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Éthiopie : Les forces du Tigré ont exécuté sommairement des civils

Le Conseil des droits de l'homme de l’ONU devrait ouvrir une enquête internationale sur les crimes de guerre présumés

Ces pierres marquent le lieu de l’enterrement d'une personne tuée lors de combats dans le village de Chenna, dans la région d'Amhara située au sud de la région du Tigré, dans le nord de l’Éthiopie. Des habitants ont déclaré que cet enterrement a eu lieu début septembre 2021, après que des combattants tigréens eurent quitté cette zone. © 2021 Tom Gardner

(Nairobi) – Les forces tigréennes ont exécuté sommairement des dizaines de civils dans deux villes qu'elles contrôlaient dans la région d'Amhara, dans le nord de l’Éthiopie, entre le 31 août et le 9 septembre 2021, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Ces meurtres mettent en évidence le besoin urgent pour le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies d'établir un mécanisme d'enquête international sur les abus commis par toutes les parties au conflit dans la région du Tigré et au-delà.

Le 31 août, les forces tigréennes sont entrées dans le village de Chenna et ont participé à des combats sporadiques et parfois violents contre les forces fédérales éthiopiennes, soutenues par certaines milices d’Amhara. Des habitants de Chenna ont indiqué à Human Rights Watch qu'au cours des cinq jours suivants, les forces tigréennes ont exécuté sommairement 26 civils lors de 15 incidents distincts, avant de quitter cette ville le 4 septembre. En outre, les forces tigréennes ont exécuté sommairement 23 personnes dans la ville de Kobo, lors de quatre incidents survenus le 9 septembre, selon des témoins. Ces meurtres ont apparemment été commis en guise de représailles suite à des attaques menées par des agriculteurs contre des forces tigréennes qui avançaient vers Kobo, plus tôt dans la journée du 9 septembre.

« Les forces tigréennes ont fait preuve d'un mépris brutal à l’égard de la vie humaine et des lois de la guerre, en exécutant des personnes sous leur garde », a déclaré Lama Fakih, directrice de la division Crises et conflits à Human Rights Watch. « Ces meurtres et d’autres atrocités commises par toutes les parties au conflit mettent en évidence la nécessité d'une enquête internationale indépendante sur les crimes de guerre présumés commis dans les régions du Tigré et d'Amhara en Éthiopie. »

Carte de l’Éthiopie, montrant les zones de conflit dans le nord du pays. HRW a mené des recherches sur des exécutions sommaires qu’auraient commises les forces tigréennes à Chenna et Kobo, dans l’État d’Amhara, entre le 31 août et le 9 septembre 2021. © 2021 Human Rights Watch

Depuis le début du conflit armé dans la région du Tigré dans le nord de l’Éthiopie en novembre 2020, les forces militaires éthiopiennes, soutenues par des forces armées érythréennes, ainsi que par des forces spéciales régionales d'Amhara et des milices de cette région, ont combattu un groupe armé tigréen affilié au Front populaire de libération du Tigré (TPLF), l'ancien parti au pouvoir dans cette région. Human Rights Watch et d'autres organisations de défense des droits humains ont documenté des crimes de guerre et de possibles crimes contre l'humanité commis au Tigré par toutes les parties au conflit. En juillet, les combats se sont étendus à la région voisine d'Amhara, entraînant des déplacements à grande échelle. Près de 3,7 millions de personnes ont actuellement besoin d'aide humanitaire.

En septembre et octobre, Human Rights Watch a interrogé à distance 36 personnes, dont des témoins de meurtres, des proches des victimes et des voisins, des personnalités religieuses et des médecins au sujet des combats et des abus commis à Chenna Teklehaimanot (Chenna) et l'ancien parti au pouvoir de la région, le Kobo, et aux alentours. Dix-neuf personnes ont décrit avoir vu des combattants tigréens exécuter sommairement 49 personnes qui, selon elles, étaient des civils, dans ces deux villes.

Human Rights Watch a également obtenu trois listes de civils qui auraient été tués à Chenna entre le 31 août et le 4 septembre, et contenant au total 74 noms. En plus des exécutions sommaires, il est possible que des civils aient été tués au cours des combats lors de tirs croisés ou du recours à des armes lourdes. Toutefois, Human Rights Watch n'a pas été en mesure de déterminer combien de personnes ont été tuées de cette manière.

Un homme de 70 ans a affirmé que deux combattants tigréens avaient tué son fils, 23 ans, et son neveu, 24 ans, chez lui dans le quartier d'Agosh-Mado à Chenna le 2 septembre. Il a apporté ce témoignage : « Vers midi, deux combattants tigréens sont arrivés… Ils ont demandé de voir nos cartes d'identité, et nous ont accusés d'être des membres des forces de défense locales. Puis ils ont attaché les mains de mon fils et de mon neveu dans le dos, les ont fait sortir […] et les ont abattus. Puis ils se sont tournés vers moi, et je les ai suppliés de ne pas me tuer. Alors ils sont repartis. »

Le 4 décembre, Human Rights Watch a envoyé aux autorités du TPLF un résumé des conclusions de ses recherches, afin de recueillir leurs commentaires, mais n'a reçu aucune réponse.

Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU devrait établir de toute urgence un mécanisme international indépendant pour enquêter sur les abus commis dans le conflit du Tigré, qui s'est étendu aux régions voisines d'Amhara et d'Afar. Cette enquête devrait porter sur les allégations d'exécutions sommaires et d'autres violations graves des lois de la guerre par les forces tigréennes.

En outre, le Conseil de sécurité de l'ONU devrait prendre d'urgence des mesures concrètes, notamment des sanctions ciblées et un embargo sur les ventes d’armes, à l’encontre de toutes les parties belligérantes en Éthiopie qui auraient commis des violations, et aider ainsi à empêcher de nouveaux abus.

Communiqué plus détaillé en anglais : en ligne ici.

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