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Sénégal : Le Parlement européen appelle à soutenir le procès de Hissène Habré

Le Sénégal devrait présenter un projet raisonnable pour le procès de l’ex-dictateur tchadien

(Bruxelles)- L’Union européenne (UE) devrait rapidement appliquer la résolution du Parlement européen qui appelle l’UE à soutenir le Sénégal dans la préparation du procès de Hissène Habré, l’ancien dictateur du Tchad, exilé à Dakar et accusé de crimes contre l’humanité, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Dans son rapport annuel adopté aujourd’hui sur les « Droits de l’homme dans le monde », le Parlement européen a invité l’Union européenne « à encourager et à appuyer le gouvernement du Sénégal dans ses efforts en vue de préparer un procès rapide et équitable d'Hissène Habré, afin qu'il réponde devant la justice d'accusations de violations massives des droits de l'Homme ».

Habré, qui vit au Sénégal, est accusé de milliers d’assassinats politiques, de torture systématique et « d’épuration ethnique », crimes perpétrés durant son régime de 1982 à 1990. En juillet dernier, le Sénégal a accepté la demande de l’Union africaine de juger Habré.

« La décision du Sénégal d’engager des poursuites contre Habré marque un tournant historique : pour la première fois un pays en voie de développement a accepté d’instruire une enquête sur des crimes commis à grande échelle par un dirigeant étranger », a déclaré Reed Brody de Human Rights Watch et qui travaille avec les victimes du régime Habré. « Les défis sont considérables. Si le gouvernement du Sénégal présente un projet raisonnable pour instruire l’affaire Habré, les pays européens devraient le soutenir dans ses démarches ».

En février, le président sénégalais, Abdoulaye Wade, a promulgué de nouvelles lois permettant au Sénégal d’instruire les cas de génocide, de crimes contre l’humanité, et de crimes de guerre, même lorsqu’ils sont commis en dehors du Sénégal, soulevant ainsi les obstacles juridiques pour le procès de Hissène Habré.

Le Ministre de la justice sénégalais a proposé de créer une nouvelle juridiction pour le procès Habré, comprenant la construction d’un nouveau bâtiment et la nomination de 15 juges salariés aux barèmes des plus hauts fonctionnaires des Nations unies. Le Président Wade aurait trouvé ce projet – et son enveloppe de 66 millions d’euros – démesuré et aurait demandé un projet plus raisonnable.

Human Rights Watch estime que le procès peut être organisé à moindres frais, même en considérant la complexité de l’enquête et de l’instruction de crimes commis à grande échelle il y a plusieurs années dans un pays étranger et qui nécessite de faire venir témoigner des centaines de personnes au Sénégal. Rappelons que l’Union africaine avait elle-même rejetée l’option de juger Hissène Habré devant un nouveau tribunal, en grande partie en raison de coûts engendrés excessifs.

Human Rights Watch a alerté le Sénégal qu’il risquait de s’aliéner le soutien des donateurs potentiels, repoussant ainsi la date du procès s’il présentait un projet si onéreux.

En mars 2006, le Parlement européen avait appelé le Sénégal à garantir un procès équitable à Hissène Habré.

Historique

Hissène Habré a dirigé le Tchad de 1982 à 1990 jusqu’à son renversement en 1990 par l’actuel Président Idriss Déby Itno et sa fuite vers le Sénégal. Son régime de parti unique fut marqué par des atrocités constantes. En 1992, une Commission d’Enquête du Ministère Tchadien de la Justice a accusé le gouvernement Habré de 40 000 assassinats politiques et de torture systématique.

Hissène Habré a d’abord été inculpé au Sénégal, en 2000, avant que la justice sénégalaise ne se déclare incompétente pour le juger. Ses victimes se sont alors tournées vers la Belgique et, après quatre années d’enquête, un juge belge a délivré un mandat d’arrêt international accusant Hissène Habré de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et d’actes de torture perpétrés durant son mandat présidentiel de 1982 à 1990. Conformément à la demande d’extradition formulée par la Belgique, les autorités sénégalaises ont arrêté Hissène Habré en novembre 2005.

Lorsque la Cour sénégalaise a refusé de statuer sur la requête d’extradition, le gouvernement sénégalais a annoncé qu’il demanderait à l’Union africaine de se prononcer sur « la juridiction compétente » pour juger Hissène Habré. Le 2 juillet 2006, l’Union africaine, s’appuyant sur les recommandations du Comité des Éminents Juristes Africains, a demandé au Sénégal de juger Hissène Habré « au nom de l’Afrique », ce que le Président Wade a accepté.

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