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Les législateurs français désavoués pour avoir tenté de criminaliser la consultation de certains sites internet

Le Conseil constitutionnel a considéré que cette disposition portait atteinte aux libertés

Une femme tient son smartphone montrant la page d'accueil de Google, dans cette image d'illustration prise le 24 février 2016. © 2016 Reuters
 

Le Conseil constitutionnel a rappelé une nouvelle fois aux parlementaires français que mettre en prison des individus pour avoir consulté des sites internet perçus comme provoquant à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de ces actes n’est pas acceptable dans une société démocratique, notamment parce que la France dispose déjà d’un arsenal juridique considérable pour poursuivre en justice les internautes appelant à la violence.

Pour la deuxième fois cette année, le Conseil constitutionnel français a censuré un récent amendement au code pénal et criminalisant « le fait de consulter habituellement » des sites internet considérés comme « soit provoquant à la commission d’actes de terrorisme, soit faisant l’apologie de ces actes ». Cette disposition, qui prévoyait une peine de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende, a été déclarée inconstitutionnelle en raison de son atteinte injustifiée à la liberté de communication.

Pour le Conseil constitutionnel, les autorités policières françaises disposent de pouvoirs suffisants pour lutter contre le terrorisme sans avoir besoin de cette disposition.

Cette décision du Conseil constitutionnel offre un répit bienvenu face à l’empressement de la France à adopter des mesures antiterroristes restrictives, au détriment des droits et libertés. La disposition en cause a été initialement introduite dans une loi de 2016 faisant de la consultation habituelle de sites aux contenus considérés comme faisant l’apologie ou incitant au terrorisme une infraction pénale, sauf si ces sites sont consultés de bonne foi, à des fins de recherche ou pour des raisons professionnelles dans le but d’informer le public. La définition vague de l’infraction, ainsi que l’absence de critères sur ce qui constitue des motifs de recherche légitimes, renforçaient l’éventualité d’un effet dissuasif sur les formes légitimes d’expression et de partage de l’information.

Ainsi, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a même demandé à ses chercheurs, dont le travail les a amenés à consulter les sites en question, de leur transmettre leurs noms et coordonnées afin de pouvoir prendre leur défense au cas où la police ouvrirait une enquête. Selon le directeur de l’Institut des sciences humaines et sociales du CNRS, la loi était « dangereuse pour les chercheurs ».

Après que le Conseil constitutionnel a, une première fois en février 2017, jugé la disposition anticonstitutionnelle, les parlementaires français, au lieu de tenir compte de cette décision, ont tenté de la contourner en ajoutant quelques mots à la disposition et en l’adoptant de nouveau. Des avocats et des associations françaises de défense des droits humains, notamment la Ligue des droits de l’Homme et la Quadrature du Net, ont contesté la constitutionnalité de cette disposition à peine modifiée, et remporté une nouvelle victoire aujourd’hui.

La Cour a souligné que le simple fait de consulter des sites internet ou de manifester une adhésion à une certaine idéologie haineuse ne justifie pas d’être privé de liberté. Il faut espérer que les parlementaires français prendront cette fois-ci le temps de comprendre le raisonnement de la Cour et de le respecter.

 

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