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Eswatini : Meurtre brutal d’un avocat défenseur des droits humains

Une enquête impartiale et transparente devrait être rapidement menée sur le meurtre de Thulani Maseko

L'avocat Thulani Maseko, spécialisé dans la défense des droits humains, photographié lors d’une interview par l’Agence France-Presse le 22 septembre 2018 à Lobamba, en Eswatini (ex-Swaziland), dans le sud de l’Afrique. Maseko a été tué le 21 janvier 2023 à son domicile dans le quartier de Luhleko, à Bhunya, dans l’ouest de ce pays.   © 2018 Gianluigi Guercia/AFP via Getty Images

(Johannesburg, le 25 janvier 2023) – Les autorités d'Eswatini devraient autoriser l'ouverture d'une enquête indépendante, impartiale et transparente sur le meurtre brutal de l'éminent avocat et activiste de l'opposition Thulani Maseko, spécialisé dans la défense des droits humains, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Le 21 janvier 2023, Thulani Maseko a été tué par une balle tirée à travers une fenêtre de son domicile dans le quartier de Luhleko à Bhunya, une ville située à 50 kilomètres de la capitale, Mbabane ; Maseko était alors assis avec sa femme et ses deux enfants, âgés de 10 et 6 ans. Quelques heures auparavant le roi Mswati III avait prononcé un discours devant ses régiments traditionnels à la résidence royale d'Engabezweni à Matsapha, lors duquel il avait averti les personnes appelant à des réformes démocratiques que des mercenaires s'occuperaient d’elles. Selon le roi, les activistes pro-démocratie seraient à l'origine de l'instabilité dans le pays. Des militants des droits humains dans le pays ont accusé le gouvernement d'avoir joué un rôle dans le meurtre de Maseko.

« Le meurtre brutal de Maseko est la dernière d'une série d'attaques effrayantes contre des activistes pro-démocratie en Eswatini », a déclaré Ashwanee Budoo-Scholtz, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch. « Il est essentiel de mener rapidement une enquête indépendante, approfondie et efficace afin d'identifier les responsables. »

Maseko était le président du Forum multipartite pro-démocratie (Multi-Stakeholder Forum, MSF), une coalition de groupes de la société civile et de partis politiques menant une campagne en vue de l’établissement d’un système démocratique en Eswatini.

Maseko avait plaidé pour des réformes démocratiques, appelant à un dialogue significatif à ce sujet. Il était en contact avec l'Organe de défense et de sécurité politique de la Communauté de développement de l'Afrique australe (Southern African Development Community, SADC), au sujet de la crise politique en Eswatini qui a débuté lors de manifestations en 2021 ; il a joué un rôle clé dans les discussions sur le processus de transition politique en Eswatini.

En 2018, Maseko avait engagé des poursuites judiciaires contre le gouvernement, pour ne pas avoir consulté le public ou collaboré avec le Parlement lorsque le roi Mswati III a unilatéralement changé le nom du pays de Swaziland à Eswatini.

Le meurtre de Maseko a accru le sentiment de peur parmi les défenseurs des droits humains dans le pays. Sibusiso Nhlabatsi, avocat spécialisé dans les droits humains et collègue de Maseko, a déclaré à Human Rights Watch : « Pour être franc, je ne me sens pas en sécurité, et personne ne se sent en sécurité. Mon impression après avoir parlé à plusieurs avocats, en particulier ceux qui travaillent dans le domaine des droits humains, c’est que les gens envisagent de fuir le pays. »

Assez récemment, le 7 décembre 2022, il y a eu une tentative d'assassinat visant Maxwell Nkambule, un avocat représentant des manifestants pro-démocratie swazis qui sont accusés d'incendies criminels et de meurtres de policiers.

Le gouvernement a exprimé ses condoléances pour la mort de Maseko, affirmant que « le décès de Maseko est une perte pour la nation » et que « son travail en tant qu'avocat des droits humains est une preuve de sa contribution au pays ». Le gouvernement a assuré au public que les forces de sécurité du pays avaient déjà commencé à enquêter sur les circonstances du décès, et que ses assassins seraient traduits en justice.

En 2021, Eswatini a été secoué par des vagues de manifestations dans un contexte de détérioration drastique de la situation des droits humains et d'absence de réformes politiques. Les autorités ont réagi en interdisant les manifestations et en déployant des policiers et des soldats, qui ont tiré sur les manifestants sans discernement avec des balles réelles.

Human Rights Watch a constaté qu'en octobre 2021, la police d'Eswatini avait tiré à balles réelles et tiré des gaz lacrymogènes dans un bus rempli de personnes se rendant dans la capitale, Mbabane, pour protester contre l'emprisonnement de deux députés pro-démocratie. Des témoins ont déclaré que certains passagers du bus ont été blessés et ont dû être hospitalisés, les autres ont été repoussés et empêchés d'entrer dans le centre-ville.

Les autorités d'Eswatini devraient ouvrir une enquête indépendante sur le meurtre de Maseko, ainsi que sur les attaques contre d'autres activistes pro-démocratie depuis 2021, a déclaré Human Rights Watch.

La SADC devrait intervenir pour arbitrer la crise politique en Eswatini et soutenir la mise en place du dialogue national attendu depuis longtemps, selon Human Rights Watch. Le gouvernement sud-africain devrait également ouvrir une enquête sur les allégations selon lesquelles des mercenaires sud-africains et des militaires privés opèrent à Eswatini à la demande du roi de ce pays, afin de comprendre s'ils ont des liens avec les meurtres d’activistes pro-démocratie, dont Thulani Maseko.

Communiqué complet en anglais : en ligne ici.

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