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(New York) - Des dizaines de milliers de Rwandaises ont été violées pendant le génocide et au cours des dix années qui se sont écoulées depuis lors mais seuls quelques auteurs de violences sexuelles ont été traduits en justice, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui.

Le rapport de 64 pages, intitulé "Toujours en lutte: La justice, un parcours semé d'obstacles pour les victimes de viol au Rwanda," examine les faiblesses persistantes qui touchent le système judiciaire rwandais et entravent les enquêtes et la poursuite des auteurs d'actes de violence sexuelle. Il décrit par ailleurs la situation désespérée dans laquelle vivent les rescapées de viol sur le plan médical et financier. Bon nombre de femmes violées ont contracté le VIH.  
 
"Les femmes violées pendant le génocide rwandais et par la suite continuent à devoir se battre pour que justice soit faite," a expliqué LaShawn Jefferson, directrice exécutive à la Division droits des femmes de Human Rights Watch. "Le système judiciaire rwandais reste mal équipé pour traiter les cas de violence sexuelle."  
 
Les mesures de protection insuffisantes pour les victimes et les témoins, le manque de formation des autorités à propos des crimes de violence sexuelle, la maigre représentation des femmes au sein de la police et des autorités judiciaires sont autant de lacunes qui handicapent la justice rwandaise. Les survivants du génocide, notamment les femmes et les filles qui ont été violées en 1994, n'ont pas été en mesure d'obtenir des réparations pour les atteintes aux droits humains qu'ils ont subies, qu'il s'agisse de compensations financières ou d'autres formes d'assistance.  
 
Une femme qui avait été victime, pendant le génocide, d'un viol collectif ayant entraîné de graves blessures physiques et un profond traumatisme psychique a confié à Human Rights Watch: "Le fait de dire que je suis ‘rescapée du génocide,' ça me rend triste parce que je ne suis pas rescapée, je suis toujours en lutte."  
 
Le Code Pénal rwandais et les lois régissant la poursuite des personnes soupçonnées de génocide criminalisent le "viol" et la "torture sexuelle" sans définir explicitement les éléments légaux de ces deux crimes, tels que la force ou la contrainte. L'ambiguïté qui en résulte, personne ne sachant au juste quelles formes de conduite sont interdites par la loi, aboutit à des incohérences dans les verdicts rendus par les tribunaux, sème la confusion dans l'esprit des représentants de la loi et du gouvernement et atténue l'attention portée à la violence sexuelle faite aux femmes. Privées des protections procédurales ad hoc, notamment la confidentialité et l'accès à du personnel policier et judiciaire de sexe féminin spécialement formé pour traiter les cas de violence sexuelle, les victimes de viol risquent d'être stigmatisées et soumises à un nouveau traumatisme.  
 
"Nous qui avons subi le crime de viol, nous avons peur que la personne à qui on raconte cette histoire ne la révèle à d'autres,"a expliqué une victime de viol à Human Rights Watch. "Devant le tribunal, à qui vais-je m'adresser?"  
 
Le système gacaca, un mécanisme traditionnel de justice qui existait au niveau des communautés, a été restauré pour poursuivre les dizaines de milliers de responsables de crimes de génocide mais les sauvegardes qu'il offrait au départ aux victimes de viol étaient insuffisantes. Il faut que les nouvelles garanties de protection établies en juin soient mises en œuvre de façon appropriée afin de remédier à ce problème.  
 
Le rapport recommande au gouvernement rwandais d'adopter une loi en souffrance relative à l'octroi de réparations financières ou autres, lesquelles permettraient aux victimes de viol de bénéficier des soins dont elles ont besoin. Le gouvernement devrait en outre mieux former les médecins et autre personnel médical en ce qui concerne le prélèvement des preuves médicolégales et il devrait organiser régulièrement, à l'intention des procureurs et des juges, des formations sur la poursuite et le jugement des actes de violence sexuelle.  
 
"La communauté internationale, qui n'était pas intervenue pendant le génocide, se doit maintenant d'aider davantage les rescapés," a conclu Jefferson. "Les bailleurs de fonds du Rwanda doivent fournir plus d'assistance médicale et autre aux victimes de viol et autres rescapés du génocide."  

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