Une nouvelle loi électorale introduite par le président tunisien Kais Saied le 15 septembre a éliminé le principe de parité entre les sexes dans les assemblées élues en Tunisie et pourrait, par conséquence, aboutir à un parlement tunisien presque exclusivement dirigé par des hommes. Les prochaines élections législatives auront lieu le 17 décembre.
La nouvelle loi supprime les dispositions relatives à la parité hommes-femmes qui figuraient dans la précédente loi électorale, laquelle visait à garantir une représentation égale des hommes et des femmes dans les assemblées élues de Tunisie, alors même que la nouvelle constitution tunisienne défend expressément ce principe.
L’une des principales avancées pour les droits des femmes après la révolution de 2011 en Tunisie a été d’assurer la parité des sexes dans les assemblées élues. Le principe a d’abord été inscrit dans la Constitution de 2014, puis la loi électorale de 2014 a exigé que la composition des listes de candidats soit alternée entre hommes et femmes. Cela a conduit à l’élection de 68 femmes au Parlement en 2014, soit 31% de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). Cette année-là, la Tunisie disposait de la plus forte représentation féminine au parlement par rapport aux autres pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord.
En 2017, un amendement à la loi électorale a en outre exigé des partis politiques et des coalitions qu’ils veillent à ce que la moitié de leurs listes candidates soient dirigées par des femmes lors des élections locales. Cela a permis aux conseils municipaux d’être composés de 47% de femmes après les élections de 2018. La nouvelle loi électorale remplace toutefois l’ancien système de représentation proportionnelle par un scrutin uninominal, sans prévoir de dispositions visant à garantir l’égalité de représentation des sexes.
En vertu de la nouvelle loi électorale, les éventuels candidats doivent présenter 400 signatures d’électeurs inscrits dans leur circonscription pour pouvoir se présenter. Les candidats ne peuvent pas non plus financer leur campagne par des fonds publics et doivent donc compter sur leurs propres moyens, ou sur des fonds privés.
Ces conditions sont particulièrement préjudiciables aux femmes, qui sont moins susceptibles de bénéficier des réseaux locaux influents dont pourraient disposer les hommes pour parrainer leurs candidatures, ou disposer des mêmes moyens financiers que leurs homologues masculins. L’ensemble de ces facteurs risque de contribuer à leur exclusion politique. À l’approche des élections de décembre, la commission électorale tunisienne a reçu 1 427 dossiers de personnes souhaitant briguer un siège au Parlement, dont seulement 214 de femmes.
Le parlement tunisien a longtemps été un modèle en matière d’équité des sexes dans la région. Tout cela pourrait bientôt être de l’histoire ancienne.
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