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L'iroko est un grand arbre mentionné dans d’anciens proverbes africains, et que l’on trouve sur la côte ouest du continent, dans des pays comme le Ghana, la Guinée et le Nigeria. L’iroko est durable, solide et peu enclin à la putréfaction ; son bois est utilisé dans divers domaines, dont la construction de maisons et la fabrication de meubles. Les oiseaux façonnent des nids pour leurs nouveau-nés sur ses larges branches accueillantes. Les animaux se nourrissent de ses feuilles. Les êtres humains se reposent sous son ombre.

Dewa Mavhinga © 2021 Human Rights Watch

Il est rare qu’un arbre iroko s’effondre. Mais quand cela arrive, l'impact est énorme. Les nids d'oiseaux s’éparpillent par terre, de nombreux oisillons meurent ou se retrouvent à la merci de renards et d’autres animaux sauvages. La chute de l’iroko ébranle les fondations des maisons voisines. L'amplitude des ondes sismiques provoquées pourrait faire trembler l’aiguille d’un appareil mesurant l’impact selon l'échelle de Richter. La chute d’un arbre iroko est un événement majeur et douloureux.

Le décès de Dewa, le 4 décembre 2021, a été douloureux pour d’innombrables personnes. Il a vécu sa vie comme s'il savait qu'il avait un temps limité pour laisser son empreinte. Il semblait pressé d'accomplir autant de tâches que possible durant le temps dont il disposait. Il était extrêmement généreux, permettant à d’autres de profiter de son temps, de ses talents et de ses ressources. Il était humble, évitant l’autopromotion et toujours soucieux du bien-être d’autres personnes.

Ainsi, peu de temps avant sa mort, il cherchait à obtenir un soutien d'urgence pour trois activistes au Zimbabwe. « Je suis actuellement au Zimbabwe, où je me suis entretenu avec les trois activistes sur leur situation sécuritaire et les récentes menaces auxquelles ils sont confrontés », écrivait-il dans un email en novembre 2021, me mettant en copie. Évoquant une mission de recherche que j’avais menée avec lui dans ce pays en octobre 2019, Dewa ajoutait dans son email : « Tunde a rencontré et interviewé l'un d'entre eux, suite à son enlèvement et aux tortures qu’il a subies. »

Vingt jours plus tard, Dewa nous a quittés. Cet email était le dernier message reçu de mon ami, qui m'appelait « Chief » (« chef »).

L'un des trois activistes était un étudiant qui avait été pris pour cible et menacé par des agents de l'État. Dewa, en tant qu'ancien dirigeant d'une association étudiante à l'Université du Zimbabwe, avait une expérience directe de la défense des droits des étudiants dans un environnement intolérant a l’égard de toute forme de dissidence.

En octobre 2021, nous avons roulé en voiture dans le quartier de cette université. Pendant plusieurs minutes, Dewa pointait du doigt avec enthousiasme divers lieux emblématiques du campus, tout en me racontant comment les étudiants cherchaient à déjouer les agissements des agents des services secrets lors de l’époque de ses propres études.

Dewa avait de nombreux projets. Il voulait écrire un livre dans sa langue natale, le Shona. Il comptait poursuivre ses études, afin d’obtenir un doctorat. Il souhaiter collecter des fonds pour diverses causes importantes au Zimbabwe, ce pays qu'il aimait passionnément. Il voulait continuer à dorloter ses chiens.

Dewa, ton décès a été comme un coucher de soleil survenu trop tôt. Ou comme un nuage passant devant la lune et l’obscurcissant. Ou comme un arbre Iroko qui s’effondre.

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Le 18 février 2022, Human Rights Watch a organisé un événement commémoratif en hommage à Dewa Mavhinga, qui était le directeur pour l'Afrique australe de l’organisation, afin d’exprimer notre tristesse mais aussi pour célébrer sa vie.  Dewa Mavhinga, un collègue bien-aimé qui était aussi apprécié par de nombreux militants du mouvement mondial des droits humains, est décédé le 4 décembre 2021.

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