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Arabie saoudite : Exécutions d’hommes accusés de crimes commis en tant que mineurs

Les autorités du royaume ont exécuté 300 personnes à ce jour en 2025

Deux Saoudiens exécutés en 2025 pour des crimes prétendument commis lorsqu’ils étaient mineurs. À gauche : Jalal al-Labbad, né en 1995 et exécuté en août 2025, après avoir été accusé de crimes commis à l’âge de 15 ans. À droite : Abdullah al-Derazi, également né en 1995 et exécuté en octobre 2025, après avoir été accusé de crimes commis à l’âge de 17 ans. © Privé

(Beyrouth) – Le 20 octobre, les autorités saoudiennes ont exécuté un homme condamné pour des crimes qu'il aurait commis alors qu'il était mineur, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Abdullah al-Derazi avait été condamné à mort après avoir été accusé de terrorisme, suite à sa participation à des manifestations et à des cortèges funéraires. Il était la 300ème personne exécutée par les autorités saoudiennes à ce jour en 2025. 

Les autorités saoudiennes ont procédé à des exécutions à un rythme sans précédent depuis le début de l'année 2025, apparemment sans respecter les normes de procédure régulière ; parmi les personnes exécutées figuraient au moins un journaliste de renom, et au moins 198 individus qui avaient été reconnus coupables d’infractions non violentes liées à la drogue. Le 21 août, les autorités ont procédé a l’exécution de Jalal al-Labbad, qui avait été visé par des chefs d'accusation similaires à celles portées contre Abdullah al-Derazi, suite à sa participation à des manifestations alors qu'il était mineur.  

« En procédant à l'exécution d'Abdullah al-Derazi, les autorités saoudiennes ont franchi deux étapes horribles : 300 exécutions au cours des 10 premiers mois de 2025, et la deuxième exécution d'une personne accusée d'avoir commis des crimes en tant qu’enfant », a déclaré Joey Shea, chercheuse sur l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis à Human Rights Watch. « Ces exécutions devraient dissiper tous les doutes qui subsistent encore dans le monde quant au bilan désastreux de l'Arabie saoudite en matière de droits humains. »

Abdullah al-Derazi appartenait à la minorité musulmane chiite du pays, qui souffre depuis longtemps de discrimination et de violence systématiques de la part du gouvernement. La police saoudienne l'a arrêté en août 2014 après l'avoir appréhendé et sévèrement battu dans la rue, selon l'Organisation européenne-saoudienne pour les droits humains (European Saudi Organization for Human Rights, ESOHR). Les autorités saoudiennes l'ont soumis à un isolement cellulaire prolongé, à d'autres formes de torture, notamment des coups et des brûlures au visage et autour des yeux, et l'ont contraint sous la torture à signer des aveux, selon l'ESOHR.

En février 2018, la Cour pénale spécialisée d'Arabie saoudite, de triste notoriété, a condamné Abdullah al-Derazi à mort pour des infractions liées à des manifestations qu'il aurait commises à l'âge de 17 ans ; cette condamnation a été prononcée en vertu de la loi antiterroriste du pays, selon des documents judiciaires. En 2023, ESOHR et MENA Rights Group ont appris que la Cour suprême avait rendu un arrêt secret confirmant la condamnation à mort d'Abdullah al-Derazi. 

Le 20 octobre, le ministère de l'Intérieur saoudien a annoncé l'exécution d'Abdullah Al-Derazi, affirmant qu'il avait commis des « crimes terroristes » et « créé une organisation terroriste visant à déstabiliser la sécurité et à tirer sur les quartiers généraux des services de sécurité et ses membres, dans l'intention de les tuer, en collaboration avec un groupe de la même organisation ». 

Précédemment, le 21 août 2025, les autorités ont exécuté Jalal al-Labbad, âgé de 15 ans au moment des faits qui lui étaient reprochés. Les autorités saoudiennes l’ont arrêté en 2017 après qu’il eut participé à des manifestations et à des cortèges funéraires, a rapporté l'ESOHR. Sa famille n'a pas été informée de la date de son exécution et aurait appris sa mort par les médias, selon un communiqué publié le 5 septembre par des experts en droits humains des Nations Unies. Ces experts ont appelé le gouvernement saoudien à « restituer immédiatement le corps de M. al-Labbad à ses proches, et à autoriser un examen médico-légal indépendant ».

Les accusations portées contre Abdullah al-Derazi et Jalal al-Labbad, les deux Saoudiens accusés d'infractions commises lorsqu'ils étaient mineurs, reposaient presque exclusivement sur leurs aveux. Or, Human Rights Watch a documenté une série de violations des droits à un procès équitable et à une procédure régulière dans le cadre du système pénal saoudien, y compris l'utilisation d'aveux obtenus sous la contrainte, dans d’autres affaires de mineurs condamnés à mort. Ceci signifie qu’il est peu probable qu' Abdullah al-Derazi ou Jalal al-Labbad aient été jugés lors de procès équitables.

L'Arabie saoudite est un État partie à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, qui interdit strictement le recours à la peine capitale pour les infractions commises par des personnes âgées de moins de 18 ans. Human Rights Watch s'oppose à la peine de mort dans tous les pays et en toutes circonstances, la considérant comme un châtiment cruel et inhumain.

Les tribunaux saoudiens ont condamné à mort au moins six autres individus accusés d'infractions lorsqu’ils étaient mineurs : Yousef al-Manasif, Ali al-Mabiouq, Jawad Qureiris, Ali al-Subaiti, Hassan al-Faraj et Mahdi al-Mohsen. Ces cinq derniers risquent d'être exécutés en raison d’accusations similaires à celles portées contre Abdullah al-Derazi et Jalal al-Labbad. Des experts de l'ONU et des organisations de défense des droits humains ont exhorté l’Arabie saoudite à mettre fin aux exécutions d’individus accusés d’infractions commises alors qu'ils étaient mineurs.

En novembre 2024, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire avait publié un avis concernant les cas de cinq détenus saoudiens – Abdullah al-Derazi, Jalal al-Labbad, Yusuf al-Manasif, Jawad Qureiris et Hassan al-Faraj – et conclu qu’il s’agissait de cinq cas de « détention arbitraire ». 

Le droit international relatif aux droits humains, y compris la Charte arabe des droits de l'homme, ratifiée par l'Arabie saoudite, souligne que les pays qui appliquent la peine de mort ne peuvent le faire que dans les cas des « crimes les plus graves » et dans des circonstances exceptionnelles. Déjà en novembre 2022, Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme avait publié une déclaration exprimant son inquiétude au sujet du nombre alarmant d'exécutions en Arabie saoudite, suite à la fin d'un moratoire officieux de 21 mois sur l'application de la peine de mort pour des infractions liées à la drogue.

« Alors que le gouvernement saoudien poursuit ses efforts pour blanchir sa réputation désastreuse en matière de droits humains, en offrant des sommes colossales à des vedettes des mondes du spectacle et du sport, ces personnes devraient se demander si elles ne contribuent pas à faire oublier l'exécution d'hommes accusés d'infractions commises lorsqu'ils étaient mineurs », a conclu Joey Shea.

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