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Procès de Kasapa en RD Congo : l’occasion manquée

Justice partielle pour les survivantes de viols ; impunité pour les fonctionnaires de l’État

Cette semaine, le Tribunal de grande instance de Lubumbashi, dans le sud-est de la République démocratique du Congo, a jugé 10 prisonniers coupables de viol, d'incendie criminel et de tentative d'évasion lors des émeutes de septembre 2020 à la prison centrale de Kasapa. Tous les prévenus, dont la plupart purgeaient déjà de longues peines, ont été condamnés à 15 ans d'emprisonnement supplémentaires, et à payer chacun 5 000 dollars US de dommages et intérêts aux 20 survivantes ayant participé au procès.

Des survivantes des viols généralisés commis en septembre 2020 à la prison centrale de Kasapa, à Lubumbashi en République démocratique du Congo, voilées pour protéger leur identité du public, assistent au procès tenu dans cette prison le 11 novembre 2021. © 2021 Privé

Seize mois après les trois jours de déferlement de violence et de viols généralisés à la prison de Kasapa, le procès a laissé un sentiment de déception et de travail inachevé à certaines survivantes. « C'est une façon de nous abandonner, car ces détenus sont déjà condamnés et vivent misérablement en prison », a déclaré une survivante à Human Rights Watch. « L'État doit faire face à sa responsabilité. »

Sur les 56 femmes détenues dans la prison au moment du soulèvement, 37 femmes et une adolescente avaient témoigné avoir été violées. Mais en ne tenant pour responsables que 10 prisonniers et aucun fonctionnaire de l’État, les autorités judiciaires n’ont que partiellement rendu justice pour ces atrocités.

Lorsque Human Rights Watch a enquêté sur l’émeute dans la prison l’an dernier, nous avions constaté qu'un groupe de détenus, qui avaient maîtrisé leur gardien et mis le feu à plusieurs bâtiments, s’était rapidement emparé de la prison. Le personnel, les gardiens et les forces de sécurité ont fui, fermant les portes de la prison derrière eux. Les détenues se sont retrouvées sans protection dans la cour de la prison, en extérieur, pendant les trois jours de chaos. La majorité des femmes, peut-être même toutes, ont été violées.

Un mois avant le soulèvement, et de nouveau quelques heures avant son déclenchement, les responsables de la prison avaient averti les autorités civiles et militaires provinciales de l'insécurité croissante dans la prison émanant notamment d’un certain nombre de « détenus très dangereux ». Ces mises en garde ont été ignorés à plusieurs reprises. Pourtant, l'incapacité de l'État à protéger et à assurer la sécurité de toutes les femmes détenues a été complètement ignorée par l'instruction.

Les autorités n'ont pas non plus fourni aux victimes des soins médicaux et un soutien psychosocial adéquats et en temps opportun après un viol. Certaines sont tombées enceintes, très probablement à la suite des viols, tandis qu'un certain nombre ont contracté de graves infections.

Les traumatismes physique et psychologique avec lesquels les survivantes doivent vivre désormais n’ont pas non plus été pris en compte.

Le procès de Kasapa a été une occasion manquée d'enquêter de manière significative sur ce qui s'est passé et de demander des comptes à tous les responsables, qu'il s'agisse des auteurs des viols ou de responsables de l'État. Les survivantes méritent une meilleure justice et de meilleurs soins.

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