Skip to main content

Kosovo : L’enquête de l’UE constitue un pas vers la justice

Cette enquête requiert un procureur expérimenté, une protection des témoins et un soutien politique

(Bruxelles, le 10 juin 2011) - La décision de l'Union européenne d'ouvrir une enquête criminelle spéciale sur les crimes qui auraient été perpétrés au Kosovo et en Albanie après la guerre au Kosovo doit être saluée comme une mesure favorable à la justice et à l'État de droit dans les Balkans, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Le succès de l'enquête dépendra de la nomination d'un procureur expérimenté, de la mise en place d'un programme efficace de réinstallation des témoins en dehors de la région, ainsi que du soutien total des États membres de l'UE et du gouvernement américain, a souligné Human Rights Watch.

« Cette enquête spéciale de l'UE nous fait progresser sur la voie de la justice pour les crimes graves commis après la guerre au Kosovo », a commenté Benjamin Ward, directeur adjoint de la division Europe et Asie centrale de Human Rights Watch. « Mais il faut un procureur principal expérimenté et influent pour mettre sur pied une équipe efficace, garantir la sécurité des témoins et s'assurer le soutien de gouvernements clés, dont celui des États-Unis. »

Désignée sous le nom de « task force » et dirigée par un procureur principal, l'enquête spéciale fera officiellement partie de la Mission « État de droit » menée par l'Union européenne au Kosovo (EULEX), mais elle sera basée dans des installations séparées à Bruxelles et à Pristina.

La task force est chargée d'analyser les allégations d'enlèvements, de disparitions, d'exécutions, de trafic d'organes et autres crimes graves. Elle examinera la coordination présumée de ces actes par des ex-commandants de l'Armée de libération du Kosovo et des dirigeants kosovars actuels, dont le Premier ministre Hashim Thaçi.

Les allégations ont été présentées dans un rapport du Conseil de l'Europe publié en décembre 2010 et élaboré par le sénateur suisse, Dick Marty.

Le Comité politique et de sécurité de l'Union européenne a approuvé la task force le 25 mai 2011, lui octroyant ainsi le soutien officiel unanime des 27 États membres de l'UE.

Compte tenu des relations étroites que la Maison-Blanche entretient avec les gouvernements kosovar et albanais, le soutien des États-Unis dans le cadre de l'enquête s'avère crucial, a relevé Human Rights Watch.

« En tant que principal partisan de l'intervention de l'OTAN en 1999 et par la suite de l'indépendance du Kosovo, les États-Unis sont tenus de promouvoir et de protéger l'État de droit au Kosovo », a fait remarquer Benjamin Ward. « Cela signifie que ce pays doit apporter un soutien total à une enquête rigoureuse sur toutes les allégations crédibles de crimes graves. »

Selon Human Rights Watch, un programme revu et corrigé de protection des témoins, incluant la possibilité de réinstaller les témoins en dehors du Kosovo, est essentiel au succès de l'enquête spéciale.

Des enquêtes antérieures sur la violence politique et le crime organisé au Kosovo ont été compromises par la réticence des témoins à se présenter pour déposer, par crainte de représailles à leur égard ou à l'égard de leurs familles. La réinstallation en dehors de la région se révèle souvent être le seul moyen de protéger les témoins, mais les gouvernements occidentaux se sont généralement montrés peu disposés à recourir à cette solution, en grande partie pour des motifs politiques nationaux, a expliqué Human Rights Watch.

« En fin de compte, cette enquête n'aboutira que si les gouvernements européens et américain s'engagent à accepter des témoins et les membres de leurs familles dont la sécurité exige une réinstallation », a ajouté Benjamin Ward.

Quatre cent soixante-dix personnes ont disparu après la fin de la guerre en 1999, alors que les troupes de l'OTAN étaient entrées au Kosovo. Parmi ces personnes, quatre-vingt-quinze sont d'origine albanaise ; les autres ne sont pas d'origine albanaise, mais principalement des Serbes.

« Cette enquête spéciale peut contribuer à tourner la page sur les horreurs de la guerre au Kosovo », a conclu Benjamin Ward. « Mais il faut absolument qu'elle bénéficie du soutien nécessaire pour mener à bien sa tâche. »

Your tax deductible gift can help stop human rights violations and save lives around the world.