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Tunisie: Les juges révoqués devraient avoir accès à leur dossier

Soixante-quinze magistrats limogés en mai n’ont pas eu droit à une audition équitable

(Tunis) – Le ministère de la Justice tunisien n’a pas répondu aux requêtes formulées pour consulter les dossiers concernant la révocation de 75 juges en mai 2012. Ces magistrats devraient pouvoir être entendus de façon équitable et avoir accès à leurs propres dossiers d’accusation, afin qu’ils puissent connaître le raisonnement suivi pour les limoger et préparer une procédure d’appel adéquate.

Dans une lettre du 20 décembre 2012, Human Rights Watch a réitéré la requête qu’elle avait exprimée le 3 décembre, lorsqu’elle avait rencontré Noureddine Bhiri, ministre de la Justice du gouvernement provisoire, pour évoquer ce problème.Dans sa lettre, Human Rights Watch demandait accès aux dossiers de ces affaires, forte du consentement écrit de dix des juges révoqués. Les magistrats avaient déclaré qu’on les empêchait de consulter leur dossier et que par conséquent, ils ne connaissaient pas les motifs de leur révocation et ne pouvaient pas faire appel efficacement de cette décision. Pourtant, en plus de trois semaines, le ministère de la Justice n’a donné aucune réponse à la lettre.

« Le manque de transparence dans la révocation des juges met à mal une composante essentielle de l’indépendance judiciaire », a déclaré Eric Goldstein, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Les mesures disciplinaires devraient être prises à la fois dans la transparence et avec une possibilité de recours ».

En se basant sur ses entretiens avec ces dix juges révoqués, Human Rights Watch a conclu que la décision prise par l’exécutif de révoquer les 75 magistrats était injuste et arbitraire. Les juges limogés ont décrit à Human Rights Watch des procédés disciplinaires iniques, au sein du ministère de la Justice, qui ignoraient les critères fondamentaux d’équité et de transparence et violaient les normes internationales pensées pour protéger l’indépendance de la justice.

Ce qui apparaissait au départ comme une atteinte du droit des juges à une audition équitable est aggravé par le manque de transparence du ministère et par ses refus de donner accès aux dossiers de ces affaires, qui sont censés contenir des preuves des fautes présumées. En outre, au moins deux des juges ont déclaré qu’en juillet 2012, ils avaient envoyé des courriers au ministère de la Justice pour solliciter le compte-rendu de leur audition par une commission interne composée de cinq inspecteurs du ministère, ainsi que les preuves en possession du ministère. Ils n’ont reçu aucune réponse.

« Même s’il est sensé de scruter le passé de magistrats ayant siégé pendant le régime du président renversé Zine El Abidine Ben Ali, le fait que le ministère de la Justice révoque ces juges arbitrairement et sans fournir de preuves contre eux est un coup porté à l’encontre de l’indépendance de la justice, et non pas en sa faveur », a conclu Goldstein.

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