(Bruxelles, 16 janvier 2025) – Le Kremlin a intensifié sa répression contre toute forme de dissidence à l’intérieur de la Russie au cours de la troisième année d’une guerre abusive à grande échelle contre l’Ukraine, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui dans son Rapport mondial 2025. Les autorités russes ont poursuivi leur croisade pernicieuse en faveur des « valeurs traditionnelles », ont encore renforcé les lois toxiques sur les « agents de l’étranger » et les « organisations indésirables », et ont activement utilisé leur vaste arsenal d’outils répressifs, notamment les lois sur la censure en temps de guerre, pour étouffer les détracteurs du régime, y compris ceux qui vivent en exil.
Dans la 35e édition de son Rapport mondial, qui comprend 546 pages, Human Rights Watch analyse les pratiques relatives aux droits humains dans près de cent pays. Dans une grande partie du monde, écrit la directrice exécutive Tirana Hassan dans son essai introductif, les gouvernements ont réprimé, arrêté et emprisonné à tort des opposants politiques, des activistes et des journalistes. Des groupes armés et des forces étatiques ont illégalement tué des civils, forcé beaucoup d’entre eux à quitter leur foyer et les ont empêchés d’accéder à l’aide humanitaire. Dans de nombreux cas parmi plus de 70 élections nationales tenues en 2024, des dirigeants autoritaires ont gagné du terrain sur la base de rhétoriques et de programmes politiques discriminatoires.
« Le Kremlin a redoublé ses efforts pour imposer un soutien public à la guerre contre l’Ukraine et aux soi-disant “valeurs traditionnelles russes”, et a adopté des lois plus répressives pour pénaliser encore plus facilement tous ceux qui ne rentrent pas dans le rang », a déclaré Hugh Williamson, Directeur de la Division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch.
- En Ukraine, les forces russes ont bombardé et pilonné sans discrimination des infrastructures civiles, tuant des civils et causant des destructions importantes. Des attaques ciblées contre le réseau énergétique ukrainien ont provoqué des pannes d’électricité dans tout le pays. Les autorités russes ont détenu au secret et torturé ou maltraité des milliers de prisonniers de guerre et de civils ukrainiens. Dans les régions d’Ukraine occupées, les autorités russes ont imposé le programme scolaire de l’État russe dans les écoles, supprimé la langue ukrainienne et menacé les parents dont les enfants suivent les cours de l’État ukrainien sur Internet.
- La liste des prisonniers politiques, désormais au nombre de 804 selon l’organisation de défense des droits Memorial, a continué de s’allonger, même après que la Russie a libéré 15 personnes dans le cadre d’un échange de détenus. Parmi les prisonniers concernés par cet échange figuraient des activistes politiques et civiques russes dont l’emprisonnement était motivé par des considérations politiques.
- Une loi adoptée en mars a interdit la publicité dans les médias qualifiés d’« agents de l’étranger », dans le but de priver ces groupes de sources de revenus. Une loi du mois de mai a interdit aux personnes qualifiées d’ « agents de l’étranger » de candidater à des postes publics ou de siéger au sein de commissions électorales. Les procureurs ont instruit au moins 25 affaires pénales pour des violations présumées de la législation sur les « agents de l’étranger ».
- Les autorités ont censuré les contenus représentant des lesbiennes, des gays, des bisexuels et des transsexuels (LGBT) et ont infligé des amendes aux librairies, services de streaming et particuliers qui diffusaient de tels contenus. À la suite de la désignation par la Cour suprême du mouvement LGBT comme « extrémiste », des procureurs ont engagé des poursuites pénales contre les employés d’un bar fréquenté par des LGBT, et des juges ont infligé des amendes et des peines de détention administrative à des personnes ayant exhibé le drapeau arc-en-ciel.
La Russie devrait libérer tous les prisonniers politiques et promouvoir un environnement dans lequel la société civile puisse fonctionner librement, a déclaré Human Rights Watch. Les autorités russes devraient abroger toutes les lois incompatibles avec les droits humains fondamentaux, notamment les lois relatives à la censure de guerre, aux « agents de l’étranger », aux organisations étrangères « indésirables », à la « propagande gay » et à la « propagande en faveur d’un mode de vie sans enfants ». Les autorités devraient mettre fin aux attaques indiscriminées contre les civils, à la torture et aux mauvais traitements infligés aux détenus civils et prisonniers de guerre ukrainiens, respecter le droit de l’occupation et demander des comptes aux forces responsables de crimes de guerre et d’autres violations du droit humanitaire international.