(New York, le 13 avril 2018) - Le Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres devrait nommer d'urgence une équipe d'enquêteurs chargée d’identifier les responsables de l'utilisation d’armes chimiques en Syrie, ont plaidé conjointement Human Rights Watch et 46 autres organisations humanitaires et de défense des droits humains dans une déclaration publiée aujourd’hui. Une telle mesure aurait un effet dissuasif sur l'utilisation de ces armes interdites et constituerait un pas important vers la justice.
Le Conseil de sécurité n'a pas prolongé le mandat du Mécanisme d'enquête conjoint (Joint Investigative Mechanism, JIM) de l'ONU et de l'Organisation internationale pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), en raison des nombreux vétos opposés par la Russie. Il n’existe donc actuellement plus d'équipe de l'ONU jouissant de l'indépendance, de l'expertise technique et du mandat nécessaires pour identifier les responsables des attaques meurtrières à l'arme chimique en Syrie. La récente attaque chimique menée contre la ville de Douma, en périphérie de Damas, le 7 avril 2018, a fait des dizaines de morts.
« Le Secrétaire général Antonio Guterres devrait tenir compte de cet appel en faveur des civils syriens, dont les souffrances ont été prolongées par l’inaction du Conseil de sécurité, paralysé par des clivages et dysfonctionnements », a déclaré Louis Charbonneau, directeur de plaidoyer auprès de l’ONU à Human Rights Watch. « Le Secrétaire général devrait utiliser les moyens à sa disposition et son autorité comme l’ont fait ses prédécesseurs, afin de mieux contrôler la situation, en mettant sur pied une unité d'enquête qui permettrait de démasquer ceux qui sont derrière les attaques chimiques en Syrie. Nous n'avons pas besoin d'un nouveau veto, nous avons besoin de leadership. »
Le 7 avril, le monde a reçu un nouveau choc en découvrant les images bouleversantes d'hommes, de femmes et d'enfants syriens asphyxiés chez eux à Douma. Cette banlieue de Damas est depuis des semaines la cible d'attaques violentes menées par l'alliance militaire entre les forces syriennes et russes.
Si les investigations sont encore en cours, des déclarations ont pointé du doigt le fait que le gouvernement syrien a une nouvelle fois utilisé des armes chimiques contre son peuple. Les gouvernements syrien et russe démentent catégoriquement l'existence d'une attaque chimique.
L'utilisation d'armes chimiques constitue un crime de guerre. L'interdiction par le droit international de l'utilisation, du développement, de la fabrication, du stockage et du transfert d’armes chimiques est absolue et ne peut être assujettie à des querelles politiques.
Depuis 2013, la Commission d'enquête des Nations Unies a recensé plus de 35 attaques à l’arme chimique en Syrie. Après avoir rejeté les conclusions sur la responsabilité du régime syrien dans l'attaque de l'an dernier contre des civils à Khan Cheikhoun, la Russie a opposé son veto au Conseil de sécurité pour empêcher le maintien du Mécanisme d’enquête conjoint de l’ONU et de l’OIAC, chargé de travailler de manière indépendante et impartiale pour identifier les auteurs de ces attaques. Le 10 avril, la Russie a une nouvelle fois opposé son veto à une résolution qui prévoyait de créer un mécanisme de l'ONU pareillement chargé d’établir les responsabilités pour les attaques à l’arme chimique en Syrie.
En conséquence, l'ONU ne dispose plus de mécanisme doté de l'indépendance, de l'expertise technique et du mandat requis pour identifier rapidement les responsables de ces attaques chimiques.
Les organisations signataires demandent au Secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres d'intervenir pour défendre les civils partout, en créant un mécanisme indépendant chargé d'établir les responsabilités dans les attaques chimiques en Syrie.
Les précédents Secrétaires généraux de l'ONU ont mis sur pied des organes similaires. Nous ne pouvons plus accepter les impasses, la paralysie et les vétos au Conseil de sécurité.
Prendre cette mesure entre tout à fait dans les prérogatives du secrétaire général et contribuerait à permettre d’identifier les auteurs de ces atrocités.
Il incombe au Conseil de sécurité de l'ONU d'amener les auteurs de ces crimes à rendre des comptes et de faire clairement savoir au monde que l'usage d'armes chimiques ne sera pas toléré.
Déclaration en anglais (PDF)
Organisations signataires :
1. Adopt a Revolution
2. American Relief Coalition for Syria (ARCS)
3. Amnesty International (communiqué)
4. Arms Control Association
5. ASML/Syria
6. Basmet Amal
7. Baytna Syria
8. Bridge of Peace Syria
9. CCFD-Terre Solidaire
10. Catholic Agency For Overseas Development (CAFOD)
11. CARE International
12. Christian Aid
13. Cairo Institute for Human Rights Studies (CIHRS)
14. Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH)
15. Ghiras Alnahda
16. Global Centre for the Responsibility to Protect
17. GOAL
18. Hand in Hand for Syria
19. HelpAge International
20. Human Appeal
21. Human Rights Watch
22. Humans of Syria
23. IDA
24. Islamic Relief UK
25. Just Foreign Policy
26. Karam Foundation
27. Montreal Institute for Genocide and Human Rights Studies (Concordia University)
28. Nonviolent Peaceforce
29. PAX for Peace
30. Physicians for Human Rights
31. Protection Approaches
32. Relief & Reconciliation International AISBL
33. Rethink Rebuild Society
34. SCM
35. Society for Threatened Peoples
36. Student-Led Movement to End Mass Atrocities (STAND)
37. Syria Charity
38. Syria Relief
39. Syrian American Medical Society (SAMS)
40. Syrian Forum USA
41. Syrian Network for Human Rights (SNHR)
42. Syrians for Truth and Justice (STJ)
43. Trocaire
44. Vision GRAM-International
45. War Child UK
46. World Federalist Movement-Institute for Global Policy (WFM-IGP)
47. 11.11.11
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— HRW en français (@hrw_fr) 14 avril 2018
#Syrie : les difficultés de l’Organisation pour l'interdiction des armes chimiques pour inspecter le site de #Douma
— HRW en français (@hrw_fr) 19 avril 2018
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