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France : Nouvelle vague de répression contre les Roms

Il faut mettre fin aux expulsions discriminatoires et aux démantèlements des camps de Roms

(Paris, le 11 août 2012) – Les opérations répétés des autorités françaises pour démanteler les camps de Roms et renvoyer les Roms d’Europe de l'Est du pays soulèvent de graves préoccupations quant au respect par la France de ses obligations internationales, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Dans les premières heures de la matinée du 9 août 2012, les autorités ont mené des opérations de démantèlement dans deux camps de fortune habités par des Roms dans les environs de Lille, dans le nord de la France, en démantelant les campements et en expulsant leurs résidants par la force. Le même jour, quelque 240 Roms roumains, précédemment expulsés de camps dans la région lyonnaise, ont été renvoyés vers la Roumanie sur un vol charter.

« Les opérations de démantèlement de cette semaine semblent être tout simplement la dernière manifestation de la politique française d'expulsion prenant pour cible les Roms d’Europe de l'Est », a déclaré Veronika Szente Goldston, directrice du plaidoyer pour l'Europe et l’Asie centrale à Human Rights Watch. « Plutôt que d'essayer de se débarrasser des Roms indésirables pendant que personne ne regarde, le gouvernement devrait porter un regard critique sur son triste bilan dans ce domaine et agir pour remédier aux exactions. »

Les autorités ont justifié leurs opérations en avançant que les conditions dans les camps étaient « insalubres » et que les « tensions » avec la population locale étaient devenues « intenables ». Aucune solution de relogement ne semble avoir été prévue, laissant sans-abri quelques 200 Roms, dont 60 enfants. En plus de celles de Lille et Lyon, des opérations de démantèlement de camps de Roms ont également été menées près de Paris au début d’août. Il semble que les Roms concernés par le raid du 9 août proviennent de Roumanie et l’on s'attend à ce que les autorités cherchent à les expulser de France.

Les 240 Roms roumains renvoyés par avion en Roumanie le 9 août seraient partis selon les autorités de façon volontaire, et ils ont été payés jusqu'à 300 euros pour partir. Par le passé, de nombreux Roms ont fini par accepter un « retour volontaire » après avoir reçu l’ordre de quitter le territoire. Accepter de partir volontairement court-circuite toute révision judiciaire des expulsions.

Le traitement réservé aux Roms d'Europe de l'Est par la France a attiré l’attention internationale en août 2010, lorsque le gouvernement, au cours d’une campagne très médiatisée, a démantelé de nombreux camps de Roms et expulsé des centaines de Roms roumains et bulgares. Une circulaire ouvertement discriminatoire, désignant explicitement les camps de Roms comme cible pour les expulsions et associant ces mesures à l'« expulsion immédiate des étrangers en situation irrégulière », avait été diffusée dans les médias.

Bien que les autorités aient rapidement abrogé la circulaire, des recherches approfondies menées entre autres par Human Rights Watch au cours des deux dernières années démontrent clairement que les Roms en France demeurent exposés aux expulsions abusives répétées ainsi qu’à la discrimination.

Une loi sur l'immigration, adoptée en juin 2011 suite à des critiques de la part de la Commission européenne, semble cibler les Roms d’Europe de l'Est en particulier et est bien loin de se conformer aux obligations de la France en vertu des règles de l'Union européenne sur la liberté de circulation et du droit international des droits humains, a affirmé Human Rights Watch.

La loi cite comme motif d'expulsion les séjours répétés de courte durée en France ainsi que le fait d’être en France « dans le but essentiel de bénéficier du système d'assistance sociale ». Les recherches de Human Rights Watch démontrent que les autorités françaises expulsent souvent les Roms sur la simple présomption qu'ils pourraient un jour bénéficier des avantages sociaux.

Bien que la loi impose aux autorités de procéder à une évaluation au cas par cas, il existe des préoccupations quant à l’application de ce principe dans la pratique, a expliqué Human Rights Watch. Dans le cas des Roms d'Europe de l’Est, par exemple, les autorités émettent souvent des ordres d'expulsion à grande échelle dans les jours qui précèdent ou durant les démantèlements de camps informels, sans procéder à un examen suffisant de la situation individuelle des personnes qui y résident.

En réponse à un questionnaire de Human Rights Watch dans le cadre de la campagne pour son élection en avril, le président François Hollande s'était engagé à « veiller à ce que la France soit exemplaire dans le domaine du respect des libertés individuelles dans les termes voulus par la Constitution et la Charte européenne des droits fondamentaux », et a appelé à ce que « les mesures discriminatoires à l'encontre des populations roms (...) soient abolies. »

« Les promesses de Hollande de mettre fin à la discrimination contre les Roms ne pourraient pas sonner plus creuses à la suite des événements de cette semaine », a conclu Veronika Szente Goldston. « Au lieu reprendre à son compte l’approche de son prédécesseur, le gouvernement Hollande devrait d'urgence prendre des mesures afin de corriger la politique actuelle d’expulsion des Roms, qui pose de graves problèmes. La réforme de la loi sur l'immigration de 2011 constitue une étape clé à cet égard. » 

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