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Égypte : Urgence d’une enquête indépendante sur les allégations de torture

La déclaration du Procureur général niant les abus permet aux responsables d’éviter de rendre des comptes devant la justice

Des policiers égyptiens montent la garde devant l’École nationale de police au Caire. © 2015 AP Photo/Amr Nabil

(Beyrouth, le 14 février 2019) - L'incapacité des autorités  égyptiennes à mettre fin aux actes de torture et aux mauvais traitements dans les lieux de détention – ou à enquêter de manière impartiale sur ces abus – renforce l’urgente nécessité d'une enquête internationale indépendante, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. En tant qu’État partie à la Convention des Nations Unies contre la torture, l'Égypte devrait autoriser le Rapporteur spécial sur la torture ainsi que d'autres experts des Nations Unies d’effectuer des missions dans le pays, notamment en visitant des lieux de détention.

Le 30 janvier 2019, le Bureau du Procureur général a déclaré qu'un représentant du parquet au Caire avait supervisé une enquête sur plusieurs cas d'abus et de torture documentés par Human Rights Watch en 2017, mais avait conclu qu’il s’agissait de « fausses allégations ».

« La déclaration du Procureur général emploie la formule habituelle des autorités égyptiennes consistant à nier les abus, à ignorer la souffrance des victimes et à entraver la justice », a déclaré Michael Page, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Des procureurs qui manquent d’indépendance ou qui parfois dissimulent des abus ne sont pas en mesure de mener des enquêtes crédibles et impartiales. »

En septembre 2017, Human Rights Watch a publié un rapport sur une vingtaine de cas de torture entre 2014 et 2016. Human Rights Watch a conclu que sous le gouvernement du président Abdel Fattah al-Sissi, les forces de police et l’Agence nationale de sécurité nationale – qui dépend du ministère de l'Intérieur – ont été impliquées de manière systématique dans de nombreux cas de disparitions forcées et de torture qui pourraient constituer des crimes contre l’humanité.

La torture est pratiquée dans des postes de police et dans des centres de détention non officiels gérés par les agences de sécurité. Les détenus sont particulièrement vulnérables lorsque leurs avocats et leurs proches sont privés de toute information sur leur lieu de détention. Ils risquent de subir des passages à tabac, des positions de stress, des décharges électriques et parfois des menaces de viol.

La torture est endémique en Egypte depuis des décennies. Depuis le coup d’État militaire de juillet 2013 ayant mené à la destitution du président Mohamed Morsi, les autorités ont encore accru la répression, interpellant des dizaines de milliers d'opposants présumés et procédant à de nombreuses arrestations arbitraires. Des organisations locales et internationales de défense des droits humains ont documenté des centaines de cas de disparitions forcées et de torture sous la présidence de Sissi. Les forces de sécurité ont tué des centaines de manifestants pacifiques et sont également suspectées  d’exécutions extrajudiciaires de détenus.

L’Égypte, élue à la présidence de l’Union africaine en 2019, devrait permettre à des représentants de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) – notamment les membres du Comité pour la prévention de la torture en Afrique, ainsi que le Rapporteur spécial sur les prisons, les conditions de détention et l’action policière en Afrique – d’effectuer des missions dans le pays.  

Dans son rapport annuel de 2017 (ang fra), le Comité contre la torture a déclaré qu'en Égypte les auteurs d'actes de torture « jouissent d’une impunité quasi-totale ». Selon le rapport, cette impunité est facilitée par « l’absence d’un service d’enquête indépendant sur les plaintes pour torture » et par « l’absence d’une surveillance indépendante et régulière des lieux de détention », parmi d’autres facteurs.

L’Égypte devrait autoriser des représentants des Nations Unies et de l’UA – notamment les trois Rapporteurs spéciaux de l’ONU chargés respectivement des questions de torture, de détentions arbitraires et de disparitions forcées – à mener des missions dans le pays. L’Égypte devrait aussi modifier certaines lois afin de s’acquitter de ses obligations juridiques internationales, conformément aux « Lignes directrices et mesures d’interdiction et de prévention de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en Afrique », émises par la CADHP.

Communiqué complet en anglais :

www.hrw.org/news/2019/02/14/egypt-set-independent-torture-inquiry

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