Deux anciens dirigeants accusés de graves violations sont récemment rentrés en République centrafricaine.
Vendredi dernier, deux semaines seulement après le retour au pays de l’ancien président de la République centrafricaine François Bozizé, l’ancien rebelle et président autoproclamé, Michel Djotodia, est lui aussi rentré dans la capitale, Bangui.
Sous la houlette de Djotodia, la Séléka, une coalition rebelle majoritairement musulmane basée dans le nord du pays, a évincé Bozizé en 2013. La Séléka s’est ensuite lancée dans une série de pillages et de tueries dans la capitale, ciblant spécifiquement les zones où vivaient des personnes proches du gouvernement de Bozizé.
Nous avons documenté comment, le week-end du 13 avril 2013, les forces de la Séléka sont entrées à bord de pickups dans le quartier de Boy-Rabe pour tirer sans discernement sur des civils et les faire fuir, avant que des hommes de la Séléka ne pillent leurs maisons. Des dizaines de personnes qui tentaient de fuir ou de plaider auprès de la Séléka ont été tuées.
La situation était encore pire en dehors de Bangui. Les combattants de Djotodia ont tué des civils qui fuyaient leurs maisons, détruit des villages, pillé des écoles et des centres médicaux et volé des stocks de céréales. Cachées dans la brousse, les populations ont souffert de maladies, de faim et d’exposition aux éléments. Cette année-là, nous avons traversé des villages et des villes incendiés et croisé sur notre route des civils affamés qui vivaient et mouraient dans la brousse.
Les preuves des crimes commis par la Séléka, que nous avons rapportées à Djotodia et à ses principaux commandants, ont été accueillies par des haussements d’épaules. Les conséquences de leurs actions sur les civils ne semblaient pas les préoccuper. Pendant la brève période de Djotodia à la présidence, le pays a été plongé dans un chaos dont les répercussions continuent de se faire sentir aujourd’hui. Lorsqu’il a fui en 2014, Djotodia a laissé derrière lui un pays en ruine.
Djotodia serait resté en contact étroit avec certaines factions de la Séléka. Son retour, comme celui de Bozizé, démontre que les responsables de crimes graves en République centrafricaine se sentent, pour l’instant au moins, intouchables. Mais leur présence pourrait donner au gouvernement et à ses partenaires une occasion de rompre avec le passé. Le mandat de la Cour pénale spéciale créée en juin 2015 couvre les crimes commis par la Séléka et la Cour pénale internationale mène sa propre enquête. Poursuivre les crimes présumés de la Séléka et obliger les dirigeants comme Djotodia à rendre des comptes permettrait de mettre fin à l’impunité qui a contribué à de tant de violence et de morts ces sept dernières années.
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Dans la presse
Tweets
#RCA : L'ex-président Michel Djotodia est revenu dans le pays, peu après le retour de son prédécesseur François Bozizé. La CPS devrait examiner les allégations de graves abus dans lesquels les deux hommes seraient impliqués, selon @LewisMudge @hrw. https://t.co/5aHCjyB4Pl
— HRW en français (@hrw_fr) January 15, 2020
En #Centrafrique #RCA, le retour de deux ex-présidents pourtant suspectés de #crimesdeguerre, voire de crimes contre l’humanité est préoccupant quant au «cycle de l’impunité» dans ce pays, selon @LewisMudge @hrw. https://t.co/IWzkjzaX5d via @LeMonde_Afrique #AFP @FL0_orent
— HRW en français (@hrw_fr) January 16, 2020