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UE : Aborder la question de la crise des droits humains en Azerbaïdjan lors de la COP29

Déclaration conjointe adressée à l’Union européenne par 17 ONG dont Human Rights Watch

Une femme passait devant le Centre d’information sur la conférence COP29, situé sur le boulevard de Bakou, dans l’est de Bakou au bord de la mer Caspienne, le 28 juillet 2024. La conférence COP29 se tiendra à Bakou, capitale de Azerbaïdjan, du 11 au 22 novembre 2024. © 2024 Aziz Karimov/Getty Images

(Bruxelles, 6 novembre 2024) – Les dirigeants de l’Union européenne qui participeront à la COP29, la 29e Conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Bakou, en Azerbaïdjan, du 11 au 22 novembre, devraient aborder directement auprès des autorités azerbaïdjanaises les cas des personnes emprisonnées pour des motifs politiques et appeler à leur libération, ont conjointement déclaré aujourd’hui 17 organisations internationales de défense des droits humains, dont Human Rights Watch.

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Déclaration conjointe

En amont de la COP29, la 29e Conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques, qui se tiendra à Bakou, en Azerbaïdjan, 17 organisations internationales de défense des droits de l’homme appellent les dirigeants européens présents à attirer l’attention de toute urgence sur la détérioration de la situation des droits de l’homme dans le pays et à en parler directement avec le gouvernement azerbaïdjanais.

L’Azerbaïdjan affiche un triste bilan en matière de violations des droits humains, qui s’est considérablement aggravé au cours des deux dernières années ; le gouvernement a ciblé les derniers vestiges des médias indépendants et de la société civile, y compris les défenseurs des droits humains. Parmi les méthodes utilisées par le gouvernement figurent les arrestations et les poursuites pour des motifs politiques sur la base de fausses accusations criminelles, ainsi que l’application arbitraire de lois très restrictives régissant les organisations non gouvernementales (ONG). Ce système de réglementation abusif prive effectivement les activistes indépendants, les médias et les défenseurs des droits humains de moyens légaux pour mener à bien leur travail, les repoussant ainsi aux marges de la loi et augmentant leur vulnérabilité aux poursuites pénales en représailles.

L’UE devrait veiller à ce que les liens économiques et politiques avec l’Azerbaïdjan, y compris la coopération énergétique, contiennent des engagements concrets en matière de droits humains, conformément aux obligations de l’Azerbaïdjan dans le cadre du Partenariat oriental de l’UE. Le budget national de l’Azerbaïdjan dépend en grande partie des combustibles fossiles ; le Protocole d’accord sur un partenariat énergétique entre l’UE et l’Azerbaïdjan, signé en 2022, est un instrument d’influence politique important. L’UE devrait utiliser son poids politique et diplomatique auprès des autorités azerbaïdjanaises pour garantir que ce partenariat respecte le traité sur l’UE, qui cite l’objectif « de consolider et de soutenir … les droits de l'homme » dans la cadre de la politique étrangère. Nous appelons également l’UE à remplir ses obligations en matière de droits humains en mettant en œuvre l’engagement, pris lors de la COP28, à « s’éloigner des combustibles fossiles » de manière équitable et respectueuse des droits, dans des délais déterminés.

Depuis la signature du Protocole d’accord, le gouvernement azerbaïdjanais s’est livré à une répression implacable contre les médias indépendants et la société civile, y compris les défenseurs des droits humains, éradiquant la plupart des formes de dissidence et le travail légitime en faveur des droits humains. En juillet 2023, les autorités ont arrêté Gubad Ibadoghlu, universitaire de renom, expert en lutte contre la corruption et l’un des finalistes du Prix Sakharov pour la liberté de pensée 2024. Après neuf mois de détention provisoire, au cours desquels sa santé s’est rapidement détériorée en raison de l’incapacité des autorités à lui fournir un traitement médical adéquat, il a été transféré en résidence surveillée et sous surveillance policière. Bien que son enquête soit temporairement suspendue, s’il est reconnu coupable, il risque jusqu’à 17 ans de prison. En avril 2024, le lauréat du Prix des droits de l’homme Václav Havel 2014 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, le défenseur des droits humains Anar Mammadli, a été arrêté et placé en détention provisoire, où sa santé s’est détériorée. L’arrestation de Mammadli intervient peu de temps après que son organisation, le Centre d’études sur la démocratie et le suivi des élections (EMDS), a publié une évaluation sur le déroulement des élections présidentielles de février et que lui et d’autres défenseurs des droits humains ont annoncé une coalition sur la justice climatique en amont de la COP29.

Depuis novembre 2023, les autorités azerbaïdjanaises ont arrêté au moins 11 journalistes et professionnels des médias indépendants et les ont placés en détention provisoire sur la base de diverses accusations criminelles fallacieuses. Parmi ces personnes figurent Ulvi Hasanli, Sevinj Vagifgizi, Hafiz Babali, Nargiz Absalamova, Elnara Gasimova, ainsi que Aziz Orujov et Shamo Eminov. Les autorités ont aussi arrêté Mushfig Jabbarov et Alasgar Mammadli, ainsi que Imran Aliyev. Parmi les autres représentants de la société civile, détracteurs du gouvernement, défenseurs des droits humains et activistes syndicaux incarcérés ces deux dernières années figurent Bakhtiyar Hajiyev, Akif Gurbanov, Ruslan Izzatli, Afiaddin Mammadov, Mahyaddin Orujov, Elvin Mustafayev, Aykhan Israfilov, Fazil Gasimov et Famil Khalilov. En juillet et août 2024, les autorités azerbaïdjanaises ont arrêté les chercheurs et actvisites pacifistes Igbal Abilov et Bahruz Samadov, les accusant de trahison sur la base de motifs fallacieux. Ils sont toujours en détention provisoire et risquent de longues peines de prison.

En plus de la vague d’arrestations contre les détracteurs du gouvernement, les autorités ont imposé des interdictions de voyager à de nombreux autres, notamment à un chercheur azerbaïdjanais bien connu, Javidan Aghayev, qui s’est vu interdire de prendre un vol pour la Lituanie et s’est vu interdire de voyager après avoir été interrogé comme témoin dans une autre fausse enquête criminelle.

L’UE a publié plusieurs déclarations au sujet de la répression en Azerbaïdjan, notant la « hausse inquiétante du nombre d’arrestations de journalistes indépendants, de défenseurs des droits humains et d’activistes politiques pour des motifs politiques ». Le Parlement européen a adopté plusieurs résolutions à cet égard. Parmi les États membres du Conseil de l’Europe, l’Azerbaïdjan affiche l’un des pires bilans en matière de mise en œuvre des arrêts émis par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui a jugé à plusieurs reprises que le gouvernement azerbaïdjanais avait violé le droit à la liberté d’association. La CEDH a également constaté de nombreux cas dans lesquels l’Azerbaïdjan a emprisonné des détracteurs du gouvernement sur la base de « motifs cachés » (« ulterior motives »), notamment en guise de représailles punissant leur activisme.

Le 3 juillet 2024, le Comité du Conseil de l’Europe pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a pris la « décision exceptionnelle » de faire une déclaration publique dénonçant le « défaut persistant de coopération » de l’Azerbaïdjan. Ce Comité a aussi exprimé ses vives inquiétudes face au « recours continu aux mauvais traitements physiques/à la torture par la police [azerbaïdjanaise] et aux pratiques généralisées de menaces, de fabrication de preuves, d’aveux forcés et d’extorsion ». Pourtant, le gouvernement azerbaïdjanais n’a pas eu à subir de conséquences graves pour ses actions. La rapidité de la répression en cours à l’approche de la COP29 témoigne du manque de volonté du gouvernement d’améliorer son bilan bien documenté en matière de répression des voix critiques.

Les dirigeants européens participant à la COP29 devraient :

  • Évoquer directement avec les autorités les cas des personnes emprisonnées pour des motifs clairement politiques et s’efforcer d’obtenir leur libération. Ils devraient en particulier donner la priorité aux cas de ceux qui ont besoin de soins médicaux urgents, comme Gubad Ibadoghlu, Anar Mammadli, Alasgar Mammadli, Hafiz Babali, Fazil Gasimov et Famil Khalilov, ainsi qu’Ulvi Hasanli qui aurait reçu des menaces après avoir rendu publiques des allégations de torture et de mauvais traitements dans le centre de détention où il est détenu.
  • Demander à rencontrer certaines des personnes emprisonnées pour des motifs politiques et/ou organiser des rencontres avec leurs familles, en particulier les personnes mentionnées dans les déclarations de l’UE sur l’Azerbaïdjan.
  • S’exprimer publiquement à chaque occasion pour exprimer son soutien aux médias indépendants et à la société civile, y compris aux défenseurs des droits de l’homme ; demander aux autorités de libérer sans condition toutes les personnes emprisonnées à tort ; et abroger les lois répressives sur les ONG. De tels appels publics ont été particulièrement importants lors des COP précédentes.
  • Rencontrer des journalistes et des membres de la société civile indépendante, notamment des défenseurs des droits de l’homme, lors de leur séjour dans le pays, afin de manifester leur soutien politique.
  • Souligner, lors de leurs interactions avec le gouvernement azerbaïdjanais, qu’une participation solide de la société civile est essentielle pour une action climatique efficace, avant, pendant et après la COP29, et qu’aucune mesure de représailles prise contre ceux qui y participent ne sera tolérée.

Organisations signataires :

Amnesty International

Anar Mammadli Campaign to end repression in Azerbaijan

Committee to Protect Journalists (CPJ)

Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (ECPMF)

Comité Helsinki - Norvège

Comité Helsinki - Pays-Bas

Eastern Partnership Civil Society Forum

Fédération européenne des journalistes (EFJ)

Free Press Unlimited

Freedom Now

Frontline Defenders

Human Rights House Foundation

Human Rights Watch

International Partnership for Human Rights (IPHR)

Organisation mondiale contre la torture (OMCT)

PEN International

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