La semaine dernière, la Cour Pénale Spéciale (CPS) en République centrafricaine a arrêté et inculpé un ancien dirigeant de la Séléka, Abakar Zakaria Hamid, connu sous le nom de « SG », pour des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre présumés en lien avec une attaque violente perpétrée il y a 10 ans contre une église et un camp de déplacés dans la capitale du pays, Bangui. Sept autres personnes ont déjà été arrêtées et inculpées dans cette affaire.
L’attaque du 28 mai 2014 contre l’église Notre-Dame dans le quartier de Fatima à Bangui est emblématique de l’impunité qui a favorisé la commission de crimes atroces par des groupes armés rivaux pendant plus d’une décennie en République centrafricaine.
À partir de décembre 2013, les tueries se sont intensifiées à Bangui, lorsque des milices anti-balaka en provenance de tout le pays se sont dirigées vers la capitale. Les groupes anti-balaka se sont formés en réaction à la prise de contrôle de la République centrafricaine par la Séléka, un groupe armé majoritairement musulman dont la violence avait ravagé le pays. Les anti-balaka ont rapidement commencé à prendre pour cible les civils musulmans qu’ils associaient à la coalition Séléka. Cette dernière ripostait par des attaques encore plus violentes.
Je me souviens encore du jour où j’ai reçu l’appel d’un habitant de Fatima au moment de l’attaque contre l’église. Il était en panique et me disait que des milliers de personnes étaient en train de fuir le quartier. Peu après, je me suis rendu à l’église et j’ai découvert que 17 personnes avaient été tuées dans le camp. Des combattants liés à « SG » et la Séléka étaient soupçonnés d’avoir commis ces crimes. Cependant, le nombre de morts était probablement plus élevé, étant donné que certaines victimes avaient été enterrées immédiatement. Les survivants m’ont montré l’endroit où Paul Emile Nzale, un prêtre bien-aimé, avait été abattu.
L’attaque contre Fatima a été la première d’une longue série d’attaques atroces contre des camps de déplacés internes dans le pays. L’église Notre-Dame, qui a continué à servir de camp de déplacés, a été attaquée de nouveau en 2018. Lors de cette attaque, au moins 16 personnes ont été tuées et de nombreuses autres blessées.
Plus tôt cette année, à la veille du dixième anniversaire de l’attaque, je me suis entretenu avec un membre de la famille d’une des victimes, qui m’a dit qu’il attendait toujours que justice soit rendue.
Instruire cette affaire, mener un procès équitable et donner aux familles des victimes accès à la justice, permettraient à la CPS de jouer un rôle essentiel dans la lutte contre l’impunité généralisée et persistante en République centrafricaine.