(Kinshasa) — Les décisions du gouvernement de la République démocratique du Congo concernant sa prochaine élection présidentielle seront cruciales pour l’avenir du pays, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.
Le rapport résume les recherches de Human Rights Watch de ces deux dernières années, aux cours desquelles le gouvernement a mené une répression à l’encontre d’activistes ainsi que de dirigeants et membres de partis d’opposition qui se sont opposés à la prolongation de la présidence de Joseph Kabila au-delà de la limite constitutionnelle de deux mandats, qui prend fin le 19 décembre 2016. Il inclut aussi des recommandations pour dissuader d’autres violations des droits humains et empêcher une crise plus large dans les semaines et les mois à venir.
Un “dialogue national” dirigé par le gouvernement est censé présenter son accord final dans les prochains jours. La plupart des principaux partis d’opposition n’ont pas participé à ce processus, le considérant comme un stratagème pour retarder les élections et permettre au Président Kabila de se maintenir au pouvoir. Des activistes et des groupes d’opposition ont appelé à des manifestations à l’échelle du pays commençant le 19 septembre, trois mois avant la fin du mandat de Kabila et au moment où, selon les exigences de la constitution, la commission électorale doit annoncer les élections présidentielles.
La répression gouvernementale a connu une forte hausse dans les jours menant aux manifestations projetées. Dans la capitale, Kinshasa, au moins une dizaine de jeunes activistes pro-démocratie ont été arrêtés après une réunion tenue le 15 septembre sur la non-violence, la paix, et le respect de la constitution. Ils sont détenus par l’agence nationale de renseignements, sans inculpation et sans accès à leurs familles ou à des avocats.
Le 16 septembre, des policiers dans la ville de Lubumbashi, au sud-est du pays, ont tiré du gaz lacrymogène et plus tard à balles réelles pour disperser des membres de partis d’opposition qui se réunissaient pour préparer les manifestations du 19 septembre. Certains participants de la réunion ont répondu en lançant des pierres, en brûlant des pneus, en bloquant des rues, et en pillant plusieurs commerces et bureaux. Des dizaines de personnes ont été arrêtées tôt le lendemain matin.
Le 17 septembre, des policiers et des agents des services de renseignements ont arrêté un activiste des droits de l'homme, Patrick Pindu, à son domicile à Kinshasa, peu de temps après avoir participé à une réunion de la société civile sur les élections. Il a été libéré le lendemain sans inculpation, sous condition qu’il se présente à l’agence de renseignements tous les 15 jours.
Pour contribuer à prévenir la violence, les représentants du gouvernement et les membres des forces de sécurité devraient respecter les droits des personnes aux libertés d’expression et de réunion, et autoriser le déroulement de manifestations pacifiques et de meetings politiques.
« Les décisions que le Président Kabila et son gouvernement vont prendre dans les prochaines semaines peuvent faire toute la différence pour l’avenir de la RD Congo », a déclaré Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Il s’agit d’une opportunité cruciale pour le pays pour consolider la démocratie, l’État de droit, et les droits humains, pour son propre future et celui de la région entière. »
La République démocratique du Congo se trouve à un moment crucial : dans les prochains mois, le Président Joseph Kabila pourrait accepter de quitter ses fonctions au terme de son deuxième mandat, le 19 décembre 2016, et permettre l’organisation d’élections présidentielles crédibles. Ceci pourrait mettre ce grand pays d’Afrique centrale sur la voie d’un renforcement de la gouvernance démocratique, de l’État de droit, et du respect des droits de l’homme, et marquer ainsi un précédent important pour la RD Congo et toute la région. Cependant, si le Président Kabila cherchait à se maintenir au pouvoir passant outre les limites claires de la constitution, le pays s’exposerait au risque de violences, d’instabilité, et de répression à une large échelle.
Trois mois avant l’échéance du 19 décembre, les autorités ont délibérément retardé les projets d’organisation d’élections, et Kabila a refusé à maintes reprises de déclarer s’il avait l’intention de se retirer ; ceux qui lui sont loyaux ont systématiquement cherché à faire taire, réprimer, et intimider la coalition grandissante de voix demandant des élections crédibles dans un délai court, et une passation pacifique du pouvoir.
La répression
Depuis janvier 2015, des fonctionnaires et des membres des forces de sécurité ont arbitrairement arrêté un grand nombre d’activistes et de leaders d’opposition, dont certains ont été détenus au secret pendant des semaines ou des mois alors que d’autres ont été jugés sur la base d’accusations fabriquées de toutes pièces. De jeunes activistes pro-démocratie pacifiques ont été accusés de fomenter des actes terroristes et injustement emprisonnés pendant près d’un an et demi, suscitant une large indignation publique et entrainant un rapport parlementaire congolais qui n’a trouvé aucune preuve de leurs supposés méfaits.
À travers tout le pays, des représentants du gouvernement et des membres des forces de sécurité ont à maintes reprises interdit des manifestations de l’opposition, empêché des dirigeants de l’opposition de se déplacer librement, et tiré du gaz lacrymogène et à balles réelles sur des manifestants pacifiques. La répression la plus meurtrière s’est produite pendant des manifestations à l’échelle du pays en janvier 2015 contre des propositions de modification de la loi électorale qui nécessiteraient la conduite d’un recensement national avant les élections, retardant potentiellement les élections de plusieurs années. Des policiers et des membres de la Garde républicaine en charge de la sécurité du président ont tué au moins 38 personnes à Kinshasa et cinq personnes dans la ville de Goma, dans l’est du pays. Au moins cinq autres personnes ont été victimes de disparitions forcées à Kinshasa, et des dizaines de personnes en plus ont été blessées, dont trois personnes touchées par balle et blessées lorsque des gardes républicains ont tiré à l’hôpital général de Kinshasa.
Lors d’une manifestation en septembre 2015 à Kinshasa, de hauts responsables des forces de sécurité et du parti au pouvoir ont recruté des voyous en vue d’attaquer des manifestants pacifiques. Armés de gourdins et de bâtons en bois, les assaillants ont frappé les manifestants, répandant la peur et le chaos dans la foule de plusieurs milliers de personnes. Plusieurs recrues ont indiqué à Human Rights Watch qu’elles avaient été convoquées la veille à une réunion avec des officiels dans un camp militaire de Kinshasa, été payées chacune environ 65 dollars US, et qu’elles avaient reçu des instructions sur la façon de mener l’attaque.
Le 26 mai 2016, les forces de sécurité ont tiré du gaz lacrymogène et à balles réelles alors qu’elles cherchaient à empêcher la poursuite de manifestations à Goma, tuant au moins une personne et en blessant au moins 11 autres, dont quatre enfants. Des leaders de l’opposition avaient appelé à des manifestations à l’échelle du pays pour protester contre la décision controversée de la Cour Constitutionnelle le 11 mai, selon laquelle le président pourrait rester en fonctions « jusqu’à l’installation du nouveau président élu ».
Pendant certaines de ces manifestations au cours des deux dernières années, des manifestants ont répondu à la répression en lançant des pierres contre les forces de sécurité, blessant un certain nombre de policiers.
En mars 2015, des membres des forces de sécurité ont enterré plus de 400 corps dans une fosse commune en périphérie de Kinshasa. Certains des corps seraient ceux de personnes tuées par des membres des forces de sécurité au cours de manifestations politiques, et dont les familles n’ont jamais pu organiser les funérailles.
Le gouvernement a fermé des médias proches de l’opposition, dont au moins sept restent bloqués. Le signal de Radio France Internationale (RFI), la principale source d’informations internationales en RD Congo, a été coupé à maintes reprises pendant des moments politiques sensibles, et l’accès à internet, les réseaux sociaux, et les communications par messages texte ont été bloqués pendant et après les manifestations à travers le pays en janvier 2015. En août 2016, le gouvernement congolais a empêché une chercheuse principale de Human Rights Watch qui avait été basée dans le pays depuis plus de 8 ans et demi, de poursuivre son travail en RD Congo.
Le 4 mai 2016, le ministre congolais de la Justice a ouvert ce qui semble avoir été une enquête motivée par des raisons politiques, à l’encontre de l’un des chefs de file de l’opposition du pays, Moïse Katumbi, pour recrutement supposé de mercenaires. Après que des policiers aient tiré du gaz lacrymogène et lancé des pierres contre des manifestants qui s’étaient rassemblés pour soutenir Katumbi lorsque ce dernier avait été convoqué pour un interrogatoire dans le bureau du procureur dans la ville de Lubumbashi, au sud-est du pays, Katumbi a été autorisé à quitter le pays pour des raisons de santé. Ensuite, alors qu’il était toujours à l’étranger, Katumbi a été déclaré coupable par un tribunal local de Lubumbashi pour faux et usage de faux dans une affaire de spoliation immobilière, et condamné à trois ans d’emprisonnement et une amende d’un million de dollars US. L’une des juges a décrit dans une lettre publique et dans un entretien à Human Rights Watch comment elle avait été menacée par le directeur de l’Agence nationale de renseignements (ANR), Kalev Mutond, et forcée à prononcer la condamnation – un exemple flagrant de l’ingérence du service de renseignements dans le secteur de la justice.
Dans ce que le ministre de la Justice a présenté comme un effort en vue de décrisper les tensions politiques, neuf défenseurs des droits humains et jeunes activistes pro-démocratie ont été libérés de prison entre le 27 août et le 5 septembre. Ils avaient été arrêtés au cours des 18 derniers mois après avoir demandé le respect de la constitution ou participé à des manifestations pacifiques ou à d’autres activités. Un grand nombre d’entre eux ont été détenus pendant des semaines ou des mois par l’ANR sans chef d’accusation et sans accès à des avocats ou à leurs familles, avant d’être finalement transférés vers la prison centrale de Kinshasa et jugés sur la base d’accusations fabriquées de toutes pièces.
Leur libération a mis fin à leur détention injustifiée, mais n’a en elle-même pas signifié un changement de politique gouvernementale. La répression ne s’est pas arrêtée, et il faut que beaucoup plus soit fait : les accusations contre la plupart des activistes libérés n’ont pas été retirées ; beaucoup d’autres prisonniers politiques demeurent en détention, y compris au moins une dizaine de jeunes activistes pro-démocratie qui ont été arrêtés à Kinshasa le 15 et le 16 septembre ; des manifestations et des meetings politiques à Lubumbashi et à Kinshasa le 29 août ainsi que le 1er et le 16 septembre sont devenues violentes lorsque la police a tiré du gaz lacrymogène sur les manifestants et arrêté des dizaines de protestataires ; et les officiels qui ont mené la répression brutale n’ont pas été tenus de rendre des comptes et restent à des postes de commandement.
Manifestations à venir
Un nombre croissant de Congolais semblent s’opposer à une prolongation du mandat de Kabila au-delà du 19 décembre, alors que la jeunesse sans emploi et marginalisée de Kinshasa et d’autres villes pourrait de plus en plus laisser éclater sa grogne dans les mois à venir si la crise économique qui frappe le pays s’aggrave. Des dirigeants de l’opposition, des mouvements de jeunes pro-démocratie, et d’autres ont appelé à des manifestations nationales à compter du 19 septembre – trois mois avant la fin du mandat de Kabila et au moment où, selon la constitution, la commission électorale doit annoncer les élections présidentielles.
Pendant ce temps, la situation sécuritaire dans l’est de la RD Congo, où des dizaines de groupes armés sont toujours actifs, reste profondément volatile. Dans la région de Beni, des forces armées ont tué plus de 600 civils dans une série de massacres depuis octobre 2014. On craint que de nombreux groupes armés dans l’est de la RD Congo et les ligues des jeunes dans les grandes villes puissent être manipulés à des fins politiques dans les mois à venir.
Comment la situation évoluera si Kabila décide de ne pas se retirer n’est pas clair. Toutefois, le risque d’une augmentation des violences, de l'instabilité, de la répression brutale, et d’un rétrécissement encore plus marqué de l'espace politique au cours des semaines et des mois à venir est très réel. Alors que la fenêtre d’opportunités se ferme, nous croyons qu'il est encore temps d’influencer le cours des événements et de contribuer à minimiser d’autres violations des droits humains.
La voie pour aller de l’avant
Le président Kabila lui-même n’a donné aucune indication qu’il se retirera, et certains membres de sa coalition au pouvoir se sont publiquement déclarés en faveur de la tenue d’un référendum pour amender la constitution.
La plupart des experts électoraux s’accordent à dire qu’il serait désormais presqu’impossible de mettre à jour les fichiers électoraux (pour y inclure les jeunes Congolais qui ont atteint l’âge de voter depuis les dernières élections de 2011) et d’organiser des élections présidentielles avant l’échéance du 19 décembre. De nombreux dirigeants de l’opposition et responsables de la société civile ont fait la demande d’avoir un leader de transition, qui ne pourrait pas être un candidat aux présidentielles, pour diriger le pays pour une courte période, le temps que les élections soient organisées, après que Kabila se serait retiré le 19 décembre, pour aider à empêcher davantage de délais indéfinis dans l’organisation des élections et une prolongation de la présidence de Kabila.
Un « dialogue national » convoqué par le Président Kabila officiellement pour discuter de la voie à suivre a commencé le 1er septembre, et l’accord final est censé être annoncé dans les jours à venir. Toutefois, la quasi-totalité des principaux partis politiques d’opposition n’y ont pas participé, craignant que le dialogue ne soit qu’un stratagème pour maintenir Kabila au pouvoir en faisant traîner le processus.
Au cours des deux dernières années, de hauts responsables des États-Unis, de l’Union européenne et des Nations Unies ont appelé à maintes reprises à l’organisation d’élections présidentielles tenues dans les délais requis et crédibles en RD Congo. Ils ont insisté sur l’importance du départ de Kabila et d’une transition du pouvoir pacifique dans les intérêts de la promotion de la démocratie, des droits humains et de la stabilité en RD Congo et dans toute la région, marquée par l’instabilité.
La Résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies, adoptée le 30 mars 2016 pour renouveler le mandat de la mission de maintien de la paix en RD Congo (MONUSCO), appelle le gouvernement congolais et ses partenaires nationaux à « veiller à la transparence et à la crédibilité du processus électoral... et notamment de faire une priorité des conditions nécessaires à la tenue des élections présidentielle et législatives de novembre 2016, conformément à la Constitution ».
À l’approche de la fin du mandat de Kabila, il est plus important que jamais pour les partenaires internationaux de la RD Congo de rester fermes sur ces principes clés. Les États-Unis et les membres du « groupe de soutien » au facilitateur de l’Union africaine pour le dialogue – y compris l’Union européenne et les Nations Unies – devraient immédiatement retenir tout soutien ou appui en faveur de tout dialogue qui n’inclut pas l’ensemble des partis politiques majeurs de la RD Congo, de tout dénouement qui ne respecte pas la Résolution 2277 du Conseil de sécurité et la constitution congolaise, ou en faveur de tout dénouement qui ne reçoit pas une large acceptation du public congolais.
Les citoyens congolais ont le droit en vertu du droit international relatif aux droits humains et des propres lois de la RD Congo de manifester pacifiquement et de faire entendre leurs voix. Avec plusieurs manifestations prévues dans les jours et semaines à venir, les membres du gouvernement congolais devraient prendre des mesures urgentes pour s’assurer que ce droit est respecté et que ceux responsables pour la répression passée soient tenus de rendre des comptes. Les partenaires internationaux de la RD Congo et la MONUSCO ont également un rôle crucial à jouer pour contribuer à la protection des manifestants pacifiques et pour montrer que les actes de répression ne sont pas sans conséquence.
L’Union européenne et ses États membres ainsi que les États-Unis et les Nations Unies devraient mettre en place des sanctions ciblées, y compris des interdictions de voyage et des gels des avoirs, à l’encontre des principaux responsables de la répression violente et des violations graves des droits humains perpétrés contre les voix dissidentes au cours des deux dernières années. Les hauts officiels congolais ont pris note lorsque les États-Unis ont annoncé leurs premières sanctions ciblées contre le commissaire de police de Kinshasa, le Général Célestin Kanyama, le 23 juin. Pour que les sanctions aient le plus grand impact, les États-Unis devraient élargir leur liste, et l’Union européenne et les Nations Unies devraient mettre en œuvre leurs propres sanctions. Une attention particulière devrait être portée sur le directeur des services de renseignements, Kalev Mutond, qui semble avoir été derrière une grande partie de la répression politique documentée Human Rights Watch, ainsi que sur d’autres hauts représentants et responsables des forces de sécurité qui ont ordonné, commandé, soutenu, ou exécuté des actes de répression et d’autres violations graves des droits humains.
La Procureure de la Cour pénale internationale devrait surveiller la situation en RD Congo, se rendre dans le pays, et faire une déclaration rappelant aux autorités congolaises que la cour a compétence sur la RD Congo et surveille étroitement l’évolution de la situation.
La crise qui perdure au Burundi, petit pays voisin à l’est de la RD Congo, devrait servir de mise en garde à ceux qui souhaitent un futur paisible, stable et démocratique pour la RD Congo. Nombreux sont ceux qui soutiendraient que les mesures internationales fortes sont arrivées trop tard – après que le Président Pierre Nkurunziza ait déjà défié les accords d’Arusha en se présentant pour un troisième mandat – et n’ont donc eu que peu d’impact. Cette crise a coûté la vie à plusieurs centaines de personnes depuis avril 2015, et environ 290 000 Burundais auraient cherché refuge dans les pays voisins. En dépit de certains efforts pour faire des progrès avec un dialogue politique, et pour déployer des forces de police des Nations Unies, le Burundi reste profondément instable et empêtré dans un marasme politique alors que de nombreux Burundais vivent dans la peur, dans un contexte des meurtres, d’enlèvements, et de torture.
Prendre des mesures fortes aujourd’hui pour faire face à la situation en RD Congo pourrait aider à dissuader la perpétration d’autres abus, contrôler les forces de sécurité lors des manifestations à venir, et mettre davantage de pression sur le Président Kabila pour respecter la constitution et accepter de se retirer à la fin de son mandat, et empêcher une crise plus large.
Recommandations
Aux représentants du gouvernement et forces de sécurité congolais :
- Permettre à tous les congolais, notamment aux organisations de la société civile et aux partis d’opposition, d’organiser des manifestations pacifiques et d’autres activités politiques sans perturbation ;
- Libérer tous les prisonniers politiques et mettre fin aux poursuites engagées pour des motifs politiques à l’encontre de personnes qui exercent leurs droits fondamentaux de liberté d’expression, d’association et de rassemblement pacifique ;
- Enquêter et poursuivre comme il convient ceux responsables de graves violations des droits humains, quels que soient leur position ou leur rang ;
- Ouvrir tous les médias qui ont été fermés de manière arbitraire, et garantir que l’accès à l’information, dont celle provenant des médias indépendants internationaux, des plateformes de réseaux sociaux, et des communications par messages texte, n’est pas bloqué ;
- Permettre aux défenseurs des droits humains congolais et internationaux de travailler en RD Congo sans entraves.
Aux dirigeants des partis politiques congolais :
- Ne pas inciter à la violence ou à la haine ; condamner l’usage de la violence par des membres de partis politiques et prendre les mesures appropriées pour y mettre fin.
À la mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) :
- Déployer des casques bleus dans les zones proches des manifestations politiques pour aider à prévenir toute violence potentielle dans le cadre du mandat de la mission de protéger les « civils se trouvant sous la menace de violences physiques … dans le cadre des élections » ;
- Assurer un déploiement rapide de casques bleus dans les zones où la violence politique pourrait éclater ;
- Mettre en place des plans détaillés pour protéger les activistes, les défenseurs des droits humains, les journalistes, et les politiciens en danger ;
- Continuer à diffuser de puissants messages publics et privés dénonçant la répression politique et d’autres graves violations des droits humains ; exhorter le gouvernement à libérer immédiatement tous les prisonniers politiques, mettre fin aux poursuites engagées pour des motifs politiques, ouvrir les médias fermés de manière arbitraire, garantir le respect du droit de rassemblement pacifique, permettre aux défenseurs des droits humains congolais et internationaux de travailler sans entraves, et garantir que ceux responsables de graves violations des droits humains sont tenus de rendre des comptes comme il convient.
Aux bailleurs de fonds internationaux de la RD Congo, notamment l’Union européenne et ses États-membres, les États-Unis et les Nations Unies :
- Dénoncer publiquement la répression politique continue et les graves violations des droits humains commises à l’encontre de ceux qui se sont exprimés contre la tentative d’extension de la présidence du président Kabila au-delà de la limite de deux mandats inscrite dans la constitution ou s’y sont opposés ;
- Exhorter le gouvernement à libérer immédiatement tous les prisonniers politiques, mettre fin aux poursuites engagées pour des motifs politiques, ouvrir les médias fermés de manière arbitraire, garantir le respect du droit de rassemblement pacifique, permettre aux défenseurs des droits humains Congolais et internationaux de travailler sans entraves et garantir que ceux responsables de graves violations des droits humains sont tenus de rendre des comptes comme il convient ;
- Mettre en œuvre des sanctions ciblées, dont des interdictions de voyage et des gels d’avoirs, contre les principaux responsables de la violente répression et des graves violations des droits humains commises en RD Congo depuis 2015 à l’encontre des voix dissidentes. Il faudrait accorder une attention particulière aux hauts fonctionnaires du gouvernement, des services de renseignement, et des forces de sécurité impliqués dans de graves violations des droits humains ;
- Retirer immédiatement l’appui ou l’approbation de tout dialogue qui n’inclurait pas tous les principaux partis politiques en RD Congo, serait incompatible avec la résolution 2277 du Conseil de sécurité des Nations Unies et avec la constitution congolaise, et à tout résultat qui ne serait pas largement accepté par le public congolais ;
- Soulever des inquiétudes concernant les violations des droits humains commises par l’Agence nationale de renseignements (ANR), notamment la détention arbitraire prolongée d’activistes et d’opposants politiques ; demander que les observateurs des droits humains, y compris les membres du Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH), aient un accès sans entraves à tous les centres de détention de l’agence de renseignements ;
- Soulever des inquiétudes concernant le détournement du système de justice à des motifs politiques, et suspendre l’aide au secteur de la justice congolaise jusqu’à constatation d’une amélioration concrète de l’indépendance du pouvoir judiciaire ;
- Utiliser vos positions d’actionnaires de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international, et de la Banque africaine de développement pour inciter les institutions à n’apporter d’appui direct au budget de la RD Congo que si le gouvernement se conforme aux exigences constitutionnelles de limite de mandat et organise des élections présidentielles dans un délai court ;
- Suspendre l’appui aux forces de sécurité impliquées dans des violations des droits humains dans le contexte de manifestations ou de campagnes politiques, ou du processus électoral ;
- Communiquer clairement au gouvernement congolais que le non-respect de la Constitution congolaise sur les mandats présidentiels, les élections, et la passation des pouvoirs dans les délais requis, aura de graves conséquences pour les relations bilatérales et multilatérales ;
- Collaborer avec d’autres partenaires internationaux en vue d’élaborer un plan clair et complet d’aide au financement d’élections en RD Congo, et en communiquer largement l’existence, une fois qu’existeront un calendrier crédible et la volonté politique manifeste de procéder à des élections, de manière à ce que l’absence de ressources ne constitue pas un obstacle aux élections prévues par la constitution.
À l’Union africaine, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), et la Chine et autres états exerçant une influence :
- Encourager le Président Kabila à se conformer à la limite de deux mandats prévue par la constitution et permettre des élections nationales crédibles et une passation de pouvoirs pacifique ;
- Favoriser, avec d’autres partenaires internationaux, un dialogue constructif en RD Congo conduisant à un processus électoral crédible et juste dans le respect de la constitution du pays et le droit international relatif aux droits humains.
Au Conseil des droits de l’homme de l’ONU :
- Établir un mécanisme indépendant, par exemple un expert indépendant ou une équipe d’experts indépendants du Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour rassembler les faits et communiquer de manière régulière les violations des droits humains dans le contexte de manifestations ou de campagnes politiques, ou du processus électoral, et disposant de moyens de réaction rapide ;
- Mandater des débats interactifs renforcés sur la RD Congo lors des sessions du Conseil des droits de l’homme en 2017, notamment avec les organismes compétents de l’ONU et les parties prenantes, en vue d’étendre l’examen de la situation des droits humains en RD Congo au-delà des discussions actuelles ;
- Demander des rapports thématiques élaborés par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme, notamment sur la répression politique et la violence dans le contexte de manifestations ou de campagnes politiques, ou du processus électoral, qui seraient axés sur des domaines particulièrement préoccupants ;
- Organiser un débat d’urgence pendant la 33e session du Conseil des droits de l’homme, ou une session spéciale, si la situation se dégrade encore.
À la Procureure de la Cour pénale internationale :
- Suivre la situation en RD Congo, visiter le pays, et publier une déclaration rappelant aux responsables que la Cour a compétence sur la RD Congo et surveille étroitement l’évolution de la situation.