Les conflits et les crises qui font rage aujourd’hui dans le monde entier au Darfour, à Gaza, en République démocratique du Congo et en Ukraine démontrent à quel point l’impunité alimente les cycles de violence. Alors que les situations d’urgence se multiplient, il est crucial qu’une justice impartiale et indépendante soit rendue aux victimes de graves crimes internationaux, quels que soient le lieu et les auteurs.
La Journée de la justice pénale internationale, observée le 17 juillet, marque l’anniversaire de l’adoption du traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI). La lutte pour la justice internationale est confrontée à un défi important. Alors que différentes voies pour établir les responsabilités se développent, la justice reste menacée par ceux qui craignent de rendre des comptes et par leurs alliés.
Depuis janvier 2024, la CPI a émis quatre mandats d’arrêt dans le cadre de son enquête sur l’Ukraine et levé les scellés d’un mandat d’arrêt de 2017 dans le cadre de son enquête au Mali, tandis que la demande du procureur pour que soient émis des mandats d’arrêt contre trois dirigeants du Hamas et deux hauts responsables israéliens, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu, est en cours d’examen.
Le principe de compétence universelle, qui permet aux juridictions nationales de poursuivre les suspects de crimes graves, indépendamment de la nationalité des auteurs ou du lieu de leur commission, continue de gagner du terrain en Europe, où la plupart de ces affaires ont été intentées, et au-delà, y compris en Argentine et aux États-Unis.
D’autres pays ont pris des mesures importantes en faveur d’une justice nationale crédible. Au Libéria, des initiatives sont en cours pour créer un tribunal pour crimes de guerre, et un verdict est attendu dans le procès historique de la Guinée sur le massacre commis dans un stade en 2009.
La Cour internationale de Justice (CIJ) est également apparue comme déterminante pour établir les responsabilités des États dans des violations de traités qui constituent de graves crimes internationaux, notamment dans le cadre des poursuites engagées par les Pays-Bas contre la Syrie en vertu de la Convention contre la torture, ainsi que par la Gambie contre le Myanmar, et par l’Afrique du Sud contre Israël, en vertu de la Convention sur le génocide.
Mais les droits des victimes dépendent de la volonté des gouvernements d’assumer leurs responsabilités et de mener à bien ces processus cruciaux. Une justice impartiale exige un soutien politique et concret constant, ainsi que la fin du « deux poids deux mesures » qui demeure un obstacle persistant à l’accès équitable des victimes à la justice.
La CPI reste visée par des attaques de la Fédération de Russie à la suite du mandat d’arrêt émis contre le président Vladimir Poutine en 2023, et les législateurs américains ont récemment entamé des démarches pour imposer des sanctions à la Cour et à ses responsables suite à la demande du procureur d’émettre des mandats d’arrêt contre de hauts responsables gouvernementaux israéliens. Même si les États parties à la CPI ont publiquement affiché leur soutien à la Cour, celui-ci diffère selon les situations. Même si elle était bienvenue, la précipitation avec laquelle la situation en Ukraine a été renvoyée devant la CPI après l’invasion à grande échelle de ce pays par la Russie en 2022 n’a pas été de mise pour d’autres, comme celles qui prévalent au Darfour ou en Palestine.
Ces disparités, en particulier chez les gouvernements des pays du Nord, alimentent une dangereuse perception selon laquelle certaines victimes méritent davantage la justice que d’autres. Elles sont symptomatiques du « deux poids, deux mesures » qui influence le système international dans son ensemble et renforce souvent le legs colonial qui alimente les déséquilibres de pouvoir sous-jacents, pouvant conduire à un accès inégal à la justice.
Ce « deux poids, deux mesures » qui n’est pas inévitable, doit être surmonté si l’on veut que le système judiciaire international tienne ses promesses. C’est sa légitimité même qui est en jeu.
Nous célébrons aujourd’hui la Journée internationale de la justice en partageant les points de vue de nos collègues du mouvement mondial pour la justice internationale quant aux opportunités et défis qui se posent selon eux. Il s’agit de rappels cruciaux de ce qui est en jeu et peut être obtenu avec un soutien de principe en faveur d’une justice impartiale partout à travers le monde