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Union africaine: enrayer les conflits en assurant la protection des droits

Au Sommet de l'UA, les Etats membres devraient prendre des mesures urgentes concernant le Darfour, la Côte d’Ivoire, la RDC

(New York) - L'Union africaine devrait placer la protection des civils et la lutte contre l'impunité pour les violations des droits humains au centre des initiatives qu'elle mène contre les conflits dans la région, a déclaré Human Rights Watch dans un document d'information publié aujourd'hui en prévision du sommet de l'UA qui se tiendra du 6 au 8 juillet.

“L'Union africaine devrait prendre des mesures proactives pour prévenir et intervenir dans les conflits sur le continent,” a déclaré Peter Takirambudde, directeur à la Division Afrique de Human Rights Watch. “En prenant des initiatives constructives pour assurer la protection des civils et des droits humains, l'UA peut jouer un rôle clé dans l'enrayement des conflits dans la région.”

Pendant les débats qui auront lieu lors de la réunion de la Conférence cette semaine à Addis-Abeba, les Etats membres de l'UA auront l'occasion de faire suivre par des actes l'engagement qu'ils professent envers la paix et la sécurité, en s'attaquant à trois crises: la région du Darfour occidental au Soudan, la Côte d'Ivoire et la République Démocratique du Congo. Chacun de ces conflits, marqués par des exactions généralisées à l'encontre des civils, pourrait dégénérer à brève échéance si l'Union africaine et la communauté internationale dans son ensemble n'agissent pas immédiatement et de façon décisive, a souligné Human Rights Watch.

Au Darfour, les militaires soudanais et leurs milices alliées janjawids ont perpétré des crimes contre l'humanité, des crimes de guerre, notamment des viols, et un “nettoyage ethnique”. Des dizaines de milliers de civils ont perdu la vie et plus d'un million de personnes ont été déplacées. Les agences d'aide internationales estiment que des centaines de milliers de personnes mourront de faim et de maladie dans les prochains mois si le gouvernement soudanais n'accorde pas immédiatement le libre accès au secours humanitaire. Le Darfour, qui est le théâtre du plus grave conflit que connaisse l'Afrique aujourd'hui, requiert une action rapide et concrète de l'UA.

Human Rights Watch a appelé l'Union africaine à accroître sa force d'observation du cessez-le-feu au Darfour, à inclure la surveillance des droits humains dans le mandat de la commission de cessez-le-feu, à rassembler des preuves sur les crimes de guerre et autres violations. Elle devrait imposer des sanctions contre Khartoum s'il ne coopère pas avec la mission de l'UA et ne respecte pas l'accord de cessez-le-feu. En collaboration avec les Nations Unies, l'Union africaine devrait prendre des mesures pour enrayer les effets du nettoyage ethnique au Darfour, dédommager les victimes et garantir le retour volontaire des personnes déplacées et des réfugiés en toute sécurité.

En Côte d’Ivoire, les forces militaires et de sécurité du gouvernement et les milices appuyées par ce dernier continuent de commettre de graves atteintes aux droits humains en toute impunité. Les partisans de l'opposition politique sont intimidés et brutalisés, tout comme le sont les personnes soupçonnées de s'opposer au gouvernement en raison de leur religion, ethnicité ou nationalité. Le pays est coupé en deux, le gouvernement contrôlant les régions du sud et les rebelles le territoire du nord. Les civils sont victimes des exactions des deux camps et de leurs milices alliées et ils souffrent de la crise économique engendrée par le conflit. La Côte d'Ivoire mérite toute l'attention de l'UA, sans quoi la situation risque d'attirer les combattants nomades des pays voisins. Si jamais le conflit armé reprenait, la crise ivoirienne pourrait mettre en péril la stabilité de la région.

Human Rights Watch a demandé à l'Union africaine de condamner les exactions en Côte d'Ivoire et d'appeler le gouvernement et les forces rebelles à y mettre fin. Elle devrait insister pour que le gouvernement désarme et disperse les milices pro-gouvernementales, enquête à propos des exactions et fasse rendre des comptes aux responsables, y compris pour les crimes commis depuis le coup d'Etat militaire de 1999. Elle devrait également exiger que les gouvernements ouest-africains respectent le moratoire de la CEDEAO sur la vente d'armes légères à la Côte d'Ivoire.

En République Démocratique du Congo (RDC), les combats qui ont eu lieu récemment à Bukavu ne sont que les derniers événements marquant une détérioration des conditions de sécurité et une longue série de violations massives du droit international humanitaire et des droits de l'homme. Les factions rebelles des anciens groupes d'insurgés ainsi que d'autres groupes armés qui n'ont pas adhéré au processus de transition recourent à la violence pour s'opposer à l'incorporation au sein de la nouvelle armée congolaise et pour contester l'autorité du gouvernement transitoire à Kinshasa. Il semblerait que les anciens dirigeants des groupes rebelles encouragent ou tolèrent ces actes alors même qu'ils participent au gouvernement de transition.

Ledit gouvernement n'a pas été en mesure de relever ces défis ni de mettre un terme à la violence. L'accord complexe sur le partage du pouvoir et la méfiance entre les participants et les non-participants à la transition sont des facteurs susceptibles de déboucher sur de futures violences et exactions. Une nouvelle crise dans le pays et une reprise du conflit risqueraient de déstabiliser l'Afrique centrale à moins que la communauté internationale et l'Union africaine ne s'engagent davantage et de façon cohérente.

Human Rights Watch a demandé à l'Union africaine de dénoncer les exactions en RDC, d'en exiger la fin et d'insister pour que les commandants responsables répondent de leurs actes. Elle devrait aussi insister pour qu'une enquête soit menée sur tous les nouveaux membres des forces armées congolaises afin de vérifier s'ils n'ont pas commis d'exactions dans le passé; elle devrait finaliser son enquête à Bukavu et rendre les résultats publics. Human Rights Watch prie instamment l'Union africaine d'aider la RDC et la Cour Pénale Internationale à traduire en justice les auteurs de graves exactions et de demander au Secrétaire Général de l'ONU de mettre sur pied un Groupe d'Experts chargé de recommander des mécanismes judiciaires pour les crimes de guerre commis avant le Statut de la CPI.

“Ces trois points chauds ont en commun le besoin de bénéficier de l'attention immédiate de l'UA et d'une action concrète de sa part,” a ajouté Takirambudde. “Protéger les civils, promouvoir les droits humains et prévenir l'impunité devraient faire partie de toutes les initiatives de l'UA visant à désamorcer les conflits dans la région.”

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