Une illustration de « Yordani », site d’une forme de torture employée dans les prisons de Nyarugenge et Rubavu au Rwanda, où des détenus étaient forcés de rentrer dans un conteneur rempli d’eau sale, submergés et battus.

« Ils m’ont jeté dans l’eau et battu »

La nécessité de rendre des comptes pour la torture au Rwanda

Une illustration montrant « Yordani », site d’une forme de torture employée dans les prisons de Nyarugenge et Rubavu au Rwanda, où des détenus étaient forcés d'entrer dans un conteneur rempli d’eau sale, submergés et battus. © 2024 John Holmes pour Human Rights Watch


 

Résumé

« Ils m’ont jeté dans l’eau et battu. Quand vous êtes mouillé, vous sentez encore plus fortement la douleur des [coups de] bâtons … Le directeur adjoint avait un bâton et un câble électrique… C’est lui qui m’a frappé », a raconté à Human Rights Watch un ancien détenu de la prison de Rubavu en juillet 2024. Le directeur adjoint de la prison auquel il fait référence a été acquitté des chefs d’inculpation de meurtre, torture et coups et blessures volontaires à l’issue d’un procès historique de fonctionnaires pénitentiaires et de prisonniers qui s’est achevé plus tôt cette même année.

Le Front patriotique rwandais (FPR), au pouvoir depuis le génocide de 1994, a longtemps permis à la torture et aux mauvais traitements d’être infligés aux détenus, qu’ils soient enfermés dans des centres de détention officiels ou non officiels dans le pays. Le 5 avril 2024, la Haute Cour de Rubavu, dans la province de l’Ouest du pays, a reconnu Innocent Kayumba, ancien directeur des prisons de Rubavu et de Nyarugenge, coupable de l’agression et du meurtre d’un détenu à la prison de Rubavu en 2019 et l’a condamné à une peine de 15 ans d’emprisonnement et une amende de 5 millions de francs rwandais (3 675 dollars US). Deux autres agents du Service Correctionnel du Rwanda (RCS) et sept prisonniers, accusés d’avoir agi sur instruction, ont été reconnus coupables d’avoir battu et tué des prisonniers. Trois autres responsables du RCS, dont l’ancien directeur de la prison de Rubavu Ephrem Gahungu et le directeur adjoint Augustin Uwayezu, ont été acquittés. Les recherches de Human Rights Watch indiquent que les atteintes graves aux droits humains, y compris la torture, sont monnaie courante dans de nombreux centres de détention du Rwanda et, à la connaissance de Human Rights Watch, Innocent Kayumba est le seul haut cadre pénitentiaire à avoir été reconnu pénalement responsable d’abus dans des lieux de détention au Rwanda.

Le cas d’Innocent Kayumba, comme le montre ce rapport, souligne les manquements graves non seulement au sein des services correctionnels du Rwanda, mais aussi au sein du système judiciaire et de l’institution nationale de protection des droits humains. Ces institutions n’ont pas mené d’enquêtes ni répondu aux allégations crédibles et répétées de torture avancées par des détenus ou d’anciens détenus depuis au moins 2017.

S’appuyant sur des recherches réalisées en suivant des procès et via des entretiens avec d’anciens détenus entre 2019 et 2024, ce rapport documente la torture et d’autres mauvais traitements subis par des personnes en détention, que ce soit dans des prisons ou dans des centres de détention non officiels. Certains des abus ont été commis par d’autres détenus, qui ont affirmé au cours du procès qu’ils avaient été contraints d’y participer.

Lors de leurs procès, plusieurs accusés, dont des membres de l’opposition, ont déclaré aux juges que les aveux présumés avaient été obtenus sous la torture lors d’interrogatoires dans un centre de détention non officiel connu sous le nom de Kwa Gacinya, un bâtiment situé dans le quartier de Gikondo à Kigali. Les juges n’ont que rarement, voire jamais, ordonné l’ouverture d’enquêtes sur ces allégations de torture.

Bien que le procès d’Innocent Kayumba et d’autres personnes constitue une étape importante pour briser l’impunité quasi totale en matière de torture au Rwanda, il n’a rendu qu’une justice partielle. Par exemple, les fonctionnaires ont été reconnus coupables de coups et blessures volontaires et de meurtre, mais acquittés du chef d’inculpation de torture qui, en vertu de la loi rwandaise, est passible d’une peine plus lourde allant de 20 ans d’emprisonnement à la perpétuité pour les agents officiels qui commettent des actes de torture dans l’exercice de leurs fonctions. En outre, plusieurs hauts responsables pénitentiaires ont été totalement acquittés par le collège de juges malgré les preuves apparemment accablantes à leur encontre, d’après les entretiens de Human Rights Watch avec d’anciens détenus. Les prisonniers ayant reçu l’ordre de battre leurs codétenus ont été condamnés à des peines allant jusqu’à 25 ans d’emprisonnement, tandis que les fonctionnaires ont été condamnés à des peines allant jusqu’à 15 ans d’emprisonnement, alors qu’ils avaient la responsabilité de prévenir les abus et de préserver le bien-être des détenus.

La mutation d’Innocent Kayumba de la prison de Rubavu à celle Nyarugenge en 2019 lui a permis de mettre en place des pratiques abusives, et parfois mortelles, dans cet établissement, comme il l’avait fait dans le premier. L’absence de poursuites contre tout autre haut cadre pénitentiaire impliqué dans ces abus est d’autant plus remarquable. Le fait que le système judiciaire et le RCS n’aient pas ordonné d’enquêtes sur les allégations de torture portées devant le tribunal par les accusés a renforcé l’impunité.

La Commission nationale des droits de la personne du Rwanda (CNDP), qui fait office de mécanisme national de prévention de la torture, chargée de surveiller la mise en œuvre du Protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations Unies contre la torture (OPCAT), n’est pas indépendante et n’a pas eu la capacité ou la volonté de signaler les cas de torture. Cette Commission a régulièrement déclaré qu’aucun cas de torture et de mauvais traitements n’a été observé en détention.

Les autorités restreignent également de façon régulière le travail d’autres institutions ayant pour mandat de surveiller les conditions de détention et de prévenir la torture. Au niveau international, le gouvernement rwandais a empêché les Nations Unies et d’autres institutions de mener de manière indépendante leur travail de surveillance essentiel.

En mai 2024, Human Rights Watch a proposé de rencontrer le ministre de la Justice afin de lui exposer les conclusions préliminaires de ces recherches et d’obtenir plus d’informations sur les efforts déployés par le gouvernement rwandais pour aborder le problème de la torture dans le pays, mais sa chercheuse senior s’est vu refuser l’entrée sur le territoire rwandais lors de son arrivée à l’aéroport international de Kigali.

Le Rwanda devrait respecter les dispositions de sa propre constitution et s’acquitter de ses obligations en vertu du droit international relatif aux droits humains – en particulier l’interdiction absolue de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants – en veillant à répondre systématiquement aux allégations de torture et de détention illégale. Il est important que le gouvernement rwandais intensifie ses efforts pour que tous les responsables de torture, notamment ceux impliqués dans des actes de torture sur des détenus, soient amenés à rendre des comptes. Le gouvernement devrait mener une enquête approfondie sur la torture dans les prisons rwandaises. Pour crédibiliser l’enquête, il devrait demander l’assistance des experts de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et des Nations Unies sur la torture et les conditions de détention et devrait présenter publiquement ses conclusions. Enfin, le gouvernement rwandais devrait coopérer avec le Comité des Nations Unies contre la torture et soumettre son rapport d’État partie, ainsi que permettre au Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de reprendre sans entrave ses visites des établissements de détention.


 

Recommandations

Au gouvernement rwandais

  • Fermer tous les lieux de détention non officiels et libérer tous les détenus. Si des accusations pénales ont été ou doivent être portées contre toute personne détenue dans un lieu de détention non officiel, elles devraient être examinées par les tribunaux qui devraient évaluer l’impact de la détention de l’accusé dans un lieu non officiel sur la légalité du maintien des poursuites pénales.

  • Mettre fin à tout acte de torture et tout mauvais traitement infligé aux détenus et mettre en œuvre et vérifier l’efficacité des mesures visant à mettre fin à ces abus dans les centres de détention, notamment en veillant à ce que les détenus aient un accès efficace à leurs avocats et à des soins médicaux.

  • Mener une enquête exhaustive et transparente sur la torture et les mauvais traitements dans toutes les prisons et autres centres de détention au Rwanda. Sanctionner ou poursuivre, selon le cas, tous les agents de l’État responsables de torture et de mauvais traitements de détenus ; suspendre de leurs fonctions tous ces agents dès lors que des enquêtes sont en cours et que des accusations sont portées contre eux, ainsi que les agents qui ont été reconnus coupables de tels crimes et dont les appels sont en instance.

  • Veiller à ce que les détenus qui ont subi des actes de torture ou des mauvais traitements disposent de voies de recours efficaces.

  • Veiller à ce que les juges respectent les normes internationales en ordonnant une enquête sur toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements qui leur sont présentées et exclure des preuves toutes déclarations, tous les aveux et toutes autres informations susceptibles d’avoir été obtenus sous la contrainte, y compris par la torture et d’autres mauvais traitements interdits.

  • Soumettre son rapport d’État partie au Comité des Nations Unies contre la torture pour permettre au Comité de procéder au troisième examen périodique du Rwanda et autoriser le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à reprendre sans entrave ses visites au Rwanda.

  • Inviter au Rwanda les mécanismes des droits humains pertinents, y compris les Rapporteurs spéciaux des Nations Unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, sur la liberté d’expression et sur la liberté d’association et de réunion pacifique, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.

Au parlement rwandais et à la Commission nationale des droits de la personne

  • Mener des enquêtes et publier des rapports évaluant l’engagement du gouvernement en faveur des droits humains, notamment en ce qui concerne le respect des droits à la vie et à la protection contre la torture et la détention arbitraire.

  • Enquêter sur les allégations de détention illégale et arbitraire et de torture dans les centres de détention, et rendre compte de ces enquêtes publiquement.

  • Condamner publiquement et sans équivoque la torture, les mauvais traitements, les disparitions forcées et les détentions illégales et arbitraires.

Aux acteurs régionaux et internationaux

  • Intégrer le respect des normes relatives aux droits humains dans les programmes visant à soutenir le secteur judiciaire rwandais et dans le dialogue politique avec le gouvernement rwandais et surveiller le respect de ces normes à intervalles réguliers.

  • Dans le cadre de l’assistance au secteur judiciaire, observer les procédures judiciaires afin de s’assurer que les procès sont menés conformément aux normes internationales relatives aux procès équitables.

  • Revoir le soutien financier et autre, y compris la formation et le renforcement des capacités, fourni aux institutions directement impliquées dans les violations des droits humains documentées dans ce rapport et demander au gouvernement rwandais de prendre des mesures concrètes pour mettre fin à ces violations et traduire en justice leurs auteurs.

  • Demander l’autorisation de visiter les prisons et les centres de détention non officiels mentionnés dans le présent rapport.


 

Méthodologie

Ce rapport s’appuie sur des entretiens et l’examen de documents judiciaires. Entre 2019 et 2024, Human Rights Watch a mené des entretiens avec plus de 28 personnes, dont 13 anciens détenus qui ont été enfermés dans des lieux de détention non officiels et dans les prisons de Rubavu et de Nyarugenge au Rwanda entre 2017 et 2024. Human Rights Watch a examiné des interviews sur YouTube d’anciens prisonniers qui ont décrit avoir été torturés en détention et a étudié les documents judiciaires de 53 personnes, y compris le procès de l’ancien directeur de prison Innocent Kayumba et de 17 autres personnes jugés pour torture, coups et blessures volontaires, meurtre et autres chefs d’inculpation. Human Rights Watch a obtenu des informations de sources indépendantes crédibles sur les récits de torture des prisonniers qui ont permis de corroborer les témoignages de certaines des personnes interrogées et s’est également entretenu avec des proches de prisonniers, des avocats, des journalistes et d’autres personnes pour corroborer les informations.

La plupart des entretiens de Human Rights Watch avec des personnes au Rwanda se sont déroulés par téléphone. Les chercheurs ont expliqué à chaque personne interrogée l’objectif de l’entretien et son caractère volontaire et confidentiel. Sauf indication contraire, tous les abus documentés dans ce rapport reposent sur plus de deux sources primaires et secondaires.

Les noms et autres informations permettant d’identifier les détenus et autres sources ont été retirés afin de protéger les personnes interrogées contre d’éventuelles représailles.

Les 29 avril et 7 mai 2024, Human Rights Watch a demandé des rendez-vous avec le ministre de la Justice et la Commission nationale des droits de la personne du Rwanda (CNDP) pour leur faire part de résultats de recherches préliminaires, mais n’a reçu aucune réponse du ministre de la Justice, et a été informé que la présidente de la Commission n’était pas disponible aux deux dates proposées. Une chercheuse senior de Human Rights Watch, qui s’est rendue à Kigali pour des réunions planifiées avec des agents diplomatiques étrangers, s’est vu refuser l’entrée dans le pays en mai.

Le 10 septembre, Human Rights Watch a envoyé au ministre rwandais de la Justice un courrier détaillé décrivant les conclusions de ce rapport et demandant au gouvernement une réponse à ces conclusions. Le ministre n’a pas répondu au moment de la publication de ce rapport. Un courrier envoyé à la CNDP n’a pas non plus reçu de réponse. Il présentait les résultats des recherches ainsi qu’une note de Human Rights Watch soumise à l’Alliance mondiale pour les institutions nationales des droits de l’homme (GANHRI), l’organe chargé de surveiller le respect par les institutions nationales des droits humains des Principes relatifs au statut des institutions nationales, en amont de son examen du travail de la CNDP en octobre 2024. Les deux lettres figurent en annexes de ce rapport.


 

Torture et mauvais traitements

Ils submergeaient les gens dans de l’eau froide, puis les emmenaient dehors dans la boue pour les battre. Ils les faisaient courir dans la cour, pieds nus et mouillés, et les frappaient.


—Ancien détenu de la prison de Rubavu, entretien téléphonique, avril 2021

La constitution du Rwanda affirme que « [n]ul ne peut faire l’objet de torture, de sévices ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants ».[1] Cependant, bien que le Rwanda soit partie à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Convention contre la torture) depuis 2008[2], la torture reste courante dans le pays, souvent dans un contexte de détention illégale ou arbitraire. En effet, Human Rights Watch a documenté dans le passé comment des personnes soupçonnées de collaborer avec des « ennemis » du gouvernement rwandais ont été détenues illégalement et torturées dans des centres de détention militaires par des soldats de l’armée rwandaise et des agents des services de renseignement. Certaines de ces personnes ont été enfermées dans des centres de détention non officiels pendant de longues périodes et dans des conditions inhumaines.[3]

Détention illégale et torture à Kwa Gacinya

Human Rights Watch a mené des entretiens avec d’anciens détenus de Kwa Gacinya, un centre de détention non officiel à Kigali, et a constaté un schéma de mauvais traitements, de simulacres d’exécutions, de passages à tabac et de torture datant depuis au moins 2011.[4] Les détenus y étaient souvent emmenés dans un premier temps après leur arrestation pour y être contraints d’avouer des crimes avant d’être transférés vers un site de détention officiel. Human Rights Watch a reçu des informations selon lesquelles Kwa Gacinya a été reconstruit en tant que poste de police, même si deux sources liées aux services de sécurité ont déclaré à Human Rights Watch que des abus sont toujours commis dans des cellules de son sous-sol.

Un ancien détenu a raconté à Human Rights Watch qu’après son arrestation en 2017, il a été conduit, menotté et les yeux bandés, dans une petite cellule d’environ un mètre sur deux à Kwa Gacinya. Il a indiqué à Human Rights Watch qu’il avait été frappé si violemment à la tête et aux oreilles par la police que son ouïe s’était détériorée. Il a passé une semaine à Kwa Gacinya avant d’être transféré au poste de police de Remera, également situé à Kigali.[5]

Dans une interview diffusée sur YouTube après sa libération de prison en janvier 2020, Venant Abayisenga, un membre de l’opposition, a déclaré qu’il avait été détenu à Kwa Gacinya du 17 septembre au 2 octobre 2017, où il a été battu à plusieurs reprises et accusé de terrorisme et d’œuvrer contre le gouvernement : « À un moment donné, ils [les agents de la police judiciaire] ont apporté une arme à feu et m’ont dit qu’ils me tireraient dessus… Je vivais menotté dans une petite cellule individuelle. C’était un lieu de peur. »[6] Venant Abayisenga a indiqué qu’il avait été interrogé par des agents de la police judiciaire sans avocat. Il a expliqué qu’il a été battu quand il a demandé la présence d’un avocat et qu’on lui a annoncé que ses collègues, arrêtés eux aussi, avaient été tués et qu’il subirait le même sort. « Des gens sont tués à Kwa Gacinya, vous entendez la voix de la personne qui est tuée, puis vous entendez quelqu’un entrer pour nettoyer la cellule, » a-t-il raconté.

Venant Abayisenga et neuf autres membres de l’opposition ont été arrêtés à la suite des élections de 2017 et jugés lors d’un procès au cours duquel plusieurs des accusés ont affirmé avoir été torturés et forcés d’avouer des crimes. Cependant, d’après l’examen par Human Rights Watch des documents du procès et les entretiens menés avec des personnes présentes, les juges n’ont pas ordonné l’ouverture d’une enquête sur les allégations de torture à Kwa Gacinya. Ces allégations graves n’ont pas non plus été reflétées dans le rapport public de la Commission nationale des droits de la personne (CNDP) sur les conditions carcérales et la torture pour aucune des trois années entre 2017 et 2020, année où le procès s’est terminé.[7] Venant Abayisenga a été acquitté et libéré en janvier 2020.

Cinq mois après son interview sur YouTube, dans laquelle il détaillait ses allégations de torture, Venant Abayisenga a disparu. Il a été vu pour la dernière fois le 6 juin 2020, quittant la maison de Victoire Ingabire dans le secteur de Remera, situé dans le district de Gasabo, à Kigali, pour acheter du crédit téléphonique.[8] L’Office rwandais d’investigation (Rwanda Investigation Bureau, RIB), un organisme en apparence autonome spécialisé chargé des enquêtes et assistant les forces de l’ordre locales, a annoncé qu’il enquêtait sur la disparition, mais n’a pas encore présenté les résultats de cette enquête.

Human Rights Watch s’est entretenu avec des sources et a examiné des documents judiciaires relatifs à un autre procès concernant 25 personnes accusées d’infractions liées à la sécurité, y compris terrorisme, association de malfaiteurs et complicité, et conspiration contre le gouvernement ou le président.[9]

Au cours du procès, qui s’est déroulé de 2018 à 2020, plusieurs accusés ont dit avoir été détenus au secret entre cinq et six mois à Kwa Gacinya. Ils ont décrit avoir été enfermés dans des cellules « ressemblant à des cercueils », d’environ un mètre sur deux, et avoir été régulièrement battus et forcés d’avouer les crimes dont ils étaient accusés. Un prévenu a affirmé que sa famille n’avait pas été informée du lieu où il se trouvait et pensait qu’il était mort. Il a également présenté des lettres que sa famille avait envoyées aux institutions gouvernementales pour demander des informations sur l’endroit où il se trouvait.[10]

Un autre accusé a indiqué qu’il avait été arrêté par des officiers militaires, qui lui ont bandé les yeux et l’ont conduit dans un centre de détention, apparemment Kwa Gacinya, où il a été enfermé dans une petite cellule : « Quand nous sommes arrivés, ils m’ont presque battu à mort jusqu’à ce que je commence à vomir du sang... Ils m’ont encore battu jusqu’à ce que je sois forcé à avouer des actes avec lesquels je n’ai rien à voir. » Il a ajouté qu’il avait ensuite été présenté à la police judiciaire et forcé d’avouer des crimes pour lesquels il a ensuite été mis en examen.[11]

Des documents judiciaires révèlent que les juges et les procureurs ont ignoré les plaintes des détenus concernant leur détention illégale et leurs mauvais traitements.[12]  

Human Rights Watch n’a connaissance d’aucune enquête sérieuse qui aurait été menée sur les abus commis là-bas.

Mauvais traitements et torture dans les prisons de Nyarugenge et Rubavu

Prison de Nyarugenge

Lors des procès observés par Human Rights Watch depuis 2019, plusieurs détenus enfermés à la prison de Nyarugenge ont déclaré aux tribunaux qu’ils avaient été soumis à des actes de torture et des mauvais traitements en détention. Ils ont décrit un schéma d’abus commis par des agents pénitentiaires ou des prisonniers sous les ordres du personnel pénitentiaire, qui plongeaient de force les détenus dans un conteneur rempli d’eau et les frappaient. Ce traitement avait été mis en place par Innocent Kayumba, directeur de la prison de Nyarugenge après sa mutation depuis la prison de Rubavu en 2019. Human Rights Watch s’est entretenu avec 13 anciens détenus enfermés dans ces prisons qui ont corroboré les récits exposés au tribunal concernant ce type de traitement. Tous ont indiqué qu’Innocent Kayumba était impliqué dans la mise en place et l’exécution de cette pratique. Certains ont affirmé que d’autres prisonniers avaient également été transférés de la prison de Rubavu, où ils avaient précédemment aidé Innocent Kayumba à mettre en œuvre ces abus, pour faire la même chose à Nyarugenge.

Plusieurs anciens prisonniers ont parlé de malnutrition sévère dans les prisons. Un ancien détenu de la prison de Nyarugenge (également connue sous le nom de Mageragere) a raconté :

Mageragere, c’est l’enfer. On vous donne un repas par jour, généralement vers 11 heures du matin. Ce repas doit vous permettre de tenir pendant 24 heures.... Les gens meurent de malnutrition, vous pouvez voir les corps traînés sur des civières de fortune faites de bois et de pneus.[13]

Après son acquittement et sa libération de prison en janvier 2020, Théophile Ntirutwa, un membre de Dalfa-Umurinzi, a donné une interview vidéo en ligne dans laquelle il a décrit sa détention au secret et les tortures qu’il a subies à la prison de Nyarugenge : « À Mageragere, il y a un endroit appelé Yordani.... [Les prisonniers] y sont emmenés et sévèrement battus. »[14]

Au moins cinq autres anciens détenus ont confirmé à Human Rights Watch la description qu’il donne du calvaire enduré par les détenus dans l’endroit de la prison de Nyarugenge appelé « Yordani » ; des conditions similaires ont également été documentées à la prison de Rubavu et décrites lors du procès d’Innocent Kayumba (voir plus loin). Un ancien détenu a expliqué : « Yordani était rempli d’eau sale qui était versée dans cette sorte de bac, puis on ordonnait à une personne de se mettre dedans et on la frappait avec des bâtons en bois. »[15] Un autre a déclaré : « Ils ont battu les prisonniers dans l'eau, l'eau était sale, certains avaient déféqué ou uriné dedans, et il y avait du sang parce que certains étaient blessés.... Les prisonniers suffoquaient là-dedans, les gardes nous enfonçaient le visage dans l'eau ».[16]

Théophile Ntirutwa a de nouveau été arrêté le 11 mai 2020 à la suite d’un incident violent dans sa boutique à Kigali, au cours duquel un homme a été poignardé à mort.[17] Il a été condamné à sept ans de prison pour avoir « [répandu]des informations fausses ou des propagandes nuisibles avec l’intention de provoquer une opinion internationale hostile à l’État rwandais », sur la base d’appels téléphoniques qu’il a passés à Victoire Ingabire, la dirigeante du parti Dalfa-Umurinzi, et à un journaliste, dans lesquels il a parlé publiquement de l’incident.[18]

Le 12 février 2019, Fabien Twagirayezu, un membre du FDU-Inkingi, qui était jugé pour des accusations liées au terrorisme, a déclaré à la Haute Cour de Kigali qu’il subissait des tortures à la prison de Nyarugenge et qu’il avait écrit à la CNDP et au ministre de la Justice, qui avait mandaté quelqu’un pour lui parler, mais que les passages à tabac ont continué.[19] Lors d’une audience le 25 avril 2019, Fabien Twagirayezu a affirmé qu’il avait été interrogé sous la menace d’une arme à feu et menacé d’être tué s’il ne répondait pas aux questions de deux agents du Département des enquêtes criminelles le 9 septembre 2017.[20] En janvier 2020, Fabien Twagirayezu a été reconnu coupable aux côtés de cinq autres membres du parti et le groupe a été condamné à des peines allant de sept à dix ans de prison.[21]

Dieudonné Niyonsenga, propriétaire d’Ishema TV, une chaîne YouTube, purge actuellement une peine de 7 ans de prison à Nyarugenge pour son travail en tant que journaliste.[22] Après son arrestation en avril 2020, il a été détenu dans plusieurs lieux à Kigali, contraint d’avouer qu’il travaillait avec le Congrès national rwandais (Rwandan National Congress, RNC), un parti d’opposition en exil ayant des liens présumés avec des groupes armés, et accusé d’avoir pris des drogues et attaqué des agents des forces de l’ordre.[23]

Une fois son procès commencé, Dieudonné Niyonsenga a signalé à plusieurs reprises au tribunal qu’il faisait l’objet de mauvais traitements et de torture alors qu’il était détenu à la prison de Nyarugenge. Le 10 janvier 2022, il a expliqué qu’il était enfermé dans une petite cellule sombre et traité moins bien que les autres prisonniers. Il a demandé des soins médicaux et que le tribunal enquête sur ses conditions de détention.[24]

En novembre 2022, le père de Dieudonné Niyonsenga a donné une interview sur YouTube dans laquelle il dénonce le traitement de son fils en prison, expliquant que son fils était affaibli, malade et privé de soins médicaux et de nourriture adéquate en détention.[25]

Dieudonné Niyonsenga a déclaré devant un tribunal de Kigali le 10 janvier 2024 qu’il est détenu dans un « trou » qui se remplit souvent d’eau, sans accès à la lumière, et qu’il est fréquemment battu. Il a fait état d’une altération de son ouïe et de sa vue du fait de ses trois années de détention dans des conditions « inhumaines » et des passages à tabac.[26]


Un commentateur en ligne détenu à la prison de Nyarugenge en violation de sa liberté d’expression a également signalé des mauvais traitements au tribunal au cours de son procès. Lors d’une audience tenue le 30 mai 2022, Aimable Karasira,[27] rescapé du génocide et ancien professeur accusé de négation et justification du génocide et de divisionnisme, a expliqué au tribunal que les autorités de la prison de Nyarugenge l’avaient torturé, y compris par la privation de sommeil, avec de la lumière et de la musique forte permanentes, et par des passages à tabac, pour le punir et le contraindre à assister aux audiences du tribunal.[28] Aimable Karasira et son avocat ont déclaré au tribunal qu’on lui refusait un traitement médical pour son diabète et ses problèmes de santé mentale et qu’il n’était pas en état de participer au procès, mais qu’il avait été conduit au tribunal de force. Il a également accusé les autorités pénitentiaires de le priver d’une nourriture adéquate ou suffisante et de lui refuser l’accès à des avocats et à l’argent envoyé par ses amis ou ses proches. Lors d’une audience tenue en juillet 2022, il a indiqué au tribunal qu’il avait été puni et battu pour s’être exprimé lors de ses comparutions devant le tribunal.[29] A la connaissance de Human Rights Watch, le juge n’a pas ordonné l’ouverture d’une enquête sur ces allégations.

Prison de Rubavu

Human Rights Watch a interrogé des anciens détenus de la prison de Rubavu qui ont décrit les types d’abus mis en place par le directeur de la prison de l’époque, Innocent Kayumba, corroborant les allégations avancées au cours du procès qui s’est tenu entre septembre 2023 et avril 2024 (voir plus loin).

Un ancien détenu de la prison de Rubavu a expliqué : « J’ai vu Kayumba. C’était le directeur quand j’étais là-bas. Il frappait beaucoup les gens.... Quand je suis arrivé à la prison, c’est lui qui m’a battu.... Quand il était fatigué, il disait à ses agents de sécurité de continuer.... Beaucoup de personnes ont été torturées. Certaines sont mortes, d’autres sont handicapées maintenant. Certaines ont perdu l’usage d’une partie du corps, d’autres ont perdu leurs dents. »[30]

Human Rights Watch a obtenu les noms de 11 prisonniers qui, selon d’anciens détenus, sont morts à la suite de passages à tabac, y compris plusieurs personnes dont les cas ont été cités lors du procès d’Innocent Kayumba.

Un ancien détenu qui était enfermé à la prison de Rubavu de 2017 à 2021 a raconté à Human Rights Watch qu’Innocent Kayumba frappait les prisonniers lorsqu’il était directeur de la prison de Rubavu: « Beaucoup de gens sont morts après avoir été torturés, mais parfois aussi à cause des conditions de détention. Nous avons failli être tués. Les prisonniers politiques étaient traités encore moins bien que les autres.... On m’accusait d’être un traître, d’essayer de nuire à mon pays. Ils ont dit que si je continuais comme ça avec l’opposition, je ne survivrais pas longtemps. »[31]

Plusieurs anciens détenus ont indiqué que de nombreux passages à tabac étaient exécutés par des prisonniers désignés par la direction de la prison. Un ancien détenu à Rubavu a raconté : « Les prisonniers agissaient comme s’ils étaient chargés du maintien de la sécurité.... Ils frappaient les gens, ils les laissaient dehors toute la nuit dans le froid. Ils utilisaient un endroit appelé “Yordani.”... Je n’ai pas de mots, c’était horrible. L’eau était froide. Parfois, la personne était retrouvée morte le lendemain matin. »[32] Un autre ancien détenu a déclaré que les prisonniers étaient obligés de courir pieds nus dans la cour jusqu'à ce qu'ils s'effondrent.[33]

Fonctionnaires pénitentiaires et prisonniers jugés pour mauvais traitements à la prison de Rubavu

 

Ils ont acquitté certains des fonctionnaires de la prison, mais ces hommes étaient responsables lorsque nous étions passés à tabac. Certains prisonniers en ont témoigné. 
—Ancien détenu de la prison de Rubavu, juillet 2024

En vertu de la loi, y compris de la constitution, la torture est interdite au Rwanda.[34] La loi prévoit une peine d’emprisonnement de 20 à 25 ans pour toute personne reconnue coupable de torture et une peine d’emprisonnement à perpétuité pour les agents officiels qui ont commis des actes de torture dans le cadre de leurs fonctions.[35]

En 2023, deux anciens prisonniers, Théoneste Niyitegeka et Emmanuel Ndagijimana, ont parlé publiquement sur YouTube en détaillant leurs allégations d’avoir subi des actes de torture en décembre 2020 à la prison de Rubavu.[36] Un mois plus tard, le gouvernement a inculpé et lancé des poursuites contre 18 fonctionnaires pénitentiaires et prisonniers, y compris d’anciens directeurs de prison et de responsables pénitentiaires, pour des infractions incluant meurtre, agression et torture commises dans la prison de Rubavu entre 2019 et 2022.[37]

Au cours du procès, qui s’est déroulé d’octobre 2023 à avril 2024, les prisonniers ont apporté des preuves de l’implication des accusés dans des pratiques de torture, qui ont parfois entraîné la mort de détenus. Le 5 avril 2024, l’ancien directeur de la prison, Innocent Kayumba, deux agents du RCS et sept prisonniers officieusement chargés du maintien de la sécurité dans la prison ont été reconnus coupables d’infractions incluant coups et blessures volontaires et meurtre.[38] Aucun des fonctionnaires ou des prisonniers n’a été reconnu coupable de torture, bien que les actes décrits par les témoins et le procureur correspondent à la définition de la torture en vertu du droit rwandais et du droit international.[39]

Lors du procès, les prisonniers et les témoins ont fourni des récits glaçants sur la façon dont Innocent Kayumba et ses coaccusés ont battu des prisonniers, entraînant la mort de plusieurs d’entre eux. Dans plusieurs cas examinés au cours du procès, les victimes ont été battues et tuées pour avoir prétendument fait entrer de l’argent dans la prison, refusé de communiquer des informations ou tenté de s’évader. Les témoignages décrivent une culture de violence et d’impunité profondément enracinée au sein de la prison, où les détenus ont été victimes d’abus pendant des années sans possibilité de réparation ou de protection.

Dans un cas, le procureur a accusé Innocent Kayumba d’avoir ordonné à un agent d’attacher un prisonnier à un arbre et de le battre pour avoir prétendument volé une couverture.[40] Le prisonnier est mort de ses blessures, selon les individus qui ont témoigné lors du procès. Dans un autre cas, un prisonnier chargé du maintien de la sécurité a été accusé d’avoir tué un autre prisonnier qui refusait d’avoir des rapports sexuels avec lui.[41]

Une action civile a été intentée par Emmanuel Ndagijimana, faisant état de handicaps permanents dus aux passages à tabac qu’il a subis en prison, mais la cour l’a trouvée infondée.[42]

La peine de 15 ans de prison prononcée à l’encontre d’Innocent Kayumba est inférieure à la peine minimale établie par la loi rwandaise pour des actes de torture, qui dispose que « [s]’il est résulté de la torture, soit une maladie incurable, soit une incapacité permanente de travail, soit la perte de l’usage absolu d’un organe, soit une mutilation d’un organe vital, la mort ou est commise par un agent officiel dans le cadre de ses fonctions, la peine est l’emprisonnement à perpétuité ».[43] Innocent Kayumba avait déjà été reconnu coupable en 2021 d’avoir volé des détenus et avait été condamné à une peine de cinq ans de prison.[44]

Les hauts responsables pénitentiaires Augustin Uwayezu et Ephrem Gahungu ont été acquittés malgré les preuves présentées au tribunal indiquant qu’ils avaient, au mieux, fermé les yeux sur les abus et n’avaient pas ordonné d’enquêtes ou, au pire, directement participé aux abus. Théoneste Niyitegeka et Emmanuel Ndagijimana ont parlé publiquement de leur connaissance de l’implication des fonctionnaires acquittés dans les actes de torture commis à la prison de Rubavu.[45]

Les peines les plus lourdes, allant jusqu’à 25 ans de prison pour meurtre, ont été prononcées à l’encontre de certains des prisonniers qui avaient été chargés du maintien de la sécurité par les services pénitentiaires. Plusieurs d’entre eux ont déclaré qu’ils avaient commis les abus sous la menace des autorités.[46]

Au cours du procès, les accusés et anciens détenus ont fourni des preuves sur la mort de plusieurs prisonniers dont Jean-Marie Vianney Nzeyimana, Étienne Agahanze, Martin Kayumba, Jean-Claude Seyeze, Damien Gasigwa, Xavier Ngarambe, Lambert Abdelatif, et sur les blessures graves infligées à Emmanuel Ndagijimana. Le tribunal a jugé que les informations relatives à la mort d’Étienne Agahanze et de Jean-Claude Seyeze étaient contradictoires et les accusés ont été acquittés des chefs d’inculpation de torture, meurtre et coups et blessures concernant ces deux hommes.[47] Human Rights Watch a reçu indépendamment des informations sur la mort des deux hommes indiquant que les victimes ont été battues à mort.

Un prisonnier qui a témoigné au procès a parlé du conteneur rempli d’eau à « Yordani », comme détaillé plus haut. D’autres détenus qui ont participé aux passages à tabac et aux actes de torture ont plaidé non coupables, au motif qu’ils suivaient les ordres qui leur avaient été donnés par le personnel. L’un de ces détenus a déclaré qu’il avait été transféré de Rubavu à la prison de Nyarugenge par Innocent Kayumba pour y mettre en œuvre le même système de torture.[48]


 

Surveillance et supervision

Ils m’ont torturé pour me faire signer des aveux et m’ont annoncé que mes collègues avaient été tués.… Ils ont dit que je serais le prochain à être tué.


Venant Abayisenga, audience du 27 juin 2018, Haute Cour de Kigali

En vertu du droit international, les États doivent veiller à ce que, même sans plainte officielle, les allégations de torture fassent l’objet d’une enquête rapide, impartiale et approfondie, afin que les responsables puissent être et soient traduits en justice et que les victimes aient accès à un recours effectif et reçoivent réparation.[49] Cependant, le gouvernement rwandais et ses institutions ayant pour mandat de protéger les droits humains n’ordonnent que rarement, voire jamais, de telles enquêtes.

Le Rwanda est officiellement devenu un État partie au Protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations Unies contre la torture (OPCAT) le 30 juin 2015.[50] En 2017, le Sous-Comité des Nations Unies pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (SPT), un organe des Nations Unies créé en vertu des dispositions de l’OPCAT, a été contraint de suspendre puis (pour la première fois) d’annuler sa visite au Rwanda, invoquant comme motifs l’obstruction des autorités et la crainte de représailles contre les personnes interrogées.[51] Le Rwanda n’a pas non plus soumis son troisième rapport périodique au Comité contre la torture, un organe des Nations Unies chargé de surveiller la mise en œuvre de la Convention contre la torture, attendu depuis le 6 décembre 2021, ce qui empêche de fait son examen par le Comité.[52]

Depuis 2021, le gouvernement n’a pas autorisé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à surveiller les conditions carcérales conformément aux normes du CICR, ce qui a amené le CICR à cesser ses activités de surveillance des prisons dans le pays.[53] Il n’y a pas de surveillance indépendante des conditions carcérales au Rwanda à l’heure actuelle.

Commission nationale des droits de la personne

En septembre 2018, la loi accordant le mandat de mécanisme national de prévention (MNP) à la Commission nationale des droits de la personne (CNDP) est entrée en vigueur.[54] La CNDP dispose désormais d’un mandat pour effectuer, avec ou sans préavis, des visites régulières dans tous les lieux où des individus pourraient être privés de liberté et formuler des recommandations.[55]

La CNDP publie chaque année des rapports d’activité et thématiques sur ses travaux de protection et de surveillance. Les rapports ignorent, pour la plupart, les violations des droits humains liées au ciblage de détracteurs réels ou supposés, à la détention arbitraire, à la torture, aux mauvais traitements, aux exécutions extrajudiciaires et aux disparitions forcées.

En 2017, le Comité des Nations Unies contre la torture, l’organe chargé de surveiller la mise en œuvre de la Convention contre la torture, s’est déclaré préoccupé par le fait qu’aucune mention de détention arbitraire dans des installations militaires ne figure dans les rapports annuels de la CNDP depuis des années, malgré des allégations crédibles d’anciens détenus.[56] Dans le cadre de son mandat de protection, la CNDP doit « examiner les violations des droits de la personne au Rwanda commises par les organes publics ou privés, les associations, les organisations non-gouvernementales, les personnes abusant de leurs pouvoirs, un groupe de personnes ou les individus ».[57] Pourtant, les organes publics, en particulier les forces de sécurité, qui ont été impliqués dans des abus au Rwanda, sont rarement, voire jamais, identifiés comme auteurs de telles violations dans aucun des rapports examinés par Human Rights Watch.

Le rapport annuel 2022-2023 de la Commission conclut que « les détenus ne sont pas soumis à la torture ou à d’autres préjudices physiques ou psychologiques ».[58] La Commission est parvenue à la même conclusion d’absence de cas de torture dans ses rapports annuels 2021-2022, 2020-2021, 2019-2020, 2018-2019 et 2017-2018, ce qui contredit les conclusions de Human Rights Watch et d’autres organisations.[59]


 

Remerciements

Les recherches menées par entretiens téléphoniques et en suivant des procès entre 2019 et 2024 ainsi que la rédaction du présent rapport ont été réalisées par Clémentine de Montjoye, une chercheuse senior de la division Afrique de Human Rights Watch. Un assistant de recherche a fourni une aide pour les recherches. Le rapport a été édité par Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale, Carine Kaneza Nantulya, directrice adjointe de la division Afrique, Aisling Reidy, conseillère juridique senior, et Babatunde Olugboji, directeur adjoint de la division Programmes. Anna Bruckner, coordinatrice au sein de la division Afrique, Travis Carr, coordinateur des publications et photographies et Jose Martinez, responsable administratif, ont apporté une assistance à la préparation et à la production.

Sarah Leblois a traduit le rapport en français. Anna Bruckner et Peter Huvos, éditeur du site Web français, ont révisé la traduction française.

Human Rights Watch tient à remercier les Rwandais qui ont accepté de parler de leurs expériences, parfois en dépit de risques personnels considérables.


 

[1] Constitution de la République du Rwanda de 2003, révisée en 2015, art. 14.

[2] Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ouverte à la signature le 10 décembre 1984, rés. de l’A.G. 39/46, 39 U.N. GAOR Supp. N° 51, à 197, doc. ONU A/RES/39/708 (1984), entrée en vigueur le 26 juin 1987, 1465 U.N.T.S. 85, 23 I.L.M. 1027 (1984), telle que modifiée, 24 I.L.M. 535, disponible à l’adresse https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/convention-against-torture-and-other-cruel-inhuman-or-degrading. Le Rwanda a adhéré à la convention le 15 décembre 2008.

[3] Human Rights Watch, « “Nous t’obligerons à avouer” : Torture et détention militaire illégale au Rwanda » (New York : Human Rights Watch, 2017), https://www.hrw.org/sites/default/files/report_pdf/rwanda1017fr_web_3.pdf.

[4] Human Rights Watch, Rapport mondial 2014 (New York : Human Rights Watch, 2014), chapitre sur le Rwanda, https://www.hrw.org/fr/world-report/2014/country-chapters/260115 ; Human Rights Watch, Contribution au 4e Examen périodique du Rwanda par le Comité des droits de l’homme, 12 février 2016, https://www.hrw.org/fr/news/2016/02/12/contribution-au-4e-examen-periodique-du-rwanda-par-le-comite-des-droits-de-lhomme ; « Rwanda : Six mois plus tard, toujours pas de justice pour Kizito Mihigo », communiqué de presse de Human Rights Watch, 17 août 2020, https://www.hrw.org/fr/news/2020/08/17/rwanda-six-mois-plus-tard-toujours-pas-de-justice-pour-kizito-mihigo ; Human Rights Watch, Rapport mondial 2021 (New York : Human Rights Watch, 2021), chapitre sur le Rwanda, https://www.hrw.org/fr/world-report/2021/country-chapters/rwanda ; « Mozambique : Le sort d’un demandeur d’asile rwandais soulève de graves inquiétudes », communiqué de presse de Human Rights Watch, 15 juin 2021, https://www.hrw.org/fr/news/2021/06/15/mozambique-le-sort-dun-demandeur-dasile-rwandais-souleve-de-graves-inquietudes.

[5] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 5 février 2020.

[6] « Umwe mubari abarwanashyaka ba FDU inkingi yavuze ibyamubayeho n’iyica rubozo yakorewe », clip vidéo, YouTube, 30 janvier 2020, https://www.youtube.com/watch?v=BpAGp9kEV3s&t=1192s.

[7] NCHR, Annual Activity Report: July 2019 - June 2020 ; NCHR, Annual Activity Report: July 2018 - June 2019 ; NCHR, Annual Activity Report: July 2017 - June 2018, tous disponibles ici en anglais et en kinyarwanda : https://www.cndp.org.rw/publications/reports?tx_filelist_filelist%5Baction%5D=list&tx_filelist_filelist%5Bcontroller%5D=File&tx_filelist_filelist%5Bpath%5D=%2Fuser_upload%2FCNDP%2FPublications%2FReports%2FAnnual_Reports%2F&cHash=fb60b5db002ee4e2a3a4f5de53402dc4.

[8] « Un opposant rwandais porté disparu », BBC News Afrique, 8 juin 2020, https://www.bbc.com/afrique/region-52967702.

[9] Affaire RP 00009/2018/HC/HCCIC jugée par la Chambre de la Haute Cour de Nyanza pour les crimes internationaux et transfrontaliers, conservée dans les dossiers de Human Rights Watch.

[10] Idem, audience des 25-27 novembre 2019.

[11] Idem, audiences du 25 septembre 2019.

[12] Verdict dans l’affaire RP 00009/2018/HC/HCCIC jugée par la Chambre de la Haute Cour de Nyanza pour les crimes internationaux et transfrontaliers.

[13] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 3 août 2023.

[14] « Theophile wari umuyobozi muri FDU inkingi yavuze iyicarubozo yakorewe || na Yorodani yo muri gereza », Umubavu TV, 20 janvier 2019,

https://www.youtube.com/watch?v=5HcuJBtWhNk.

[15] Entretiens téléphoniques de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 30 janvier et 14 février 2020.

[16] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 24 avril 2024.

[17] « Rwanda : Un homme politique condamné pour avoir prétendument terni l’image du pays », communiqué de presse de Human Rights Watch, 18 janvier 2023, https://www.hrw.org/fr/news/2023/01/18/rwanda-un-homme-politique-condamne-pour-avoir-pretendument-terni-limage-du-pays.

[18] Idem.

[19] Audience du 12 février 2019 de l’affaire RP 00039/2018/HC/HCCIC.

[20] Idem, audience du 25 avril 2019.

[21] Verdict dans l’affaire RP 00039/2018/HC/HCCIC, 23 janvier 2020, Chambre de la Haute Cour de Nyanza pour les crimes internationaux et transfrontaliers, conservé dans les dossiers de Human Rights Watch.

[22] Verdict dans l’affaire RP 00675/2020/TGI/GSBO, 12 mars 2021, conservé dans les dossiers de Human Rights Watch.

[23] « Rwanda : Des vidéos publiées sur YouTube entrainent des arrestations et des poursuites judiciaires », communiqué de presse de Human Rights Watch, 30 mars 2021, https://www.hrw.org/fr/news/2021/03/30/rwanda-des-videos-publiees-sur-youtube-entrainent-des-arrestations-et-des.

[24] « CYUMA HASSAN IBYE BIRANGIYE NABIOMU RUKIKO AHISHUYE UKO AFUNGIWE MU MWOBO MURI », publication sur YouTube, Iwacu TV, 10 janvier 2022, https://youtu.be/Bo8d0HGj180.

[25] La vidéo a été retirée de YouTube, transcription conservée dans les dossiers de Human Rights Watch.

[26] La vidéo a été retirée de YouTube, transcription conservée dans les dossiers de Human Rights Watch.

[27] « Rwanda : Vague de poursuites visant la liberté d’expression », communiqué de presse de Human Rights Watch, 16 mars 2022, https://www.hrw.org/fr/news/2022/03/16/rwanda-vague-de-poursuites-visant-la-liberte-dexpression.

[28] « TUZICWA nyuma ya CHOGM / Umva amajwi ya Karasira mu Rukiko », clip YouTube, Pax TV – Ireme, 31 mai 2022, https://youtu.be/lG9JPM07ik4.

[29] Procès-verbal d’audience conservé dans les dossiers de Human Rights Watch.

[30] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 13 mars 2024.

[31] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 13 avril 2021.

[32] Idem.

[33] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un ancien détenu, 24 avril 2024.

[34] Constitution de la République du Rwanda de 2003, révisée en 2015, art. 14.

[35] Loi n° 68/2018 du 30/08/2018 déterminant les infractions et les peines en général, arts. 112 et 113.

[36] Laurent Munyandilikirwa, « Témoignages d’anciens prisonniers : M. Ndagijimana Emmanuel et Dr Niyitegeka Théoneste », 30 août 2023, The Rwandan, https://www.therwandan.com/fr/temoignages-danciens-prisonniers-m-ndagijimana-emmanuel-et-dr-niyitegeka-theoneste/.

[37] Affaire n° RP 00652/2023/TGI/RBV, CMB RP 00650/2023/TGI/RBV, CMB RP 00654/2023/TGI/RBV, CMB RP 00673/2023/TGI/RBV, CMB RP 00758/2023/TGI/RBV, CMB RP 00757/2023/TGI/RBV, CMB RP 00694/2023/TGI/RBV et CMB RP 232/2023/TGI/RBV.

[38] Idem. Voir aussi : « The Verdict on Torture within Rwanda’s Carceral System », The Rwandan, 6 avril 2024, https://www.therwandan.com/the-verdict-on-torture-within-rwandas-carceral-system/.

[39] L’article 112 de la loi n° 68/2018 du 30/08/2018 déterminant les infractions et les peines en général définit la torture comme « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir pour un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination de quelque nature que ce soit ».

[40] Verdict dans l’affaire n° RP 00652/2023/TGI/RBV, CMB RP 00650/2023/TGI/RBV, CMB RP 00654/2023/TGI/RBV, CMB RP 00673/2023/TGI/RBV, CMB RP 00758/2023/TGI/RBV, CMB RP 00757/2023/TGI/RBV, CMB RP 00694/2023/TGI/RBV et CMB RP 232/2023/TGI/RBV, 5 avril 2024, conservé dans les dossiers de Human Rights Watch.

[41] Idem.

[42] Idem.

[43] Loi n° 68/2018 du 30/08/2018 déterminant les infractions et les peines en général, art. 113.

[44] Verdict dans l’affaire RP 00374/2021/TB/NYGE, 3 décembre 2021, conservé dans les dossiers de Human Rights Watch.

[45] Vidéo retirée de YouTube, transcription conservée dans les dossiers de Human Rights Watch.

[46] Verdict dans l’affaire n° RP 00652/2023/TGI/RBV, CMB RP 00650/2023/TGI/RBV, CMB RP 00654/2023/TGI/RBV, CMB RP 00673/2023/TGI/RBV, CMB RP 00758/2023/TGI/RBV, CMB RP 00757/2023/TGI/RBV, CMB RP 00694/2023/TGI/RBV et CMB RP 232/2023/TGI/RBV.

[47] Verdict dans l’affaire n° RP 00652/2023/TGI/RBV, CMB RP 00650/2023/TGI/RBV, CMB RP 00654/2023/TGI/RBV, CMB RP 00673/2023/TGI/RBV, CMB RP 00758/2023/TGI/RBV, CMB RP 00757/2023/TGI/RBV, CMB RP 00694/2023/TGI/RBV et CMB RP 232/2023/TGI/RBV.

[48] Affaire RP 00652/2023/TGI/RBV, CMB RP 00650/2023/TGI/RBV, CMB RP 00654/2023/TGI/RBV, CMB RP 00673/2023/TGI/RBV, CMB RP 00758/2023/TGI/RBV, CMB RP 00757/2023/TGI/RBV, CMB RP 00694/2023/TGI/RBV et CMB RP 232/2023/TGI/RBV, audience du 12 février 2024.

[49] Comité des droits de l’homme de l’ONU, Observation générale n° 31, La nature de l’obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, doc. ONU CCPR/C/21/Rev.1/Add. 13 (2004), para. 15 et 16 ; Comité contre la torture de l’ONU, Observation générale n° 3, Application de l’article 14 par les États parties, doc. ONU CAT/C/GC/3 (2012), para. 27.

[50] Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OPCAT), adopté le 18 décembre 2002, rés. de l’A.G. A/RES/57/199, [réimprimé dans 42 I.L.M. 26 (2003)], entré en vigueur le 22 juin 2006, arts. 3 et 17.

[51] « Prévention de la torture: un organe des droits de l’homme de l’ONU suspend sa visite au Rwanda en invoquant des obstructions », communiqué de presse du Bureau du Haut-Commissaire pour les droits de l’homme des Nations Unies, 20 octobre 2017, https://www.ohchr.org/fr/press-releases/2017/10/prevention-torture-un-human-rights-body-suspends-rwanda-visit-citing?LangID=E&NewsID=22273#:~:text=GENEVA%2FKIGALI%20(20%20October%202017,that%20some%20interviewees%20could%20face ; « UN torture prevention body to visit Burundi, Costa Rica, Senegal and Switzerland ; terminates Rwanda visit », communiqué de presse du HCDH de l’ONU, 4 juillet 2018, https://www.ohchr.org/en/press-releases/2018/07/un-torture-prevention-body-visit-burundi-costa-rica-senegal-and-switzerland.

[52] Base de données relative aux organes conventionnels de l’ONU, Statut de présentation des rapports pour Rwanda : https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/TreatyBodyExternal/countries.aspx?CountryCode=RWA&Lang=FR.

[53] Département d’État des États-Unis, Bureau pour la démocratie, les droits humains et le travail, « Country Reports on Human Rights Practices – 2021 : Rwanda », https://www.state.gov/reports/2021-country-reports-on-human-rights-practices/rwanda/ (accédé le 1 octobre 2024).

[54] Loi n° 19/2013 du 25/03/2013 modifiée par la loi n° 61/2018 du 24/08/2018 déterminant la mission, l’organisation et le fonctionnement de la Commission nationale des droits de la personne.

[55] Pour plus d’informations sur le travail de la Commission nationale des droits de la personne, voir la soumission de Human Rights Watch de mai 2024 à l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme ici : https://www.hrw.org/news/2024/09/30/submission-global-alliance-national-human-rights-institutions-ganhri.

[56] « Observations finales sur le deuxième rapport périodique du Rwanda », Comité des Nations Unies contre la torture, 21 décembre 2017, CAT/C/RWA/CO/2, https://www.ohchr.org/fr/documents/concluding-observations/catcrwaco2-committee-against-torture-concluding-observations.

[57] Loi n° 19/2013 du 25/03/2013 modifiée par la loi n° 61/2018 du 24/08/2018 portant missions, organisation et fonctionnement de la Commission nationale des droits de la personne, art. 1(3).

[58] Commission nationale des droits de la personne, 2022 - 2023 Annual Activity Report, septembre 2023 (disponible en Kinyarwanda uniquement, traduction de Human Rights Watch), https://www.cndp.org.rw/index.php?eID=dumpFile&t=f&f=91617&token=2722c60288ecbd1cc31d45691caa44ef0fa58fa8, p. 9.

[59] Human Rights Watch, Rapport mondial 2024 (New York : Human Rights Watch, 2024), chapitre sur le Rwanda, https://www.hrw.org/fr/world-report/2024/country-chapters/rwanda ; Human Rights Watch, « Rejoins-nous ou tu mourras » : La répression extraterritoriale exercée par le Rwanda (New York : Human Rights Watch, 2023), https://www.hrw.org/fr/report/2023/10/10/rejoins-nous-ou-tu-mourras/la-repression-extraterritoriale-exercee-par-le-rwanda ; « Rwanda : Un détracteur du gouvernement incarcéré dénonce la torture en prison », communiqué de presse de Human Rights Watch, 13 juin 2022, https://www.hrw.org/fr/news/2022/06/13/rwanda-un-detracteur-du-gouvernement-incarcere-denonce-la-torture-en-prison ; Human Rights Watch, Rapport mondial 2021 (New York : Human Rights Watch, 2021), chapitre sur le Rwanda, https://www.hrw.org/fr/world-report/2021/country-chapters/rwanda ; Human Rights Watch, Rapport mondial 2020 (New York : Human Rights Watch, 2020), chapitre sur le Rwanda, https://www.hrw.org/fr/world-report/country-chapters/rwanda.