Au début de cette semaine, la Cour pénale internationale a rejeté la demande de sursis introduite par le gouvernement ivoirien pour le transfèrement à La Haye de Charles Blé Goudé, un proche allié de l’ex-Président Laurent Gbagbo et chef de longue date d’une violente milice pro-Gbagbo. Suite à la crise postélectorale dévastatrice de 2010-2011, le gouvernement du Président Alassane Ouattara avait rapidement remis Gbagbo à la CPI, où il est toujours en détention en attendant que les juges établissent s’il existe suffisamment d’éléments de preuve pour engager un procès. La coopération des autorités ivoiriennes semble toutefois moins manifeste maintenant que Gbagbo ne se trouve plus sur leur territoire.
Le gouvernement ivoirien n’a toujours pas réagi officiellement au mandat d’arrêt délivré par la CPI à l’encontre de Blé Goudé pour quatre chefs de crimes contre l’humanité, bien que ce dernier soit détenu par les autorités ivoiriennes depuis son extradition du Ghana en janvier 2013. Le rejet par la cour de la demande de sursis n’est pas surprenant. Le gouvernement s’est basé sur une interprétation plutôt large du Statut de Rome, le traité instituant la CPI, en cherchant à obtenir une suspension temporaire du mandat d’arrêt de la CPI pour déterminer s’il entend poursuivre Blé Goudé en Côte d’Ivoire.
Maintenant que la suspension du mandat d’arrêt n’est plus à l’ordre du jour dans les circonstances actuelles, la balle est clairement dans le camp du gouvernement ivoirien. Deux choix s’offrent à lui : soit remettre Blé Goudé à la CPI, soit contester la recevabilité de l’affaire Blé Goudé devant la CPI aux motifs qu’il est jugé en Côte d’Ivoire essentiellement pour les mêmes crimes. Nul doute que le gouvernement connaît bien cette dernière approche — il a fini par contester la recevabilité de l’affaire ouverte par la CPI contre l’ex-Première Dame Simone Gbagbo, également recherchée pour crimes contre l’humanité, presque vingt mois après la délivrance du mandat d’arrêt de la CPI à son encontre.
Bien que la CPI n’agisse qu’en dernier ressort, elle fonctionne selon des règles qu’Abidjan est légalement tenu de suivre. La remise de Blé Goudé à la cour s’inscrit en droite ligne dans ces règles. Depuis l’arrivée au pouvoir de Ouattara, la Côte d’Ivoire a maintes fois accepté d’assumer ses responsabilités par rapport à la CPI, tout récemment encore l’année dernière lorsqu’elle a officiellement ratifié le Statut de Rome.
Dans la foulée des années Gbagbo, le gouvernement Ouattara s’efforce de se forger une réputation de pays qui renoue le contact avec la communauté internationale et met l’accent sur les droits humains. Honorer les obligations légales qui lui incombent aux termes du Statut de Rome dans l’affaire Blé Goudé constituerait un pas important dans cette direction.
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LInfodrome.com 27.03.14