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Les responsables espagnols devraient avoir de sérieuses discussions avec le Ministre russe des Affaires Etrangères, Sergei Ivanov, concernant les abus commis par la Russie en Tchétchénie, a vivement encouragé Human Rights Watch à la veille de la visite d'Ivanov à Madrid.

Le gouvernement russe affirme avec insistance qu'un retour à la normale est en train de se produire en Tchétchénie et a refusé d'établir une commission nationale pour enquêter sur les accusations d'abus graves commis par des troupes russes contre des civils tchétchènes. Moscou s'est directement moqué des résolutions de la Commission des Nations Unies sur les Droits de l'Homme, notamment en refusant l'accès en Tchétchénie aux observateurs des Nations Unies.

L'Union Européenne a été l'architecte de la résolution condamnant la Russie, l'année dernière à la Commission des Nations Unies, actuellement réunie à Genève pour sa session annuelle de six semaines.

"Dans le cas de la Tchétchénie, la Russie est en train de se moquer de l'Union Européenne et des Nations Unies," a déclaré Elizabeth Andersen, Directrice Exécutive de la Division Europe et Asie Centrale de Human Rights Watch. "En tant que pays actuellement en charge de la présidence de l'Union Européenne, l'Espagne ne peut pas laisser cela se produire. Afin de maintenir leur intégrité politique, les responsables espagnols doivent exprimer de fermes protestations auprès d'Ivanov concernant le comportement des troupes russes en Tchétchénie."

Human Rights Watch a publié un document de présentation basé sur plus de cinquante entretiens conduits par des chercheurs de Human Rights Watch en décembre 2001 et février 2002. Ce document décrit les violations des droits humains et du droit humanitaire international commises quotidiennement par les troupes russes : détentions arbitraires, disparitions forcées, exécutions sommaires, tirs à l'aveuglette et pillages à large échelle.

Human Rights Watch a déclaré que les forces rebelles tchétchènes étaient aussi responsables de graves violations du droit humanitaire international, notamment des assassinats de douzaines de fonctionnaires tchétchènes travaillant pour l'administration mise en place par le gouvernement russe.

"La Tchétchénie est le seul endroit en Europe où des civils sont tués pratiquement quotidiennement," a déclaré Andersen. "Nos recherches contredisent clairement les affirmations du gouvernement russe selon lesquelles la Tchétchénie est sur la voie d'un retour à la normale. Ce qui est train de se produire là bas est sans aucun doute très loin d'être normal."

En étudiant la conduite des forces russes lors de six opérations de ratissage entre août et décembre 2001 seulement, le document de présentation de Human Rights Watch fait état de neuf cas de disparitions et de cinq cas d'utilisation aveugle de la force. Ce document analyse les efforts limités des autorités russes pour enquêter sur ces crimes et décrit les problèmes rencontrés par les personnes déplacées dans les régions voisines de la Tchétchénie. Le document de présentation décrit également les assassinats perpétrés par les forces tchétchènes contre des responsables officiels et de simples civils ainsi que les menaces proférées à leur encontre.

Parmi les victimes dont les cas sont détaillés dans le document de présentation, se trouvent les personnes suivantes :

  • Madina Mezhieva et Amkhad Gekhaev ont été mitraillés à l'arme automatique actionnée depuis un hélicoptère militaire, le 27 octobre 2001 alors qu'ils rentraient chez eux en voiture, après s'être rendus dans un champ de navets, à Komsomolskoe. Les soldats ont capturé ces deux personnes vivantes et plusieurs jours plus tard, des membres de leur famille ont obtenu leurs corps, tous les deux mutilés, du bureau du commandant militaire à Gudermes.
  • Malika Lalaeva et Raisa Taramova, deux enfants tués lors du bombardement de Goity, le 28 octobre 2001 lorsque trois des neuf obus lancés sur le village ont achevé leur trajectoire sur la maison de la famille Lalaev.
  • Musa Yunusov et Lom-Ali Yunusov, tous les deux détenus de nuit le 9 décembre 2001 par des soldats russes qui ont également mis le feu à leurs maisons. Cinq jours plus tard, des membres de leurs familles ont identifié leurs corps mutilés parmi sept cadavres abandonnés dans une forêt proche d'une banlieue de Grozny.
  • Magomed-Emi Alsultanov, Khasmagomed Esuev, Mukhadi Khamzatov, Saidmagomed Mutsukaev, Anzor Ismailov et d'autres, détenus par les forces russes et qui ont par la suite "disparu". Pendant des mois, des membres de leurs familles ont tenté d'obtenir auprès des autorités russes des informations sur leur sort mais n'y sont jamais parvenus.

Dans aucun de ces cas, les autorités n'ont pris les mesures adéquates pour enquêter sur ces abus. Depuis la dernière réunion de la commission des Nations Unies, le gouvernement russe a prétendu mener des investigations criminelles sur les abus en Tchétchénie. Cependant, Human Rights Watch a analysé plusieurs enquêtes clés, notamment celles concernant les "disparitions" en masse de Sernovodsk, le charnier du village de Dachny et les massacres de Alkhan-Yurt, Staropromyslovskii et Aldi. Human Rights Watch a montré que les enquêteurs avaient constamment échoué à prendre des mesures d'investigation adaptées qui auraient pu permettre de conduire à l'identification des auteurs de ces actes.

La sécurité encore très incertaine en Tchétchénie continue d'empêcher plus de 200 000 personnes déplacées de rentrer chez elles. Les autorités russes exercent sur elles des pressions afin qu'elles rentrent en Tchétchénie mais la majorité reste en Ingouchie, dans des conditions sordides, peu sûres et incertaines.

Human Rights Watch exhorte la Commission des Nations Unies à adopter une résolution :

  • Déplorant la poursuite de graves violations du droit humanitaire international.
  • Notant l'incapacité russe à établir une commission nationale d'enquête ou tout autre mécanisme de recherche des responsables.
  • Notant l'absence de tout bilan officiel national ou international sur les violations commises dans le contexte du conflit en Tchétchénie.
  • Appelant la Russie à adresser des invitations aux observateurs adéquats des Nations Unies en charge des droits humains et
  • Appelant la Russie à donner corps au processus national de recherche des coupables.

"Le gouvernement espagnol est un rouage clé de tout effort pour amener la Russie à assumer ses responsabilités relativement aux atrocités commises en Tchétchénie," a déclaré Andersen. "L'heure est venue pour Madrid d'agir."

Le document Human Rights Watch de présentation est disponible en anglais à l'adresse suivante : https://www.hrw.org/un/unchr-chechnya.htm.

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