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Cambodge : L’étau de la répression s’est resserré après la mascarade électorale

Les donateurs doivent agir fermement pour protéger les droits et la démocratie

Des membres du Parti du sauvetage national du Cambodge – principal parti d’opposition, dissous en 2017 — lors de leur transport dans un fourgon de police vers le siège de la Cour d'appel de Phnom Penh, pour une audience tenue le 10 mai 2018. © 2018 Samrang Pring / Reuters

(New York) – Le Premier ministre du Cambodge, Hun Sen, s’est servi de la répression des droits et d’élections factices pour resserrer son emprise sur le pouvoir et consolider un gouvernement de parti unique, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui dans son Rapport mondial 2019.

En 2018, le gouvernement du Parti du peuple cambodgien (CPP) a intensifié sa répression contre l’opposition politique, les médias indépendants, les défenseurs locaux des droits humains, les leaders syndicaux et d’autres activistes. Les autorités se sont servies du système judiciaire politisé et corrompu du pays comme d’une arme politique afin de poursuivre les défenseurs des droits humains et les voix dissidentes.

« En 2018, le Premier ministre Hun Sen a anéanti tout semblant de démocratie au Cambodge, en harcelant ses détracteurs, en dissolvant le principal parti d’opposition et en tenant des élections destinées à assurer sa dictature », a déclaré Brad Adams, directeur de la division Asie de Human Rights Watch. « Hun Sen a étouffé les promesses des Accord de paix de Paris de 1991, qui voulaient créer un Cambodge démocratique et respectueux des droits, pendant que les pays qui avaient promis d’appuyer la mise en œuvre de ces accords détournaient le regard pour la plupart. »

Rapport mondial (ANG) complet >> Rapport mondial (FRA) abrégé >>
Dans la 29e édition de son Rapport mondial annuel (version intégrale en anglais 674 pages – version abrégée en français 233 pages), Human Rights Watch examine les pratiques en matière de droits humains dans plus de 100 pays au cours de l’année 2018. Kenneth Roth, le directeur exécutif, affirme dans son essai introductif que les populistes qui répandent la haine et l'intolérance dans de nombreux pays sont confrontés à une résistance croissante. De nouvelles alliances de gouvernements respectueux des droits, souvent inspirées et rejointes par des organisations de la société civile et par le public, sont en train d’accroître le prix à payer pour les abus commis par des dirigeants autocratiques. Les succès de leurs démarches illustrent la possibilité de défendre les droits humains - voire la responsabilité de le faire – y compris aux heures les plus sombres.

Le 29 juillet, il n’y a eu aucune véritable élection nationale, puisque la Cour suprême, contrôlée par le CPP, avait dissous le principal parti d’opposition, le Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), et infligé à 118 responsables du parti l’interdiction d’exercer la politique pendant cinq ans. Les 125 sièges de l’Assemblée nationale sont désormais tous occupés par des membres du CPP. Le gouvernement a fait emprisonner pendant un peu plus d'un an le président du parti d’opposition, Kem Sokha, sur la base d’accusations de trahison montées de toutes pièces, avant de le placer en résidence surveillée, assortie de nombreuses restrictions. Le précédent président du CNRP, Sam Rainsy, demeure en exil après avoir été condamné à l’issue d’un procès à motif politique, et beaucoup d’autres membres du parti se sont enfuis à l’étranger pour échapper à des poursuites judiciaires arbitraires.

La liberté des médias s’est effondrée en 2018. Les actions entreprises par le gouvernement pour éliminer les journaux, radios et chaînes de télé indépendantes ont atteint leur paroxysme avec la vente forcée du Phnom Penh Post à un Malaisien lié à Hun Sen et les poursuites judiciaires contre deux journalistes de Radio Free Asia sur la base d’accusations fabriquées. Les autorités ont également resserré la surveillance des médias sociaux et mis en examen des personnes ordinaires pour leurs publications Facebook critiquant le gouvernement.

Le gouvernement a encore restreint la liberté d’expression et le droit de réunion pacifique en amendant la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales, déjà répressive, ainsi que la loi sur les syndicats, avec notamment une clause de lèse-majesté (insulte à la monarchie) et des amendements constitutionnels.

Grâce à des sanctions permises par la loi Magnitski, les États-Unis ont fait pression en faveur d’améliorations du respect des droits humains, tandis que l’Union européenne a officiellement lancé une procédure de suspension des préférences commerciales du Cambodge dans le cadre de « Tout sauf les armes ». Dans le même temps, la Chine a investi des milliards de dollars au Cambodge sans se soucier le moins de monde des droits humains.

« Aussi bien les États-Unis que l’UE ont montré l’exemple lors des élections de juillet en retirant des financements, en refusant d’envoyer leurs observateurs et finalement en infligeant des sanctions motivées par la situation des droits humains », a conclu Brad Adams. « D’autres États donateurs devraient leur emboîter le pas et tenir Hun Sen responsable des abus de son gouvernement. »

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Tweet (mars 2019)
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