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États-Unis : Supprimer l’exception « coréenne » de l’interdiction des mines terrestres

La mise en œuvre de la Convention internationale a progressé malgré le recours à ces mines par certains pays

(Washington, le 11 décembre, 2015) – L'administration Obama devrait renoncer à l’exception qu’elle fait pour la péninsule coréenne dans le cadre de sa politique interdisant l'utilisation des mines antipersonnel, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch, à l’issue de la réunion annuelle de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel de 1997.

« Il n'y a aucune justification valable à une future utilisation de mines terrestres par les États-Unis dans la péninsule coréenne », a déclaré Steve Goose, directeur de la division Armes à Human Rights Watch, et président de la campagne américaine visant à interdire ces mines. « Les États-Unis devraient bannir l'exception coréenne de leur politique d’interdiction des mines et adhérer enfin au traité international prohibant ces armes aveugles. »

Les mines terrestres antipersonnel ne feront aucune différence dans la défense de la Corée du Sud, a affirmé Human Rights Watch. Une interdiction aidera à protéger les civils de ces armes, qui ont causé tant de souffrances dans la péninsule coréenne et dans le reste du monde.

Un démineur de Handicap International, avec son chien dont le flair  permet de mieux détecter les mines terrestres enfouies dans le sol, photographié en juin 2014 dans la province de Manicia, au Mozambique. © Eva Maria Fischer/Handicap International, June 2014

Les États-Unis, la Corée du Nord et la Corée du Sud ne figurent pas parmi les 162 États parties à la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel de 1997, également connue sous le nom de Convention d'Ottawa, qui interdit totalement les mines antipersonnel et exige leur destruction et la fourniture d’une assistance aux victimes. L'administration Obama a, en 2014, annoncé d’importantes mesures pour aligner la politique américaine sur cette Convention, à laquelle les Etats-Unis adhèreront lorsque, affirme-t-elle, le Pentagone aura achevé une étude sur la réponse à apporter à la « situation particulière » de la péninsule coréenne.

Les États-Unis ont cherché à se ménager une exception géographique pour la péninsule coréenne il y a 18 ans, lors des négociations du traité, une position vigoureusement contestée par ses alliés. L'armée américaine veut conserver la possibilité de recourir aux mines antipersonnel dans le cas d'une invasion par la Corée du Nord. Mais de nombreux officiers militaires américains en retraite, y compris ceux qui commandaient les forces en Corée, ont déclaré que l'utilisation de mines antipersonnel n’avait que pas ou peu de valeur sur le plan militaire.

Le 23 septembre 2014, le président Barack Obama a annoncé une interdiction de l'utilisation des mines antipersonnel américaines partout dans le monde à l’exception de la péninsule coréenne. Les États-Unis sont également tenus de détruire leurs mines antipersonnel qui ne sont pas jugées « nécessaires à la défense de la République de Corée » et à « ne pas aider, encourager ou inciter quiconque à l'extérieur de la péninsule coréenne à se livrer à des activités interdites » par la Convention d’Ottawa. Cette décision a suivi une annonce, en date du 27 juin dernier, interdisant la production et l'acquisition de mines antipersonnel par les États-Unis, qui ne remplaceront pas leurs stocks existants, « à mesure qu’ils expireront ».

Les États-Unis étaient l'un des 10 pays observateurs lors de la quatorzième Réunion des États Parties à la Convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel, qui s’est tenue à Genève au Palais des Nations, pendant la semaine du 30 novembre 2015. Plus de 90 États parties ont participé. Au cours de cette réunion :

  • Le Mozambique a annoncé être exempt de mines terrestres après avoir achevé le déminage de toute les zones connues dans le pays ;

  • La Finlande s’est déclarée débarrassée de toutes ses mines antipersonnel après avoir achevé la destruction de son stock de plus d’un million d’unités ;

  • La Pologne s’est engagée à détruire son stock d’un million de mines antipersonnel d’ici mars 2016, et Oman à détruire le sien avant la date-butoir de février 2019 fixée par la Convention d’Ottawa ;

  • Le Sri Lanka a annoncé que, suite à un changement de gouvernement, il y aurait « un changement de paradigme » dans sa politique relative aux mines terrestres et que le pays se prépare maintenant à adhérer à la Convention en 2016 ;

  • •L'Ukraine a nié de manière répétée avoir recouru à des mines antipersonnel dans les provinces orientales de Donetsk et de Lougansk, blâmant les groupes armés soutenus par la Russie dans l’utilisation récente de ce type d’armes ;

  • Les États parties ont donné leur accord pour repousser la date-butoir de destruction des stocks et de déminage pour Chypre, l’Éthiopie, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal.

Le 7 décembre, les États-Unis se sont abstenus lors du vote de la résolution non contraignante de l’Assemblée générale de l'ONU sur la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel, un texte qui a été approuvé par 168 voix pour, aucune contre et 17 abstentions.

Selon l'Observatoire des mines 2015, le rapport mondial de suivi de la Campagne internationale pour l'interdiction des mines antipersonnel :

  • Collectivement, les États parties ont détruit plus de 49 millions de mines antipersonnel, dont plus de 530.000 en 2014. Cependant, la Biélorussie, la Grèce et l'Ukraine sont toujours en violation de la Convention après avoir échoué à achever la destruction de leurs stocks dans les délai prévus de quatre ans.

  • Depuis octobre 2014, les forces gouvernementales du Myanmar, de la Corée du Nord et de la Syrie, tous Etats non-signataires ont utilisé des mines antipersonnel, comme les groupes armés non étatiques d’Afghanistan, de Colombie, d'Irak, de Libye, du Myanmar, du Pakistan, de Syrie, de Tunisie, d'Ukraine et du Yémen, qui privilégient les engins explosifs improvisés activés par la victime elle-même.

  • En 2014, le nombre de victimes de mines, y compris celles faites par des engins explosifs improvisés qui se déclenchent comme des mines antipersonnel et des restes explosifs de guerre, est passé à 3.678, dont une grande majorité de civils, contre 3.308 victimes en 2013. Ce chiffre reste néanmoins inférieur de 40% par celui de 1999, à l’entrée en vigueur de la Convention. Cependant, de nombreuses victimes ne sont pas recensées, ce qui permet de penser que le nombre de tués est probablement beaucoup plus élevé.

  • En 2014, plus de 200 kilomètres carrés de territoires ont été déminés dans le monde entier, se soldant par la destruction de plus de 230.000 mines antipersonnel et de 11.500 mines antivéhicules. Depuis 1999, 29 pays se sont déclarés déminés, tandis que 57 sont toujours affectés par des mines terrestres non désamorcées et des restes explosifs de guerre. Les donateurs et pays touchés ont ainsi financé à hauteur d’environ 610 millions de dollars l'action antimines en 2014, soit une diminution de 30 millions (5%) par rapport à 2013. C’est la deuxième année consécutive que ces contributions diminuent.

Le Chili accueillera et présidera la quinzième Réunion des États parties, qui se tiendra à Santiago au cours de la semaine du 28 novembre 2016. Elle sera précédée de réunions intersessions à Genève les 19 et 20 mai prochains.

Membre fondateur de la Campagne internationale pour interdire les mines (ICBL), Human Rights Watch préside le la section américaine de cette campagne et participe à la politique d’interdiction au sein de l’Observatoire des mines et des armes à sous-munitions. L'ICBL a reçu le Prix Nobel de la paix 1997, conjointement à sa coordinatrice, Jody Williams, pour ses efforts en vue d’une Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel et ses contributions à une nouvelle diplomatie internationale fondée sur des exigences humanitaires.

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