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Iran : Exploitation du système judiciaire pour persécuter les bahaïs

Les autorités ont procédé à une vague d'arrestations arbitraires et de confiscations de biens

Des photos de membres de la communauté bahaïe en Iran qui ont été touchés par la vague de répression menée par les autorités iraniennes contre cette minorité.  © 2025 Bahá'í International Community (BIC)

(Genève) – Les autorités iraniennes ont intensifié leur répression contre les membres de la communauté bahaïe, avec une récente série de peines de prison sévères et de confiscations d'actifs, ont conjointement déclaré aujourd'hui l’ONG Bahá'í International Community (BIC) et Human Rights Watch. Le pouvoir judiciaire iranien mène la persécution des bahaïs, dans un contexte d'incitation croissante à la discrimination par les responsables de l'État, de propagande haineuse et de désinformation visant cette communauté religieuse minoritaire.

« Les autorités iraniennes persécutent sans relâche les bahaïs, les privant des droits humains les plus fondamentaux uniquement en raison de leur foi, ce qui constitue des crimes contre l'humanité », a déclaré Bahar Saba, chercheuse senior sur l'Iran à Human Rights Watch. « Il n'y a pratiquement aucun aspect de la vie des bahaïs en Iran qui n'ait été affecté par ces violations flagrantes qui constituent des crimes au regard du droit international. »  

La dernière vague de répression gouvernementale, qui s'est intensifiée à la suite du conflit entre Israël et l'Iran en juin 2025, s'est traduite par des arrestations arbitraires, des interrogatoires, des condamnations injustes, des emprisonnements et des confiscations de biens.

Entre juin et novembre 2025, la BIC a recensé plus de 750 actes de persécution à travers l'Iran, soit trois fois plus que le nombre enregistré au cours de la même période en 2024. Ces incidents comprennent plus de 200 perquisitions de domiciles et d'entreprises, suivies d'interrogatoires, qui ont abouti à la détention et à l'arrestation d'au moins 110 bahaïs. Les tribunaux révolutionnaires ont tenu des audiences pour plus de 100 personnes et ont prononcé de nouvelles condamnations contre des bahaïs, allant de deux à dix ans de prison. Au moins 45 personnes ont été convoquées pour commencer à purger leur peine de prison pendant cette période. Parmi les personnes emprisonnées figurent des mères qui ont été séparées de leurs jeunes enfants.

« Un système judiciaire qui devrait garantir l'équité et la neutralité et servir de refuge contre l'oppression sert plutôt d'arme de persécution contre les bahaïs, les dissidents et d'autres minorités religieuses et ethniques en Iran », a déclaré Simin Fahandej, représentante de la Communauté internationale bahaïe auprès des Nations Unies à Genève.

Les juges iraniens ont toujours fait preuve d'un mépris flagrant pour les procédures régulières et d'un préjugé religieux extrême à l'égard des bahaïs, la plus grande minorité religieuse non musulmane d'Iran. Au cours des 45 dernières années, un certain nombre de documents politiques, élaborés conformément à un mémorandum signé en 1991 par le Guide suprême iranien, ont révélé la politique délibérée et systématique du gouvernement visant à persécuter les bahaïs, notamment par le biais du système judiciaire du pays.

En avril 2025, l'Union européenne a imposé des sanctions à l’encontre de certaines sections du pouvoir judiciaire iranien ainsi qu'à plusieurs juges et procureurs pour violations des droits humains, y compris la persécution des bahaïs.

« Dans de nombreux cas, le pouvoir judiciaire iranien s'est montré peu disposé à remplir son devoir sacré de promoteur de la justice », a affirmé Simin Fahandej. « Au contraire, il a souillé ses mains et son bilan par des verdicts empreints de persécution et de préjugés religieux. Ces verdicts ont été rendus par des juges qui, à maintes reprises, ont cherché non pas à rendre justice, mais à réprimer la communauté bahaïe et sont profondément complices de la machine répressive de l'État. »

La dernière vague de persécutions contre les bahaïs a été marquée par des détentions dans des circonstances pouvant s'apparenter à des disparitions forcées et par une escalade des longues peines de prison à la suite de procès manifestement inéquitables. Dans certains cas, les tribunaux ont insisté pour prononcer des peines sévères après que la Cour suprême ait annulé les verdicts et ordonné de nouveaux procès, ou bien les autorités ont rouvert des procédures pénales contre des bahaïs après leur acquittement.

Selon les informations obtenues par la BIC, le 12 novembre, les forces de sécurité de Gorgan, dans la province du Golestan, ont arrêté Farhad Fahandej après avoir fouillé son domicile et saisi ses effets personnels. Son lieu de détention, le motif de son arrestation et les charges retenues contre lui sont restés inconnus pendant plusieurs semaines après son arrestation. Fahandej avait déjà passé 15 ans en prison en raison de ses convictions religieuses.

Fin octobre 2025, à Semnan, Anisa Fanaian, une femme bahaïe emprisonnée dans le passé pour sa foi, a été condamnée pour des chefs d'accusation vaguement formulés par la 10ème Chambre de la Cour d'appel de Semnan et condamnée à huit ans de prison. Ce verdict a été rendu après que la Cour suprême a annulé le précédent verdict rendu par un tribunal inférieur, à la suite d'une demande de réexamen judiciaire, et ordonné la tenue d’un nouveau procès.

Dans une autre affaire profondément alarmante et caractéristique d'un État utilisant le pouvoir judiciaire comme outil de répression, les autorités ont rouvert des procédures pénales contre 26 bahaïs à Shiraz. Selon les informations obtenues par la BIC, ces 26 personnes avaient été acquittées à la suite d'une décision de la Cour suprême qui avait annulé leurs condamnations et leurs peines en 2022 et ordonné un nouveau procès. La réouverture de la procédure pénale dans cette affaire aurait été demandée par un ancien président de la Cour suprême provinciale, conformément aux procédures prévues par le droit national, ce qui suggère fortement l'implication directe du chef du pouvoir judiciaire. Les informations obtenues par la BIC indiquent également que bon nombre des 26 personnes ont été victimes de torture et de mauvais traitements lors de leur arrestation initiale en 2016. Dans un incident emblématique des violations par les magistrats des garanties les plus élémentaires en matière de procédure régulière, l'ancien président de la Cour suprême a insulté l'avocat de la défense lors d'une réunion, et l'a expulsé de son bureau en déclarant : « Ce ne sont pas des suspects, ce sont des criminels. »

Dans une affaire jugée à Kerman le 29 novembre 2025, l’ONG Human Rights Activists News Agency (Agence de presse des activistes des droits humains - HRANA) a rapporté que la Cour d'appel de la province a condamné Shahram Fallah, 64 ans, à neuf ans et six mois de prison (soit une réduction de la peine originale de plus de 13 ans) et à un an d'exil interne, pour « activités éducatives et propagation d’informations déviantes contraires à la charia » et « formation d'un groupe visant à perturber la sécurité nationale ». Ces accusations reflètent celles utilisées dans d'autres affaires pour criminaliser la croyance pacifique des bahaïs.

À Hamadan, six femmes bahaïes - Neda Mohebbi, Atefeh Zahedi, Farideh Ayyoubi, Noura Ayyoubi, Zarrindokht Ahadzadeh et Jaleh Rezaie - ont été placées en détention le 26 octobre pour purger leur peine de prison. Les autorités avaient condamné cinq d'entre elles à six ans de prison et la sixième à sept ans. Ces femmes, dont certaines sont mères de jeunes enfants, étaient accusées d'« activités éducatives et de propagation d’informations déviantes contraires à la charia » et d'« appartenance à la secte bahaïe ».

À Karaj, Nahid Behrouzi a été condamnée le 6 octobre à une peine sévère, dont cinq ans de prison et la confiscation de ses biens personnels, pour « activités éducatives et de propagation d’informations déviantes contraires à la charia sacrée ». Selon les informations obtenues par la BIC, plusieurs agents l'ont arrêtée violemment sans mandat le 29 août 2024. Elle a subi des contusions et un saignement de nez. Elle a ensuite été détenue pendant 65 jours sans avoir accès à un avocat ni à des soins médicaux appropriés. Pendant le procès, son avocat s'est vu refuser l'accès complet à son dossier et aucune preuve n'a été présentée pour étayer les accusations.

À Shiraz, Roya Sabet, une résidente des Émirats arabes unis venue en Iran pour s'occuper de ses parents âgés, a été arrêtée le 25 octobre 2025 par des agents du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI), et transférée à la prison d'Adelabad pour purger une peine de 10 ans de prison qu'elle avait précédemment reçue. Les informations examinées par la BIC ont montré qu'elle avait été condamnée en mai 2025 sur la base d'accusations sans fondement de « collaboration avec des citoyens du gouvernement israélien » et de « formation d'un groupe contre la sécurité nationale ». Elle est également soumise à une interdiction de voyager pendant deux ans et à une interdiction d'activités en ligne pendant cinq ans. 

Dans une autre affaire emblématique de l'intensification de la répression étatique à l'encontre des femmes bahaïes, le 28 septembre 2025, les autorités ont confirmé des peines de prison allant de 5 à 10 ans à l'encontre de 10 femmes bahaïes à Ispahan, pour « propagande contre la République islamique » et « participation à des activités éducatives et propagation d’informations déviantes contraires à la charia sacrée ».

La politique des autorités visant à dépouiller les bahaïs de leurs biens économiques s'est également poursuivie sans relâche. Dans une affaire récente à Ispahan, la BIC a constaté que les autorités avaient invoqué l'article 49 de la Constitution, une clause permettant à l'État de saisir des biens « illégaux », pour s'approprier les biens légitimes de 20 bahaïs de la province, y compris leurs maisons, leurs véhicules et leurs comptes bancaires, sans procédure régulière. 

« Toutes les personnes impliquées dans des crimes relevant du droit international commis contre les bahaïs en Iran, y compris les procureurs et les magistrats, devraient être tenues responsables de leurs actes », a conclu Bahar Saba.

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