Une foule violente a agressé sexuellement, roué de coups, menacé et humilié une personne intersexe âgée de 27 ans, le 15 novembre, à Yaoundé, la capitale du Cameroun. Les agresseurs ont filmé l’attaque, qui a duré plusieurs heures, dans deux vidéos effrayantes qui ont circulé sur les réseaux sociaux.
Selon les rapports médicaux délivrés par un centre de soins de Yaoundé, la victime, Sara (un pseudonyme), souffrait de multiples hématomes sur tout le corps. Son médecin a déclaré qu’elle nécessiterait un suivi pendant 15 à 18 jours en raison de la gravité de ses blessures.
La police a arrêté un homme en lien avec cette attaque, avant de le relâcher 48 heures plus tard. Le 16 novembre, l’association CAMFAIDS, une organisation de défense des droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes, a déposé plainte auprès de la police au nom de Sara pour coups et blessures, et traitements inhumains et dégradants. CAMFAIDS prête assistance à Sara, notamment sur les plans médical et psychologique.
Deux membres de CAMFAIDS ont déclaré que Sara était choquée et gravement traumatisée et qu’elle avait tenté de se suicider le 19 novembre. « Nous l’avons trouvée inconsciente dans la salle de bain à côté d’une bouteille d’eau de Javel. Nous avons appelé le médecin. Elle a été placée sous observation », a indiqué un militant de CAMFAIDS.
En août, Human Rights Watch a documenté une autre attaque brutale commise par une foule contre deux femmes transgenres, Shakiro et Patricia, à Douala, la capitale économique du Cameroun. Cette attaque a été perpétrée quelques semaines seulement après qu’un tribunal a ordonné la remise en liberté de ces femmes de prison en l’attente de leur appel d’une peine de cinq ans pour des accusations arbitraires d’« homosexualité ».
L’année 2021 a été marquée par une hausse du nombre d’actions policières contre les personnes LGBTI au Cameroun. Entre février et avril, les forces de sécurité ont arrêté au moins 27 personnes, dont un enfant, pour comportement homosexuel consensuel présumé ou variance de genre, en passant à tabac et en soumettant certaines personnes à des examens anaux forcés alors qu’elles se trouvaient en détention. Ces examens sont reconnus comme une forme de mauvais traitements ou de torture.
Les autorités n’ont pas encore fait de déclaration publique au sujet de l’attaque subie par Sara. Leur silence sur cet incident très médiatisé de violence insensée contre une personne LGBTI risque d’adresser un message selon lequel de tels abus peuvent être tolérés et met en évidence l’échec du gouvernement à protéger les membres de cette communauté au Cameroun. La police devrait donner suite d’urgence à la plainte de CAMFAIDS, ouvrir une enquête sur l’attaque contre Sara et traduire les responsables en justice. Elle devrait également assurer la sécurité des activistes LGBTI qui effectuent un travail crucial dans un climat d’intimidation et de violences.
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