Cette semaine, le ministre français de l’Intérieur, Manuel Valls a déclaré que ses propos selon lesquels seule « une minorité de Roms » voulait s’intégrer en France n’avaient choqué que ceux « qui ne connaissent pas ce dossier ». En tant que personne ayant effectué des recherches et suivi ce dossier, je suis choquée. Lorsque j’ai demandé à des familles roms vivant en France de me parler de leur vie, de leurs espoirs et des défis auxquels elles sont confrontées, elles souhaitaient les mêmes choses que nous tous : travailler, vivre dignement et offrir à leurs enfants une bonne éducation.
Ce n’est pas la première fois que les Roms sont dépeints sous un angle négatif par un responsable français. L’ironie veut qu’il y a une semaine à peine, Manuel Valls mettait en garde contre la stigmatisation des Roms après que Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate à la mairie de Paris, eut déclaré que les Roms « harcèlent » les Parisiens.
Lorsqu’il a été élu, le gouvernement semblait avoir pris ses distances par rapport au discours de son prédécesseur. Il y a quelques mois à peine, au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, il s’était engagé à combattre la discrimination à l’égard des Roms.
Aujourd’hui pourtant, la situation des Roms semble s’être aggravée. Les ONG font état de l’expulsion de plus de 12 000 Roms de campements non autorisés depuis le début de l’année et la plupart ont été expulsés sans se voir offrir un logement alternatif. Manuel Valls a précisé que « la majorité » des Roms devaient « être reconduits à la frontière », ne laissant pratiquement planer aucun doute sur le fait que les reconduites vers la Roumanie et la Bulgarie sans examen individuel de la situation de chaque personne se poursuivront, en violation de la législation de l’UE.
Lorsqu’il était candidat à la présidence, François Hollande avait souligné que les Roumains et les Bulgares, « quelle que soit leur origine » étaient des citoyens européens. Aujourd’hui, en sa qualité de Président, François Hollande se doit d’envoyer un message clair faisant comprendre que quels que soient leur nationalité, leur statut d’immigrant ou leur situation en matière de logement, les Roms doivent être traités de la même façon que quiconque. Il incombe à l’État de protéger les personnes vulnérables vivant sur son territoire contre la discrimination et la stigmatisation.
L’Europe doit également jouer son rôle. La Commission européenne a eu raison d’élever la voix mercredi et de rappeler à la France le droit de tous les citoyens de l’UE à la liberté de circulation. Néanmoins, le discours prononcé au début de ce mois par la Commissaire européenne Viviane Reding semblait indiquer qu’elle estimait que la Commission était parvenue à résoudre la crise des Roms dont la France avait été le théâtre au cours de l’été 2010. Les preuves ne manquent pas pour montrer que la crise subsiste, et cette fois, la Commission devrait veiller à ce que ses avertissements soient suivis d’effets.