Cela fait plusieurs années que je connais le journaliste Dom Phillips. Je me souviens d’un dîner quand il m'a raconté qu’au Royaume-Uni, où il est né, il écrivait des articles au sujet de la musique ; puis il s’est installé au Brésil, après être tombé amoureux de ce pays lors d'une visite en 2007.
Dom Phillips et Bruno Pereira, un expert en affaires autochtones, ont disparu le 5 juin lors d'un déplacement en Amazonie, effectué pour un reportage.
En 2016, Dom a écrit un article remarquable pour le Washington Post, au sujet d'un rapport sur les violences policières que j'avais rédigé pour Human Rights Watch. Ce rapport était basé principalement sur des entretiens avec des policiers. Dans son article, Dom a évoqué « les tentations, les pressions et les défaillances organisationnelles qui sous-tendent la culture de la violence et de la peur au sein du département de police de Rio ». J'ai été touché par l’approche nuancée de son article, qui reflétait mes propres efforts lors de mes recherches.
Ce genre d'empathie imprègne aussi les nombreux reportages de Dom sur les peuples autochtones et la destruction de l'environnement en Amazonie, un sujet sur lequel il se concentrait de plus en plus.
Quant à Bruno Pereira, il était auparavant un haut fonctionnaire de la FUNAI (Fundação Nacional do Índio, l’agence gouvernementale chargée de protéger les peuples autochtones qui vivent dans une forme d’isolement volontaire dans la forêt tropicale du Brésil. Comme d'autres fonctionnaires engagés dans la défense de l'Amazonie et de ses habitants, il a été démis de ses fonctions par l’administration Bolsonaro.
Bruno a ensuite travaillé avec une organisation autochtone dans la vallée de Javari, une zone dangereuse où des groupes criminels impliqués dans l'exploitation forestière illégale, l'exploitation minière et le trafic de drogue attaquent quiconque se dresse sur leur chemin. La situation s'est aggravée sous le président Jair Bolsonaro, qui a sapé l'application des lois environnementales et la protection des territoires autochtones.
Bruno avait reçu des menaces liées à son travail depuis plusieurs années.
Les autorités ont perdu un temps précieux après que Bruno et Dom aient disparu. Plus de 30 heures plus tard, le commandement de l'armée pour la région amazonienne - qui dispose d'importantes ressources dans la région - a déclaré qu'il attendait toujours l'ordre de se joindre aux recherches. Il a fallu plus de 48 heures au gouvernement pour autoriser des recherches par voie aérienne.
Ces recherches n’ont toujours pas permis de retrouver Dom et Bruno, et doivent être intensifiées.
Le président Bolsonaro, qui dénigre régulièrement les médias et les droits des autochtones, a déclaré le 7 juin que les deux hommes s’étaient lancés dans « une aventure qui n'est pas recommandée ».
Leur aventure consistait à se soucier des peuples autochtones et de l'Amazonie, sous une administration qui ne semble se soucier ni de ces personnes, ni de cette région.
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