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Reconnaissance bien méritée pour une juge centrafricaine

Danièle Darlan a été récompensée pour sa lutte en faveur de la démocratie en République centrafricaine

Danièle Darlan, de la République centrafricaine, reçoit le Prix international de la femme de courage (International Women of Courage Award) des mains du secrétaire d'État américain, Antony Blinken, et de la première dame des États-Unis, Jill Biden, lors d'une cérémonie dans la salle Est de la Maison Blanche, à Washington D.C., le 8 mars 2023. © 2023 Manuel Balce Ceneta/AP Photo

Danièle Darlan, ancienne présidente de la Cour constitutionnelle de la République centrafricaine, savait que son poste serait difficile lorsqu’elle a pris ses fonctions en 2017. Le pays, dont une grande partie du territoire était contrôlé par des groupes armés qui ont commis des violations des droits humains en toute impunité, venait d’organiser des élections présidentielles après l’établissement d’une nouvelle constitution.

La semaine dernière, Danièle Darlan a reçu le prix International Woman of Courage (Prix international de la femme de courage) de la part du gouvernement américain, une distinction qui reconnaît ses efforts pour protéger la constitution. Elle a été appelée par son surnom, la "Dame de fer".

En 2020, Mme Darlan a certifié les résultats des élections après un scrutin marqué par une faible participation du fait de l’activité des groupes armés, permettant au président Faustin-Archange Touadéra d’être reconduit dans ses fonctions.

L’an dernier, elle a reçu la visite de diplomates russes qui cherchaient à modifier la constitution du pays pour permettre à Touadéra de rester au pouvoir. Mme Darlan a été cité en ces termes : « Je les ai prévenus que notre instabilité était due au fait que les présidents voulaient rester éternellement au pouvoir ».

En effet, en 2015, les Centrafricains ont organisé un dialogue national lors duquel ils ont dit « non » aux présidents à vie et inscrit la limitation du nombre de mandats dans la constitution de 2016.

En 2022, Mme Darlan a déclaré inconstitutionnels les projets de modification de la constitution. À la suite de cette décision, des groupes, composés en majorité de jeunes hommes, se sont rassemblés devant son bureau pour demander sa destitution. Le mois dernier, nous nous sommes entretenus avec certains d’entre eux, qui ont confirmé avoir été payés par des associations de jeunes en faveur du parti au pouvoir pour prendre part aux manifestations, et ont déclaré qu’ils ne se souciaient pas vraiment de la décision de la Cour.

Voyant en Mme Darlan une menace, le gouvernement a tenté de la démettre illégalement de ses fonctions de présidente de la Cour, en invoquant son âge.

Ironie du sort, le 3 janvier, la Cour constitutionnelle, désormais dirigée par un nouveau président, a déclaré que la décision de mettre à la retraite Mme Darlan de force était inconstitutionnelle. Cependant, la Cour a estimé qu’il n’y avait plus rien à faire car Mme Darlan avait déjà annoncé qu’elle n’avait pas l’intention de revenir y siéger. Ces évènements ont déclenché une crise judiciaire qui continue de remettre en question la légitimité d’une cour de justice qui devrait être considérée comme la gardienne de la constitution du pays.

Le prix décerné à Mme Darlan est amplement mérité. Elle a fait preuve d’un réel courage et continue de le faire. Mais elle reste aussi illégalement démise de ses fonctions et la Cour qu’elle dirigeait autrefois a ouvert la voie à une modification de la constitution.

Le gouvernement actuel tourne le dos à l’engagement pris contre les présidents à vie. La République centrafricaine a besoin de davantage de dames de fer pour s’assurer qu’une véritable chance est donnée à la démocratie.

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