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Mémorandum de Human Rights Watch pour la dixième session de l’Assemblée des États parties de la Cour pénale internationale

Introduction

Résumé des recommandations pour la dixième session

I. Élections

A.         Élection de juges

B.         Élection du procureur

II. Budget

A.         La nature intégrée des activités de la cour

B.         Efficacité et charge de travail excessive de la cour

C.          Des mesures pour progresser

III. La coopération

A.         Renforcer le cadre institutionnel de l’AEP sur la coopération : les prochaines étapes

B.         Rôle de la CPI pour rallier un soutien diplomatique et politique

IV. Non-coopération

V. La complémentarité, l’Assemblée et la CPI

 

Introduction

L’année prochaine marquera le dixième anniversaire de l’entrée en vigueur du Statut de Rome, le traité instituant la Cour pénale internationale (CPI). Au fil des dix années qui se sont écoulées, les responsables de la cour—appuyés par les États parties, la société civile et l’ensemble de la communauté internationale—ont opéré des progrès constants dans la tâche difficile qui leur a été confiée de concrétiser, jour après jour, les aspirations du traité. À la veille de l’élection d’un nouveau procureur, une étape clé pour l’institution, la charge de travail de la cour n’a jamais été aussi importante. Les enquêtes ouvertes dans sept situations ont débouché sur 12 affaires en instance à l’encontre de 24 personnes.

Néanmoins, à bien des égards, l’année écoulée depuis la neuvième session de l’Assemblée des États parties (AEP) a fait clairement ressortir les énormes défis qui se profilent à l’horizon. Le défèrement de la situation en Libye décidé à l’unanimité par le Conseil de sécurité des Nations Unies (ONU), ainsi que la demande présentée à la CPI par le nouveau gouvernement ivoirien pour qu’elle ouvre une enquête en Côte d’Ivoire, ont nettement mis en valeur la CPI sur la scène internationale. Du Kenya à la Syrie, « La Haye » en est arrivée à symboliser de plus en plus le dernier et meilleur espoir de justice. Bien que cette mise en valeur marque de façon positive l’influence et l’importance croissantes de la CPI, elle s’accompagne de défis majeurs.

Primo, alors que les espoirs de justice se sont accrus, le fossé entre les attentes suscitées et la justice rendue par la CPI s’est approfondi. Le mandat de la CPI est loin d’être terminé dans les cinq situations faisant l’objet d’une enquête ouverte avant cette année. Pourtant, il ne cesse de s’étendre, avec l’ajout de deux nouvelles situations, l’examen entamé dans huit autres situations pour déterminer s’il convient d’y ouvrir une enquête, et la perpétration de nouvelles atrocités dans un certain nombre de pays, notamment au Moyen-Orient et en Afrique du nord. Cette expansion du nombre de dossiers potentiels à traiter est le reflet du besoin bien réel de réclamer des comptes, mais les limites de la CPI sur le plan de son universalité et de sa capacité menacent de décevoir les attentes et de créer des lacunes considérables en matière de lutte contre l’impunité.

Secundo, la visibilité accrue de la CPI s’accompagne du risque d’être perçue comme un moyen d’accomplir certains desseins politiques. Les gouvernements ont reconnu le rôle de la CPI dans des situations de crise et de conflit, et ils peuvent dès lors être tentés de traiter la CPI comme un nouvel outil à utiliser dans la poursuite de leurs objectifs politiques. Certes, certains objectifs politiques—tels qu’une paix durable—peuvent être promus en administrant la justice, mais la justice rendue par la CPI n’en est pas moins une fin en soi. La cour devrait être autorisée à opérer en toute indépendance et sans ingérence, sans se soucier de considérations politiques à géométrie variable. Ce risque n’est pas nouveau, mais il semble s’accroître.

Relever ces défis n’est pas chose aisée et requiert une vigilance accrue de la part des responsables de la cour. Même si le premier verdict de la CPI est attendu prochainement, les progrès limités réalisés par la cour dans les dossiers existants ont restreint sa capacité à répondre à de nouvelles demandes. Les responsables de la cour devraient améliorer la façon dont la CPI administre la justice et garantir l’efficacité et la crédibilité de la justice rendue, laissant moins de latitude aux détracteurs de la cour.

Malheureusement, les États parties à la CPI n’ont pas apporté une aide suffisante à la cour et à ses responsables pour répondre à ces défis. Un certain nombre de facteurs entrent en ligne de compte.

En ce qui concerne le risque d’altération du mandat de la cour au service d’intérêts politiques, la faute est à imputer à certains États parties à la CPI. Presque immédiatement après que le Conseil de sécurité de l’ONU eut déféré la situation en Libye, des rumeurs ont fait état d’une offre de négociation éventuelle d’une amnistie pour l’ex-dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, que quelques États parties à la CPI membres du Conseil de sécurité auraient appuyée. En septembre, certains membres de l’Union européenne auraient offert leur soutien à l’Autorité palestinienne pour qu’elle obtienne un statut amélioré à l’ONU en échange de la promesse de ne pas se tourner vers la CPI, en dépit de l’engagement renouvelé de l’Union européenne en faveur de l’universalité dans sa Décision révisée sur la Cour pénale internationale.

En ce qui concerne l’aide à apporter à la cour pour qu’elle réponde aux attentes croissantes, les États parties ont des opinions divergentes à propos du rôle de la CPI. Bien que le mandat confié à la cour de rendre la justice demeure clair, la pomme de discorde porte simplement sur ce que cela signifie dans la pratique. Comment la cour peut-elle trouver un juste équilibre, s’engageant à fond et de façon soutenue pour mener à bien son mandat, tout en étant appelée à intervenir dans un nombre croissant de situations dans lesquelles des crimes relevant de sa compétence ont été commis ?

Les efforts déployés pour résoudre cette question sont, à leur tour, entravés par les lourdes contraintes financières auxquelles sont confrontés de nombreux États parties en raison des problèmes économiques persistants qui frappent la planète. Cela a conduit certains États parties à insister pour que le budget demandé par la cour soit comprimé. Lors de la conférence de révision du Statut de Rome de la CPI qui s’est tenue en 2010, les discussions fondamentales dans trois domaines essentiels pour aider la CPI et le système du Statut de Rome à relever les défis futurs—la coopération, la complémentarité et l’impact—ont de plus en plus dérapé pour se noyer dans un débat sur la réduction des coûts.  Cette pression met à mal la fragile compréhension—péniblement élaborée entre les États parties, les responsables de la cour et la société civile lorsque la cour est devenue opérationnelle—de l’importance des activités clés de la cour, telles que la sensibilisation, pour remplir efficacement son mandat.

Ces développements et ce débat contribuent à affaiblir la capacité qu’a la cour de relever les défis qui se posent à elle. Il faut que les États parties à la CPI gardent à l’esprit et renouvellent leur engagement envers les objectifs les plus nobles visés par la cour : mettre un frein à l’impunité ; rendre efficacement la justice pour les victimes des crimes les plus graves commis dans le monde ; et avoir un impact au sein des communautés affectées, entre autres en dissuadant la perpétration de futurs crimes et en encourageant la traduction en justice des criminels. Nous invitons les États parties, lors de la dixième session de l’Assemblée, à examiner les points à l’ordre du jour en prenant soin de tenir compte des conséquences de leurs décisions sur la réalisation de ces objectifs.

Nous analysons ci-après plusieurs domaines dans lesquels les États parties peuvent soutenir la CPI et l’aider à relever les défis auxquels elle est confrontée aujourd’hui.  Ces domaines sont les suivants : doter la cour des magistrats les plus hautement qualifiés lors de l’élection du prochain procureur et de six juges ; faire en sorte que la cour dispose des ressources suffisantes pour remplir le mandat qui lui a été confié de rendre efficacement la justice ; accroître la coopération—notamment en apportant un soutien diplomatique et politique à la cour pour affirmer son indépendance—et réagir aux cas de non-coopération ; et  intensifier les efforts visant à aider les autorités nationales par le canal d’initiatives de complémentarité.

Résumé des recommandations pour la dixième session

Dans leurs déclarations lors du débat général et lors de toute discussion ou de tout événement parallèle sur la coopération, les engagements et la complémentarité, les États parties devraient:

  • Affirmer leur engagement en faveur de la mission et du mandat confiés à la CPI de mettre fin à l’impunité pour les crimes les plus graves touchant l’ensemble de la communauté internationale ;
  • Souligner l’obligation qui incombe aux États parties à la CPI de coopérer pleinement avec la cour, notamment dans l’exécution des arrestations, et s’engager à s’aider mutuellement à fournir cette pleine coopération, même dans des circonstances difficiles ;
  • Mettre l’accent sur l’indépendance de la CPI et de son procureur et s’engager à protéger la cour contre toute ingérence politique :
  • Encourager les autres États parties à continuer d’exprimer leur soutien diplomatique et politique à la cour et à la coopération avec la cour, et affirmer l’importance du rôle de la cour elle-même dans le renforcement du soutien diplomatique et politique ;
  • Reconnaître le rôle central de la CPI en tant qu’instance n’agissant qu’en dernier ressort en l’absence de véritables actions intentées par les autorités nationales, ainsi que le rôle de l’Assemblée dans les discussions visant à faire en sorte que le principe de complémentarité soit davantage mis en pratique ;
  • Poursuivre les discussions au sein de l’Assemblée afin d’optimiser le rôle joué par les points focaux en charge de la complémentarité, le Secrétariat de l’AEP et la CPI dans les initiatives de complémentarité ;
  • Informer l’Assemblée de la mise en œuvre des engagements nationaux pris à Kampala (et lorsque des progrès n’ont pu être opérés sur le plan de la mise en œuvre, partager, dans un esprit constructif, les obstacles n’ayant pu être surmontés) ; et
  • Prendre des engagements supplémentaires—ou dans le cas d’États parties qui n’ont pas été à même de prendre des engagements à Kampala, en prendre pour la première fois.

En ce qui concerne l’élection de juges de la CPI et du procureur de la CPI, les États parties devraient :

  • Mettre de côté les intérêts particuliers et ne voter que pour les candidats les plus hautement qualifiés ; et
  • Examiner attentivement les propositions relatives à une commission consultative pour l’examen des candidatures, prévue à l’article 36(4), en vue de la mise en place de la commission en amont du prochain tour des élections judiciaires.

L’Assemblée devrait :

  • Donner mandat au Bureau de « tirer les enseignements » du fonctionnement du Comité de recherche du Bureau pour le poste de procureur de la CPI.

En ce qui concerne le budget, l’Assemblée devrait :

  • Rejeter la « croissance nominale zéro » ou la « croissance zéro » en tant qu’outils budgétaires inappropriés pour la CPI, gardant à l’esprit le besoin de l’institution d’enregistrer une croissance continue et raisonnable afin de répondre à sa charge de travail croissante ;
  • Examiner le bien-fondé de la demande de budget de la cour et des recommandations du Comité du budget et des finances, et approuver un budget suffisant pour permettre à la cour de s’acquitter dûment de son mandat en 2012 ;
  • S’opposer à des réductions budgétaires qui mettraient en péril l’administration efficace de la justice par la cour, notamment dans des domaines clés tels que la sensibilisation et l’information du public ; et
  • Veiller à ce que des ressources raisonnables soient disponibles dans le budget voyages de la cour afin de permettre les contacts qui s’avèrent indispensables entre les responsables de la cour et les partenaires internationaux et essentiels pour accroître la coopération.

Après la session de l’Assemblée, les États parties devraient :

  • Encourager la cour, lors de son examen de la planification stratégique pour 2012, à tirer parti de cette occasion pour évaluer attentivement les demandes et la charge de travail croissantes auxquelles elle est aujourd’hui confrontée, et définir les outils complémentaires qui seront nécessaires pour lui permettre de réaliser ses priorités stratégiques et d’atteindre ses objectifs dans ce nouveau contexte ; et
  • Donner suite aux propositions de révision du processus budgétaire de la cour.

En ce qui concerne la résolution omnibus, l’Assemblée devrait :

  • Exprimer son soutien aux activités de sensibilisation et d’information du public réalisées par la cour, et affirmer le besoin de continuer à améliorer et à adapter ces activités dans le cadre de la mise en œuvre par la cour de son Plan stratégique de sensibilisation et de sa stratégie d’information du public ;
  • Donner mandat au Bureau de poursuivre son dialogue sur la complémentarité afin de fournir une base pour la redésignation des points focaux ;
  • Accueillir favorablement le rapport de la cour et celui du Secrétariat de l’Assemblée sur la complémentarité, encourager la cour et le Secrétariat à continuer d’identifier les contributions aux initiatives de complémentarité, et les inviter à fournir des rapports actualisés aux futures sessions de l’Assemblée : et
  • Renouveler le mandat du Groupe d’étude sur la gouvernance, tenant compte du besoin de plus grande clarté concernant son mandat et ses relations avec les autres structures de l’AEP.

En ce qui concerne une résolution spécifique sur la coopération, l’Assemblée devrait :

  • Renouveler le mandat de facilitateur pour la coopération afin de continuer à mettre l’accent, au sein de l’AEP, sur les mesures nécessaires pour renforcer la coopération avec la cour, et identifier, en concertation avec les responsables de la cour et à l’aide du rapport de la cour sur la coopération présenté à la dixième session de l’AEP, les domaines prioritaires pour la prochaine facilitation qui correspondent aux besoins les plus pressants de la cour.
  • Faire de la coopération un point permanent à l’ordre du jour des sessions de l’AEP, et ce dès la onzième session ;
  • Mettre sur pied un groupe de travail sur la coopération ; ou, en guise d’alternative, donner mandat au facilitateur en charge de la coopération d’élaborer, en concertation avec les États parties, des propositions relatives à la création d’un groupe de travail en vue de mettre sur pied ledit groupe lors de la onzième session de l’AEP ;
  • Décider de faire de la prise d’engagements une composante régulière de ses sessions, redésigner des points focaux pour les engagements, et demander aux points focaux d’élaborer pour l’avenir un moyen par lequel les États rendent compte de la mise en œuvre des engagements à la session annuelle de l’AEP ; et
  • Encourager la cour à poursuivre les efforts qu’elle déploie pour promouvoir la coopération avec les États, les organisations régionales et internationales, et la société civile, entre autres via une participation à des séminaires régionaux pour étendre ses réseaux de coopération et de soutien.

Par ailleurs, en ce qui concerne la coopération, les États parties devraient :

  • Se réunir, en marge de cette session de l’Assemblée, avec d’autres États parties et avec des responsables de la cour afin de partager les meilleures pratiques en matière de coopération, notamment les arrangements institutionnels nationaux tels que les points focaux et les groupes de travail sur la CPI, ainsi que les lois d’application ; discuter des obstacles communs qui se posent pour répondre aux demandes de coopération spécifiques ; et explorer la possibilité de conclure des accords-cadres dans des domaines tels que la réinstallation des témoins, la mise en liberté provisoire et l’exécution des peines.

En ce qui concerne d’éventuelles discussions sur les procédures visant à réagir à la non-coopération, l’Assemblée devrait :

  • Adopter les procédures prévues dans le rapport du Bureau sur les procédures possibles de l’Assemblée relatives à la non-coopération ; et
  • Donner mandat au Bureau de fournir un rapport complémentaire afin d’élaborer un catalogue commun de mesures à la disposition de l’AEP, notamment l’obtention de garanties de non-répétition et la suspension des droits de vote à l’AEP.

I. Élections

Lors de la dixième session de l’AEP, les États parties à la CPI éliront six nouveaux juges—soit un tiers des juges de la cour—ainsi que le prochain procureur de la CPI. La responsabilité incombant aux États parties de garantir l’élection des candidats les plus hautement qualifiés en fonction de leurs mérites constitue l’un des aspects les plus importants de leur rôle de gestionnaires de la cour. Afin de mener à bien son mandat d’institution judiciaire chargée de faire respecter le droit des personnes à un procès équitable et de rendre, d’une manière efficace, crédible et rapide, une justice digne de ce nom pour les victimes d’atrocités massives, la CPI a besoin de responsables et de juges qui jouissent de l’expérience et de la compétence nécessaires, répondent aux exigences du Statut de Rome et font preuve d’une éthique du service public et d’un attachement au mandat de la CPI. Ceci est sans doute particulièrement vrai dans le cas du procureur, dont la vision et la capacité sont essentielles pour que la cour soit à même de remplir sa mission. En fait, la première rencontre du public avec l’institution passe souvent par les enquêtes menées par son procureur. À l’heure où les attentes à l’égard de la cour n’ont jamais été aussi grandes, où son image n’a jamais été aussi bonne, et où ses décisions attireront probablement davantage encore l’attention et les critiques—justifiées et injustifiées—les États parties ne peuvent se permettre de se soustraire à l’importante responsabilité qui est la leur de fournir à la cour les meilleurs dirigeants possibles.

Reflétant peut-être une prise de conscience accrue de l’importance de ces élections, cette année a été marquée par un certain nombre d’innovations visant à aider les États parties à proposer et à élire des candidats pour ces postes. Nous analysons ci-dessous quelques-unes de ces innovations relatives aux élections judiciaires et à l’élection du procureur, et nous formulons des recommandations aux États parties alors qu’ils se préparent à ces deux niveaux d’élection en décembre. Outre ces recommandations, nous nous associons au document de l’Équipe de la Coalition pour la CPI (CCPI) sur les Élections, préparé pour cette dixième session de l’Assemblée.

A.Élection de juges

Le nouveau Panel indépendant sur les élections judiciaires de la CPI, un comité informel mis sur pied par la CCPI et composé de cinq experts judiciaires et juridiques, a procédé à sa première évaluation des candidats à l’élection au poste de juge. Pour déterminer si les 19 candidats étaient « qualifiés » ou « non qualifiés », l’évaluation réalisée par le Panel indépendant s’est basée sur les critères énoncés à l’article 36 du Statut de Rome. Le panel a conclu que tous les candidats, à l’exception de quatre, étaient qualifiés. En ce qui concerne ces quatre candidats, l’analyse visant à déterminer si un candidat était « non qualifié » s’est limitée à évaluer si les qualifications répondaient aux critères associés à la liste sur laquelle le candidat apparaissait, à savoir la Liste A—compétence dans les domaines du droit pénal et de la procédure pénale—ou la Liste B—compétence dans des domaines pertinents du droit international.[1]Le Panel indépendant a également formulé un certain nombre de recommandations à l’AEP concernant les questions qui ont été soulevées au cours de ses travaux mais n’ont pas été prises en compte lors de son évaluation. Il s’agit notamment du besoin d’une plus grande clarté de la part des États à propos de leurs procédures de présentation des candidats, de l’importance de l’âge et de la santé des candidats pour pouvoir être élus, et de l’éventuelle adoption d’un code de conduite pour les élections judiciaires de la CPI afin de préserver l’impartialité du candidat s’il est élu.[2]

En tant que références pour les États parties, les évaluations du Panel indépendant peuvent contribuer à faire en sorte que les élections prévues lors de la session de décembre soient basées sur le mérite et que les candidats remplissent les  critères établis à l’article 36. Comme nous l’avons déjà préconisé à l’occasion d’élections judiciaires précédentes, les États parties devraient également résister à la pratique du « marchandage des votes », dans le cadre de laquelle les États s’entendent pour appuyer leurs candidats respectifs en ne se souciant guère des qualifications des personnes. Human Rights Watch recommande vivement aux États parties de :

  • Mettre de côté les intérêts particuliers et voter uniquement pour les candidats les plus hautement qualifiés.

Nous sommes toutefois d’accord avec l’observation du Panel indépendant qui souligne qu’outre les critères énoncés à l’article 36, il peut y en avoir d’autres qui devraient guider les États parties au moment d’élire les juges de la CPI. Satisfaire aux critères établis à l’article 36 est indispensable, mais même lorsque ces critères sont remplis, il reste malgré tout un degré considérable de latitude pour déterminer quels candidats sont les mieux placés pour occuper une fonction à la CPI. Le fait d’avoir suivi de près le fonctionnement de la cour depuis le début de ses activités nous a permis de relever un certain nombre de considérations pratiques dont les États parties devraient, à nos yeux, tenir compte afin de garantir la présentation et, au final, l’élection des meilleurs candidats.

Plus précisément, nous estimons que les États parties à la CPI devraient accorder une importance particulière aux :

  • Candidats qui jouissent d’une expérience pratique considérable dans les procédures pénales. Les prochaines élections auront lieu à un moment critique pour le fonctionnement de la cour. Des procédures préliminaires et de première instance suivent activement leur cours dans la plupart des sept situations faisant l’objet d’une enquête de la CPI ; cette cadence ne fera probablement qu’augmenter. Statuer efficacement dans ce type de procédures exige des personnes bien au fait des exigences des procès pénaux, entre autres du besoin de gérer les observations orales et écrites de l’accusation, de la défense et des victimes participant aux procédures afin de garantir le bon déroulement des procédures préliminaires et de première instance ainsi que le respect des droits de la défense. Les personnes pouvant se prévaloir d’une expérience de travail préalable dans des procès pénaux—candidats de la « Liste A »—sont beaucoup mieux placées pour répondre à ces exigences.[3]
  • Candidats qui ont la capacité et la volonté de répondre aux exigences que pose le jugement d’affaires tout au long d’un mandat de neuf ans. La CPIa subi le départ de quatrejuges pour des raisons de santé. Les États parties devraient examiner soigneusement quels candidats ont la capacité (y compris l’endurance) et la motivation nécessaires pour relever les nombreuses exigences qui pèsent sur les juges siégeant à la CPI tout au long d’un mandat complet de neuf ans. Ils doivent entre autres souvent réaliser des tâches extrêmement complexes et accaparantes, par exemple évaluer les demandes présentées, dans certains cas, par des milliers de victimes qui cherchent à participer aux procédures, et passer en revue des milliers de pages de documents pour autoriser les expurgations. Alors que les affaires traitées par la CPI se multiplient, les juges devraient se préparer à siéger dans plus d’un procès à la fois et éventuellement à plus d’un niveau, ce qui signifie que la charge de travail ne fera que croître. Les ressources en personnel judiciaire dont ils disposent sont limitées. Globalement, Human Rights Watch invite les États parties à s’assurer que les candidats présentés aux élections par l’AEP soient fermement engagés en faveur de la mission confiée à la CPI de traduire en justice, dans le cadre de procès équitables, les auteurs des crimes les plus graves que l’humanité ait connus.
  • Candidats qui ont fait preuve d’une volonté d’apprendre dans le cadre de formations continues.La CPIest une institutionunique en son genre, et les juges siégeant à la cour seront inévitablement confrontés à un nombre de défis sans précédent. Il se peut que même les juges jouissant d’une grande expérience préalable dans la gestion de procès pénaux complexes ne soient pas automatiquement aptes et ne possèdent pas la connaissance nécessaire pour gérer ces défis efficacement. Une formation continue—à la fois pour les nouveaux juges et pour ceux siégeant déjà à la cour—pour présenter les « enseignements tirés » et les stratégies permettant de gérer ces défis à l’avenir se révélera indispensable. Les États parties devraient dès lors élire des candidats pour qui la formation juridique continue a beaucoup d’importance et qui sont disposés à participer à des initiatives visant à promouvoir l’innovation juridique et la coordination entre toutes les chambres judicaires afin de traiter les questions complexes relatives au droit et à la politique générale.[4]

Nous estimons que les candidats qui présentent ces qualités, en dehors du fait de répondre aux critères du Statut de Rome, seront plus à même d’aider la cour à relever les défis qui se poseront à l’avenir.

Enfin, le Panel indépendant a recommandé que l’AEP procède à la mise en place de sa propre commission consultative pour l’examen des candidatures telle que prévue à l’article 36(4) du Statut de Rome, laquelle pourrait aller au-delà du mandat du Panel indépendant et évaluer non seulement les critères énoncés à l’article 36 mais également les prestations passées des candidats judiciaires.[5]En fait, comme le prévoit la résolution omnibus adoptée lors de la neuvième session, le Bureau a nommé un facilitateur chargé de piloter les discussions relatives à la mise en place d’une commission consultative.[6]Human Rights Watch a appelé antérieurement l’AEP à mettre en place une commission consultative pour l’examen des candidatures et attend avec intérêt le rapport que présentera le Bureau lors de cette dixième session de l’Assemblée. Nous invitons les États parties à :

  • Examiner attentivement les propositions relatives à une commission consultative pour l’examen des candidatures, prévue à l’article 36(4), en vue de la mise en place de la commission en amont du prochain tour des élections judiciaires.

B.Élection du procureur

En ce qui concerne l’élection du prochain procureur, le Comité de recherche mis sur pied par le Bureau a cherché à s’écarter considérablement du processus suivi il y a neuf ans pour l’élection du premier procureur de la cour.[7]Le Comité de recherche a été chargé de recevoir, de manière informelle, des « déclarations d’intérêt »—en d’autres termes des communications informelles transmettant directement au comité les noms de personnes hautement qualifiées—émanant d’un certain nombre de sources, notamment d’individus, de la société civile et d’États. Il a également reçu pour mandat de recenser les candidats correspondant aux critères énoncés dans le Statut de Rome pour devenir le prochain procureur et de prendre contact avec eux de manière informelle.[8]Compte tenu de la préférence de l’AEP pour une élection par consensus du prochain procureur de la CPI, les États parties ont été « invités » à se conformer au processus établi par le Comité de recherche, « de préférence tant pour sa désignation que pour son élection », et il leur a été déconseillé de soumettre des candidatures formelles et de mener des activités de campagne formelles.[9]

En octobre dernier, le Comité de recherche a produit un rapport destiné à l’AEP, établissant une liste restreinte de quatre candidats à prendre en considération : Fatou B. Bensouda, actuellement procureur adjoint (poursuites), Cour pénale internationale ; Andrew T. Cayley, actuellement co-procureur auprès des Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens ; Mohamed Chande Othman, actuellement juge à la Cour suprême de Tanzanie ; et Robert Petit, actuellement conseil, Section des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, Ministère de la Justice, Canada.[10]Le comité n’a pas fait de distinction entre ces quatre candidats.

Le comité a reçu ou identifié 52 déclarations d’intérêt et s’est entretenu avec 8 candidats.[11]Aucun autre candidat n’a été formellement présenté par des États, ce qui indique un respect apparent des méthodes de travail du Comité de recherche. Des points focaux régionaux ont maintenant été nommés en vue de faciliter le consensus autour d’un seul candidat à désigner formellement et à élire à la session de décembre. Les quatre candidats ont chacun été invités à New York à des séances d’information avec les États parties à la CPI.

Au cours de l’année écoulée, Human Rights Watch a engagé des contacts actifs avec les États parties et le Comité de recherche du Bureau afin d’encourager un processus basé sur le mérite et le plus susceptible de garantir l’élection du meilleur candidat au poste de procureur de la CPI. À cette fin, notre organisation—conjointement avec cinq autres associations de la société civile—a publié une lettre à l’attention du Comité de recherche, identifiant les défis auxquels sera probablement confronté le prochain procureur, ainsi que les critères à utiliser pour évaluer les candidats potentiels en plus des critères limités énoncés à l’article 42(3) du Statut de Rome.[12]Nos critères—expliqués plus en détail dans la lettre—sont les suivants :

  • Faire la preuve d’une expérience d’excellence professionnelle dans des affaires pénales complexes ;
  • Faire la preuve d’une aptitude à agir en toute indépendance et impartialité dans l’exercice de ses fonctions professionnelles ;
  • Pouvoir justifier d’une excellence professionnelle en matière de gestion institutionnelle ;
  • Faire la preuve d’une expérience de travail avec d’autres organes ou agences pour atteindre de façon efficace un objectif commun ; et
  • Faire la preuve d’une expérience en matière de communication efficace avec une vaste palette de publics cibles.[13]

Human Rights Watch recommande vivement aux États parties de se référer à ces critères lors des discussions conduisant à l’élection du prochain procureur de la CPI. L’élection du prochain procureur façonnera en profondeur la CPI au cours de la prochaine décennie et nous appelons les États parties à continuer d’accorder la plus grande attention et la plus haute priorité à cette élection.

Nous nous réjouissons du dialogue ouvert entre le Comité de recherche du Bureau et la société civile et, à nos yeux, ledit Comité a présenté un certain nombre d’avantages pour l’AEP au cours de ce processus d’élection. Dans une large mesure, il incarne un effort visant à rompre avec « la pratique habituelle » et à placer le mérite des candidats au premier plan. D’un point de vue pratique, le fait de préserver dans une certaine mesure le caractère informel du processus de recherche a contribué à entretenir une distinction importante entre le mérite des candidats individuels et les États susceptibles (ou non) de les appuyer. Cette distinction a créé un espace permettant au processus de recherche de faire passer le mérite avant d’autres facteurs, débouchant sur une liste restreinte comptant au total quatre solides candidats. En limitant les pratiques habituelles de campagne et de « marchandage des votes » lorsqu’il s’agit de postes de haut niveau, il se peut que le recours au Comité de recherche ait encouragé certains candidats à se présenter, lesquels auraient autrement été dissuadés par le sentiment – suscité par de telles pratiques – que  l’ampleur du soutien des États parties prime le mérite.

Cela ne signifie pas que le processus a été parfait. Certaines inquiétudes se sont manifestées quant au fait que le processus mis en place par le Comité de recherche ne permettait pas une transparence suffisante à certains moments clés. Ces préoccupations peuvent s’avérer inévitables, étant donné que le Comité de recherche est chargé de maintenir un haut niveau de confidentialité dans le processus suivi pour encourager la présentation des candidatures. Néanmoins, il est clair que certains enseignements sont à tirer, notamment en ce qui concerne la façon de gérer les attentes du public en matière d’information tout en tenant compte du besoin de préserver la confidentialité. Par ailleurs, il se peut que les États parties souhaitent dégager des moyens pour faire en sorte que les candidats repris sur la liste restreinte puissent se rendre aux entretiens avec le Comité de recherche et aux réunions d’information avec les États parties, afin que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, ce qui n’a pas été le cas cette année. Human Rights Watch recommande à l’AEP de :

  • Donner mandat au Bureau de « tirer les enseignements » du fonctionnement du Comité de recherche du Bureau pour le poste de procureur de la CPI.

Les recommandations découlant d’une évaluation pourraient contribuer à des changements dans le mandat ou les procédures du Comité de recherche pour les prochaines élections du procureur et influencer la façon dont l’AEP aborde les autres élections de la CPI.

II. Budget

Un certain nombre de facteurs analysés dans la partie « Introduction » soulèvent des controverses à propos du budget 2012 de la cour. Le travail demandé à la CPI—deux nouvelles situations, la Libye et la Côte d’Ivoire, ont été ajoutées au rôle des causes traitées par la cour—augmente alors que les problèmes économiques mondiaux continuent d’exercer une pression sur de nombreux États parties. Tout au moins au cours des trois dernières années, les États parties ont cherché à limiter la croissance du budget de la cour, certains insistant sur une « croissance zéro » ou une « croissance nominale zéro ». Pour ce qui est des plus importants contributeurs de la cour et de certains autres États parties, cette pression budgétaire découle de contraintes bien réelles auxquelles sont confrontées les administrations nationales pour boucler leur propre budget. Mais cette pression se révèle de plus en plus incompatible avec la charge de travail de la cour. Par ailleurs, alors qu’un appel persistant à la réduction des coûts se fait entendre, la déception engendrée par le fait que la cour n’a pas encore prononcé de jugement dans sa première affaire, ainsi que certaines insuffisances dans le processus budgétaire de la cour, ont amené d’aucuns à se demander si les ressources demandées par la cour se justifiaient pleinement.

Le budget demandé par la cour pour 2012 s’élève à 117,7 millions d’euros, soit une hausse de 13,6% par rapport au budget de 103,6 millions d’euros approuvé en 2011.[14] Au cours de l’année 2011, hormis le budget ordinaire, la cour peut d’ici la fin de l’exercice avoir accès à environ 5 millions d’euros provenant du Fonds en cas d’imprévus.[15] Le budget réclamé par la cour pour 2012 exclut jusqu’à présent les coûts associés à l’enquête en Côte d’Ivoire (dont l’autorisation a été accordée après la remise de la demande de budget en juillet).[16]

Lors de l’examen du projet de budget de la cour pour 2012, le groupe d’experts de l’AEP,  le Comité du budget et des finances (CBF), a recommandé des compressions budgétaires dans certains domaines tels que l’assistance temporaire générale, le recours à des services de consultants, les déplacements, la formation, ainsi que les fortes hausses salariales. Si ces recommandations—qui prévoient des réductions à hauteur d’environ 5,6 millions d’euros—sont adoptées intégralement par les États parties, le budget de la cour pour 2012 se trouverait réduit à 112,1 millions d’euros (sous réserve de décisions relatives à toute demande budgétaire supplémentaire).[17]Les principaux contributeurs de la cour cherchent à opérer des coupes supplémentaires dans le budget en plus de celles recommandées par le CBF afin de maintenir le budget à une « croissance nominale zéro ».

Dans les discussions relatives aux ressources de la cour et dans le cadre des efforts visant à comprimer le budget, les États parties semblent s’orienter dans deux directions différentes. Il y a tout d’abord des États qui font valoir que la cour devrait définir ses priorités en fonction des activités « essentielles » et « non essentielles » et établir son budget en conséquence. Il y a ensuite d’autres États qui ne cessent d’insister sur la mise en place de réformes ou de changements de politique afin d’améliorer l’efficacité de la cour.

Human Rights Watch est favorable à ce que l’AEP joue un rôle actif et engagé comprenant un contrôle et un retour d’information sur les activités de la CPI, pour autant qu’elle exerce son rôle dans le respect de l’indépendance judiciaire. La charge de travail excessive de la cour  que nous constatons, et que nous analysons plus loin, découle indubitablement de l’association de contraintes budgétaires et du besoin d’améliorer les politiques et la planification dans certains domaines, entre autres la préparation même du projet de budget de la cour. Mais nous craignons que les discussions entre les États parties ne soient animées par le souci prédominant d’empêcher toute augmentation du budget sans tenir compte des conséquences à long terme que cela entraînerait pour l’institution. Comme expliqué plus loin, nous doutons que cela débouche sur des solutions durables et constructives.

Même si des dépenses excessives existent peut-être dans certains domaines et pourraient être ciblées, les États parties auront probablement besoin de combler le fossé croissant qui se creuse entre, d’une part, la cour à laquelle les responsables de la CPI, l’AEP et la société civile aspirent depuis 10 ans—une institution crédible, équitable et efficace qui rend véritablement justice dans les situations dont elle est saisie—et, d’autre part, la volonté de certains États de payer. De fait, le CBF—notant les dépenses croissantes prévues au budget de la cour—a indiqué qu’ « il serait irréaliste de s’attendre à ce que la Cour propose, de son propre chef, d’importantes réductions de ses activités ou abolitions de programmes qui avaient été mandatés par l’Assemblée ». Appelant l’AEP à fournir davantage de conseils, il a conclu qu’ « en d’autres termes, la Cour en est arrivée à un stade où les résultats escomptés qui sont fonction du type et du niveau des activités ont tendance à s’éloigner des résultats escomptés en fonction des ressources ».[18]

Lors de la session de l’AEP de cette année, nous prions les États parties d’attacher une grande importance au besoin de garantir le développement continu de la cour et sa capacité à répondre à des attentes croissantes. Les décisions relatives au budget de la cour devraient être évaluées en gardant à l’esprit leurs conséquences pour cette institution au caractère unique. Les États parties devraient :

  • Rejeter la  « croissance nominale zéro » ou la « croissance zéro » en tant qu’outils budgétaires inappropriés pour la CPI, gardant à l’esprit le besoin de croissance continu et raisonnable de l’institution pour répondre à une charge de travail croissante ; et
  • Examiner le bien-fondé de la demande de budget de la cour et des recommandations du CBF, et approuver un budget qui garantira suffisamment la mise en œuvre effective de son mandat en 2012.

Au-delà de cette AEP, les États parties et les responsables de la cour devraient s’employer à établir un dialogue constructif qui apporte davantage de clarté et de transparence par rapport aux ressources demandées par la cour, et qui cherche à mieux doter la cour des moyens nécessaires pour faire face à la multiplication des demandes. Comme nous le recommandons plus loin, les processus de planification stratégique de la cour et une révision de sa procédure budgétaire pourraient constituer des mécanismes importants permettant d’y parvenir.[19]Outre les éléments présentés ici,Human Rights Watch s’associe aux recommandations plus détaillées relatives à l’examen du budget de la cour et formulées dans le document de l’Équipe de la CCPI sur le Budget et les Finances préparé pour la dixième session de l’AEP.

A.La nature intégrée des activités de la cour

Lors de la neuvième session de l’AEP, l’Assemblée a invité la cour « en sus de son budget ordinaire pour 2012, … à établir des options budgétaires pour 2012, chiffrant le coût de l’ensemble des activités essentielles de la Cour (enquêtes, poursuites et procès) et chiffrant également le coût d’autres activités importantes qui pourraient être menées à bien grâce au même montant de crédits qu’en 2011 ».[20]Mais la cour n’a présenté de demande que pour son budget annuel ordinaire.

Bien que l’on ignore ce qu’entendaient les États parties par « autres activités importantes », la cour a eu raison de refuser de faire la distinction entre ce qui serait considéré comme des activités « essentielles », à savoir ses enquêtes, poursuites et procès, et d’autres activités « non essentielles ». La mise en œuvre du mandat de la CPI dépend de tout un éventail de fonctions étroitement liées.

À titre d’exemples, les enquêtes, poursuites et procès de la CPI bénéficient du soutien des bureaux extérieurs. Les experts en protection basés dans ces bureaux assurent la protection et le bien-être des témoins, tandis que les logisticiens appuient les missions d’enquête, y compris celles des conseils de la défense qui protègent le droit de leurs clients à un procès équitable. Le personnel de la Section de participation des victimes et des réparations, qui travaille avec des partenaires locaux, facilite la procédure de demande des victimes désireuses de participer au procès. Les activités de relations extérieures—dans les situations dont la cour est saisie, mais également ailleurs dans le monde—requièrent une coopération dans ces enquêtes et procès, entre autres pour l’exécution des mandats d’arrêt nécessaire pour que les procès aient lieu. Elles contribuent par ailleurs à s’assurer le soutien diplomatique et politique dont la cour a besoin pour mener ses enquêtes et poursuites en toute indépendance.

Les contacts directs avec les communautés affectées au moyen d’activités de sensibilisation organisées dans les situations dont la cour est saisie jouent un rôle essentiel à plusieurs égards. Ils veillent non seulement à ce que justice soit rendue, mais aussi à ce que l’on voie  qu’elle est rendue. Ils facilitent l’accès au droit de participation des victimes octroyé aux termes du Statut de Rome. De surcroît, en sensibilisant davantage aux travaux de la cour et en corrigeant les perceptions erronées, ils peuvent renforcer les conditions nécessaires pour assurer une coopération avec la cour ainsi que la sécurité des victimes et des témoins. Ces contacts, ainsi que la présence du personnel de la cour sur le terrain, se révèlent également nécessaires pour informer de la politique décidée par la CPI et pour l’adapter en fonction des contextes locaux.

Il ne s’agit donc pas d’aspects facultatifs des activités de la cour. À mesure que la CPI est devenue opérationnelle et est arrivée à déceler ce qui était requis dans la pratique pour remplir le mandat qui lui a été confié en vertu du Statut de Rome, elle a élaboré un modèle important pour pouvoir véritablement rendre une justice équitable et crédible. Ce modèle—basé sur l’essence et la nature intégrée des fonctions de la cour—s’inspire des enseignements tirés, notamment des tribunaux ad hoc. Le dialogue entre la cour, les États parties et la société civile—dans le cadre des groupes de travail du Bureau, des sessions de l’AEP et de la conférence de révision de Kampala—a cherché à développer une vision partagée de ce qui est requis pour que la cour mène à bien son mandat. Cette vision a été ratifiée dans les résolutions omnibus adoptées par les États parties lors de chaque session annuelle, ainsi que dans les résolutions adoptées à la conférence de révision, dans lesquelles les États parties ont d’une part exprimé leur soutien aux activités de sensibilisation de la cour, à son travail d’information du public, à ses efforts en matière de relations externes, ainsi qu’au renforcement de sa présence sur le terrain, et ils ont d’autre part affirmé l’importance capitale de la participation des victimes.

Le soutien des États parties aux activités de sensibilisation de la cour, et plus récemment, à ses efforts en matière d’information du public, a été particulièrement vigoureux. Le Plan stratégique d’information et de sensibilisation de la cour a été demandé initialement par l’AEP lors de sa quatrième session en décembre 2005.[21]Depuis lors, à chaque session de l’AEP, l’Assemblée a reconnu l’importance des activités de sensibilisation et encouragé leur intensification, entre autres par la mise en œuvre du Plan stratégique.[22]Lors de la neuvième session de l’AEP, l’Assemblée a préconisé d’étoffer les activités d’information et de sensibilisation, « notamment en procédant, selon que de besoin et dès que possible, à des actions rapides de sensibilisation, y compris durant la phase d’examen préliminaire ».[23]

Lors de sa huitième session, l’AEP a demandé un plan en matière d’information couvrant l’ensemble de la cour, plan qui a par la suite été produit et adopté par la cour, et accueilli favorablement par l’AEP l’année dernière.[24]Les États parties ont réclamé ce plan stratégique alors qu’il apparaissait clairement que les détracteurs peu scrupuleux de la cour exploitaient un vide en matière d’information du grand public à propos de la CPI, principalement à la suite des réactions brutales qui ont accueilli le mandat d’arrêt délivré à l’encontre du Président soudanais Omar el-Béchir.[25]

La cour a encore beaucoup à faire pour améliorer la mise en œuvre de ses activités. Comme cela a été le cas dans le passé, la société civile et les États parties ont un rôle critique à jouer en encourageant les responsables de la cour à agir en ce sens, notamment en s’attelant à travailler sur la stratégie en matière de poursuites et autres stratégies de la cour.[26]Toutefois, la révision de la pratique et de la politique de la cour devrait être animée par le souci d’accroître la prestation de la cour, et non pas strictement de réduire ses dépenses.

Lors des discussions sur le budget qui auront lieu au cours de cette prochaine session de l’AEP, les États parties devraient :

  • S’opposer à des compressions budgétaires qui mettraient en péril l’administration efficace de la justice rendue par la cour, notamment dans des domaines clés tels que la sensibilisation et l’information du public ; et
  • Réitérer, dans la résolution omnibus, leur soutien aux activités d’information et de sensibilisation réalisées par la cour, ainsi que le besoin de continuer à améliorer et à adapter ces activités dans le cadre de la mise en œuvre par la cour du Plan stratégique de sensibilisation et de la stratégie en matière d’information du public.[27]

B.Efficacité et charge de travail excessive de la cour

Au cours des dernières sessions, le CBF a constamment poussé la cour à chercher à réaliser des économies de coûts et à financer les hausses de coûts en augmentant son efficacité. Les États parties ont avalisé cette approche lors de leur septième session de l’Assemblée, priant instamment « la Courde tout mettre en œuvre pour réaliser des gains d’efficacité au cours de 2009, et pri[ant] le Greffier de rechercher les moyens d’y parvenir, d’appliquer les mesures qui s’imposent à cet égard et de faire rapport à l’Assemblée des États Parties à sa huitième session ».[28]Même si le CBF semblait au départ se référer à des « lignes de conduite inefficaces en matière d’administration » et à un « allégement des procédures administratives », le premier rapport de la cour à l’Assemblée sur les gains d’efficience possibles visait non seulement certaines procédures administratives—telles que le recrutement et les ressources humaines—mais également des procédures directement liées à son mandat judiciaire, notamment le système d’aide judiciaire, la protection des témoins et la durée des procédures.[29]Ce dialogue sur les gains d’efficience possibles s’est poursuivi entre la cour et le CBF, et tout récemment, le CBF s’est félicité des efforts fournis par la cour, notant qu’elle « avait considérablement avancé dans sa recherche visant à déterminer et à chiffrer d’éventuels gains d’efficience ».[30]

Les États parties se sont intéressés directement à l’efficience, mais non explicitement en lien avec l’identification d’économies de coûts. Lors de la session de l’AEP de l’année dernière, les États parties ont mis sur pied un Groupe d’étude sur la gouvernance chargé de « faciliter un dialogue organisé entre les États Parties et la Cour aux fins de conforter le cadre institutionnel du système mis en place par le Statut de Rome et de renforcer la bonne organisation et l’efficacité de la Cour tout en préservant pleinement son indépendance judiciaire … [et] en vue de recenser, en liaison avec la Cour, les questions nécessitant de nouvelles mesures et de soumettre des recommandations à l’Assemblée par l’entremise du Bureau ».[31]Les travaux du Groupe d’étude ont été articulés autour de trois catégories : (1) les rapports entre la CPI et l’AEP ; (2) le renforcement du cadre institutionnel au sein de la CPI ; et (3) l’accroissement de l’efficacité de la procédure pénale.[32]

Le Groupe d’étude sur la gouvernance offre une plateforme d’échange entre les États parties et les responsables de la cour, rendant possible d’améliorer la compréhension mutuelle dans un certain nombre de domaines clés. En amont de la mise sur pied du Groupe d’étude, Human Rights Watch avait exprimé son inquiétude quant au risque qu’il aille trop loin—soit  en empiétant sur l’indépendance judiciaire, soit en faussant les processus d’élaboration des politiques que les responsables de la cour sont plus à même de mener en raison de leur expertise—et qu’il devienne un outil servant à identifier de possibles économies de coûts.[33]Il semble clair que les États parties ont fait preuve de respect à l’égard de l’indépendance de la cour, sollicitant généralement les points de vue des responsables de la cour comme base de discussion et s’appuyant sur ces points de vue à l’heure de recommander de nouvelles mesures. Le Groupe d’étude a également salué la participation de la société civile.

Il demeure important que les discussions du Groupe d’étude sur l’efficience ne soient pas animées par le désir de trouver des économies de coûts.

Après huit années d’activités, et alors que la cour s’apprête à conclure son premier cycle complet de procédures de première instance, les discussions sur l’efficacité des procédures et sur une éventuelle réforme s’avèrent importantes et nécessaires. Mais associer ces discussions trop étroitement à une recherche de compressions budgétaires risquerait de donner l’impression, probablement erronée, que des économies de coûts majeures peuvent être trouvées. Il se peut que de réelles lacunes existent dans des domaines où les ressources existantes pourraient être mieux utilisées et les responsables de la cour ont la responsabilité de gérer les ressources de la cour efficacement, entre autres en s’engageant dans un dialogue avec le CBF à propos des gains d’efficience. Mais il y a aussi un certain nombre de domaines pour lesquels la cour dispose clairement d’un budget extrêmement serré.

La demande de budget de la cour reflète une insuffisance apparente de fonds pour financer un certain nombre d’unités et d’activités et elle se base sur des hypothèses extrêmement prudentes en ce qui concerne les procédures préliminaires et de première instance en 2012.[34]Une pression évidente pèse sur l’institution, laquelle est passée de quatre situations en 2009 à cinq en 2010, puis à sept en 2011, donc dans un laps de temps relativement court. Afin de traiter simultanément deux affaires visant chacune trois accusés dans la situation au Kenya, la chambre préliminaire a introduit une demande de budget supplémentaire au titre du Fonds en cas d’imprévus.   [35]   Évoquant des contraintes sur le plan des ressources, la Section de la participation des victimes et des réparations a été dans l’impossibilité de traiter toutes les demandes de victimes reçues dans le cadre de l’affaire Callixte Mburashimana avant l’audience de confirmation des charges concernant cette affaire, privant des centaines de personnes qui avaient introduit une demande de jouir de leur droit de participation.   [36]   Les contrats d’un nombre important de membres du personnel temporaire de la CPI n’ont pas été renouvelés pour 2012.[37]Le procureur de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, a récemment lancé une mise en garde :

Pour la première fois, le Bureau [du Procureur] est confronté à la possibilité de ne pas pouvoir enquêter en raison de contraintes affectant ses ressources. La proposition du CBF [recommandant des compressions budgétaires] entraînerait un changement dans les structures convenues précédemment, et transformerait le processus de prise de décisions. Certaines affaires ne feront pas l’objet d’enquêtes en raison de contraintes budgétaires. Changer le modèle de la Cour qui est guidé par les affaires pour qu’il devienne un modèle guidé par les ressources financières est plus qu’une question de budget, il s’agit d’une question juridique et stratégique.[38]

Bien qu’il puisse exister des moyens à la fois meilleurs et plus économiques permettant à la cour d’effectuer ses travaux, compte tenu de ce fossé considérable entre les demandes et les financements requis, nous doutons que les ressources globales nécessaires pour financer les travaux de la cour puissent faire l’objet de réductions sensibles. En fait, nous sommes préoccupés par le fait que les appels à une efficacité accrue risquent de dénaturer les importants processus de planification et de réforme. Ainsi, le Bureau du Procureur a fait valoir que le nombre limité d’affaires dans les situations dont est saisie la CPI était à la mesure de l’engagement du Bureau à faire preuve d’efficacité, et il a signalé qu’une « politique d’expansion en matière de poursuites » ferait croître le budget de la cour de façon exponentielle.[39]Les recherches de Human Rights Watch semblent toutefois indiquer que la CPI a été beaucoup trop limitée dans les affaires traitées dans chaque situation, risquant de ne pas mener à bien son mandat dans ces situations. Dans les situations relevant de la compétence de la cour, le Bureau du Procureur devrait plutôt en faire davantage pour rendre une justice crédible et efficace. Certes, cela requerra des changements de politique au Bureau du Procureur, mais cela exigera aussi inévitablement davantage de ressources.[40]

Les discussions sur de possibles gains d’efficience et des moyens plus efficaces pour réaliser le travail de la cour s’avèrent importantes, et nous approuvons le fait que les États parties portent une attention continue à ces questions. Bien qu’il soit important de préciser davantage le mandat du Groupe d’étude et ses liens avec les autres structures de l’AEP au moment où son rôle se fera récurrent, les États parties devraient étendre le mandat du Groupe d’étude, et Human Rights Watch s’associe aux recommandations plus larges concernant le Groupe d’étude formulées dans le document de l’Équipe de la CCPI pour la surveillance de l’AEP, élaboré pour la dixième session de l’AEP.

Nous estimons particulièrement bonne la proposition de discuter d’une série de questions qui pourraient déboucher sur la rationalisation des procédures pénales de la cour.[41]Parmi les questions identifiées par le Japon, point focal de la catégorie III, figurent notamment « le nombre de juges par section et par chambre, le cas d’absence d’un juge, les questions liées à l’administration de la preuve (éléments de preuve écrits et récolement de témoins), la gestion des affaires, la procédure préliminaire, la participation des victimes [et] la création d’un groupe de travail interne à la cour pour étudier la procédure pénale »[42]. Bien que Human Rights Watch n’ait pas analysé ces questions, plusieurs d’entre elles semblent pertinentes pour améliorer le rythme des procédures dont la CPI est saisie, élément crucial du droit à un procès équitable, ainsi que l’administration d’une justice efficace rendue par la cour aux communautés affectées. La proposition émise par le Japon de solliciter l’opinion des juges sur ces questions constituera un bon point de départ à la discussion.

Mais compte tenu des demandes accrues dont fait l’objet la cour, ces discussions sont peu susceptibles d’éliminer le besoin d’augmenter raisonnablement le budget de la cour. Nous invitons les États parties à veiller à ce que les importantes discussions stratégiques au sein du Groupe d’étude ou des groupes de travail du Bureau ne soient pas guidées principalement par le souci de raboter le budget.

C.Des mesures pour progresser

Nous recommandons ci-après deux mesures que la cour et les États parties peuvent prendre au cours de l’année à venir. Bien qu’il soit peu probable que ces recommandations permettent de résoudre le défi immédiat que doivent relever les États parties en définissant le budget pour 2012, la gestion de ces questions pourrait fournir une base plus solide pour de futures discussions budgétaires et prises de décision. Nous analysons par ailleurs les désavantages des propositions visant à rendre certaines activités de la cour tributaires de financements volontaires.

1. Planification stratégique

La cour révisera son plan stratégique global en 2012 dans le cadre d’un dialogue avec les États parties. Elle devrait envisager de tirer parti de cette occasion pour évaluer en profondeur les demandes et la charge de travail croissantes auxquelles elle est aujourd’hui confrontée, et pour déterminer les outils complémentaires qui se révèleront nécessaires pour qu’elle puisse mettre en œuvre ses priorités stratégiques et atteindre ses objectifs dans ce nouveau contexte.

Il ne s’agit pas d’une tâche aisée, car il est même difficile de prédire la charge de travail de la cour pour une année déterminée. Elle peut dépendre d’un certain nombre de facteurs dont elle n’a pas entièrement le contrôle—entre autres les saisines par les États et par le Conseil de sécurité de l’ONU ou la coopération sur le plan des arrestations—ou qui sont soumis aux décisions indépendantes de ses juges.

Dans la mesure du possible, la cour devrait néanmoins chercher à prévoir avec une plus grande clarté à quoi ressemblera une CPI plus mûre, avec de multiples situations et la tenue de procès simultanés. Prédire l’évolution de chaque situation existante au cours des six années à venir (la période qui reste du plan stratégique actuel) et les implications, à tous les niveaux de la cour, de l’ouverture de nouvelles situations au cours de cette période pourrait ensuite contribuer à identifier où un développement, une réduction ou d’autres ajustements seront nécessaires pour permettre à la cour de continuer à répondre aux besoins et à être guidée par les affaires à traiter plutôt que par les ressources dont elle dispose. En réalisant ce travail de cartographie, la cour devrait réexaminer son « modèle de capacité » qui, pendant ses premières années d’existence, lui a permis de prédire ce qui pourrait être réalisé avec les ressources disponibles.[43]

Cette démarche devrait se faire séparément du processus budgétaire lui-même, mais elle pourrait fournir aux États parties un meilleur contexte pour les demandes de budget annuel et une vision cohérente qui justifie mieux ces demandes dans une perspective pluriannuelle. Elle pourrait contribuer à générer la « cohérence », souhaitée par l’AEP, « entre le processus de planification stratégique et le processus budgétaire, qui est crucial pour la crédibilité et la durabilité de l’approche stratégique à plus long terme ».[44]

Dans un sens, le CBF a déjà anticipé ce besoin de perspective pluriannuelle accrue. Il a demandé que la cour « établisse un document prévisionnel de ses dépenses à moyen terme (c’est-à-dire jusqu’en 2015 au moins) sous la forme d’une annexe au projet de budget-programme pour 2012 ainsi que pour chaque budget annuel ultérieurement. Le Comité encourage également l’Assemblée à mettre en place des mécanismes d’examen de tels coûts ».[45] Bien que le CBF cite des coûts tels que le remplacement des équipements, les locaux et les coûts en personnel, dans un certain sens, les enquêtes qui débouchent sur des procès et requièrent l’appui d’une série d’activités de la cour énumérées plus haut pourraient aussi être considérées comme « des inducteurs de coûts qui déploient leurs effets sur plusieurs années ». Le processus susmentionné pourrait contribuer à élaborer des outils de planification afin de mieux anticiper et communiquer les conséquences pour les activités de la cour sur plusieurs années.

Il est d’ores et déjà évident que les nouveaux outils de gestion requis dans la période à venir comprendront des plans de retrait visant à compléter les travaux de la cour dans une situation donnée. Dans chacune des situations dont la CPI est saisie, les travaux de la cour sont loin d’être terminés, mais une planification est néanmoins indispensable pour s’assurer que la réduction ou l’arrêt final des activités de la CPI consolidera son héritage final. Il s’agirait par exemple de prévoir dès le départ de contribuer au développement des capacités nationales afin de réprimer les crimes internationaux graves après l’achèvement des travaux de la cour. Il est également essentiel que le départ de la cour d’une situation n’amoindrisse pas l’héritage qu’elle laisse. La cour ne veut pas laisser les témoins en danger ou faire naître le sentiment qu’elle a abandonné la situation dont elle est saisie. C’est particulièrement le cas là où, comme en Ouganda aujourd’hui, la cour risque de devoir mettre en place des stratégies de maintien lorsque ses procédures pénales se trouvent bloquées par un défaut de coopération dans l’exécution des arrestations. Comme l’a indiqué le CBF, « [l]es plans de retrait permettront d’informer l’Assemblée sur la manière dont les ressources disponibles peuvent être réaffectées et sur les éventuels moyens d’assister un pays de situation pour mener des procès au plan national lorsque la Cour aura mené à terme ses activités dans le cadre d’une situation donnée ».[46]

2. Analyse du processus budgétaire de la CPI

Il est clair que le processus budgétaire de la CPI devrait être réexaminé. Le projet de budget de la cour est basé sur des prévisions établies près d’un an avant l’approbation du budget. Bien que le CBF ait noté des améliorations continues dans la présentation budgétaire de la cour, le projet de budget risque encore de souffrir d’un manque de transparence en ce qui concerne l’utilisation des ressources ou les justifications fournies pour les ressources supplémentaires. Il pèche également par l’absence d’une perspective pluriannuelle, à laquelle il est fait allusion plus haut. Plus fondamentalement peut-être, le fait que la cour ait dépensé moins que les crédits disponibles pendant ses premières années d’existence a contribué à un manque de confiance de la part des États parties à l’égard de la capacité qu’a l’institution d’identifier précisément les ressources dont elle a besoin. Les responsables de la cour n’ont pas toujours aidé, envoyant des signaux contradictoires lors des discussions budgétaires antérieures à propos de la capacité de la CPI à faire face à des compressions de ressources ou à absorber de nouveaux coûts, semblant indiquer la présence de fonds excédentaires dans le budget.  

Dans la catégorie II, et à l’occasion de l’examen des rapports entre la présidence et le greffe dans l’administration de la cour, le Groupe d’étude a entamé cette année un débat sur le processus budgétaire de la cour. Il a maintenant proposé que ce débat se poursuive l’année qui vient dans le cadre d’une catégorie distincte consacrée au processus budgétaire.

En quelque sorte, cela pourrait revenir à faire double emploi avec la démarche du CBF, lequel a demandé à la cour de « réexaminer le processus d’élaboration du projet de budget-programme et de faire rapport au Comité à ce sujet à sa dix-huitième session ».[47]Nous avons conscience du besoin de ne pas avoir deux mécanismes analogues de contrôle et de transmission d’information au sein de l’Assemblée. Par ailleurs, le Groupe d’étude et les États parties devraient peut-être étudier le calendrier chargé proposé pour le Groupe et cerner les limites qui devraient être fixées en termes de questions soumises au Groupe. Mais en même temps, des discussions directes avec les États parties sur le processus budgétaire de la cour—comme cela a pu se faire au sein du Groupe d’étude pour d’autres questions durant l’année écoulée—pourraient améliorer la compréhension entre la cour et les États parties et permettre à l’avenir un dialogue plus constructif sur ces questions.

Nous recommandons aux États parties :

  •  D’analyser quels espaces appropriés existent ou devraient être créés par l’assemblée pour procéder à une révision du processus budgétaire de la cour.

Il pourrait s’agir d’adopter la recommandation du Groupe d’étude, mais également d’inviter le CBF à participer et à partager son expertise. Toute révision devrait identifier à l’avance des thèmes de discussion clairs et les résultats envisageables. Tout comme dans le cas des questions à l’ordre du jour du Groupe d’étude cette année, la première étape des discussions devrait consister à inviter la cour à présenter son point de vue. Le processus de révision pourrait examiner si le rapport au CBF déjà demandé à la cour pourrait servir de point de départ aux travaux de la catégorie. Cette révision pourrait également être l’occasion idéale d’examiner le rôle du CBF, ses rapports avec l’AEP, et de renforcer ses méthodes de travail.[48]

3. Financements volontaires

Enfin, le CBF a proposé que l’AEP envisage «  des modes alternatifs de financement et de prestation de services » pour certaines activités de la cour. Human Rights Watch déconseille toute démarche qui placerait certaines activités de la cour en dehors du budget annuel, les rendant tributaires de financements volontaires ou même d’un « système mixte de financement reposant sur l’utilisation de contributions mises en recouvrement et de contributions volontaires ». Il est peu probable que les financements volontaires procurent une base sûre pour les activités de la cour et ils imposeraient aux ressources existantes des efforts de collectes de fonds.

Le CBF a mentionné tout spécialement la possibilité de financer les activités de sensibilisation et d’information du public par le canal de ce « système mixte de financement ». Ces activités de la cour recourent effectivement à des réseaux de partenaires, tels que les médias locaux et internationaux et les organisations de la société civile. Ces réseaux renforcent l’impact des activités de la cour, lui donnant une portée qui ne serait pas possible compte tenu des ressources disponibles dans le budget de la CPI. Toutefois, cela ne soustrait pas la CPI à sa responsabilité de fournir des informations précises et impartiales concernant les procédures de la cour et sur lesquelles ces réseaux se fondent, et cela ne signifie pas que le personnel de la cour n’a pas besoin de réaliser des activités stratégiques et de transmettre directement les messages appropriés. Par ailleurs, dans les communautés affectées, rien ne peut vraiment remplacer le contact direct avec le personnel et les responsables de la cour pour garantir le véritable dialogue au cœur de tout travail efficace de sensibilisation.

III. La coopération

Afin de relever les défis futurs, une coopération accrue des États parties est indispensable. Pour répondre aux espoirs de justice et résister aux manipulations visant à mettre le mandat de la cour au service d’intérêts politiques, il faudra que le mandat judiciaire indépendant de la cour bénéficie d’un solide soutien public, permettant à la CPI de mener à bien son travail à l’abri de toute ingérence politique. Ceci n’est pas moins important que l’assistance judiciaire et l’appui logistique pour garantir des avancées sur le plan des arrestations, des enquêtes et des procès équitables.

Bien que le soutien à la CPI soit la responsabilité des États individuels, l’AEP a un rôle crucial à jouer en aidant les États parties à améliorer leur coopération. Au cours de l’année écoulée, l’Assemblée a opéré quelques progrès dans la poursuite de ses travaux sur la coopération. Des consultations sur la coopération organisées sous l’égide du facilitateur de l’AEP en charge de la coopération au sein du Groupe de travail de La Haye ont été un espace important d’échange entre les États parties et les responsables de la cour dans un certain nombre de domaines, notamment les accords-cadres, les lois d’application, le soutien diplomatique à la cour, la réinstallation des témoins, ainsi que d’autres types d’aide et d’éléments de preuve. Nous recommandons vivement aux États parties lors de la dixième session de l’AEP de :

  • Renouveler le mandat de facilitateur pour la coopération afin de continuer à mettre l’accent, au sein de l’AEP, sur les mesures nécessaires pour renforcer la coopération avec la cour ; et
  • Identifier, en concertation avec les responsables de la cour et à l’aide du rapport de la cour sur la coopération présenté à cette session de l’AEP sur la coopération, les domaines prioritaires pour la prochaine facilitation qui correspondent aux besoins les plus pressants de la cour.[49]

Mais hormis ces concertations et à l’exception notable de l’élaboration de procédures permettant de s’attaquer à la non-coopération (analysée plus loin), l’AEP n’a pas opéré beaucoup de progrès en ce qui concerne les moyens dont elle doit se doter pour faciliter une coopération plus efficace. Nous réitérons ci-après trois mesures que l’AEP pourrait prendre pour renforcer son cadre institutionnel : (1) inclure un point permanent sur la coopération à l’ordre du jour des sessions de l’AEP ; (2) créer un groupe de travail intersessions sur la coopération ; et (3) redynamiser la pratique des engagements.[50]Nous invitons les États parties à réexaminer ces recommandations lors de cette session afin de veiller à ce que la promesse de l’AEP de promouvoir la coopération se voit renforcée plutôt que mise à l’écart. Par ailleurs, les États parties devraient tirer parti de la session de l’AEP pour renforcer la coopération et réaffirmer le rôle primordial que joue la CPI lorsqu’il s’agit de rallier un soutien diplomatique et politique autour de sa mission.

A.Renforcer le cadre institutionnel de l’AEP sur la coopération : les prochaines étapes

1. Tirer parti de la session annuelle de l’AEP

Les sessions de l’AEP sont, en soi, une occasion importante de renforcer la coopération. Même en l’absence d’un point officiel sur la coopération à l’ordre du jour, nous recommandons aux États parties de :

  • Se réunir avec d’autres États parties et avec les responsables de la cour, en marge de la session de l’AEP, afin de partager les meilleures pratiques en matière de coopération, notamment les arrangements institutionnels nationaux tels que les points focaux et les task forces sur la CPI, ainsi que les lois d’application ; discuter des obstacles communs qui se posent pour répondre aux demandes de coopération spécifiques ; et explorer la possibilité de conclure des accords-cadres dans des domaines tels que la réinstallation des témoins, la mise en liberté provisoire et l’exécution des peines.

Les sessions de l’AEP peuvent également contribuer à développer des appuis politiques. Nous recommandons que lors du débat général et autres occasions pertinentes, les États parties expriment leur soutien politique dans des déclarations qui :

  • Affirment leur attachement à la mission et au mandat confiés à la CPI de mettre fin à l’impunité pour les crimes les plus graves qui touchent la communauté internationale ;
  • Soulignent l’obligation qui incombe aux États parties à la CPI de coopérer pleinement avec la cour, notamment dans les arrestations, et s’engagent à s’aider mutuellement à fournir cette pleine coopération, même dans des circonstances difficiles
  • Mettent l’accent sur l’indépendance de la CPI et de son procureur et promettent de protéger la cour contre toute ingérence politique.

Le projet de résolution sur la coopération devrait :

  • Encourager les États parties à continuer d’exprimer leur soutien diplomatique et politique à la cour et à la coopération avec la cour.

2. Faire de la coopération un point permanent à l’ordre du jour des sessions de l’AEP

Lors de la neuvième session de l’AEP, les consultations informelles sur la coopération ont été marquées par un échange utile de meilleures pratiques entre les États parties, visant à partager les expériences susceptibles de contribuer à améliorer la coopération avec la cour. Plusieurs États ont pris la parole pour fournir des informations sur divers aspects de leurs arrangements en matière de coopération. Par ailleurs, c’est de ces consultations que semble avoir émergé pour la première fois un consensus clair concernant le besoin d’agir—comme recommandé dans le rapport 2010 du Bureau sur la coopération[51]—à propos des procédures de l’AEP relatives à la non-coopération. Cette démarche a permis à l’AEP de progresser sur une question importante liée à la coopération, analysée plus loin.

Bien que la participation à ces consultations ait été limitée—peut-être en raison de l’ajout relativement tardif de ce point à l’ordre du jour, et du fait qu’elles aient été qualifiées d’ « informelles » plutôt que de réunion plénière des États parties—elles ont constitué un important prolongement des discussions de fond qui avaient marqué le bilan de la coopération lors de la conférence de révision de Kampala. Elles ont en quelque sorte aussi donné effet à la déclaration de Kampala sur la coopération, qui avait « décid[é] que l’Assemblée des États Parties devrait, dans l’examen de la question de la coopération, mettre un accent particulier sur le partage des expériences ».[52]De fait, la résolution omnibus adoptée à la neuvième session s’est inspirée de la déclaration de Kampala et a « demand[é] au facilitateur [pour la coopération] d’examiner des propositions visant à partager des expériences et d’autres initiatives pour renforcer la coopération, comme de faire de la question de la coopération un point permanent à l’ordre du jour de l’Assemblée ».[53]

Malheureusement, en dépit de cet exemple positif, il n’est, à notre connaissance, pas prévu d’inclure la coopération parmi les points officiels à l’ordre du jour de la dixième session de l’AEP.

Comme nous l’avons recommandé l’année dernière, et comme le confirment les expériences de Kampala et de la dernière session de l’AEP, un point permanent à l’ordre du jour, bien préparé, sur la coopération garantirait au moins une occasion d’avoir un échange de meilleures pratiques en séance plénière. Ce point permanent à l’ordre du jour pourrait également inclure un échange sur d’autres problèmes non résolus en matière de renforcement de la coopération auxquels le partage d’expériences risque de ne pas apporter de réponse, par exemple lorsque les défis—tels que les arrestations—requièrent de nouvelles approches. Nous invitons les États parties, dans le cadre du texte adopté dans la résolution sur la coopération, à :

  • Faire de la coopération un point permanent à l’ordre du jour des sessions de l’AEP, et ce dès la onzième session, et
  • Demander au facilitateur pour la coopération de promouvoir un échange sur le fond lors de ce point de l’ordre du jour, notamment en identifiant au préalable des thèmes spécifiques de discussion—couvrant à la fois des formes de coopération obligatoires et non obligatoires.

3. Groupe de travail sur la coopération

Même si l’inclusion de la coopération à l’ordre du jour des sessions annuelles de l’AEP ferait progresser le travail collectif de l’Assemblée dans le domaine de la coopération, pour garantir autant que possible une meilleure pratique des États à longue échéanceet tirer parti du travail des anciens points focaux et facilitateurs pour la question de la coopération, l’AEP devrait disposer d’un groupe de travail sur la coopération opérant entre les sessions. Un groupe de travail renforcerait la capacité du facilitateur pour la coopération de travailler dans des domaines prioritaires toute l’année et il permettrait des échanges plus fréquents sur la coopération.

Nous encourageons les États parties à réfléchir de manière créative à la façon dont ce groupe de travail pourrait être structuré, à la fois pour veiller à ce qu’il remplisse efficacement son mandat et pour limiter les implications sur le plan des ressources. Une possibilité serait de disposer d’un groupe de travail composé d’un nombre limité de représentants auto-sélectionnés, tout en gardant à l’esprit la nécessité d’une diversité sur le plan de l’expérience, des besoins et de la représentation régionale. Sous la direction du facilitateur pour la question de la coopération, les membres du groupe pourraient être chargés d’initiatives spéciales. Le groupe de travail pourrait résumer ses activités dans un rapport annuel destiné à l’AEP, formulant des recommandations à propos des thèmes de discussion lors du point sur la coopération à l’ordre du jour de l’AEP et identifiant de possibles domaines de travail prioritaires pour l’année suivante.

Les États parties devraient :

  • Adopter, à la dixième session, une décision établissant un groupe de travail sur la coopération ; ou en guise d’alternative
  • Donner mandat au facilitateur pour la coopération d’élaborer, en concertation avec les États parties, des propositions relatives à la création d’un groupe de travail sur la coopération, en vue de mettre en place ledit groupe lors de la onzième session de l’AEP.

4. Engagements

Les engagements pris par les États constituaient une pratique nouvelle et novatrice pour la CPI à la conférence de Kampala, et ils semblent avoir procuré aux États une cible utile pour atteindre les objectifs en matière de coopération. Offrir l’occasion de prendre chaque année de nouveaux engagements pourrait avoir un effet utile permanent et faire en sorte que la cour reçoive régulièrement des promesses concrètes d’assistance accrue. Toutefois, lors de l’AEP de l’année dernière, les propositions visant à élaborer un cadre pour assurer un suivi des engagements n’ont pas reçu le soutien des États parties. Bien que le mandat des points focaux pour les engagements ait été renouvelé, l’AEP s’est finalement contentée d’appeler les États et les organisations régionales à « soumettre des engagements supplémentaires et à informer, selon que de besoin, l’Assemblée de leur mise en œuvre à ses prochaines sessions ».

Nous invitons les États parties à poursuivre la pratique des engagements à cette session de l’AEP. Même si tout mécanisme de suivi devrait en grande partie dépendre de rapports fournis par les États eux-mêmes, le fait de procurer aux États un cadre spécifique pour rendre compte de la mise en œuvre de leurs engagements peut être un élément important incitant à continuer cette pratique.[54]Outre les annonces des États (et organisations) concernant les engagements et leur mise en œuvre, comme recommandé plus haut, nous encourageons l’Assemblée, dans le cadre de ses résolutions omnibus ou sur la coopération, à :

  • Décider de faire de la prise d’engagements une composante régulière de ses sessions ; et
  • Renommer des points focaux pour les engagements et demander auxdits points d’élaborer pour l’avenir un moyen par lequel les États peuvent faire rapport de la mise en œuvre de leurs engagements à la session annuelle de l’AEP.

B.Rôle de la CPIpour rallier un soutien diplomatique et politique

Comme indiqué plus haut, la CPI dépend du soutien politique et diplomatique énergique de ses États parties et d’autres membres de la communauté internationale, et nous avons déjà formulé antérieurement un certain nombre de recommandations plus spécifiques destinées aux États parties.[55]Les recommandations adressées aux États parties et à la cour concernant le soutien politique et diplomatique figurent principalement dans les recommandations du premier rapport du Bureau sur la coopération.[56]

On ne soulignera jamais assez la fonction cruciale des États parties, mais la cour a aussi un rôle clair à jouer. Le discours annuel du président de la CPI à l’Assemblée générale, les séances d’information du procureur sur le Darfour et la Libye au Conseil de sécurité, ainsi que les visites de haut niveau des responsables de la cour aux Nations Unies, aux organisations régionales et dans les pays dont la situation a été déférée à la cour, entre autres, sont autant d’occasions importantes d’améliorer la compréhension des responsables nationaux et des fonctionnaires des organisations intergouvernementales. Cela peut, en retour, déboucher sur un renforcement de la coopération.[57]

D’ailleurs, la décision prise par l’AEP lors de sa huitième session d’ouvrir un bureau de liaison de la CPI auprès de l’Union africaine (UA) visait à multiplier les possibilités pour les responsables de la CPI d’être en prise directe avec les ambassades et les responsables de l’UA. Cette décision faisait suite d’une part à l’aggravation des relations entre la CPI et l’UA dans la foulée de la décision de l’UA d’appeler ses États membres à refuser de coopérer à l’arrestation et à la remise du Président soudanais Omar el-Béchir, et d’autre part à la reconnaissance du fait que les informations précises mises à la disposition des diplomates à Addis-Abeba au sujet de la cour étaient limitées. Bien que l’ouverture du bureau de liaison de la CPI auprès de l’Union africaine fasse toujours l’objet d’un blocage, la cour a néanmoins opéré d’importants progrès, intensifiant ses contacts avec certains membres de l’Union africaine, conformément à l’engagement de l’AEP de « poursuivre une action régulière et approfondie à Addis–Abeba avec l’Union africaine et les missions diplomatiques dans la perspective de la mise en place d’un bureau de liaison de la Cour ».[58]Par exemple, en juillet 2011, la cour et l’UA ont organisé conjointement un séminaire technique à Addis- Abeba. Y ont participé des responsables et du personnel de la commission de l’UA, ainsi que des représentants des États parties africains à la CPI. Selon la cour, l’UA a déjà fait part de son intention d’organiser un séminaire de suivi en 2012.[59]

La cour s’est engagée dans des initiatives similaires ailleurs. Des séminaires régionaux parrainés par la Ligue des États arabes (Qatar) et la Francophonie (Sénégal, Cameroun, Tunisie) ont mis en contact des responsables de la cour avec du personnel et des responsables de ministères nationaux de ces régions. Comme l’a indiqué la cour dans son rapport sur la coopération, ces séminaires ainsi que les contacts entre les responsables de la cour et des partenaires internationaux créent de nouveaux réseaux importants de soutien à la cour.[60]L’expérience nous a d’ailleurs montré que la coopération avec la cour est souvent facilitée par des réseaux d’influence mis en place au sein du personnel et des responsables des administrations nationales. Le fait qu’un ministre ou qu’un membre du personnel d’une ambassade ait davantage conscience des besoins et des problèmes de la CPI peut se traduire concrètement par une prise de position publique plus favorable de son administration. Bien que les séminaires soient souvent financés par des États parties et des institutions intergouvernementales, la participation de responsables de la CPI est capitale. Dans la résolution omnibus ou sur la coopération, les États parties devraient :

  • Encourager la cour à poursuivre les efforts qu’elle déploie pour promouvoir la coopération avec les États, les organisations régionales et internationales et la société civile, entre autres à travers une participation à des séminaires régionaux afin d’élargir ses réseaux de coopération et de soutien.

Dans le cadre des discussions sur le budget, les États parties devraient :

  • Veiller à ce que des ressources raisonnables soient prévues dans le budget voyages de la cour afin de permettre des contacts indispensables entre son personnel et ses responsables et les partenaires internationaux qui s’avèrent essentiels pour accroître la coopération.

IV. Non-coopération

Parallèlement à ses  efforts pour faciliter le renforcement de la coopération, l’AEP a pour mandat d’apporter des réponses appropriées à la non-coopération. Cette responsabilité est mentionnée aux articles 87 et 112 du Statut de Rome. L’article 87, en ses paragraphes 5 et 7, dispose que si ayant conclu un arrangement ad hoc ou un accord avec la cour, un État partie ou non partie « n’accède pas » à une demande de coopération, la cour « peut en prendre acte et en référer » à l’AEP ou au Conseil de sécurité de l’ONU si c’est celui-ci qui l’a saisie. Pour sa part, aux termes de l’article 112(2)(f), l’AEP examinera toute question relative à la non-coopération. Lors de la neuvième session, l’AEP a chargé son Bureau « de préparer un rapport sur les procédures dont l’Assemblée pourrait avoir besoin pour s’acquitter de son mandat, afin d’examiner toute question relative à un défaut de coopération et de soumettre ce rapport à l’Assemblée pour examen lors de sa dixième session ».[61]

Le rapport du Bureau qui a maintenant été élaboré envisage deux scénarios distincts : dans le premier, la cour a soumis à l’AEP un problème spécifique de non-coopération, et dans le second, avant que la cour ne soumette le problème de non-coopération, des mesures urgentes peuvent s’avérer nécessaires pour obtenir une coopération aux fins de l’arrestation et de la remise d’un individu faisant l’objet d’un mandat d’arrêt de la cour. Comme stipulé dans le rapport, dans le premier scénario, il faudrait de la part de l’AEP « une réponse formelle comprenant certains éléments publics » (bien qu’une réponse informelle et urgente puisse être apportée dans un premier temps), tandis que dans le second scénario, il faudrait apporter « une réponse totalement informelle au niveau diplomatique et politique ». [62]

La suite du rapport suggère des procédures associées à chaque scénario. Les réponses formelles après soumission par la cour du problème de non-coopération reviendraient principalement à offrir à l’État concerné diverses possibilités de réagir par l’entremise du Bureau, suivies par la possibilité d’un dialogue ouvert entre ledit État, les États parties, les États observateurs et des représentants de la société civile lors d’une session de l’AEP. Après le dialogue ouvert, le Bureau pourrait rédiger un rapport incluant des recommandations en vue de mesures de l’Assemblée à discuter et à mettre en œuvre—éventuellement via une résolution de l’AEP.[63]Les réponses informelles aux situations de non-coopération institutionnaliseraient la pratique actuelle du recours aux bons offices du président de l’AEP pour soulever la question avec l’État concerné et d’autres partenaires en mesure de susciter une coopération, avec l’assistance supplémentaire de quatre points focaux régionaux sélectionnés par le Bureau. Sur la base d’un rapport du président du Bureau concernant ce recours à de bons offices, le Bureau déciderait si le président doit continuer à s’investir dans cette question et de quelle manière.[64]

Ces propositions reflètent un bon point de départ pour que l’AEP prenne ses responsabilités en matière de non-coopération. L’existence de ces procédures renforcerait les moyens dont dispose l’AEP pour assumer ces responsabilités et enverrait un signal opportun montrant l’importance que l’AEP attache au respect des obligations des États à l’égard de la CPI. Lors de cette dixième session de l’AEP, nous recommandons aux États parties :

  • D’adopter les procédures prévues dans le rapport du Bureau sur les procédures auxquelles l’Assemblée pourrait avoir recours en cas de non-coopération.

En ce qui concerne les réponses formelles, il est clair que le véritable test résidera dans la mise en œuvre de ces procédures. Hormis la proposition d’adoption d’une résolution, le rapport n’aborde pas les véritables modalités d’une « réponse formelle » apportée par l’AEP à la suite du dialogue avec l’État concerné dans le cas où un problème de non-coopération est soumis par la cour. La perspective d’un blâme exprimé publiquement devant l’AEP est probablement l’un des outils les plus puissants dont dispose l’Assemblée pour garantir la coopération. En même temps, les États parties devraient poursuivre les discussions et :

  • Donner pour mandat au Bureau de fournir un rapport complémentaire afin d’arriver à un catalogue commun d’autres mesures à la disposition de l’AEP, notamment l’obtention de garanties de non-répétition et la suspension du droit de vote à l’AEP.

Par ailleurs, les États parties devraient veiller à ce que le cadre nécessaire soit mis en place pour faciliter le travail du Bureau concernant la non-coopération. Par exemple, le rapport du Bureau fait allusion à des discussions en « séance plénière de l’Assemblée dans le cadre du point sur la coopération mis à l’ordre du jour ». Ceci souligne l’importance de faire de la coopération un point permanent à l’ordre du jour de l’AEP, comme nous le recommandons plus haut. Si un groupe de travail sur la coopération venait à être mis sur pied, il conviendrait peut-être aussi d’examiner s’il ne serait pas plus pertinent de confier à ce forum la réalisation de certaines tâches attribuées au Bureau dans les procédures proposées.

Human Rights Watch salue en particulier l’inclusion dans le rapport de propositions de réponses informelles de la part de l’AEP pour anticiper un défaut de coopération dans l’arrestation et la remise de fugitifs recherchés par la CPI. Nous avons déjà constaté l’importance de ce type de réponses pour mener avec succès une stratégie à long terme en matière d’arrestation. Le Président Omar el-Béchir, recherché en vertu de deux mandats d’arrêt de la CPI pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, s’est rendu dans un certain nombre d’États parties à la CPI sans faire l’objet d’une arrestation (et en fait, ces visites ont été, dans une large mesure, le facteur à l’origine de l’attention accordée par l’AEP à la non-coopération). Mais d’autres visites à des États parties—et dès lors d’autres cas de non-coopération—et même à certains États non parties ont été évitées grâce aux efforts concertés de certains diplomates, dont le président de l’AEP, ainsi que de la société civile locale et internationale, qui se sont efforcés d’exercer des pressions sur les autorités nationales afin qu’elles interdisent à Béchir d’entrer dans leur pays ou qu’elles procèdent à son arrestation. Il s’agit en l’occurrence de visites au Kenya, en République centrafricaine, en Libye, en Zambie et en Malaisie. Par ailleurs, parfois, même lorsque des visites ont été effectuées, par exemple au Malawi, des démarches similaires ont réussi à attirer une importante couverture médiatique, mettant en avant l’obligation qu’ont les États parties à la CPI d’exécuter les mandats d’arrêt délivrés par la cour et montrant que la société civile et les États parties s’opposent à ce que ces visites ne débouchent pas sur une arrestation.

Certes, ces succès n’ont pas abouti concrètement à une arrestation. Mais ils ont fait en sorte que Béchir porte aujourd’hui l’étiquette de fugitif sur la scène internationale, signe que les choses ne devraient pas continuer comme avant pour ceux qui cherchent à échapper à la justice, et ils affirment l’intégrité des mandats d’arrêt de la CPI ainsi que l’importance de la coopération avec la cour. Au fil du temps, cela aide à préserver la validité des mandats d’arrêt et peut contribuer à la marginalisation, qui est parfois une condition préalable à l’arrestation finale.

Il faut souvent beaucoup de temps et des efforts considérables pour faire bouger les représentants d’États et de régions, les responsables de la CPI, la société civile locale et internationale et les journalistes. Dans de nombreux cas, réussir à prévenir la non-coopération dépend dès lors d’une « alerte précoce » et du partage efficace des informations entre ces réseaux. En institutionnalisant et en élargissant le travail jusqu’ici confié au président de l’AEP via les procédures proposées dans le rapport du Bureau, l’AEP peut assumer un rôle accru en aidant les parties concernées à œuvrer ensemble pour promouvoir une pleine coopération et aider les États à s’acquitter de leurs obligations.

V. La complémentarité, l’Assemblée et la CPI

Aussi important que puisse être le fait de développer davantage le plein potentiel de la CPI et de lui assurer un solide soutien, les besoins existants et émergents en matière de lutte contre l’impunité requièrent également d’étendre la portée de la justice internationale en réprimant, au niveau national, les atrocités perpétrées à grande échelle. C’est pour cette raison que Human Rights Watch s’est réjoui de l’attention accordée lors du bilan de la conférence de révision aux défis à relever pour garantir une mise en œuvre plus efficace du principe de complémentarité—fondement du système du Statut de Rome. Néanmoins, traduire l’attention accrue accordée à la complémentarité en résultats tangibles sur le terrain demeure difficile.

Human Rights Watch mène des recherches et des projets de plaidoyer en Bosnie, en République démocratique du Congo, en Guinée, au Kenya et en Ouganda, soit pour promouvoir la répression des crimes massifs au niveau national, soit pour analyser les enquêtes et poursuites concernant ces crimes qui sont menées actuellement, sont au point mort ou n’ont pas abouti. Les résultats de nos travaux permettront d’examiner les obstacles persistants auxquels se heurtent ces procédures nationales, allant d’un engagement politique instable à l’absence de cadres législatifs et de capacités. Ils mettront également en lumière quelques possibles solutions, bien qu’imparfaites, telles que la présence mixte de personnel national et international au sein de la Chambre pour les crimes de guerre située à Sarajevo. Mais à l’exception de la Bosnie, dans chacun de ces pays, les progrès opérés dans la répression des crimes massifs sont limités, en particulier lorsque les personnes visées sont des individus occupant une position de force ou une fonction de dirigeant.

Ce constat n’est pas surprenant et réaffirme l’importance de recourir à la CPI en dernier ressort. Accroître l’application effective du principe de complémentarité est clairement un projet de longue haleine et l’AEP demeure un acteur indispensable.  

Au cours de l’année qui s’est écoulée, les discussions de Kampala ont continué à porter leurs fruits et à se multiplier dans un certain nombre de forums. Bien que ces discussions aient sensibilisé l’AEP et la communauté de la CPI au fait primordial que « l'assistance internationale doit être renforcée afin de pouvoir poursuivre efficacement les auteurs des crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale », ce point a de plus en plus souvent été intégré par d’autres parties concernées importantes. Parmi celles-ci figurent en premier lieu un certain nombre d’acteurs du développement.[65]

La Commission européenne a poursuivi les efforts déployés pour mettre en place une « boîte à outils » destinée à fournir des orientations pour son élaboration de projets visant à renforcer les capacités nationales en matière de répression des crimes internationaux graves. Par ailleurs, la version actualisée du Plan d’action de l’Union européenne concernant la CPI—promesse faite à Kampala—contient maintenant un chapitre sur la « complémentarité », lequel dispose que dans la coopération au développement, l’UE et ses États membres donneront la priorité à la lutte contre l’impunité.[66]À la suite de l’engagement pris par le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires juridiques, lors de la session de l’AEP l’année dernière, selon lequel l’ONU accorderait une attention accrue à la question de la complémentarité, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a annoncé qu’il tiendra dûment compte des spécificités du Statut de Rome dans ses activités.[67]D’ailleurs, immédiatement avant la dixième session de l’AEP, le Centre International pour la Justice Transitionnelle et le PNUD tiendront une conférence sur la complémentarité en grande partie axée sur l’État de droit et les acteurs du développement. La Banque mondiale a également accordé davantage d’attention au rapport entre la justice et le développement, invitant le président de la cour, le Juge Sang-Hyun Song, à prononcer une allocution lors de l’ouverture de sa « Semaine du droit, de la justice et du développement » organisée cet automne.[68]

Comme nous l’avons noté précédemment, en amont de la conférence de Kampala, au sein des programmes généraux de renforcement de l’État de droit, l’accent avait été peu souvent mis sur un sous-ensemble distinct d’assistance spécifiquement axé sur les crimes relevant de la compétence de la CPI.[69] Un changement de paradigme qui verrait la reconnaissance de l’importance et de la priorité de ce sous-ensemble d’assistance est absolument indispensable si l’on veut générer dans la pratique un « renforcement de l’assistance internationale » pour pouvoir réprimer les crimes relevant de la compétence de la CPI. L’AEP devrait dès lors considérer que l’intérêt accru des acteurs du développement pour la complémentarité est un succès significatif.

Mais étant donné l’incompréhension qui régnait avant Kampala, et les points de vue encore divergents des acteurs de l’État de droit et de la communauté de la CPI, il est trop tôt pour dire si cet intérêt accru donnera lieu au changement de paradigme nécessaire. Le risque réel demeure que les acteurs du développement cherchent à revenir au statu quo, subordonnant ou assimilant les objectifs spécifiques de la lutte contre l’impunité pour les crimes internationaux à une assistance plus importante sur le plan de l’État de droit.

Les efforts en matière de complémentarité impliquent la participation continue de l’AEP. L’assemblée comprend à la fois les États en mesure de fournir une assistance, ceux susceptibles d’avoir besoin de cette assistance et un certain nombre d’observateurs clés—notamment au sein des États non parties et des organisations de la société civile—et elle a accès au personnel de la CPI, une ressource clé pour la complémentarité. Ces acteurs sont tous unis par l’engagement qu’ils partagent à l’égard de la lutte contre l’impunité. L’AEP est dès lors particulièrement bien placée pour être la garante du concept de complémentarité, veillant à ce que l’accent reste mis sur les points clés même lorsque de nouveaux acteurs entrent en scène.
L’AEP devrait davantage prêter attention à la complémentarité afin qu’elle ne renonce pas à apporter à ces efforts sa valeur ajoutée unique. Des progrès ont été opérés sur le plan de la prise de conscience du rôle attribué au Secrétariat de l’AEP dans la résolution de Kampala sur la complémentarité, celui de « faciliter l'échange d'informations entre la Cour, les États Parties et les autres parties prenantes, y compris les organisations internationales et la société civile, en vue de renforcer les juridictions nationales ».[70]Le Secrétariat de l’AEP a élaboré des plans pour un « extranet » ou portail Internet sur la complémentarité visant à faciliter les échanges d’information virtuels concernant les ressources en matière de complémentarité, les offres et les demandes d’assistance et les enseignements tirés. L’ « extranet » pourrait s’avérer être un outil utile et, une fois lancé, nous encourageons le Secrétariat de l’AEP à déployer des efforts importants pour assurer sa publicité auprès des parties prenantes et pour promouvoir une utilisation et une mise à jour fréquentes du site. Cela se révèlera primordial pour faire en sorte que l’ « extranet » devienne une source d’information dynamique et incontournable.

Mais il en faudra davantage, si l’on s’en réfère aux plans décrits dans le rapport du Bureau sur la complémentarité publié cette année. Nous avons défini précédemment le rôle de catalyseur de l’AEP—assumé par l’intermédiaire des points focaux ou facilitateurs pour la complémentarité et du Secrétariat de l’AEP—qui comprend trois fonctions centrales : (1) assurer un dialogue entre la communauté de la CPI et les autres acteurs de l’État de droit via une participation à des concertations, à des initiatives et au développement de lignes politiques au sein d’autres forums, et transmettre les informations relatives à ces initiatives à la communauté de l’AEP ; (2) faciliter les initiatives concrètes en servant de point de contact à ceux qui recherchent une assistance et à ceux qui sont en mesure de la fournir, en mettant au départ l’accent sur une situation choisie dont la CPI est saisie ; et (3) convoquer des discussions au sein de l’AEP sur des défis spécifiques—tels que forger une volonté politique—ou certains domaines d’assistance.[71]L’ « extranet » pourrait apporter une contribution importante en ce sens, mais en définitive, il s’agira pour les points focaux de l’AEP et le personnel du Secrétariat d’engager des efforts soutenus en matière de mise en réseau et de diplomatie. Pour ce faire, le rapport du Bureau sur la complémentarité indique que le Secrétariat se met également en contact avec les autres parties prenantes afin d’établir des relations.

L’année dernière, dans nos discussions avec les États parties en marge de la session de l’AEP, certains se sont inquiétés d’une part des implications financières qu’entraînerait un rôle accru de l’AEP, et d’autre part de la charge de travail que devraient assumer les points focaux de l’AEP et le personnel du Secrétariat. Bien qu’à nos yeux, les fonctions énoncées plus haut représentent des objectifs modestes, nous convenons qu’il faudrait peut-être accroître le rôle de l’AEP et de son Secrétariat au fil du temps et le faire évoluer en fonction de l’expérience. L’idéal serait que les ressources supplémentaires disponibles à l’avenir permettent au Secrétariat d’augmenter sa capacité à institutionnaliser davantage le travail de l’AEP en matière de complémentarité.

Il est indispensable que l’AEP poursuive et intensifie ses efforts dans le domaine de la complémentarité. Les États parties devraient :

  • Reconnaître, dans les déclarations faites lors du débat général, le rôle central de la CPI en tant qu’instance n’agissant qu’en dernier ressort en l’absence de véritables actions intentées par les autorités nationales, ainsi que le rôle de l’AEP dans les discussions visant à faire en sorte que le principe de complémentarité soit davantage mis en pratique.
  • Inclure une mention dans la résolution omnibus donnant mandat au Bureau de poursuivre son dialogue sur la complémentarité afin de fournir une base pour la redésignation des points focaux ; et
  • Poursuivre les discussions au sein de l’AEP afin d’optimiser le rôle de ces points focaux et celui du Secrétariat de l’AEP, et fixer des objectifs spécifiques devant être atteints par l’AEP avant la onzième session de l’AEP.

Par ailleurs, les États parties devraient continuer à appuyer et à encourager l’action de la cour en matière de complémentarité. Human Rights Watch accueille avec satisfaction le rapport de la cour sur la complémentarité publié pour la dixième session de l’AEP, rapport requis par la Conférencede révision.[72]Ce document aide à clarifier la nature de l’engagement de la cour dans les activités de complémentarité ; il est évident que dans le cadre de son travail quotidien, elle est souvent bien placée pour catalyser les initiatives de complémentarité et appuyer ces initiatives en lui apportant son expertise.[73]Bien que le rapport de la cour indique que ces activités sont entreprises dans les limites des ressources existantes ou avec des ressources externes,[74]Human Rights Watch estime que même les dépenses modestes encourues pour mener et renforcer ces initiatives devraient être assumées par les États parties compte tenu des possibilités importantes qu’elles offrent de générer des dividendes en termes de renforcement des capacités nationales pour réprimer les crimesrelevant de la compétence de la CPI.

Lors de la dixième session de l’AEP, dans le texte de la résolution omnibus, les États parties devraient :

  • Accueillir favorablement le rapport de la cour sur la complémentarité ;
  • Encourager la cour à continuer d’identifier les domaines dans lesquels elle peut contribuer, par son travail et son expertise, aux initiatives de complémentarité ainsi qu’au travail du Secrétariat de l’AEP. La cour devrait mettre particulièrement l’accent d’une part sur un examen plus approfondi du lien, analysé plus haut, entre l’élaboration de plans de retrait et l’héritage laissé par la cour dans les situations dont elle est saisie, et d’autre part, sur l’engagement dans des initiatives de complémentarité qui contribuent à renforcer les capacités nationales pour réprimer les crimes internationaux dans ces situations ; et
  • Inviter la cour à fournir un rapport actualisé sur la complémentarité lors d’une future session de l’AEP.

 


[1]Voir Panel indépendant sur les élections judiciaires de la Cour pénale internationale (CPI), « Rapport sur les Présentations aux Élections Judiciaires 2011 de la Cour Pénale Internationale », 26 octobre 2011, http://www.iccindependentpanel.org/sites/default/files/Panel%20ind%C3%A9... (consulté le 13 novembre 2011). Le Statut de Rome identifie plusieurs critères pour guider les États parties à la CPI lors de la sélection des juges. L’article 36(3) dispose que « les juges sont choisis parmi des personnes jouissant d'une haute considération morale, connues pour leur impartialité et leur intégrité et réunissant les conditions requises dans leurs États respectifs pour l'exercice des plus hautes fonctions judiciaires ». Chaque candidat à l’élection au poste de juge à la CPI doit avoir une compétence reconnue soit dans les domaines du droit pénal et de la procédure pénale (candidats dits de la « Liste A ») ou dans des domaines pertinents du droit international (candidats dits de la « Liste B »). Par ailleurs, les États parties devraient tenir compte des exigences énumérées à l’article 36(8) concernant la représentation des hommes et des femmes, la représentation géographique et la représentation des principaux systèmes juridiques, gardant à l’esprit le besoin d’inclure des juges ayant une expertise juridique spécifique à propos de questions telles que la violence à l’égard des femmes et des enfants. Statut de Rome de la CPI (« Statut de Rome »), Doc. ONU A/CONF.183/9, 17 juillet 1998, entré en vigueur le 1er juillet 2002, art. 36.

[2]Panel indépendant sur les élections judiciaires de la CPI, « Rapport sur les Présentations aux Élections Judiciaires 2011 de la Cour Pénale Internationale »,” pp. 19-21.

[3]Le Statut de Rome prévoit un total de 18 juges siégeant à la CPI : un minimum de six au sein de la Section préliminaire et de la Section de première instance, et cinq au sein de la Section des appels. Sur la base du nombre de votes minimum requis aux termes du Statut de Rome, les États parties doivent élire au moins trois juges parmi les candidats de la « Liste A » lors des prochaines élections. Le nombre de votes minimum requis pour les candidats de la « Liste B » est déjà atteint. Voir Secrétariat de l’Assemblée des États parties (AEP), Note verbale, ICC-ASP/10/S/04, 7 février 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Elections/EJ2011/NV-Election-Jud... (consulté le 20 novembre 2011), pp. 13-14. Néanmoins, sur les six juges dont le mandat expire le 10 mars 2012, quatre sont affectés à la section de première instance, un siège à la fois au sein de la section préliminaire et de la section de première instance, et le dernier est affecté à la section des appels. Le Juge Sylvia Steiner est affectée à la section préliminaire où elle est membre de la chambre préliminaire I et elle siège également en première instance au procès de Jean-Pierre Bemba. Human Rights Watch estime par conséquent que, pour promouvoir le fonctionnement efficace et effectif des chambres, au moins cinq des six postes judiciaires vacants devraient être occupés par des personnes qui jouissent d’une solide expérience pratique en matière de procès au pénal.

[4]Ces critères sont expliqués plus en détail dans : Lettre de Human Rights Watch aux ministres des Affaires étrangères des États parties à la CPI, « Recommendations for Nominating and Electing Candidates to Serve as Judges », 18 mai 2011, https://www.hrw.org/news/2011/05/18/icc-recommendations-nominating-and-el....

[5]Panel indépendant sur les élections judiciaires de la CPI, « Rapport sur les Présentations aux Élections Judiciaires 2011 de la Cour Pénale Internationale », p. 21.

[6]Voir AEP, « Renforcement de la Cour pénale internationale et de l’Assemblée des États parties (« Résolution omnibus  de la neuvième session »), ICC-ASP/9/Res.3, 10 décembre 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-9-Res.3-FRA.pdf(consulté le 20 novembre 2011), para. 25 ; Bureau de l’AEP, « Second ICC-ASP Bureau Meeting: Agenda and Decisions », 1erfévrier 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Bureau/ICC-ASP-2011-Bureau-2-D-0... (consulté le 15 novembre 2011), p. 1.

[7]Le Comité de recherche est composé des personnes suivantes appartenant à chacun des cinq groupes régionaux de l’ONU : le Prince Zeid Ra’ad Zeid Al-Hussein, représentant permanent du Royaume hachémite de Jordanie auprès des Nations Unies (Groupe des États d’Asie et Coordinateur) ; Baso Sangqu, représentant permanent de la République sud-africaine auprès des Nations Unies (Groupe des États d’Afrique) ; Miloš Koterec, représentant permanent de la République slovaque auprès des Nations Unies (Groupe des États d’Europe orientale) ; Joel Hernández García, conseiller juridique auprès du Secrétariat des relations extérieures du Mexique (Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes) ; et Sir Daniel Bethlehem, Q.C., ancien conseiller juridique du Ministère des Affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni (Groupe des États d’Europe occidentale et autres États).

[8]AEP, « Bureau de l’Assemblée des États parties, Comité de recherche de candidats pour le poste de Procureur de la Cour pénale internationale, Mandat » (« Mandat »), ICC-ASP/9/INF.2, 6 décembre 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP9/ICC-ASP-9-INF.2-FRA.pdf (consulté le 20 novembre 2011), para. 6.

[9]Ibid., para. 3 ; « Le Comité de recherche de candidats pour le poste de Procureur de la CPI : déclaration du Président de l’Assemblée, Monsieur l’Ambassadeur Christian Wenaweser », communiqué de presse de l’AEP, 22 juillet 2011, http://www.icc-cpi.int/menus/asp/press%20releases/press%20releases%20201... (consulté le 20 novembre 2011).

[10]« Rapport du Comité de recherche des candidats pour le poste de Procureur de la Cour pénale internationale », 22 octobre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Elections/EP2011/EP2011-PSC-Repo... (consulté le 20 novembre 2011), p. 1.

[11]Ibid., pp. 5-6.

[12]L’article 42(3) du Statut de Rome dispose que l’élection du procureur devrait être guidée par le mérite, stipulant qu’il doit s’agir d’une personne tenue de  « jouir d'une haute considération morale et avoir de solides compétences et une grande expérience pratique en matière de poursuites ou de procès dans des affaires pénales.

[13]Lettre adressée au Comité de recherche de candidats pour le poste de Procureur de la Cour pénale internationale  par la Fédération Internationaledes Ligues des Droits de l'Homme, Human Rights Watch, le Centre International pour la Justice Transitionnelle, l’International Crisis Group, l’Institute for Security Studies et l’ Open Society Initiative, 16 mars 2011, https://www.hrw.org/sites/default/files/related_material/ICC%20prosecutor....

[14]AEP, « Projet de budget-programme pour 2012 de la Cour pénale internationale » (« Demande de budget 2012 »), ICC-ASP/10/10, 21 juillet 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-10-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011), paras. 2, 4.

[15]La cour a indiqué qu’elle demanderait probablement 3,38 millions d’euros pour réapprovisionner le Fonds en cas d’imprévus afin d’atteindre le seuil de réapprovisionnement de 7 millions d’euros, mais elle a également signalé que le montant exact requis pour le réapprovisionnement ne pouvait être calculé qu’après la clôture officielle des comptes de la cour. Le solde du Fonds en cas d’imprévus au début de l’année s’élevait à8,757 millions d’euros. Voir AEP, « Rapport du Comité du budget et des finances sur les travaux de la dix-septième session » (« Rapport de la 17esession du CBF »), ICC-ASP/10/15, 18 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-15-FRA.pdf (consulté le 23 novembre 2011), para. 50 (solde d’ouverture du Fonds en cas d’imprévus).

[16]Le Comité du budget et des finances (CBF) de l’AEP, composé d’experts, a identifié un certain nombre d’autres dépenses additionnelles possibles, entre autres le financement du Bureau de liaison auprès de l’Union africaine, le loyer et l’entretien des locaux temporaires, ainsi que les coûts associés aux locaux permanents, au réapprovisionnement du Fonds en cas d’imprévus, à la nouvelle situation en Côte d’Ivoire et au possible appel à d’autres juges (en dehors des postes déjà budgétisés par la cour). Ibid., p. 5, table 1. Les Pays-Bas, pays d’accueil, ont offert de financer les coûts des locaux temporaires pour 2012. Voir Bureau de l’AEP, « Seventeenth ICC-ASP Bureau Meeting: Agenda and Decisions », 1ernovembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Bureau/ICC-ASP-2011-Bureau-17-D-... (consulté le 20 novembre 2011), p. 1. Les coûts associés à la situation en Côte d’Ivoire feront probablement l’objet d’une demande de budget supplémentaire présentée à l’AEP. La question des dépenses liées au Bureau de liaison auprès de l’Union africaine ne se posera que si un accord concernant l’ouverture dudit bureau est conclu cette année avec l’Union africaine.

[17]AEP, « Rapport de la 17esession du CBF », pp. 36-38, annexes IV-V.

[18]Ibid., paras. 13-14. Le CBF a identifié les domaines suivants comme étant des « inducteurs de coûts » méritant un examen stratégique de la part de l’AEP : l’aide judiciaire ; les nouvelles situations dont les renvois du Conseil de sécurité de l’ONU ; les réparations ; le processus budgétaire ; la sensibilisation ; et les modes alternatifs de financement et de prestation de services. Ibid., paras. 15-26.

[19]L’Équipe de la CCPI sur le Budget et les Finances a écrit à tous les États parties en juillet 2011, signalant le besoin de prévoir une croissance continue dans le budget de la cour, et elle a remis ses observations à la dix-septième session du Comité du budget et des finances portant sur bon nombre de ces points. Voir Lettre adressée aux États parties à la CPI par l’Équipe de la CCPI sur le Budget et les Finances, 6 juillet 2011, http://www.iccnow.org/documents/Lettre_de_la_CCPI_sur_le_budget_2012_de_... (consulté le 15 novembre 2011) ; Équipe de la CCPIsur le Budget et les Finances, « Soumission à l’attention du Comité sur le Budget et les Finances lors de sa dix-septième session du 22 au 30 août 2011 : Commentaires relatifs au projet de budget-programme pour 2012 de la Cour pénale internationale et autres domaines », 17 août 2011, http://www.iccnow.org/documents/Commentary_on_2012_budget_FRENCH1_%282%2... (consulté le 15 novembre 2011).

[20]« Audit externe, budget-programme pour l’exercice 2011 et documents y relatifs », para. 31, dansDocuments officiels de l’Assemblée des États parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, Neuvième session, New York, 6-10 décembre 2010, ICC-ASP/9/20, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP9/OR/ICC-ASP-9-20-Vol.I-Part.... (consulté le 20 novembre 2011), vol. 1, partie II, pp. 9-12.

[21]AEP, « Renforcer laCourpénale internationale et l’Assemblée des États parties », ICC-ASP/4/Res.4, 3 décembre 2005, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-ASP4-Res-04-... (consulté le 20 novembre 2011), para. 22. Le Plan stratégique d’information et de sensibilisation de la cour est disponible sur http://www.icc-cpi.int/NR/rdonlyres/FB4C75CF-FD15-4B06-B1E3-E22618FB404C... (consulté le 22 novembre 2011).

[22]Voir AEP, « Renforcer la Cour pénale internationale et l’Assemblée des États parties »,ICC-ASP/5/Res.3, 1er décembre 2006, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-ASP5-Res-03-... (consulté le 20 novembre 2011), para. 20; « Renforcer la Cour pénale internationale et l’Assemblée des États parties »,ICC-ASP/6/Res.2, 14 décembre 2007, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-ASP6-Res-02-... (consulté le 20 novembre 2011), para. 20 ; « Renforcer la Cour pénale internationale et l’Assemblée des États parties »,(« Résolution omnibus de la septième session), ICC-ASP/7/Res.3, 21 novembre 2008, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-ASP7-Res-03-... (consulté le 20 novembre 2011), para. 25 ; « Renforcer la Cour pénale internationale et l’Assemblée des États parties »,(« Résolution omnibus de la huitième session), ICC-ASP/8/Res.3, 26 novembre 2009, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-8-Res.3-FRA.pdf (consulté le 20 novembre 2011), para. 33 ; AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para 38.

[23]AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para 38.

[24]AEP, « Résolution omnibus de la huitième session », para. 34 ; AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para. 39.

[25]Voir Human Rights Watch, « Mémorandum pour la huitième session de l’Assemblée des États parties de la Cour pénale internationale » (« Mémo pour la huitième session ») novembre 2009, https://www.hrw.org/sites/default/files/related_material/M%C3%A9morandum%..., pp. 12-13. Le « Rapport de la Cour sur la stratégie d’information, 2011-2013 » de la CPI est disponible sur : http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP9/ICC-ASP-9-29-FRA.pdf (consulté le 22 novembre 2011).

[26]En ce qui concerne l’information et la sensibilisation, chaque année depuis 2007, la cour a produit des rapports circonstanciés sur les efforts déployés. Ses rapports annuels peuvent être consultés sur http://www.icc-cpi.int/menus/icc/structure%20of%20the%20court/outreach/o... (consulté le 22 novembre 2011). La conférence de révision de Kampala en 2010 a également été l’occasion d’évaluer les activités de sensibilisation mises en œuvre par la CPI lorsque le rapport entre la sensibilisation, la participation des victimes, les réparations et l’impact de la cour au sein des communautés affectées a été choisi pour être l’un des quatre thèmes du bilan. La résolution sur l’impact adoptée à Kampala a mis l’accent sur le lien entre la sensibilisation et la participation des victimes, et souligné le besoin de continuer « à optimiser et à adapter » les activités d’information et de sensibilisation. Conférence de révision du Statut de Rome, « L’impact du système du Statut de Rome sur les victimes et les communautés affectées », Résolution RC/Res.2,  8 juin 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/RC-Res.2-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011), préambule, para. 3.

[27]Human Rights Watch s’associe également au document de l’Équipe de la CCPI sur les Communications préparé pour la dixième session de l’AEP.

[28]AEP, « Budget-programme pour 2009, Fonds de roulement pour 2009, barème des quotes-parts pour la répartition des dépenses de la Cour pénale internationale, financement des autorisations de dépenses pour l’exercice 2009 et Fonds en cas d’imprévus », ICC-ASP/7/Res.4, 21 novembre 2008, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-ASP7-Res-04-... (consulté le 20 novembre 2011), p. 3.

[29]Voir, par exemple, AEP, « Rapport intérimaire de la Cour sur l’étude des gains d’efficience possibles en 2010 », ICC-ASP/8/6, 6 mai 2009, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP8/ICC-ASP-8-6-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011).

[30]Voir AEP, « Rapport de la 17esession du CBF », para. 48.

[31]AEP, « Création d’un groupe d’étude sur la gouvernance », ICC-ASP/9/Res.2, 10 décembre 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-9-Res.2-FRA.pdf (consulté le 20 novembre 2011), paras. 1-2.

[32]AEP, « Rapport du Bureau concernant le groupe d’étude sur la gouvernance », ICC-ASP/10/30, 22 novembre 2011,  http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-30-FRA.pdf (consulté le 2 décembre 2011), para. 3.

[33]Voir Human Rights Watch, « Mémorandum pour la neuvième session de l’Assemblée des États parties de la Cour pénale internationale » (« Mémo pour la neuvième session »), novembre 2010, https://www.hrw.org/fr/news/2010/12/01/human-rights-watch-memorandum-nint..., pp. 26-31.

[34]Pour une analyse plus approfondie, voir CCPI, « Soumission pour la 17e session du CBF », pp. 3-6. Ces unités sont la Section de la participation des victimes et des réparations, le Bureau du conseil public pour la Défense, la Section de l’information du public et de la documentation, l’Unité des victimes et des témoins, ainsi que le Bureau de l’audit externe, et des redéploiements des ressources sont également prévus entre bureaux locaux. La demande de budget de la cour reconnaît que l’évolution éventuelle des procédures engagées dans quatre affaires—Mburashimana, Banda de Jerbo, et les deux affaires au Kenya—ou dans les nouvelles situations ne sont pas prises en compte dans sa demande de budget. AEP, « Demande de budget pour 2012 » para. 72. Dans les affaires Mburashimana et du Kenya, les décisions relatives à la confirmation des charges sont attendues début 2012.

[35]AEP, « Demande de budget 2012 » para. 57.

[36]« Hundreds of victims prevented from participating in crucial court hearings due to lack of resources at the International Criminal Court », communiqué de presse de REDRESS, 15 juillet 2011, http://www.iccnow.org/documents/StatementVictimParticipation15July2011.pdf (consulté le 15 novembre 2011). Lors des discussions sur la révision de la « Stratégie relative aux victimes » de la CPI au sein du Groupe de travail de La Haye convoqué par le facilitateur pour les victimes et les communautés affectées et le Fonds au profit des victimes, les responsables de la cour ont indiqué que les contraintes en matière de ressources limitaient la mise en œuvre de la stratégie à tous les niveaux. Voir AEP, « Rapport du Bureau sur les victimes et les communautés affectées et le Fonds au profit des victimes », ICC-ASP/10/31, 22 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-31-FRA.pdf (consulté le 5 décembre 2011), para. 8. Les États parties semblent avoir répondu que la stratégie « est par trop ambitieuse et manque de réalisme, notamment parce qu’elle n’est pas viable dans le cadre des ressources disponibles ». Ibid., para. 11.

[37]Silvana Arbia, Greffier de la CPI, « Allocution à la 21eséance d’information à l’intention du corps diplomatique », La Haye, 8 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/NR/rdonlyres/6E215717-3219-4C7E-A924-A9D18BF8CDC8... (consulté le 15 novembre 2011), pp. 4-5.

[38]Luis Moreno-Ocampo, procureur de la CPI, « Remarks to the 21stDiplomatic Briefing », La Haye, 8 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/NR/rdonlyres/6E215717-3219-4C7E-A924-A9D18BF8CDC8... (consulté le 15 novembre 2011), p. 4. [Traduction de Human Rights Watch]

[39]Ibid., pp. 3-4 ; Bureau du Procureur, « Discussion Document—Increasing the Efficiency of Judicial Proceedings », 14 juin 2011, copie en possession de Human Rights Watch, p. 2.

[40]Voir plus généralement Human Rights Watch, Un travail inabouti : Des lacunes à combler dans la sélection des affaires traitées par la CPI, septembre 2011, https://www.hrw.org/fr/reports/2011/09/15/un-travail-inabouti-0.

[41]Voir AEP, « Rapport du Bureau concernant le Groupe d’étude sur la gouvernance », para. 25.

[42]Ibid., para. 24.

[43]Voir AEP, « Rapport sur le Modèle de capacité de la Cour », ICC-ASP/5/10, 21 août 2006, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/library/asp/ICC-ASP-5-10_French.pdf (consulté le 15 novembre 2011).

[44]AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para. 36.

[45]AEP, « Rapport de la 17e session du CBF », para 22.

[46]Ibid., para. 19. Les activités de la cour et de l’AEP sur la complémentarité sont analysées dans la partie V.

[47]Ibid., para 23.

[48]Nous avons déjà exprimé antérieurement notre inquiétude quant aux informations parfois limitées mises à la disposition du  CBF, et quant à sa tendance à traiter des questions de politique générale qui ne relèvent pas de son mandat. Voir Human Rights Watch, « Mémo pour la huitième session », pp. 30-32, « Mémo pour la neuvième session », p. 26 ; voir également CCPI, « Non-Paper: Recommendations to the Study Group on Governance », 1ermars 2011, copie en possession de Human Rights Watch, p.2.

[49]Par exemple, la résolution sur la coopération adoptée lors de la huitième session de l’AEP a identifié 11 questions prioritaires pour le facilitateur en charge de la coopération. Il s’agit notamment de « chercher les moyens de continuer à renforcer le soutien public et diplomatique dont bénéficie la Cour », de « chercher les moyens de continuer à renforcer l’exécution des décisions de la Cour », de favoriser ou d’étudier la possibilité de conclure des accords avec la cour sur la réinstallation et la protection des témoins, l’exécution des peines, la mise en liberté provisoire, et de « chercher les moyens de recourir plus facilement à de nouveaux modes de preuve, y compris en ce qui concerne les informations financières ». AEP, « Coopération », Résolution ICC-ASP/8/Res.2, 26 novembre 2009, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-8-Res.2-FRA.pdf(consulté le 20 novembre 2011), para. 16.

[50]Nous avons également recommandé que les États parties nomment un sous-facilitateur pour la coopération chargé de rallier un soutien diplomatique devant les Nations Unies, lieu clé de débats touchant souvent à des questions concernant les travaux de la CPI et offrant une plateforme de prestige particulièrement importante pour la mission de la cour. Bien que l’AEP n’ait pas nommé de sous-facilitateur, un point focal a été nommé au sein du Groupe des Amis de la CPI basé à New York pour œuvrer en ce sens.

[51]AEP, « Rapport du Bureau sur la coopération », ICC-ASP/9/24, 17 novembre 2010 http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP9/ICC-ASP-9-24-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011), para. 19.

[52]Conférence de révision du Statut de Rome, « Coopération », Déclaration RC/Decl.2, 11 juin 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/RC-Decl.2-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011), para. 8.

[53]AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para. 11.

[54]  Le Plan d’action actualisé adopté par l’Union européenne (UE) en juillet 2011, dont la révision était l’un des engagements pris par l’UE lors de la conférence de révision de Kampala, dispose que « l’UE et ses États membres devraient échanger des informations sur la mise en œuvre des engagements pris en particulier à la Conférence de révision, à l’Assemblée des États parties ou dans tout autre forum international tel que la conférence du CICR [Comité international de la Croix-Rouge] ».Voir « Action Plan to follow-up on the Decision on the International Criminal Court » (« EU Action Plan »), annexe au mémorandum du Comité politique et de sécurité à COREPER, Conseil de l’Union européenne, « I » Item Note, 12 juillet 2011, http://www.iccnow.org/documents/EU_Action_Plan_st12080_en11.pdf (consulté le 15 novembre 2011), p. 13. [Traduction de Human Rights Watch] Un mécanisme de suivi des engagements au sein de l’AEP pourrait éventuellement opérer par le biais de l’établissement d’autres échanges régionaux d’informations, avec un rapport annuel des groupements régionaux à l’Assemblée.

[55]Voir Human Rights Watch, Courting History: The Landmark International Criminal Court’s First Years, juillet 2008, https://www.hrw.org/sites/default/files/reports/icc0708webwcover.pdf, pp. 223-30.

[56]AEP, « Rapport du Bureau sur la coopération », ICC-ASP/6/21, 19 octobre 2007, http://212.159.242.181/iccdocs/asp_docs/library/asp/ICC-ASP-6-21_French.pdf (consulté le 15 novembre 2011), paras. 23-28 (recommandations 7-11).

[57]Bien qu’elles visent des objectifs liés aux relations extérieures, ces visites de haut niveau peuvent également être l’occasion pour la cour de mener des activités d’information du public. En annonçant publiquement ces visites ou d’autres initiatives analogues conformément à la stratégie d’information de la cour accueillie favorablement par la neuvième session de l’AEP, la CPI peut sensibiliser l’ensemble du public à ses travaux et contribuer à augmenter le soutien populaire à l’égard de la cour. Cette démarche peut, pour sa part, avoir un impact sur le soutien politique et diplomatique.

[58]AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para. 31. L’AEP a également chargé la cour de « faire en sorte qu’il soit possible [en 2011] de disposer des ressources humaines nécessaires et de crédits de voyage d’un montant qui ne doit pas être inférieur aux dépenses réalisées en 2010 (38 000 euros), aux fins de maintenir des rapports diplomatiques avec l’Union africaine, en attendant que cette dernière revienne sur sa décision de ne pas donner suite à la demande de la Cour tendant à ouvrir un bureau de liaison à Addis–Abeba (Éthiopie) ». Voir AEP, « Budget–programme pour l’exercice financier 2011, Fonds de roulement pour l’exercice financier 2011, barème des quotes–parts pour la répartition des dépenses de la Cour pénale internationale, financement des autorisations de dépenses pour l’exercice financier 2011 et Fonds en cas d’imprévus », ICC-ASP/9/Res.4, 10 décembre 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/ICC-ASP-9-Res.4-FRA.pdf (consulté le 20 novembre 2011), p. 31.

[59]AEP, « Report of the Court on cooperation », ICC-ASP/10/40, 18 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-40-ENG.pdf (consulté le 20 novembre 2011), para. 71.

[60]Ibid., paras. 70-86.

[61]AEP, « Résolution omnibus de la neuvième session », para. 12.

[62]Bureau de l’AEP, « Rapport du Bureau sur les procédures auxquelles l’Assemblée pourrait avoir recours en cas de non-coopération », ICC-ASP/10/37, 8 septembre 2011,http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-37-FRA.pdf (consulté le 7 décembre 2011).  

[63]Ibid., paras. 13-14.

[64]Ibid., paras. 15-20.

[65]Conférence de révision du Statut de Rome, « Complémentarité » (Résolution sur la complémentarité »), Résolution RC/Res.1, 8 juin 2010, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/Resolutions/RC-Res.1-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011), para 3.

[66]Voir EU Action Plan, pp. 15-16. La « boîte à outils », une fois finalisée, pourrait servir de repère important aux États membres de l’UE pour la mise en œuvre de cet engagement, et également aux autres États et aux agences de développement..

[67]Voir AEP, « Rapport de la Cour sur la complémentarité », ICC-ASP/10/23, 11 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/iccdocs/asp_docs/ASP10/ICC-ASP-10-23-FRA.pdf (consulté le 15 novembre 2011), para.18 ; « Le Président de la CPI discute avec la Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement du renforcement desjuridictions nationales », communiqué de presse de la CPI, 18 mars 2011, http://www.icc-cpi.int/menus/icc/press%20and%20media/press%20releases/pr... (consulté le 15 novembre 2011) ; voir également Conseil de sécurité des Nations Unies, « État de droit et justice transitionnelle dans les sociétés en situation de conflit ou d’après conflit. Rapport du Secrétaire général », S/2011/634, 12 octobre 2011, http://www.unrol.org/files/S_2011_634FR.pdf (consulté le 16 novembre 2011), para. 32.

[68]« Le Président de la CPI appelle à davantage de synergie entre justice internationale et développement », communiqué de presse de la CPI, 15 novembre 2011, http://www.icc-cpi.int/menus/icc/press%20and%20media/press%20releases/ne... (consulté le 15 novembre 2011).

[69]Voir analyse dans Human Rights Watch, Making Kampala Count: Advancing the Global Fight against Impunity at the ICC Review Conference, mai 2010, https://www.hrw.org/sites/default/files/reports/ij0510webwcover.pdf, pp. 37-46.

[70]Conférence de révision du Statut de Rome, « Résolution sur la complémentarité », para. 10.

[71]Nous analysons ces recommandations plus en détail dans Human Rights Watch, « Mémo pour la neuvième session », pp. 19-23.

[72]Voir AEP, « Rapport de la Cour sur la complémentarité ».

[73]Le Bureau du Procureur note que la publicité de ses examens préliminaires peut faciliter les efforts déployés à l’échelon national en matière de responsabilisation. Ibid., para. 33. Human Rights Watch se réjouit de l’engagement du Bureau du Procureur à se servir du temps pris à décider s’il convient d’ouvrir une enquête pour être en prise directe avec les autorités nationales. La perspective d’une action de la CPI peut inciter les autorités nationales à déployer davantage d’efforts pour mener leurs propres enquêtes, tout en signalant aux violateurs potentiels des droits humains que la communauté internationale a le regard tourné vers eux. Mais bien que le bureau du procureur ait, au cours des dernières années, médiatisé davantage les « situations faisant l’objet d’un examen » et son action menée auprès des autorités nationales, cette action n’a pas toujours été cohérente. Nous formulons un certain nombre de recommandations au Bureau du Procureur pour qu’il renforce son approche dans Human Rights Watch, « Une trajectoire à rectifier : Recommandations au Procureur de la CPI en vue d’une approche plus efficace des « situations faisant l’objet d’un examen », juin 2011, https://www.hrw.org/sites/default/files/related_material/HRW%20Course%20C....

[74]AEP, « Rapport de la Cour sur la complémentarité », para. 5. 

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