(Washington) – Le gouvernement gambien commet de graves violations des droits humains à l'encontre de personnes considérées comme des détracteurs et des opposants politiques, perpétuant un climat de terreur et de répression dans le pays, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui.
Arbitrary Arrests, Torture, and Killings
Ce rapport de 81 pages, intitulé State of Fear: Arbitrary Arrests, Torture, and Killings (« État de terreur : Arrestations arbitraires, torture et meurtres »), décrit la situation en matière de droits humains en Gambie depuis que le président Yahya Jammeh a pris le pouvoir en 1994 et a réprimé impitoyablement toute forme de contestation. Les forces de sécurité de l'État et des groupes paramilitaires semi-clandestins commettent des exécutions extrajudiciaires, des arrestations et des détentions arbitraires, et font disparaître des personnes de force, poussant des centaines de Gambiens à fuir ce petit pays, connu surtout à l’étranger en tant que destination touristique. La plupart des abus documentés dans le rapport ont été commis entre 2013 et 2015.
« Si on regarde au-delà des magnifiques plages de la Gambie, on constate que la population vit dans un climat de peur alimenté par l’injustice et par l’impunité dont bénéficient les auteurs d'abus », a déclaré Felicity Thompson, chercheuse sur l'Afrique de l'Ouest à Human Rights Watch et auteure du rapport. « Le gouvernement devrait d'urgence changer de cap en commençant à respecter les droits humains fondamentaux et en poursuivant en justice les individus qui les violent. »
Le rapport est basé sur des entretiens approfondis avec plus de 35 victimes et témoins de violations des droits humains, dont des journalistes, des défenseurs des droits, des dirigeants de mouvements étudiants, des membres de l'opposition politique, des autorités religieuses et des membres des communautés lesbienne, gay, bisexuelle et transgenre (LGBT). Human Rights Watch a également interrogé de nombreux anciens membres des forces de sécurité et de groupes paramilitaires. Beaucoup de ces personnes étaient convaincues d'être surveillées par les services de renseignement et leur peur était perceptible quand elles ont parlé à Human Rights Watch en prenant de grands risques pour leur sécurité personnelle.
Les forces de sécurité gambiennes arrêtent fréquemment des personnes sans motif valable ni chef d'accusation, les maintenant souvent en détention au secret pendant des mois et même des années. Les personnes détenues pour des motifs politiques, notamment les partisans présumés de l'opposition; les détracteurs du président ou du gouvernement; et les personnes impliquées dans des tentatives de coup d'État, sont souvent soumises à la torture et à d'autres mauvais traitements. Récemment, après une tentative de coup en décembre 2014, des dizaines de personnes ont fait l'objet de disparitions forcées et auraient été torturées.
L'Agence nationale de renseignement de Gambie (National Intelligence Agency, NIA), ainsi qu’un groupe paramilitaire dont les membres sont surnommés les « Jungulers » et des unités armées de la Force de police de Gambie ont été fréquemment impliqués dans les abus, a souligné Human Rights Watch. Un ancien Junguler a déclaré à Human Rights Watch: « Quand [Jammeh] veut vous torturer, il fait appel aux équipes de Jungulers pour le faire. Ou s'il veut vous arrêter secrètement, il utilise cette équipe de Jungulers. Ou quand il veut vous tuer sans que personne ne le sache, les Jungulers viendront vous tuer et se débarrasseront de votre cadavre. »
Plusieurs victimes ont décrit des méthodes de torture incluant de rudes passages à tabac, des viols, des simulacres d'étouffement avec des sacs en plastiques, des électrochocs sur certaines parties du corps notamment les parties génitales, et des déversements sur la peau de sacs en plastique fondus. Les victimes ont également décrit des sévices psychologiques tels que de longues périodes de détention au secret, des simulacres d'exécution et de multiples menaces de torture et de mort. La plupart des victimes et des témoins qui ont parlé à Human Rights Watch ont désigné les Jungulers comme étant les responsables des actes de torture, mais beaucoup ont affirmé que des responsables des services de renseignement étaient présents ou complices de ces abus.
L'oppression des médias par le gouvernement a été particulièrement dure, manifestement afin de réduire les voix critiques au silence et d'empêcher que des informations négatives sur le pays ne parviennent au monde extérieur. Des dizaines de journalistes ont fui la Gambie au cours des deux dernières décennies. Dans le cas le plus récent, le directeur de la station de radio indépendante Taranga FM, Alagie Abdoulie Ceesay, a été arrêté en juillet. Il a été détenu au secret pendant 11 jours sans chef d'accusation au siège de la NIA et a été brutalement torturé. Quelques jours après sa remise en liberté, Alagie Ceesay a été de nouveau arrêté, inculpé de plusieurs chefs d'accusation de sédition et s'est vu refuser une libération sous caution. Il est toujours en détention.
Alagie Ceesay a été « frappé jusqu'à ce qu'il perde connaissance et a été à plusieurs reprises forcé à boire de l'huile de cuisine comme si c'était de l'eau », a déclaré à Human Rights Watch une personne qui l'a vu après sa libération du siège de la NIA. « Nous l'avons vu, le visage tuméfié et le dos couvert d'ecchymoses et de blessures. Il ne pouvait plus marcher normalement à cause des coups reçus. »
Les Gambiens qui s'identifient comme LGBT ou qui sont perçus comme tels sont régulièrement la cible de discours au vitriol du président Jammeh, de nouvelles lois discriminatoires, de détentions arbitraires et de mauvais traitements. En mai dernier, Yahya Jammeh a déclaré lors d'un rassemblement politique qu'il « trancherait la gorge » des Gambiens gays – dernier en date d'une longue série de discours haineux prononcés par lui à l'encontre des homosexuels. Après l'adoption en octobre 2014 d'une loi sur « l'homosexualité aggravée » prévoyant l'imposition d'une peine de prison à perpétuité pour toute une série de nouvelles infractions, des dizaines de personnes LGBT ont fui le pays.
Un homme qui a fui la Gambie en 2015 après avoir été acquitté de l'inculpation d'avoir commis des « actes contre nature » a affirmé qu'il avait été torturé à plusieurs reprises lors de sa détention par la NIA. « J'ai été frappé à coups de gourdin et à coups de poing », a-t-il dit à Human Rights Watch. « Ils m'ont menacé de mort si je ne leur donnais pas les noms d'autres homosexuels en Gambie. »
Malgré les violations systématiques des droits humains commises en Gambie, les autorités n'ont mené que peu d'enquêtes sur les allégations de torture ou de mauvais traitements de la part de fonctionnaires de l'État, et aucun responsable gouvernemental ou membre des services de sécurité ou des groupes paramilitaires n'a été amené à rendre des comptes pour de graves violations.
En juillet, à l'occasion de l'anniversaire du coup d'État de 1994 par lequel il est arrivé au pouvoir, le président Jammeh a gracié et remis en liberté plus de 200 détenus, dont des prisonniers politiques et des membres des familles de personnes accusées d'avoir participé à la tentative de coup de 2014. La libération de prisonniers détenus illégalement ou arbitrairement constitue un geste humanitaire important mais de nombreux autres Gambiens demeurent injustement emprisonnés.
Les bailleurs de fonds internationaux et les autres gouvernements devraient condamner systématiquement et publiquement les violations des droits humains en Gambie, évoquer leurs préoccupations avec les responsables gouvernementaux gambiens à tous les niveaux et insister pour que les membres des forces de sécurité de l'État qui commettent des abus soient amenés à rendre des comptes, a affirmé Human Rights Watch.
« Il faut espérer que la récente remise en liberté de prisonniers politiques soit le prélude à d'autres mesures positives de la part du gouvernement gambien, notamment au démantèlement de la redoutable unité des Jungulers, à la libération des autres prisonniers illégalement détenus et à l'engagement de poursuites judiciaires à l'encontre des auteurs de violations des droits humains au sein des forces de sécurité », a affirmé Felicity Thompson. « Tant que les forces de sécurité et les groupes paramilitaires agiront en toute impunité, les Gambiens souffriront. »
Les forces de sécurité gambiennes arrêtent fréquemment des personnes sans motif valable ni chef d'accusation, les maintenant souvent en détention au secret pendant des mois et même des années. Les personnes détenues pour des motifs politiques, notamment les partisans présumés de l'opposition; les détracteurs du président ou du gouvernement; et les personnes impliquées dans des tentatives de coup d'État, sont souvent soumises à la torture et à d'autres mauvais traitements. Récemment, après une tentative de coup en décembre 2014, des dizaines de personnes ont fait l'objet de disparitions forcées et auraient été torturées.
L'Agence nationale de renseignement de Gambie (National Intelligence Agency, NIA), ainsi qu’un groupe paramilitaire dont les membres sont surnommés les « Jungulers » et des unités armées de la Force de police de Gambie ont été fréquemment impliqués dans les abus, a souligné Human Rights Watch. Un ancien Junguler a déclaré à Human Rights Watch: « Quand [Jammeh] veut vous torturer, il fait appel aux équipes de Jungulers pour le faire. Ou s'il veut vous arrêter secrètement, il utilise cette équipe de Jungulers. Ou quand il veut vous tuer sans que personne ne le sache, les Jungulers viendront vous tuer et se débarrasseront de votre cadavre. »
Plusieurs victimes ont décrit des méthodes de torture incluant de rudes passages à tabac, des viols, des simulacres d'étouffement avec des sacs en plastiques, des électrochocs sur certaines parties du corps notamment les parties génitales, et des déversements sur la peau de sacs en plastique fondus. Les victimes ont également décrit des sévices psychologiques tels que de longues périodes de détention au secret, des simulacres d'exécution et de multiples menaces de torture et de mort. La plupart des victimes et des témoins qui ont parlé à Human Rights Watch ont désigné les Jungulers comme étant les responsables des actes de torture, mais beaucoup ont affirmé que des responsables des services de renseignement étaient présents ou complices de ces abus.
L'oppression des médias par le gouvernement a été particulièrement dure, manifestement afin de réduire les voix critiques au silence et d'empêcher que des informations négatives sur le pays ne parviennent au monde extérieur. Des dizaines de journalistes ont fui la Gambie au cours des deux dernières décennies. Dans le cas le plus récent, le directeur de la station de radio indépendante Taranga FM, Alagie Abdoulie Ceesay, a été arrêté en juillet. Il a été détenu au secret pendant 11 jours sans chef d'accusation au siège de la NIA et a été brutalement torturé. Quelques jours après sa remise en liberté, Alagie Ceesay a été de nouveau arrêté, inculpé de plusieurs chefs d'accusation de sédition et s'est vu refuser une libération sous caution. Il est toujours en détention.
Alagie Ceesay a été « frappé jusqu'à ce qu'il perde connaissance et a été à plusieurs reprises forcé à boire de l'huile de cuisine comme si c'était de l'eau », a déclaré à Human Rights Watch une personne qui l'a vu après sa libération du siège de la NIA. « Nous l'avons vu, le visage tuméfié et le dos couvert d'ecchymoses et de blessures. Il ne pouvait plus marcher normalement à cause des coups reçus. »
Les Gambiens qui s'identifient comme LGBT ou qui sont perçus comme tels sont régulièrement la cible de discours au vitriol du président Jammeh, de nouvelles lois discriminatoires, de détentions arbitraires et de mauvais traitements. En mai dernier, Yahya Jammeh a déclaré lors d'un rassemblement politique qu'il « trancherait la gorge » des Gambiens gays – dernier en date d'une longue série de discours haineux prononcés par lui à l'encontre des homosexuels. Après l'adoption en octobre 2014 d'une loi sur « l'homosexualité aggravée » prévoyant l'imposition d'une peine de prison à perpétuité pour toute une série de nouvelles infractions, des dizaines de personnes LGBT ont fui le pays.
Un homme qui a fui la Gambie en 2015 après avoir été acquitté de l'inculpation d'avoir commis des « actes contre nature » a affirmé qu'il avait été torturé à plusieurs reprises lors de sa détention par la NIA. « J'ai été frappé à coups de gourdin et à coups de poing », a-t-il dit à Human Rights Watch. « Ils m'ont menacé de mort si je ne leur donnais pas les noms d'autres homosexuels en Gambie. »
Malgré les violations systématiques des droits humains commises en Gambie, les autorités n'ont mené que peu d'enquêtes sur les allégations de torture ou de mauvais traitements de la part de fonctionnaires de l'État, et aucun responsable gouvernemental ou membre des services de sécurité ou des groupes paramilitaires n'a été amené à rendre des comptes pour de graves violations.
En juillet, à l'occasion de l'anniversaire du coup d'État de 1994 par lequel il est arrivé au pouvoir, le président Jammeh a gracié et remis en liberté plus de 200 détenus, dont des prisonniers politiques et des membres des familles de personnes accusées d'avoir participé à la tentative de coup de 2014. La libération de prisonniers détenus illégalement ou arbitrairement constitue un geste humanitaire important mais de nombreux autres Gambiens demeurent injustement emprisonnés.
Les bailleurs de fonds internationaux et les autres gouvernements devraient condamner systématiquement et publiquement les violations des droits humains en Gambie, évoquer leurs préoccupations avec les responsables gouvernementaux gambiens à tous les niveaux et insister pour que les membres des forces de sécurité de l'État qui commettent des abus soient amenés à rendre des comptes, a affirmé Human Rights Watch.
« Il faut espérer que la récente remise en liberté de prisonniers politiques soit le prélude à d'autres mesures positives de la part du gouvernement gambien, notamment au démantèlement de la redoutable unité des Jungulers, à la libération des autres prisonniers illégalement détenus et à l'engagement de poursuites judiciaires à l'encontre des auteurs de violations des droits humains au sein des forces de sécurité », a affirmé Felicity Thompson. « Tant que les forces de sécurité et les groupes paramilitaires agiront en toute impunité, les Gambiens souffriront. »