(Bangkok) – Narendra Modi, Premier ministre de l’Inde, et son parti nationaliste hindou, le Bharatiya Janata Party (BJP), sont revenus au pouvoir pour un troisième mandat en juin 2024, à l'issue d'une campagne électorale qui a incité à la discrimination, à l’hostilité et à la violence contre les musulmans et d’autres minorités, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui dans son Rapport mondial 2025. Le gouvernement s’est de plus en plus impliqué dans la tentative d’étouffer la dissidence au-delà des frontières de l’Inde, notamment en annulant les visas de ses détracteurs et en ciblant les dirigeants séparatistes pour les assassiner à l’étranger.
Dans la 35e édition de son Rapport mondial, qui comprend 546 pages, Human Rights Watch analyse les pratiques relatives aux droits humains dans près de cent pays. Dans une grande partie du monde, écrit la directrice exécutive Tirana Hassan dans son essai introductif, les gouvernements ont réprimé, arrêté et emprisonné à tort des opposants politiques, des activistes et des journalistes. Des groupes armés et des forces étatiques ont illégalement tué des civils, forcé beaucoup d’entre eux à quitter leur foyer et les ont empêchés d’accéder à l’aide humanitaire. Dans de nombreux cas parmi plus de 70 élections nationales tenues en 2024, des dirigeants autoritaires ont gagné du terrain sur la base de rhétoriques et de programmes politiques discriminatoires.
« Le Premier ministre Modi aime se vanter des traditions démocratiques de l’Inde, mais il lui est de plus en plus difficile de cacher la répression croissante de son gouvernement à l’encontre des minorités et des voix critiques », a déclaré Meenakshi Ganguly, directrice adjointe de la division Asie à Human Rights Watch. « Une décennie de politiques discriminatoires et de répression a affaibli l’État de droit et restreint les droits économiques et sociaux des communautés marginalisées. »
- Les violences ethniques dans l'État de Manipur, dans le nord-est du pays, ont fait plus de 250 morts et plus de 60 000 déplacés depuis mai 2023. En septembre 2024, des affrontements entre des groupes armés de la communauté majoritairement chrétienne Kuki-Zo et de la communauté majoritairement hindoue Meitei auraient fait au moins 11 morts.
- Les autorités indiennes ont eu recours à des lois abusives sur le financement étranger, telles que la Loi sur la réglementation des contributions étrangères et la Loi antiterroriste sur la prévention des activités illégales, à des enquêtes financières falsifiées et à d'autres moyens pour attaquer illégalement des organisations et activistes de la société civile.
- Le viol et le meurtre d’une médecin de 31 ans dans un hôpital public à Calcutta au mois d’août ont suscité de nombreuses protestations, soulignant que les femmes indiennes demeurent exposées à la violence et à d’autres formes d’abus sur le lieu de travail, et se heurtent à d’importants obstacles pour obtenir justice pour les violences sexuelles.
- Le Canada, les États-Unis et le Pakistan ont accusé les agences de renseignement indiennes de cibler des suspects de terrorisme et des dirigeants séparatistes en vue de les assassiner. En octobre, la police nationale canadienne a allégué que des agents de l’État indien s’étaient livrés à des activités criminelles sur le sol canadien. Le gouvernement indien a révoqué le régime de visa privilégié de journalistes étrangers travaillant en Inde et de citoyens étrangers d'origine indienne qui critiquaient le gouvernement.
Les autorités indiennes devraient mettre un terme aux politiques discriminatoires à l’encontre des musulmans, des chrétiens et des autres minorités religieuses, et garantir la justice pour les personnes affectées, a déclaré Human Rights Watch. Elles devraient cesser de harceler les groupes de la société civile, enquêter sur les violences commises par les groupes ethniques et les forces de sécurité au Manipur, et œuvrer avec les dirigeants communautaires pour rétablir la sécurité.