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Arabie saoudite : Le Dakar au royaume de la répression

Des militantes saoudiennes toujours en prison à l’approche du départ du rallye

L'un des véhicules participant au Rallye Dakar en 2013.  © 2013 Wikicommons

(Paris) – Amaury Sport Organisation devrait mettre à profit le fait qu’elle organise le rallye Dakar en Arabie saoudite pour dénoncer la persécution des militantes des droits des femmes dans ce pays, ont déclaré aujourd’hui Human Rights Watch, MENA Rights Group et 11 autres organisations internationales de défense des droits humains. La prochaine édition du rallye Dakar – autrefois connu sous le nom de Rallye Paris-Dakar – démarrera le 5 janvier 2020 à Jeddah et se terminera, 9 000 km plus loin, le 17 janvier 2020 à Al-Qiddiya.

« Amaury Sport Organisation et les pilotes du Dakar devraient faire entendre leurs voix contre les mauvais traitements que le gouvernement saoudien inflige aux militantes des droits des femmes pour avoir plaidé en faveur du droit de conduire », a déclaré Minky Worden, directrice des initiatives mondiales au sein de Human Rights Watch. « Les supporters, les médias et les équipes concurrentes ne devraient pas se laisser aveugler par le spectacle sportif, par le biais duquel le royaume dArabie saoudite tente de blanchir son image alors quil emprisonne des activistes pacifiques. »

Le Dakar est une course automobile d’endurance tout-terrain organisée par le groupe français Amaury Sport Organisation. En avril, la société avait annoncé que le rallye 2020 aurait lieu à travers l’Arabie saoudite, dans le cadre d’un partenariat de cinq ans avec le gouvernement de ce pays.

Les sponsors, les diffuseurs et les sportifs sont concernés par le choix des instances sportives d’organiser des événements majeurs dans des pays qui violent les droits humains fondamentaux, ont déclaré les organisations signataires. Ayant conclu une relation de cinq ans avec l’Arabie saoudite, Amaury Sport Organisation devrait aussi adopter et mettre en œuvre une politique en matière de droits humains permettant d’identifier les risques, et user de son influence pour promouvoir le respect des droits humains dans ce pays, ainsi qu’à travers toutes ses activités. Conformément aux Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits humains, la FIFA, l’organisation mondiale du football, ainsi que d’autres grandes organisations sportives, ont adopté des politiques de ce type.

Depuis le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi en octobre 2018, l’Arabie saoudite est sous le feu des critiques internationales pour son bilan en matière de droits humains – en particulier son manque de transparence concernant l’enquête sur le meurtre de Khashoggi et son rôle à la tête d’une coalition militaire responsable de graves violations du droit international humanitaire au Yémen.

De manière plus générale, l’Arabie saoudite a créé ces dernières années un environnement extrêmement hostile pour les défenseur.e.s des droits humains dont des dizaines sont détenu.e.s de manière arbitraire. Parmi ces activistes, se trouvent Loujain al-Hathloul, Samar Badawi, Nassima al-Sadah et Nouf Abdulaziz, qui ont toutes défendu le droit des femmes de conduire et plaidé pour la fin du système discriminatoire de tutelle masculine. D’autres activistes ont été provisoirement libérées mais elles et les quatre femmes en détention sont toujours poursuivies pour leur militantisme pacifique. Plusieurs activistes ont affirmé qu’elles avaient été torturées en détention, notamment en recevant des chocs électriques, des coups de fouet, des menaces de nature sexuelle et d’autres mauvais traitements.

« Plus dune dizaine de femmes pilotes prendront part au Dakar alors même que des militantes saoudiennes des droits des femmes croupissent en prison pour avoir réclamé le droit de conduire », a déclaré Inès Osman, directrice de MENA Rights Group. « LArabie saoudite ne devrait pas avoir les coudées franches uniquement parce quelle accueille un événement sportif en vue comme le Dakar. »

Human Rights Watch, MENA Rights Group et plusieurs autres organisations appellent les organisateurs du Dakar, les concurrents et les médias diffuseurs officiels à faire pression pour que les autorités saoudiennes libèrent immédiatement toutes les militantes des droits des femmes actuellement détenues et abandonnent les poursuites contre elles. Amaury Sport Organisation devrait entamer un dialogue avec les associations de défense des droits humains et adopter une politique veillant à ce que ses activités ne contribuent pas à des violations des droits. 

Les Principes directeurs pour les entreprises multinationales de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) soulignent le devoir des entreprises de prévenir ou d’atténuer les impacts négatifs de leurs activités sur les droits humains. De même, les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits humains énoncent que les entreprises ont la responsabilité d’« évite[r] davoir des incidences négatives sur les droits de lhomme ou dy contribuer par leurs propres activités » et de « remédie[r] à ces incidences lorsquelles se produisent ».

« Amaury Sport Organisation a lopportunité de se joindre à dautres instances sportives pour faire progresser le respect des droits humains là où elles organisent des événements », a déclaré Bénédicte Jeannerod, directrice France de Human Rights Watch. « Adopter et appliquer une politique en matière de droits humains lui éviterait d’avoir à cautionner le bilan entaché dabus dun pays hôte répressif. »

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Dans les médias

PerspectivesMed   RMCSport   Eurosport/AFP

Le Monde    Arte 1 / AFP       Arte 2 / AFP   ActuOrange (AFP)  

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