rôle de maintien de la paix qui incombait précédemment à l'Union africaine. Il s'agit du premier véritable test de la capacité de la mission de l'ONU, la MINUSCA, à apporter un certain soulagement à ce pays déchiré par la guerre, après 18 mois de sanglantes violences intercommunautaires qui ont fait des milliers de morts et déplacé près d'un quart de la population, devenu sans logis.

Selon des sources locales, le regain de violence a commencé au début de cette semaine, quand un combattant musulman de la Séléka a quitté un camp militaire où vivent près d'un millier de miliciens de ce groupe rebelle, afin de rendre visite à des membres de sa famille dans la capitale. En chemin, des membres de la milice rivale anti-balaka, dont les combattants nourrissent une haine profonde à l'égard des musulmans, l'ont reconnu et ont pris son taxi en chasse. Le combattant de la Séléka a lancé plusieurs grenades sur ses assaillants, blessant des passants. Quand il a finalement été capturé, il a été lynché et son corps a été mutilé et incinéré sur place.

Mercredi, son cadavre carbonisé a été rendu à sa famille, ce qui a déclenché une nouvelle spirale de violence. Un infortuné chauffeur de taxi a été tiré de force de son véhicule et lynché par une bande de musulmans en colère. La dépouille calcinée du combattant de la Séléka a été apportée à la base de la MINUSCA. La foule en colère a pillé et incendié des échoppes près de la base, sans que les soldats du maintien de la paix n'interviennent. Les propriétaires des  magasins et des maisons affectées ont répliqué à la foule en colère et de nouvelles violences s'en sont suivies.

Lorsque les Casques bleus ont par la suite dispersé ces bandes, la tension était à son comble. Des miliciens anti-balaka étaient arrivés de tous les quartiers de la ville, prenant le contrôle des principaux ronds-points et dressant des barricades, apparemment en préparation d'un assaut contre la dernière enclave musulmane existant encore à Bangui.

Au cours des deux derniers jours, des coups de feu et des explosions ont retenti dans toute la ville, ravivant le mauvais souvenir de la période infernale de décembre 2013 à avril 2014, quand les lyncheurs faisaient la loi dans les rues et des centaines d'habitants ont péri lors de violences intercommunautaires.

Les tentatives des soldats de la paix de reprendre le contrôle des rues se sont toutefois soldées par un lourd tribut : jeudi soir, une patrouille conjointe de Casques bleus pakistanais et bangladais est tombée dans une embuscade tendue à la périphérie de la ville par des hommes armés non identifiés, qui ont tué un officier pakistanais et en ont blessé plusieurs autres – les premières victimes d'une mission de l'ONU qui s'annonce particulièrement difficile.

Ce dernier incident montre combien la situation reste fragile dans la capitale, et combien il est crucial pour les soldats de la paix de l'ONU de répondre rapidement et de manière énergique au moindre signe de violence. En quelques heures, un petit incident peut dégénérer et échapper à tout contrôle, ramenant les milices rivales dans les rues. Et chaque fois, ce sont les civils qui en payent le prix.

Chacun en République centrafricaine doit comprendre que les Casques bleus de l'ONU n'hésiteront pas à agir conformément à leur mandat et aux normes internationales afin de protéger les civils menacés, en recourant à la force s'il le faut. Il est impératif que les soldats de la paix de l'ONU signifient clairement à tous qu'ils ont pour mandat de faire respecter la loi et l'ordre à Bangui, en empêchant les milices brutales de faire régner la terreur dans les rues.

Il est également crucial que toutes les parties au conflit et leurs chefs comprennent qu'ils risquent d’être amenés à rendre compte des crimes commis, et que les dirigeants politiques de tous les camps sachent que l'incitation et le recours à la violence pour atteindre des objectifs politiques feront l'objet de poursuites judiciaires.

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