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Sénégal : Ouverture du procès de l'ex-dictateur du Tchad

Hissène Habré est poursuivi pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et torture

(Dakar, le 17 juillet 2015) – Le procès de l'ancien dictateur du Tchad Hissène Habré est une victoire pour les victimes de son régime, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Le procès débutera le 20 juillet 2015, près de 25 ans après le renversement de Hissène Habré.

« L'ouverture du procès de Hissène Habré, 25 ans après sa fuite du Tchad, est un hommage aux survivants de son régime brutal qui n'ont jamais abandonné la lutte pour la justice », a déclaré Reed Brody, conseiller juridique à Human Rights Watch, qui travaille avec les survivants depuis 1999. « Cette affaire démontre aux despotes, où qu’ils se trouvent, qu’ils ne seront jamais hors de portée de leurs victimes. »

Habré est poursuivi pour crimes contre l'humanité, crimes de guerre et torture. Ce procès sera le premier au monde où les juridictions d’un État vont juger l’ancien dirigeant d’un autre État pour des supposées violations des droits humains. 



Habré sera jugé par les Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises pour crimes contre l’humanité, torture et crimes de guerre. Ces Chambres ont été inaugurées par le Sénégal et l’Union africaine en février 2013 afin de poursuivre « le ou les principaux responsables » des crimes internationaux commis au Tchad entre 1982 et 1990, quand Hissène Habré était au pouvoir. Le président de la Chambre d’Assises, Gberdao Gustave Kam du Burkina Faso, siégera aux cotés de deux juges sénégalais expérimentés.

Le procès devrait durer trois mois, au cours desquels environ 100 témoins et victimes sont attendus à la barre.

Hissène Habré, par la voix de ses avocats, a fait savoir qu'il ne voulait pas assister aux audiences. Cependant, en vertu de la procédure sénégalaise, le Président de la Cour peut l'obliger à comparaître.

« J'attends ce jour depuis ma sortie de prison, il y a près de 25 ans », a déclaré Souleymane Guengueng, qui a failli succomber aux maladies et aux mauvais traitements endurés pendant près de trois ans dans les prisons de Hissène Habré. Il a ensuite fondé l’Association des Victimes des Crimes du Régime de Hissène Habré (AVCRHH). « Je veux pouvoir regarder Hissène Habré dans les yeux et lui demander pourquoi j’ai pourri trois années en prison, pourquoi mes amis ont été torturés et tués ».

Hissène Habré est accusé de milliers d’assassinats politiques et de l’usage systématique de la torture. Après avoir été renversé par l’actuel président Idriss Déby Itno, Habré a fui au Sénégal. Habré fut arrêté une première fois au Sénégal en février 2000, mais le Sénégal refusa alors de le poursuivre, puis de l’extrader en Belgique en 2005. Peu de progrès a été réalisé dans l’affaire jusqu’en 2012 avec la victoire de Macky Sall lors de l’élection présidentielle, et la décision de la Cour internationale de Justice ordonnant au Sénégal de poursuivre ou extrader Habré en justice, ce qui a conduit à la création des Chambres africaines extraordinaires. Les Chambres ont inculpé Habré en juillet 2013 et l’ont placé en détention provisoire. Après une instruction de 19 mois, les juges ont conclu qu’il y avait suffisamment de preuves pour que Habré soit jugé.

« Cette affaire est un tournant dans la lutte pour que les auteurs d’atrocités rendent compte de leurs crimes, en Afrique et dans le monde » a déclaré Reed Brody. « Cela a pris beaucoup d’années et de péripéties, mais au final un groupe de survivants tenaces a montré que même un dictateur peut être traduit en justice. »

Le 25 mars, une cour criminelle au Tchad a condamné 20 agents de sécurité du régime de Hissène Habré pour torture et assassinat.

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Euronews 14.07.15 :

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