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Domestic Violence-Morocco

« Il m’enfermait à la maison pour que je n’aille pas à la police »

« Fatima » : Témoignage d’une survivante de la violence domestique au Maroc

Les autorités marocaines échouent souvent à empêcher la violence conjugale et familiale, à protéger les victimes, et à punir les agresseurs. Nous, Human Rights Watch, demandons à la Ministre marocaine de la Femme d’adopter des lois fortes à même de protéger efficacement les victimes de violences domestiques. Pour cela, nous avons besoin de votre aide. Mais d’abord, lisez l’histoire de Fatima.

Fatima (pseudonyme), 34 ans, de Fez, s’est mariée à 17 ans et a eu deux enfants avec son mari. Son mari, a-t-elle expliqué, a commencé à être violent après six ans de mariage, l’insultant chaque jour et la battant environ une fois par mois. Il lançait des objets sur elle, dont des livres, un téléphone et un verre. Il crachait dans sa nourriture et une fois, l’a cognée si fort au visage qu’elle en a perdu une dent. Une autre fois, il lui a brûlé le bras avec une brochette rougie au feu, et la jambe avec une cigarette. Il l’a également violée à maintes reprises, a-t-elle dénoncé. « Il m’a forcée à avoir des rapports sexuels avec lui de la façon dont il voulait. Il m’a forcée à avoir des relations anales. »

Fatima a déclaré qu’elle s’était rendue à deux reprises à la police de Fez, la première fois en 2006, après que son mari l’eut brûlée avec une brochette incandescente :

La police l’a appelé et il a dit, « Regardez cette femme, je l’ai sauvée de la prostitution et de la rue. Elle dit que je l’ai brûlée, alors qu’elle s’est brûlée toute seule. » Il [le policier] me regardait et me disait : « Tu devrais avoir honte. ». Ils m’ont demandé s’il y avait des témoins. J’ai répondu : « Non, ça s’est passé à l’intérieur de la maison, seul le petit était là. » Ils m’ont dit : « Si tu as des témoins, on peut t'aider, sinon, on ne peut rien faire. »

Fatima, victime de violence domestique, montre une marque de brûlure sur son bras. Elle a déclaré que son mari l’avait brûlée, en 2006, avec une brochette rougie au feu, mais que la police lui avait répondu : "si tu as des témoins, on peut t’aider ; sinon, on ne peut rien faire”. © Rothna Begum/Human Rights Watch

Un jour de 2007, a déclaré Fatima, son mari a jeté sur elle un verre rempli d’acide (l’ma l’qate3) mais elle est parvenue à se protéger. Plutôt que sa peau, l’acide a seulement aspergé son manteau et le cartable de son fils. « Après cela, a-t-elle confié, il m’a enfermée 15 jours à la maison, pour que je ne puisse pas aller à la police. J’ai continué à vivre avec lui après parce que j’avais peur de lui. »

Fatima a déclaré qu’en 2010, son mari s’était soûlé et avait exigé qu’elle se déshabille devant leur fils de 9 ans. Face à son refus, il avait tenté de la poignarder. Elle s’était enfuie en courant, et son voisin lui avait payé un taxi pour qu’elle se rende à la police.

D’après Fatima, les policiers semblaient craindre une confrontation avec son mari, et pour cette raison, lui avaient conseillé de se réfugier dans sa famille. Elle a déclaré avoir déposé plainte auprès du procureur de Fez, mais être retournée vivre avec son mari une semaine plus tard, cédant aux pressions de son beau-frère. Selon elle, ni la police ni le procureur n’ont donné suite à cette affaire.

Fatima a quitté son mari en juin 2015. Au moment de notre entretien avec elle, elle avait introduit une demande de divorce, et résidait dans un refuge privé. Son fils de 14 ans vivait avec sa famille maternelle, tandis que son jeune fils de 4 ans vivait encore chez son père. Fatima voulait que ses deux enfants soient avec elle.

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Human Rights Watch s’est entretenu avec « Fatima », ainsi qu’avec 19 autres femmes et filles au Maroc en septembre 2015. Sa situation est un exemple des violences domestiques subies par les femmes dans ce pays, et de la faible réactivité du gouvernement face à ce problème.

Human Rights Watch a constaté que souvent, les autorités marocaines échouent à empêcher les violences domestiques, protéger les survivantes, et punir les agresseurs.

Les victimes de violences domestiques comme Fatima méritent beaucoup plus de la part de leur gouvernement. Le Maroc devrait renforcer et adopter des lois en vue d’améliorer la protection pour les victimes de violences domestiques. Human Rights Watch a écrit au gouvernement marocain—et notamment à Bassima Hakkaoui, ministre de la Femme et de la Famille—afin de demander un renforcement du projet de loi sur les violences faites aux femmes, ainsi que des réformes du code pénal et des procédure pénales.

Voici les mesures les plus importantes que nous recommandons :

  • Définition et champ d'application des crimes de violence domestique : Les projets de loi devraient définir clairement la notion de « violence domestique », et pénaliser le viol conjugal. Conformément aux normes de l’ONU, la définition devrait inclure les ex-épouses et les personnes ayant une relation intime non matrimoniale.

  • Mesures préventives : Les projets de loi devraient prévoir des mesures de prévention de la violence domestique—notamment des activités de sensibilisation, des modules dans les programmes d’enseignement, ainsi que des actions de sensibilisation des médias aux violences faites aux femmes.

  • Responsabilités des forces de l’ordre et du parquet : Les projets de loi devraient spécifier les obligations de la police et des procureurs dans les cas de violence domestique. Ces projets de loi devraient exiger que la police et les procureurs se concertent et communiquent directement, au lieu de demander aux plaignantes de transmettre des messages entre ces services.

  • Responsabilités du système judiciaire : Les projets de loi devraient spécifier que le témoignage d’une plaignante pour violences domestiques peut, dans certaines circonstances, être une preuve suffisante pour une inculpation, sans autres témoins.

  • Ordonnances de protection : Les projets de loi devraient prévoir spécifiquement des ordonnances de protection, d’urgence et de longue durée. En application de ces ordonnances, il serait interdit aux agresseurs de s’approcher des victimes de leurs violences, sous peine d’encourir la force de la loi. Le droit marocain actuel ne prévoit pas de telles ordonnances.  

  • Autres services et assistance pour les victimes : Les projets de loi devraient prévoir le soutien et la prestation de services aux victimes de violences domestiques. Parmi ces services : des lieux de refuge, des soins physiques et psychologiques, des conseils juridiques, et des lignes d’appels gratuites. Le gouvernement devrait affecter un fond spécial, ou tout autre type d’assistance financière, aux survivantes de violences domestiques.

Pour plus d’informations, notamment la liste détaillée de nos recommandations au gouvernement marocain, lisez ceci : Maroc : Faible réponse face au problème de la violence domestique

Vous voulez aider Fatima, et toutes les victimes de violences domestiques au Maroc ? Utilisez le hashtag الحقاوي-عطيني-حقي# pour demander à Bassima Hakkaoui, Ministre des Femmes, de renforcer le projet de loi sur les violences faites aux femmes :

Mme Hakkaoui, défendez les femmes du #Maroc par 1 loi forte contre la violence conjugale https://www.hrw.org/fr/news/2016/02/15/maroc-faible-reponse-face-au-probleme-de-la-violence-domestique @MSFFDS الحقاوي_عطيني_حقي#

1. Copiez le paragraphe suivant en utilisant [Control C] ou [Command C]
 Mme Hakkaoui, les Marocaines ont besoin de vous ! Protégez-les contre la violence conjugale et familiale et punissez les agresseurs, en adoptant une loi forte contre la violence domestique au #Maroc https://www.hrw.org/fr/news/2016/02/15/maroc-faible-reponse-face-au-probleme-de-la-violence-domestique 
 2. Collez-le, en utilisant [Control V] ou [Command V], en tant que commentaire sous n’importe quel post de la page Facebook du ministère marocain de la Femme 
 
 

 

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