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Iran : Trois ans après la répression des manifestations, l’impunité perdure

Les gouvernements étrangers devraient soutenir les efforts visant la reddition de comptes pour les abus

Des Iraniennes et Iraniens manifestaient à Téhéran le 1er octobre 2022, suite à la mort de Mahsa Amini, une jeune femme iranienne âgée de 22 ans qui est décédée quelques jours après son arrestation par la police des mœurs. © 2022 AP Photo/Images du Moyen-Orient

(Beyrouth, 16 septembre 2025) – Les autorités iraniennes n'ont toujours pas mené d'enquêtes efficaces, impartiales et indépendantes sur les graves violations des droits humains et les crimes de droit international commis lors des manifestations « Femme, Vie, Liberté » de septembre 2022 et par la suite, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Le troisième anniversaire des manifestations devrait rappeler avec force aux gouvernements préoccupés l’importance des efforts visant à tenir les auteurs de crimes responsables de leurs actes, et à permettre aux familles des victimes d’obtenir justice.

En mars 2024, la Mission d'établissement des faits des Nations Unies sur la République islamique d'Iran a publié son premier rapport, qui concluait que la répression meurtrière des manifestations par les autorités iraniennes avait entraîné de graves violations des droits humains et des crimes contre l'humanité, notamment des meurtres, des actes de torture et des viols. Mais malgré les nombreux appels à la justice, exprimés en Iran et à l’étranger, les autorités iraniennes ont loué les forces de sécurité ayant réprimé les manifestations, vilipendé les manifestant-e-s, rejeté les plaintes des victimes et de leurs familles, et persécuté des familles de personnes tuées ou exécutées.

« Les victimes et leurs familles qui ont subi des violences brutales de la part des autorités iraniennes n'ont aucune chance d'obtenir justice, car ceux qui devraient apporter réparation sont eux-mêmes impliqués dans des violations et des crimes et protègent les autres responsables de toute responsabilité », a déclaré Bahar Saba, chercheuse senior sur l'Iran à Human Rights Watch. « Les autres pays qui peuvent engager des poursuites dans de telles affaires devraient saisir toutes les occasions de le faire. »

Les violations flagrantes des droits humains commises par les autorités iraniennes dans le cadre des manifestations « Femme, Vie, Liberté » ont persisté bien après les manifestations de rue. Dans son deuxième rapport, publié en mars 2025, la Mission d'établissement des faits de l'ONU a constaté que les autorités continuaient de persécuter des femmes et des filles, des membres des minorités, ainsi que des familles de victimes qui cherchaient à obtenir justice.

Les autorités ont récemment exécuté au moins deux hommes et condamné plusieurs autres à mort en lien avec les manifestations. Mojahed Kourkouri a été exécuté le 11 juin. Amnesty International a documenté que les autorités l'ont gravement torturé et condamné à mort à l'issue d'un procès manifestement inéquitable concernant le mouvement « Femme, Vie, Liberté ». Mehran Bahramian, pendu le 6 septembre, était le douzième homme exécuté suite à des poursuites liées aux manifestations de 2022. L’organisation Iran Human Rights, basée à Oslo, a signalé que les autorités avaient torturé Bahramian afin d’extorquer des aveux.

Les autorités iraniennes ont continué d'appliquer les lois et les politiques discriminatoires et dégradantes sur le port obligatoire du hijab, qui avaient entraîné la mort en détention, le 16 septembre 2022, de Mahsa Jina Amini, âgée de 22 ans. La mission d'enquête de l'ONU a conclu que l'État iranien était responsable de sa mort, survenue dans des circonstances illégales. Depuis lors, les autorités ont adopté un large éventail de mesures violentes et répressives pour contraindre les femmes et les filles à respecter le port obligatoire du hijab. Ces mesures incluent des arrestations et des détentions arbitraires, des poursuites judiciaires injustifiées, des sanctions sévères, le déni de services de base, la privation de droits fondamentaux, notamment à l'éducation, à la santé et à l'emploi, la saisie de véhicules et le recours à des technologies de surveillance.

De nombreuses Iraniennes ont déclaré à Human Rights Watch que malgré les risques graves et les coûts personnels considérables, elles continueraient à revendiquer le respect de leurs droits humains.

De nombreuses survivantes de la répression violente des manifestations par le gouvernement, y compris celles souffrant de blessures graves et durables, ont dû quitter l'Iran en raison de menaces d'arrestation, de torture et de poursuites pénales. Certaines vivent dans l'incertitude dans les pays voisins, où elles manquent de sécurité et d'accès aux soins médicaux et psychologiques, ainsi qu'aux traitements nécessaires.

Des Iraniennes qui ont bénéficié d'une protection dans des pays tiers, notamment en Europe, continuent de subir les effets désastreux des violences criminelles, notamment des douleurs physiques chroniques, des complications médicales, des infections récurrentes et des traumatismes psychologiques. Celles qui s'expriment publiquement ou militent ont exprimé leurs craintes pour la sécurité de leurs proches en Iran, qui ont subi harcèlement, interrogatoires et perquisitions à leur domicile.

Plusieurs survivant-e-s ont toutefois exprimé leur détermination à poursuivre leur quête de vérité, de justice et de liberté. « Je ne peux plus dormir sur le côté gauche », a déclaré un jeune homme blessé par des projectiles métalliques lors des manifestations. « Au bout d'une dizaine de minutes, j'ai l'impression d'être poignardé à répétition… Psychologiquement, c'est éprouvant. Avant, je soulevais des poids lourds à la salle de sport et maintenant, je peux à peine soulever quoi que ce soit. [Mais] si les manifestations recommencent demain, je retournerai [dans la rue]. »

En vertu du droit international, le gouvernement iranien a la responsabilité première d'enquêter sur les violations graves des droits humains et de les poursuivre en justice, et de veiller à ce que les victimes obtiennent réparation rapidement et adéquatement. Cependant, l'impunité en Iran est historique et a précédé de loin les manifestations « Femme, Vie, Liberté ». Au lieu de garantir l'obligation de rendre des comptes, le gouvernement a mis en place les structures juridiques et judiciaires du pays pour protéger les responsables de violations et de crimes.

Tous les pays exerçant une compétence universelle et extraterritoriale devraient ouvrir des enquêtes pénales appropriées sur les crimes de droit international commis par les autorités iraniennes pendant et depuis les manifestations « Femme, Vie, Liberté », a déclaré Human Rights Watch.

« De nombreuses survivantes des manifestations “Femme, Vie, Liberté” vivent dans des conditions précaires dans des pays voisins de l'Iran », a conclu Basa Saba. « Les gouvernements concernés devraient prendre des mesures coordonnées pour les soutenir dans leur quête de sécurité, de protection et d’aide humanitaire. »

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