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Zimbabwe : La violente répression alimente la crise qui s’aggrave

Mbeki et d’autres leaders de la SADC devraient réclamer la fin des atteintes aux droits humains

Le gouvernement du Zimbabwe devrait mettre un terme à sa violente répresssion contre l’opposition politique, les militants de la société civile et même les Zimbabwéens ordinaires dans les quartiers considérés comme des bastions de l’opposition, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.

Human Rights Watch appelé le Président sud-africain Thabo Mbeki – qui a reçu un mandat de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) pour répondre à la crise politique du Zimbabwe – à mettre les droits humains au cœur des pourparlers de médiation prévus entre le parti au gouvernement et l’opposition.

« Le Président Mbeki a une opportunité de demander la fin des violations massives des droits humains qui alimentent la crise du Zimbabwe, » a dit Georgette Gagnon, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch. « Les dirigeants des pays de la SADC devraient adopter une position plus ferme face à la situation épouvantable des droits humains au Zimbabwe. »

Le rapport de 39 pages, intitulé « L’opposition sous les coups : Escalade de la violence et de la répression gouvernementales au Zimbabwe » (« Bashing Dissent: Escalating Violence and State Repression in Zimbabwe ») décrit de façon détaillée la répression exercée depuis le mois de mars par le gouvernement zimbabwéen contre l’opposition et les manifestants pacifiques. S’appuyant sur deux semaines de recherches à Harare, Bulawayo, Masvingo, Mutare et Bindura, le rapport contient des comptes-rendus de première main sur les exactions systématiques et à grande échelle de la part du gouvernement contre des membres de l’opposition et des militants de la société civile, ainsi que sur sa répression de plus en plus violente contre des Zimbabwéens ordinaires dans les banlieues fortement peuplées de Harare.

« Les arrestations arbitraires, les détentions ainsi que les raclées brutales infligées par les forces de sécurité et de police se sont multipliées en mars et avril, et se poursuivent sans fléchir », a affirmé Gagnon. « Le gouvernement zimbabwéen viole en toute impunité les droits humains de ses citoyens. »

La Campagne pour sauver le Zimbabwe (« Save Zimbabwe Campaign ») – une large coalition d’organisations de la société civile zimbabwéenne et de membres de l’opposition politique – a tenté de célébrer le 11 mars une réunion de prière à Highfield, une banlieue de Harare. Alors que des centaines de personnes affluaient vers les Zimbabwe Grounds, la police anti émeute, lourdement armée, a lancé contre elles une attaque brutale et qui ne faisait pas suite à des provocations, frappant les gens à coups de matraques et de crosses de fusils et blessant des dizaines de personnes, en essayant d’empêcher que la réunion ait lieu. La police a arrêté de nombreux membres de l’opposition et militants de la société civile, dont les leaders des deux factions du parti de l’opposition, le Mouvement pour un changement démocratique (MDC). Les membres du MDC et les militants de la société civile qui ont été arrêtés ont été ensuite détenus dans divers postes de police autour de Harare, et beaucoup d’entre eux ont été brutalement battus par des agents de sécurité et de la police alors qu’ils se trouvaient en détention.

Le rapport décrit également la façon dont la police a fait un usage disproportionné et létal de la force contre des militants non armés, causant la mort d’un militant et des blessures graves à plusieurs autres. Le 12 mars, lors des obsèques de Gift Tandare, membre du MDC tué par balles par la police le 11 mars juste après la réunion de prière à Harare, deux sympathisants du MDC ont été gravement blessés quand la police a ouvert le feu sur les personnes qui suivaient le cortège funèbre.

« Les policiers ont sauté de leurs camions et se sont mis à frapper tout le monde. Il y a eu deux gars tués par balles à l’enterrement, je l’ai vu » a dit un sympathisant du MDC qui a été témoin de la scène au cours de laquelle 20 à 30 policiers armés de fusils, de matraques, et accompagnés de chiens policiers, ont donné l’assaut au cortège funèbre. « L’un d’eux a reçu une balle dans le bras, et l’autre dans la jambe. Ils ont tiré, c’est tout. Ils ont dit ‘dispersez-vous, dispersez-vous, qu’est-ce que vous faites là ? ’ et des gens se sont mis à courir, et c’est comme ça que deux ont été tués. Ceux parmi nous qui n’ont pas couru ont été obligés de s’allonger par terre et ont été battus. »

Des victimes des violences ont dit à Human Rights Watch, juste après l’attaque du 11 mars, que la police a continué à se déchaîner au hasard en frappant des gens qui marchaient dans les rues, dans des centres commerciaux et des bars à bière dans plusieurs quartiers fortement peuplés de Harare, que les autorités considéraient comme des bastions de l’opposition. Les policiers sont aussi allés de maison en maison en frappant les gens à coups de matraques et en les accusant d’appartenir à l’opposition.

La répression dans les banlieues se poursuit à un niveau élevé. La police a imposé un couvre-feu officieux dans plusieurs banlieues, dont Glenview et Highfield, arrêtant et battant toute personne suspectée de soutenir l’opposition, en particulier la nuit.

« Actuellement, personne ne sort après 19 heures, à moins de vouloir prendre des coups, » a dit un homme à Highfield à Human Rights Watch. « Mon neveu a été battu l’autre jour alors qu’il rentrait à pied tard chez lui, après avoir rendu visite à des amis. La police l’a accusé d’être un des militants du MDC qui préparent des actions violentes, mais mon neveu ne soutient aucun parti. »

Le gouvernement zimbabwéen prétend qu’il riposte à une campagne de violence et de terreur menée par l’opposition dans le pays. Les autorités ont arrêté plus de 30 membres et sympathisants du MDC qu’elles accusent d’avoir depuis le 12 mars organisé et mené dans le pays 11 attaques au cocktail Molotov contre des camps de la police, un train de passagers, et deux magasins. Le MDC nie ces allégations et accuse les agents gouvernementaux d’avoir mis en scène ces attaques pour justifier la répression contre l’opposition.

« Les attaques au cocktail Molotov sont des crimes graves, et leurs auteurs doivent rendre des comptes, » a souligné Gagnon, « Mais ces attaques ne justifient pas les violentes attaques du gouvernement contre des centaines de Zimbabwéens ordinaires, de membres et sympathisants de l’opposition, ainsi que de militants de la société civile. »

Contrairement aux affirmations du gouvernement selon lesquelles la responsabilité première des récentes violences reposerait sur l’opposition politique, Human Rights Watch a constaté que les forces de police du Zimbabwe, les agents de la Central Intelligence Organization (CIO), et des groupes de « milices de jeunes » soutenus par le gouvernement sont les principaux auteurs de violations graves des droits humains. L’incapacité du gouvernement à refréner les exactions commises par ces groupes est susceptible d’encourager d’autres violences incontrôlées, a ajouté Human Rights Watch.

Human Rights Watch a appelé les forces de sécurité et de police du Zimbabwe à cesser immédiatement le recours à une force excessive contre les manifestants. Les forces de sécurité et de police doivent aussi cesser d’intimider, de harceler et de battre les membres de l’opposition, les militants de la société civile et les Zimbabwéens ordinaires. Le gouvernement doit enquêter sur tous les cas d’exactions et poursuivre les responsables.

Human Rights Watch a exhorté la SADC à exiger publiquement la fin de la violence et des violations actuelles des droits humains au Zimbabwe, et à traduire en justice tous les responsables. La SADC devrait déployer une mission indépendante au Zimbabwe pour enquêter sur les signalements d’atteintes aux droits humains, conformément à l’objectif déclaré de la SADC d’encourager et de renforcer le développement d’institutions et de pratiques démocratiques parmi ses Etats membres, et d’encourager le respect des obligations internationales relatives aux droits humains dans le cadre des traités de l’Union africaine et des Nations Unies.

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