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Un ancien rebelle nommé à un poste clé en RD Congo

La nomination de Tommy Tambwe risque de compromettre les efforts de désarmement et de stabilisation

Des combattants du groupe armé URDPC/CODECO dans le village de Wadda en province de l’Ituri, dans le nord-est de la République démocratique du Congo, le 19 septembre 2020. © 2020 ALEXIS HUGUET/AFP via Getty Images

Le président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, a récemment annoncé le lancement d'un programme tant attendu de Désarmement, Démobilisation, Relèvement Communautaire et Stabilisation, destiné à encourager les milliers de combattants de plus de 100 groupes armés à déposer les armes. Cela fait des décennies que le pays a besoin d'un cadre de démobilisation efficace : retirer les armes des combattants, poursuivre les responsables de crimes graves et réintégrer le reste d’entre eux dans les communautés est essentiel pour mettre fin aux cycles de violence dans l'est du Congo. Mais la nomination par Tshisekedi de l'ancien chef rebelle Tommy Tambwe pour coordonner ce nouveau programme soulève de sérieuses inquiétudes.

Tambwe a été l’un des chefs de file des principaux groupes rebelles soutenus par le Rwanda, responsables d'innombrables violations des droits humains dans l'est du Congo au cours des 25 dernières années. En 2002, lorsqu’il était vice-gouverneur du Sud Kivu administré par la rébellion du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), Amnesty International et Reporters Sans Frontières avaient relevé qu'il avait ordonné l'arrestation de journalistes qu'il jugeait critiques à l'égard de son mouvement.

En 2012, des enquêteurs des Nations Unies ont rapporté que Tambwe dirigeait l'Alliance de Libération de l'Est du Congo (ALEC) tout en ayant « trouvé protection au Rwanda ». Le groupe était allié à la rébellion du M23, responsable de crimes de guerre généralisés, notamment des exécutions sommaires, des viols et des recrutements forcés.

Sans surprise, bon nombre de Congolais ont rapidement fait part de leurs inquiétudes après la nomination de Tambwe. Le lauréat du prix Nobel de la paix, le Dr Denis Mukwege, a exprimé sa « circonspection » et a réitéré l'appel conjoint, auquel s’était rallié Human Rights Watch, en faveur d'un mécanisme d’assainissement visant « la mise à l’écart des institutions publiques des personnes responsables de violations des droits humains ». Des dizaines de groupes de la société civile et mouvements citoyens des provinces du Nord et Sud Kivu ont averti que la nomination de Tambwe « porte en elle déjà les germes de l'échec de ce processus ». Une coalition de milices Mai-Mai l'a décrit comme une « tactique déguisée de déstabilisation ». Certains parlementaires ont également appelé Tshisekedi à faire machine arrière.

Les tentatives successives de désarmement, démobilisation et réintégration des combattants dans la société congolaise ont échoué au cours des deux dernières décennies, malgré les millions de dollars injectés par les bailleurs internationaux. Des milliers de combattants qui s’étaient rendus ont finalement regagné la brousse tandis que des auteurs d’abus ont été récompensés par des promotions au lieu d’être tenus pour responsables.

Pour réussir, ce nouveau programme a besoin de la confiance des communautés de l'est du Congo. Un mauvais départ risque d'en faire une nouvelle occasion manquée d'assurer la sécurité de la population de la région.

 

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