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Conseil de l’Europe : Les droits des personnes handicapées menacés

Les Etats devraient s’opposer au Protocole sur la détention et le traitement forcés et proposer des alternatives

Le siège du Conseil de l'Europe, à Strasbourg. © 2018 Human Rights Watch
(Bruxelles) – Les Etats membres du Conseil de l’Europe devraient s’opposer aux nouvelles propositions normatives sur la détention et le traitement forcés des personnes handicapées, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. L'organe chargé d'élaborer ces normes, le Comité de bioéthique du Conseil de l'Europe (DH-BIO), composé d'experts de chaque Etat membre, doit se réunir le 21 novembre 2018 à Strasbourg.

Les nouvelles normes sont en cours d'élaboration sous la forme d'un projet de Protocole additionnel à la Convention d'Oviedo sur la bioéthique, une convention du Conseil de l'Europe qui réglemente les droits humains dans le cadre de la biologie et de la médecine. Le Protocole additionnel vise à fournir un cadre juridique pour l'hospitalisation et le traitement involontaires des personnes « atteintes de troubles mentaux » en Europe. Le Conseil de l'Europe est une organisation inter-gouvernementale de défense des droits humains composée de 47 Etats membres, dont les 28 pays de l'Union européenne.

« Le Conseil de l'Europe se targue de promouvoir les normes les plus élevées en matière de droits humains, mais le projet de Protocole additionnel à la Convention d'Oviedo va à l'encontre de décennies de progrès laborieux vers l'égalité de droits pour les personnes handicapées », a déclaré Lea Labaki, de la division Droits des personnes handicapées à Human Rights Watch. « Les gouvernements européens devraient s'opposer publiquement au Protocole et mettre un terme à son développement. »

La Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), ratifiée par 46 des 47 Etats membres du Conseil de l'Europe, garantit aux personnes handicapées, y compris les personnes avec un handicap psychosocial (correspondant à un problème de santé mentale), un droit égal à la liberté et aux soins de santé basés sur le consentement éclairé. Le projet de Protocole additionnel risque d’affaiblir la protection des droits humains garantie par la CDPH et pourrait conduire à de graves violations des droits des personnes handicapées, a affirmé Human Rights Watch.

Dès le mois de septembre, Human Rights Watch a envoyé des lettres aux Etats membres du Conseil de l'Europe et à ses principaux organes pour leur demander de s'opposer au Protocole additionnel et insister sur son retrait. Six pays ont répondu, indiquant tous qu'ils réfléchissaient à leur position.

Les organisations représentant les personnes handicapées, le Comité des droits des personnes handicapées des Nations Unies, les rapporteurs spéciaux des Nations Unies sur la santé et le handicap, ainsi que l'Assemblée parlementaire et la Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe ont demandé le retrait du projet de Protocole additionnel. La Bulgarie, le Portugal et l'ancienne République yougoslave de Macédoine s'y sont publiquement opposés.

La détention involontaire basée sur le handicap, et en particulier le traitement involontaire des personnes avec un handicap psychosocial, sont des violations intrinsèques des droits des personnes qui y sont soumises, notamment de la protection contre la discrimination, du droit à la liberté et la sécurité de la personne, et du droit à la santé. Ces traitements peuvent également aller à l’encontre de l'interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants.

La protection contre la discrimination, la détention illégale et les mauvais traitements ainsi que le droit à la santé sont également consacrés par la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).

Pour lutter contre les abus envers les personnes avec un handicap psychosocial, le Conseil de l'Europe devrait plutôt encourager ses Etats membres à mettre un terme aux mesures coercitives et leur fournir des orientations quant aux alternatives au placement et au traitement involontaires respectueuses des droits et fondées sur le consentement éclairé. De telles alternatives existent déjà dans de nombreux pays et peuvent se développer grâce à l'échange d'informations et au partage des bonnes pratiques entre pays.

« En créant un cadre pour le placement involontaire et le traitement forcé, le Protocole additionnel porte atteinte aux droits fondamentaux et à la dignité des personnes handicapées », a conclu Lea Labaki. « Les membres du Conseil de l'Europe ont la possibilité d'arrêter cette dangereuse trajectoire et promouvoir les droits des personnes handicapées par des alternatives à la force et à la coercition. »

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