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UE : La migration par voie maritime exige une responsabilité partagée

Des secours et des ports sûrs sont nécessaires alors que les autorités libyennes ne parviennent pas à protéger les migrants ni à garantir leurs droits

Sauvetage d’un homme en mer Méditerranée par un membre de l'ONG Proactiva Open Arms, à environ 20 milles nautiques au nord de la Libye, le 3 octobre 2016. © 2016 Getty Images

(Milan, le 4 juillet 2017) – Les mesures visant à lutter contre la migration par voie maritime dans la Méditerranée centrale  –  proposées le 3 juillet 2017 par le commissaire de l'Union européenne à l'immigration et par les ministres de l'Intérieur de l'Italie, de la France et de l'Allemagne – sont encore loin de ce qui est nécessaire, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Les ministres de l’Intérieur de l’UE, réunis pour un sommet informel les 6 et 7 juillet, devraient explorer des plans plus ambitieux en vue d’assurer un partage plus équitable des responsabilités pour les vies et les droits des personnes qui quittent la Libye par voie maritime, notamment des plans de débarquement et des projets de réinstallation.

« Ces propositions sur la migration par voie maritime sont loin d'être une véritable feuille de route pour le partage des responsabilités.  Ce n'est pas bon pour l'UE, ce n'est pas bon pour l'Italie, et c'est terrible pour les personnes qui fuient la Libye », a déclaré Judith Sunderland, Directrice adjointe de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « Les objectifs à long terme, pour louables qu’ils soient, ne peuvent pas cacher la dure réalité actuelle : avec des conditions abusives, le manque de système d'asile et les conflits, les autorités libyennes sont dans l’incapacité de garantir efficacement les droits et de protéger les personnes. »

Les mesures présentées hier approuvent pour la plupart l'intensification des plans actuels en ce qui concerne le renforcement des capacités du gouvernement d'entente nationale (Government of National Accord, GNA) pour contrôler les frontières de la Libye, l'augmentation des retours depuis les pays de l'UE, et la relocalisation en dehors de l'Italie de certains demandeurs d'asile vers d'autres pays de l'UE. Le GNA, soutenu par l’ONU et basé à Tripoli, est l’une des trois autorités rivales qui se disputent la légitimité internationale et le contrôle du territoire.

La déclaration commune arrive après que le gouvernement italien a demandé à d'autres pays de l'UE d’accepter le débarquement des migrants et des demandeurs d'asile secourus en Méditerranée, et que le ministre de l’Intérieur de l’Italie a déclaré qu’il envisageait d’empêcher le débarquement en Italie de migrants et de demandeurs d'asile secourus par des embarcations n’arborant pas le drapeau italien et ne faisant pas partie des opérations navales internationales. L'Italie effectue ou coordonne pratiquement toutes les opérations de sauvetage en Méditerranée, et environ 85 000 personnes ont été débarquées en Italie depuis janvier. Plus de 2 000 personnes sont mortes en mer cette année.

Un plan bien coordonné entre les pays de l'UE sur la mer Méditerranée  –  notamment Malte, la France et l'Espagne  –  visant à partager la responsabilité du débarquement vaut la peine d'être exploré comme moyen d'alléger la pression sur le système d'accueil de l'Italie, selon Human Rights Watch.

Au lieu de cela, la déclaration appelle à accélérer le plan de relocalisation de l'UE existant, la France et l'Allemagne s'engageant à accroître leurs efforts. Le plan de relocalisation a été conçu de manière étroite et mal mis en oeuvre, et même dans le meilleur des cas, il ne bénéficiera qu’à une fraction des personnes qui parviennent jusqu’aux rives italiennes, a déclaré Human Rights Watch.

La France, l'Allemagne et d'autres États membres de l'UE devraient adopter des critères d'éligibilité plus larges afin de permettre à plus de personnes d'accéder au plan de réinstallation, et veiller à ce que les demandes de relocalisation d'enfants non accompagnés et de membres de la famille dans les pays de l'UE soient rapidement traitées.

La déclaration comprend également une proposition de code de conduite pour les organisations non gouvernementales qui effectuent des secours en mer.
Une meilleure coordination, des codes de conduite et les meilleures pratiques sont importants pour tous les acteurs impliqués dans la recherche et le sauvetage en Méditerranée. Les gouvernements de l'UE devraient également reconnaître que les organisations non gouvernementales effectuent d'importants efforts de sauvetage en Méditerranée, souvent dans les zones où ne sont pas présents les navires de l'UE opérant dans le cadre de Frontex et de l'opération de l'UE contre les trafiquants, EUNAVFOR MED, a déclaré Human Rights Watch.

Tous nouveaux arrangements ou instructions sur la réponse aux situations de détresse en mer devraient garantir que les navires de l'UE ne soient pas tenus de céder aux forces libyennes les opérations de sauvetage dans les eaux internationales, et devraient s’assurer que les navires se trouvant à proximité remplissent leurs obligations de sauvetage dans les eaux territoriales libyennes, dans des situations posant la menace d'une perte de vie imminente.

Les migrants et les demandeurs d'asile en Libye sont confrontés à une détention arbitraire dans des conditions épouvantables et à un risque bien documenté d'abus graves, y compris le travail forcé, la torture et la violence sexuelle. Les forces fragmentées de la Garde côtière libyenne n’ont pas les capacités d’exécuter en toute sécurité des obligations de recherche et de sauvetage. Pour autant que Human Rights Watch le sache, EUNAVFOR MED et les États membres et les institutions compétentes de l'UE n'ont pas encore mis en place de mécanisme de suivi du programme de formation pour les forces de la Garde côtière libyenne, ni d’efforts visant à améliorer les conditions dans les centres de détention.

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