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Le projet de Constitution algérienne offre peu de réconfort à un journaliste emprisonné

Le président promet une large consultation à ce sujet, alors même que des journalistes et des dirigeants du mouvement de protestation sont derrière les barreaux

Un manifestant algérien tient le drapeau national lors d’une manifestation contre le gouvernement à Alger, le 29 novembre 2019. © 2019 AP Photo/Toufik Doudou

Si le journaliste algérien emprisonné Khaled Drareni parvenait à obtenir une copie du projet de constitution diffusé par le président Abdelmadjid Tebboune au début du mois de mai, il pourrait en savourer toute l’ironie.

Tout comme l’actuelle constitution , ce projet prévoit qu’aucun « délit de presse ne peut être sanctionné par une peine privative de liberté ». Il renforce même la disposition actuelle définissant la détention provisoire comme une « mesure exceptionnelle ».

Khaled Drareni, correspondant à Alger de TV5 Monde et de Reporters sans frontières, et cofondateur du site d’information casbah-tribune.com, se trouve en prison depuis deux mois, accusé d’avoir « appelé à un rassemblement illégal » et « porté atteinte à l’unité nationale ».

Ces accusations ne sont prétendument pas liées a des activités journalistiques, mais en réalité ont tout à voir avec la couverture par Drareni des manifestations hebdomadaires du mouvement Hirak, qui plaide en faveur de réformes, et de son activité sur Twitter, son compte étant suivi par 140 000 personnes.

Les manifestations massives du Hirak, qui secouent l’Algérie depuis février 2019, avaient contraint à la démission le prédécesseur de Tebboune, Abdelaziz Bouteflika.

Le 7 mars, les autorités ont arrêté Drareni lors d’une des dernières manifestations de Hirak avant leur suspension en raison de la pandémie de Covid-19. Remis en liberté provisoire le 10 mars, Drareni a été de nouveau placé en détention le 29 mars, et détenu depuis cette date. Le 27 mai, un tribunal d’Alger a de nouveau rejeté sa demande de remise en liberté provisoire. Aucun juge ne l’a encore interrogé.

Drareni n’est pas la seule victime des efforts de l’État pour juguler le mouvement protestataire Hirak. Des dizaines d’organisateurs et d’activistes ont été emprisonnés sur la base d’accusations similaires à celles portées contre Drareni. Les autorités semblent exploiter la période de confinement pour paralyser le mouvement, et d’éviter ainsi sa résurgence à la suite d’un éventuel assoupissement des restrictions imposées aux rassemblements.

Lors de son entrée en fonction, Tebboune avait assuré avoir pris acte des demandes du mouvement Hirak. Le préambule du projet de constitution reconnaît même les aspirations à « une nouvelle Algérie exprimées pacifiquement par le mouvement populaire depuis le 19 février 2019 ». Toutefois, le texte principal ne reflète aucun des changements systémiques réclamés par le Hirak.

Au moment de dévoiler le projet, Tebboune s’était engagé à organiser un processus consultatif destiné à en affiner les éléments de langage. Rien de moins problématique que de mener une telle consultation alors que les autorités emprisonnent des dirigeants de l’opposition et des journalistes indépendants comme Drareni pour « atteinte à l’unité nationale ». Ce chef d’accusation, à la formulation bien trop vague, ne devrait même pas exister si la protection de la liberté d’expression inscrite dans l’actuelle Constitution avait le moindre sens.

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