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Lettre conjointe de la société civile aux membres du CDH sur la situation en Russie

Le Conseil des droits de l'homme doit prendre des mesures urgentes pour remédier à la situation désastreuse des droits humains en Russie.

21 septembre 2022

Aux représentants permanents des États membres et observateurs du Conseil des droits de l'homme de l'ONU

Objet: Fédération de Russie : Le Conseil des droits de l'homme doit prendre des mesures urgentes pour remédier à la situation désastreuse des droits humains en Russie.

Monsieur l’Ambassadeur/Madame l’Ambassadrice,

Nous vous écrivons pour appeler votre délégation à se tenir aux côtés des défenseurs des droits humains, des militants et des organisations de la société civile russes en soutenant la résolution portant sur la création d'un rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Russie lors de la 51e session du Conseil des droits de l'homme des Nations unies (HRC51).

Ces dernières années, les autorités russes ont mené une campagne systématique de répression des droits humains et de restriction de l'espace civique, notamment en fermant les médias indépendants, en intimidant et en harcelant les défenseurs et les militants des droits humains, en interdisant les manifestations pacifiques et en imposant des restrictions abusives aux activités des organisations indépendantes de la société civile dans le pays, y compris celles qui cherchent à obtenir justice et à trouver des recours effectifs en cas de violations des droits humains.

Les défenseurs des droits humains, les militants et les organisations de la société civile pris pour cible par les autorités russes incluent ceux qui font campagne en faveur d'élections libres et équitables, qui défendent les droits fondamentaux des femmes et des minorités religieuses, ethniques, sexuelles et de genre, ainsi que ceux qui luttent contre les persécutions à caractère politique, la corruption et la dégradation de l'environnement. Ces derniers mois, les intimidations, le harcèlement et les attaques ont atteint un niveau record. En effet, il n'a jamais été aussi difficile ou dangereux pour les défenseurs des droits humains, les militants et les organisations de la société civile d’exercer leurs activités dans la Fédération de Russie post-soviétique. Aujourd'hui, nous sommes solidaires d’un nombre croissant d’entre eux qui demandent la création d'un rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Russie.

Depuis l'adoption, en mars 2022, de la loi de censure qui criminalise la diffusion de prétendues "fake news" et les informations fournies par des médias indépendants sur le conflit armé entre la Russie et l'Ukraine, les autorités ont bloqué l'accès à des dizaines de médias indépendants et engagé des procédures pénales à l’encontre de nombreux défenseurs des droits humains, militants sur le terrain, blogueurs indépendants célèbres, journalistes et personnalités politiques de l’opposition, dont Vladimir Kara-Murza. Plus de 1 250 procédures administratives ont été ouvertes dans toute la Russie. Des poursuites pénales fallacieuses sont également engagées contre des manifestants anti-guerres pour divers autres chefs d'accusation, dont ceux de hooliganisme. Plus de 15 000 manifestants anti-guerres ont été placés en détention. Les autorités ont utilisé la législation relative à la lutte contre l'extrémisme et le terrorisme pour monter de toutes pièces des affaires pénales contre les dissidents. Des dizaines de personnes, dont Alexei Navalny, figure de l'opposition politique, restent emprisonnées pour des motifs politiques.

Les politiques de plus en plus répressives de la Fédération de Russie, auxquelles s’ajoutent l'exclusion du pays du Conseil de l'Europe (les victimes de nouvelles violations des droits humains commises en Fédération de Russie depuis le 17 septembre ayant ainsi perdu la protection de la Convention européenne des droits de l'homme) et son isolement diplomatique vis-à-vis des États qui ont soutenu les droits humains et la société civile russe, rendent de plus en plus difficile les interactions entre les défenseurs des droits humains, les militants et les organisations de la société civile russes et la communauté internationale. Et cela ne semble pas prêt de s’arrêter. En l'absence d'un soutien international réel et d'un mécanisme de contrôle robuste, les organisations indépendantes de la société civile russe continueront d'être isolées et dangereusement menacées.

Compte tenu de l'escalade de la répression, des restrictions imposées aux activités des organisations indépendantes de la société civile et de la suppression de l'espace civique, un suivi rigoureux de la situation des droits humains en Russie est impératif. Un mandat de rapporteur spécial dédié permettrait de collecter les informations de manière indépendante et d'analyser la situation des droits humains en Russie. Il permettrait aux membres du Conseil des droits de l'homme d’avoir accès à des rapports officiels et approfondis et de formuler des recommandations sur la manière d'améliorer la situation des droits humains qui se détériore rapidement dans le pays. Un rapporteur spécial pourrait également endosser le rôle, crucial en cette période, de point de contact au sein de l’infrastructure onusienne des droits humains pour les défenseurs des droits humains, les militants et les organisations de la société civile russes. Un rapporteur spécial serait une voix indépendante importante pour s'élever contre les restrictions croissantes des droits humains en Russie et pour défendre les personnes victimes d'intimidation, de harcèlement et de représailles pour leur activisme ou leur travail en faveur des droits humains.

S'il est important que les procédures spéciales thématiques existantes continuent à se pencher sur la situation en Fédération de Russie dans le cadre de leurs mandats respectifs, il est essentiel qu’un expert unique soit en mesure de faire le lien entre les différents aspects et d’aborder la situation de manière globale, et qu’il puisse dialoguer plus étroitement avec les autorités russes, les défenseurs des droits humains, les militants et les organisations de la société civile.

Nous comptons sur votre délégation pour faire preuve de solidarité avec les défenseurs des droits humains, les militants et les organisations indépendantes de la société civile russes en soutenant une résolution établissant un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits humains en Russie.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur l’Ambassadeur/Madame l’Ambassadrice, l'expression de nos sentiments distingués.

  • Amnesty International
  • Board of the EU-Russia Civil Society Forum
  • Freedom House
  • Human Rights House Foundation
  • Human Rights Watch
  • Commission Internationale des Juristes
  • Service International pour les Droits Humains (ISHR)
  • Netherlands Helsinki Committee
  • Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)

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