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Ursula von der Leyen
Présidente de la Commission européenne

Josep Borrell-Fontelles
Haut représentant pour les affaires étrangères

Commission européenne

Rue de la Loi, 200
1049 Bruxelles

Bruxelles, le 28 octobre 2022

 

RE : Les droits humains dans la stratégie de l’UE pour les Grands Lacs

 

Mme la Présidente Von der Leyen, M. le Haut Représentant Borrell, 

 

Nous vous adressons cette lettre dans le contexte de l’élaboration d’une nouvelle stratégie de l’UE pour les Grands Lacs, afin de vous demander que cette stratégie reflète de manière adéquate et traite en priorité les nombreux et graves défis en matière de droits humains observés tant au niveau national que régional. Sans cela, les dirigeants de cette région recevraient un message erroné, à savoir que l’UE est prête à fermer les yeux sur des violations flagrantes.

Dans tous les pays de la région des Grands Lacs, Human Rights Watch a documenté des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées et des arrestations arbitraires de membres de l’opposition. La société civile et les médias y sont continuellement confrontés à un harcèlement et des pressions qui les empêchent de travailler correctement. Les personnes associées au mouvement des droits humains – comme Tony Germain Nkina au Burundi – font partie de ceux qui, trop nombreux, sont en détention pour des raisons politiques. Au Rwanda, le gouvernement omet systématiquement d’enquêter sur les allégations d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, de décès en détention, de détention arbitraire, et de torture et autres mauvais traitements. Dans l’est de la République démocratique du Congo, la résurgence du M23, soutenu par le Rwanda, a aggravé un peu plus encore une situation déjà catastrophique, et déplacé des milliers de civils supplémentaires dans une région où les groupes armés, et parfois les soldats du gouvernement, ont commis des abus généralisés au cours de l'année écoulée. Des forces militaires étrangères ont également été impliquées dans des abus contre des civils. De plus, l’exploitation et le commerce des ressources naturelles entraînent de graves problèmes en termes de droits humains pour les communautés concernées.

Dans le contexte de sa future stratégie, nous demandons donc à l’UE de :

·       exprimer clairement et publiquement ses préoccupations quant aux violations graves des droits humains et à l’impunité persistante dans la région des Grands Lacs, ainsi que son engagement à soulever la question des droits humains au plus haut niveau politique possible. La stratégie devrait également souligner le fait que l’UE attend des gouvernements de la région des Grands Lacs qu’ils s’engagent à répondre à ses préoccupations et à lutter véritablement contre l’impunité qui prévaut.

·       s’engager à promouvoir de manière concrète et significative les libertés d’association et de réunion pacifique et la liberté d’expression, ainsi qu’à dénoncer le harcèlement, la détention, la torture et les mauvais traitements infligés aux activistes de la société civile, aux journalistes, aux membres de l’opposition et aux autres critiques. La stratégie doit respecter les principes fondamentaux contenus dans ses Lignes directrices sur les défenseurs des droits de l’homme et dans son Plan d’action en faveur des droits de l’homme et de la démocratie.

·       lier les améliorations futures de la coopération bilatérale à des critères clairs en matière de droits humains, notamment le respect de la liberté d’expression, la prévention de la torture et des mauvais traitements, la libération des défenseurs des droits humains et des personnes perçues comme des détracteurs détenus pour des motifs politiques, et le respect de l’obligation de rendre des comptes en cas de violations graves.

·       insister sur une véritable coopération avec les mécanismes régionaux et internationaux des droits humains, y compris avec les rapporteurs spéciaux thématiques et par pays, l’examen périodique universel, les organes des traités et le HCDH, comme le rapporteur spécial sur la situation au Burundi et le Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’homme en RDC (BCNUDH), mettre en œuvre leurs recommandations et promouvoir la ratification et la mise en œuvre des principaux traités relatifs aux droits humains et du Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

·       veiller à ce que les références au commerce régional et aux ressources nationales dans la stratégie reflètent des engagements clairs qui permettent d’éviter les violations des droits humains à l’encontre des communautés concernées.

·       indiquer clairement que l’obligation de rendre des comptes pour les violations graves des droits humains est cruciale pour garantir le respect des droits humains et la stabilité à long terme dans la région des Grands Lacs et s’engager à faire pression aux niveaux national et régional pour que des mesures soient prises afin de lutter contre l’impunité.

Nous vous remercions de l’attention que vous voudrez bien accorder à cet important sujet et nous nous tenons à votre disposition pour vous fournir toute information complémentaire.

Nous vous prions de croire, Madame la Présidente, Monsieur le Haut représentant, en l’assurance de notre haute considération.

 

Mausi Segun                                                                     Bruno Stagno
Directrice exécutive – Division Afrique                      Responsable principal du plaidoyer

Human Rights Watch                                                       Human Rights Watch

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