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Une cour nigérienne pourrait lever l’immunité de l’ex-président après une procédure inéquitable

Mohamed Bazoum a été privé d’accès à ses avocats et à des pièces de l’acte d’accusation le visant

L'ancien président nigérien Mohamed Bazoum à l'Elysée à Paris, le 16 février 2023. © 2023 Michel Euler/AP Photo

Le 14 juin, la plus haute cour du Niger pourrait décider de lever l’immunité de l’ancien président Mohamed Bazoum à l’issue d’une procédure qui n’a pas respecté les normes de procédure régulière. Les autorités nigériennes devraient abandonner ce cas problématique et respecter le droit de Mohamed Bazoum à un procès équitable.

Mohamed Bazoum est détenu arbitrairement au sein du palais présidentiel depuis le mois de juillet dernier, quand des officiers de l’armée nigérienne ont renversé son gouvernement lors d’un coup d’État militaire. En août, les autorités de la junte ont annoncé leur intention de le poursuivre pour « haute trahison » et atteinte à la sécurité nationale, mais ne l’ont toujours pas présenté devant un juge. En avril, ces mêmes autorités ont engagé à son encontre une procédure judiciaire visant à lever son immunité présidentielle, afin de pouvoir le poursuivre pour des crimes présumés commis après son élection à la présidence en 2021.

À la suite du coup d’État, la junte a créé une Cour d’État pour remplacer la Cour de cassation et le Conseil d’État, en faisant la plus haute cour du Niger. La procédure devant la Cour d’État a toutefois été entachée de graves irrégularités, notamment plusieurs violations des droits de Mohamed Bazoum à présenter des preuves pour étayer sa défense, à communiquer avec ses avocats et à être entendu par un tribunal indépendant. En portant l’affaire devant la plus haute cour du pays, la junte a également privé l’ex-président de son droit de faire appel de la décision.

Les défenseurs nigériens des droits humains ont critiqué la procédure de la cour. Un avocat a demandé : « Comment une cour dont le président est nommé directement par le chef de l’État peut-elle être un organe impartial et indépendant ? ».

Les avocats de Mohamed Bazoum ont déclaré à Human Rights Watch qu’ils n’avaient pas pu communiquer avec lui depuis octobre dernier, et que leur accès aux pièces du dossier avait été limité. « Les autorités ont modifié l’article 141 du statut de la cour [concernant l’accès aux informations du dossier], alors que l’affaire était déjà pendante devant la cour, nous empêchant de consulter des documents clés du dossier », a déclaré Moussa Coulibaly, l’un des avocats de Bazoum. « On ne change pas les règles en cours de match. »

En septembre, Mohamed Bazoum a déposé une requête auprès de la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), invoquant des violations des droits humains à son encontre et à l’encontre de sa famille lors de sa détention. En décembre, la cour de la CEDEAO a statué qu’il était détenu arbitrairement, et a ordonné sa libération.

Les Principes de l’Union africaine sur le droit à un procès équitable prévoient que les éléments essentiels d’un procès équitable dans toutes les procédures judiciaires comprennent l’accès à un avocat, la possibilité de préparer son dossier de manière adéquate et le droit de faire appel auprès d’une instance judiciaire de plus haut niveau.

Les autorités nigériennes devraient abandonner les poursuites en cours et, si des chefs d’accusation avérés sont retenus contre Mohamed Bazoum, porter l’affaire devant une cour pénale régulière, tout en veillant au respect de l’ensemble de ses droits à un procès équitable. 

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