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Plus de 750 ONG soulignent le rôle essentiel du HCDH face aux violations des droits humains

Lettre conjointe adressée à Michelle Bachelet, nommée Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme - 5 septembre 2018

Vue du Conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève, en Suisse, le 6 juin 2017. © 2017 Reuters

le 5 septembre 2018

Madame la Haut-Commissaire,

En tant qu’organisations de la société civile du monde entier, que ce soit aux niveaux local, national, régional et international, nous vous félicitons chaleureusement de votre nomination au poste de Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

Nous sommes mobilisés en faveur d’un monde respectueux des droits et de la dignité humains et de communautés équitables, justes et durables. Nous considérons qu’un(e) Haut-Commissaire avec une forte présence, engagé(e) dans un partenariat stratégique avec une société civile indépendante, peut contribuer de manière significative à l’avènement de cette vision.

Vous prenez vos fonctions à un moment où les droits humains sont pris pour cible et où nombre des réalisations modernes dans ce domaine sont en danger. En ces temps difficiles, nous comptons sur vous pour être une porte-parole indéfectible de la défense des droits individuels, des victimes, des garants et des défenseurs des droits de la personne dans le monde entier.

Sur tous les continents, gouvernements et acteurs non étatiques violent les droits des individus, des communautés et des peuples, souvent en toute impunité. La société civile, les dissidents pacifiques et les médias sont régulièrement réduits au silence dans la brutalité. Le rôle de votre Bureau dans le suivi et l’établissement de rapports sur de telles situations est essentiel pour lutter contre les violations et décourager les abus futurs, ainsi que pour garantir justice et responsabilité. L’assistance technique et le renforcement des capacités du HCDH sont également déterminants et, pour être efficaces, doivent être abordés de manière holistique, parallèlement à une évaluation rigoureuse des défis qui se posent à l’exercice des droits dans le pays concerné, notamment grâce à des indicateurs clés permettant de mesurer les progrès et la coopération de son gouvernement.

En tant que Haut-Commissaire, vous avez un rôle unique à jouer pour attirer l’attention du Conseil des droits de l’homme (CDH) de l’ONU et des autres organismes onusiens pertinents sur les situations nationales préoccupantes, notamment celles qui ne figurent pas à son ordre du jour ou qui reçoivent une attention insuffisante, le plus souvent en raison de pressions politiques. Ce rôle devrait s’étendre à des interventions devant le Conseil de sécurité, soit sur des situations déjà inscrites à son ordre du jour, soit sur celles qui, en l’absence de surveillance adéquate, pourraient constituer une menace à la paix et à la sécurité internationales. Des missions de suivi et des réunions intersessions au CDH peuvent être initiées par le Haut-Commissaire sur la base du mandat universel de votre bureau, en attirant l’attention sur les crises nationales négligées et en contribuant à la réalisation du mandat du Conseil, qui est de prévenir les violations des droits humains.

Nous sommes conscients que le poste de Haut-Commissaire comporte ses propres défis. De nombreux États insisteront pour que vous évitiez la stratégie surnommée « naming and shaming » (« nommer et couvrir de honte ») et vous inciteront à privilégier une « diplomatie discrète », dans le respect de la souveraineté nationale. Souvent, les voix les plus intolérantes à la critique et les plus fermes dans la répression de la dissidence tenteront de se faire entendre haut et fort, au détriment de la vôtre. Les survivants, les victimes et les activistes qui se trouvent en première ligne dans des pays où leurs droits sont bafoués compteront sur vous en tant que garante des droits humains, pour avoir le courage et la conviction de dénoncer ouvertement et publiquement les auteurs de tels actes, même lorsque cela est délicat ou impopulaire auprès des gouvernements.

Partout dans le monde, les droits qui constituent des éléments essentiels de l’espace civique sont systématiquement bafoués. La société civile et les défenseurs des droits humains sont exposés chaque jour à de graves risques dans leur lutte sur le terrain, parmi lesquels l’emprisonnement, le gel de leurs avoirs, les campagnes de diffamation, les actes de torture, les disparitions forcées et même les assassinats. De tels risques se posent également pour les individus qui coopèrent avec l’ONU, fréquemment victimes d’intimidation, de harcèlement ou de représailles. Nous vous exhortons à être une ardente défenseuse des droits des activistes sur le terrain et au sein de l’Organisation, à dénoncer publiquement les auteurs de violations et à ouvrir des enquêtes – ou à faire pression pour que des enquêtes soient ouvertes – dans les cas d’attaques et de représailles. Nous vous encourageons également à tirer pleinement parti du rôle complémentaire distinct et souvent novateur de la société civile dans les activités du HCDH, et à veiller à ce que le Bureau collabore étroitement avec la société civile en tant que partenaire stratégique aux niveaux national, régional et international.

Actuellement, le système qui encadre les droits humains est visé par des attaques sans précédent. Les autocrates populistes s’en prennent à l’universalité des droits humains, limitant de manière disproportionnée et illégale les droits dans le prétendu intérêt de la « sécurité nationale ». Implicitement, ils encouragent souvent leurs partisans ou des milices à mener des attaques contre les activistes, ainsi que contre les pauvres et les populations vulnérables, tout en procédant à une interprétation sélective des droits humains et en s’efforçant de dévoyer les mécanismes des droits humains en fonction de leurs desseins politiques. La sauvegarde et le renforcement des normes et des mécanismes universels relatifs aux droits humains doit être une responsabilité fondamentale du Haut-Commissaire.

Le climat actuel met en évidence la nécessité, pour votre mandat, d’assumer un rôle de plaidoyer vigoureux au service de la défense du droit international des droits humains et du système international des droits humains, ainsi que d’entreprendre une action robuste à l’ONU, pour faire respecter les droits humains à l’échelle des agences et des organismes et dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Encore une fois, nous vous félicitons de votre nomination et sommes prêts à vous aider, vous et votre bureau, dans l’accomplissement de votre mandat vital.

Veuillez agréer, Madame la Haut-Commissaire, l’expression de nos sentiments distingués. 

Organisations signataires

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