Human Rights Watch se félicite de la volonté du gouvernement du Mali de renouveler le mandat de l'Expert indépendant des Nations Unies. La mise en œuvre des recommandations de l'expert démontrerait l'engagement du gouvernement à améliorer la situation des droits humains dans le pays alors qu’il se remet d'un conflit armé brutal. Et en combattant la faiblesse de l’État de droit dans le pays, le gouvernement s'attaquerait également à un facteur clé qui a sous-tendu l'instabilité du pays.
Nous appuyons les conclusions de l'Expert indépendant sur l'importance du renforcement du système judiciaire malien, qui se caractérise par des lacunes dramatiques ; sur la nécessité de poursuivre les auteurs de crimes graves commis par toutes les parties au cours du récent conflit armé ; et sur les avantages d'une commission pour la justice et la vérité qui soit crédible et représentative.
Human Rights Watch se félicite de l’engagement que le gouvernement a pris de lutter contre l’impunité et est encouragé par les progrès démontrés dans les travaux menés de manière courageuse et indépendante par les autorités judiciaires nationales pour enquêter sur les disparitions forcées d'au moins 21 « Bérets rouges » et sur les actes de torture en 2012 à l’encontre de ces forces d’élite par des hommes fidèles à l’auteur du coup d’État, Amadou Sanogo. Nous sommes également encouragés par la poursuite de la coopération du gouvernement avec le procureur de la Cour pénale internationale.
Cependant, nous sommes préoccupés par l'absence de progrès dans les enquêtes sur les nombreuses autres victimes de violations commises par l’ensemble des factions belligérantes. Les progrès louables réalisés dans l’affaire des « Bérets rouges » devraient être la première de nombreuses affaires étudiées avec compétence et impartialité, et devraient marquer le début d’efforts plus larges dans la lutte contre l’impunité.
Human Rights Watch s’est entretenu avec un grand nombre de familles de victimes qui tentent d’obtenir justice pour les pertes de leurs proches ou les blessures infligées à ceux-ci. Àce jour, plus de 30 familles ont déposé des plaintes et des rapports de disparitions de personnes auprès de la police et de la gendarmerie, et ont écrit des lettres aux procureurs détaillant les crimes. Malheureusement, pratiquement aucune de ces affaires n’a fait l’objet d’une enquête et aucun des responsables présumés n’a été traduit en justice.
Nous exhortons le gouvernement à élaborer une stratégie pour s’assurer que soient menées des enquêtes et des poursuites envers toutes les parties au conflit portant la responsabilité de crimes graves ; à rectifier, avec l'aide de bailleurs de fonds internationaux, les lacunes de son système de justice pénale ; et à s'opposer à toute amnistie pour crimes graves dans tout futur règlement négocié entre les factions belligérantes.
Nous reconnaissons que l’absence jusqu'à très récemment d’autorités judiciaires dans le nord ainsi que l'insécurité persistante ont entravé les efforts pour enquêter. Cependant, la plupart des crimes en question ont été commis dans des zones que les autorités judiciaires n’ont jamais quittées.
La tenue d’enquêtes et de procès pour les crimes commis par toutes les parties, conformément aux normes internationales, est essentielle pour promouvoir le respect des droits humains, construire de solides institutions d’État de droit et établir une paix durable au Mali.